• Aucun résultat trouvé

Propositions de solutions de réhabilitation de l’adoption simple

Paragraphe 2. Le renouveau souhaitable de la forme simple de l’adoption

B. La réhabilitation de la forme d'adoption simple sénégalaise

2. Propositions de solutions de réhabilitation de l’adoption simple

122 - Le bien-fondé. L’adoption simple est souvent perçue, à tort, comme « l’exception d’un

univers dont l’adoption plénière serait la règle »194. Cette perception occidentale de l’institution fait de la forme plénière de l’adoption le modèle idéal. Pourtant, l’adoption simple présente des caractéristiques propres, susceptibles de séduire les adoptants potentiels. En effet, elle permet d’apporter une solution satisfaisante à certaines situations et notamment à l’adoption de l’enfant du conjoint. Elle est en outre « réellement originale et plus

respectueuse de la réalité vécue par l’adopté »195. Après avoir illustré les raisons qui plaident en faveur d’une réhabilitation de l’adoption limitée, il faudra se pencher sur les moyens souhaitables à mettre en œuvre pour y parvenir.

192 LAVALLEE (C.), Le rôle de la volonté en matière d’adoption en droit français et en droit québécois, thèse, Lyon, 2002, p. 230, n° 308.

193 GALLIARD (C.), op.cit. p. 305, n° 433.

194 MONREDON (E.), « L’adoption aujourd’hui », J.C.P. 1992, I., 3607., n°44.

123 - Les moyens d’une réhabilitation de la forme simple de l’adoption. La remise à

l’honneur de l’adoption avec maintien du lien de filiation d’origine peut se réaliser à travers deux réformes qui sont liées. La première consiste à faire de l’adoption avec maintien du lien de filiation d’origine, une adoption de droit commun ou de principe et la seconde consistera à faire de la forme plénière de l'adoption, une adoption d’exception. Du coup, le prononcé de la forme "modeste" de l’adoption devenu le principe de droit commun (a), la forme radicale de l’adoption ou l’adoption substitution ne restera possible que dans de rares hypothèses lorsque l’intérêt de l’enfant l’exige (b).

a. Une adoption simple de droit commun

124 - Résurgence d'une doctrine. Faire de l'adoption simple, l'adoption de droit commun,

conduira à ressusciter les idées du Professeur RUBELLIN-DEVICHI196. Ces idées n’ont pas séduit en France mais sont adaptées aux contextes malien et sénégalais, favorables au principe du prononcé systématique d’une adoption simple.

125 – Etat des différentes réformes en France. Depuis quelques années, une partie de la

doctrine française197, plaidant une revalorisation de l’adoption simple, a proposé une modification substantielle du droit français de l’adoption, laquelle modification aurait pour vocation de rendre systématique le prononcé d’une adoption simple. Cette dernière étant susceptible de conversion de plein droit en adoption plénière au bout d’un certain temps.

126 - Les raisons d'une réforme. Cette proposition, qui est l’œuvre du Professeur RUBELLIN- DEVICHI reposait sur deux raisons essentielles. La première a trait aux conséquences néfastes qui pourraient résulter du prononcé d’une adoption plénière. La

196 Cet auteur propose , en France, depuis quelques années une modification d'importance du droit positif de l'adoption, qui rendrait systématique le prononcé d'une adoption simple, celle-ci pouvant être convertie de plein droit en adoption plénière après l'écoulement d'un certain délai. Mais sans notre proposition n'est pas de faire de l'adoption simple, un préalable indispensable, mais plutôt une adoption de droit commun. (Cf. RUBELLIN – DEVICHI (J.), « Droits de visite », RTD. Civ. 1988. 326 ; RTD. Civ. 1990. 263 ; Réflexions pour d’indispensables réformes en matière d’adoption, D. 1991, chr., p. 209.

197 Voir notamment RUBELLIN –DEVICHI (J.), « Droits de visite »,préc. p. 209; BOULANGER (F.), Enjeux et défis de l’adoption – Etude comparative et internationale, Economica, 2001, p. 146, n° 107 ; HAUSER (J.) et HUET – WEILLER (D.), La famille – Fondation et vie de famille, L.G.D.J., 2ème éd., 1993, p. 665, n° 918 ; MAZEAU (H.), (L.) et (J.), et CHABAS (F.), Leçons de droit civil -, La famille, t. I, vol. 3, 8ème éd. Par LEVENEUR (L.), Montchretien, 1995, n° 1059, p. 482. ; 197 GALLIARD (C.), Adoption simple, adoption plénière : essai sur la dualité de l’institution, op. cit. , p.312. n° 445 et s. Plus récemment en 2014, Le rapport d'Irène THERY propose de rénover la dualité des formes de l’adoption héritée de la loi de 1966 en France en revalorisant l’adoption simple, et modernisant l’adoption plénière. (Cf. "Le droit face aux nouvelles valeurs de responsabilité générationnelle" Rapport du groupe de travail Filiation, origines, parentalité, 2014, p.107).

seconde est relative à la possibilité pour l’enfant de participer activement à son propre adoption plénière.

S'agissant de la première raison évoquée, l’auteur note que « la fiction créée brutalement par

l’adoption plénière se trouve d’autant plus difficile à admettre sur un plan général, que la filiation biologique est connue, ou peut l’être avec la plus grande certitude »198. Elle fustige cette mesure en affirmant que « l’assimilation totale immédiate qui entraine l’éviction également totale immédiate de la famille d’origine conduit à des conséquences absurdes »199.

127 - Position de la jurisprudence française. La jurisprudence française semble aller dans

ce sens. Ainsi, l’analyse de deux arrêts attestent de cette réalité.

Le premier est ancien. Il a permis de rejeter la fiction qui entoure l’adoption plénière. Dans son arrêt du 21 juillet 1987, la Cour de cassation a reconnu droit de visite aux grands-parents devenus étrangers vis-à-vis de leur petit fils, au motif que « l’existence d’une parenté réelle, même si elle n’est plus reconnue juridiquement entre les grands-parents par le sang et le

petit-fils adopté en la forme plénière, est constitutive d’une situation exceptionnelle au sens de l’article 371-4 »200. Cette interprétation avait permis d'accorder aux grands-parents un droit de visite, qui devait s'entendre non seulement du droit d'aller voir l'enfant mais aussi du droit de l'héberger, de le recevoir à son domicile201. Il faut rappeler que cette jurisprudence est intervenue sous l'empire de la loi du 4 juin 1970 dont l'article 371-4, alinéa 2, du Code civil prévoyait qu' " en considération de situations exceptionnelles, le tribunal peut accorder un droit de correspondance ou de visite à d'autres personnes, parents ou non ". Le critère retenu ici était " l'existence de situations exceptionnelles ". Même si la rédaction de l' article 371-4 a été modifiée, la même solution devrait perdurer, fondée sur un autre critère : " l'intérêt de l'enfant ". Cette disposition de l'article 371-4 a été modifiée depuis l'entrée en vigueur le 19 mai 2013 de la Loi n° 2013-404 du 17 mai 2013-art.9. Ce même article, dans sa nouvelle version, dispose que: " Si tel est l'intérêt de l'enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables". Le critère qui

198 RUBELLIN –DEVICHI (J.), ibid.

199 RUBELLIN –DEVICHI (J.), ibid.

200 RUBELLIN –DEVICHI (J.), RTD. Civ. 1990. 264.

201 Civ. 1ère, 5 mai 1996, Bull. civ. I, n° 112. V. Dans le même sens, Cour d'appel de Montpellier 10 chambre section C2 , Audience du 19 février 2014, N° de RG: 13/01770, Légisfrance.

permet désormais au juge d'accorder un droit de visite n'est donc plus l'existence d'une situation exceptionnelle mais la conformité de l'exercice d'un tel droit avec l'intérêt de l'enfant. Les droits qui peuvent être invoqués par les grands-parents sont " moins des droits subjectifs que des droits-fonctions tournés vers la satisfaction de l'intérêt de l'enfant "202. En conséquence, quelle que soit la rédaction de l'article 371-4 du Code civil, il faut relever qu'en reconnaissant le maintien de relations personnelles aux grands-parents et, partant, à l'ensemble des membres de la famille par le sang, la Cour de cassation a " posé ainsi une limite de taille à la fiction qui sous-tend le principe de la rupture totale avec la famille d'origine posé par l'article 356 du Code civil "203. Le maintien du lien de fait montre à l'évidence que la disparition du lien de droit n'est qu'une fiction.

Le second, plus récent, est l’œuvre de la Cour d’appel de Paris204. Dans cet arrêt, la Cour, tout en constatant que les conditions de l’adoption plénière étaient remplies, a prononcé l’adoption simple plutôt que l’adoption plénière voulue par les requérants. La cour a justifié cette décision par le fait que l’enfant avait une sœur confiée à une famille d’accueil avec laquelle des liens ont été maintenus et un jeune frère confié aux requérants de sorte que l’adoption plénière n’apparaissait pas conforme à l’intérêt de l’enfant, celle-ci opérant une rupture complète et irrévocable des liens de filiation avec la famille biologique. La Cour d’appel de Grenoble avait déjà statué en ce sens le 3 septembre 2007205.

S'agissant de la seconde raison, M. MONREDON estime qu’une telle proposition permettra à un enfant adopté sous la forme simple de pouvoir participer à son propre adoption plénière : « Dans une procédure où l’enfant n’a que peu de droit à la parole, et dans une optique conforme à une volonté d’apporter une plus grande autonomie aux mineurs par la

reconnaissance de droits propres, l’adoption simple, mesure transitoire vers une adoption

plénière ultérieurement librement acceptée, apparaît la seule voie qui correspondrait à ces objectifs »206.

202 MURAT (P.), note sous Civ. 1ère, 16 juillet 1997, Dr. fam. 1997, comm. n° 173. V. En ce sens FULCHIRON (H.), L'autorité parentale rénovée - commentaire de la loi du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale, Defrénois 2002, art. 37580, p. 959, et GOUTTENOIRE-CORNUT (A.), La consécration de la coparentalité par la loi du 4 mars 2002, Dr. fam., 2002, chr. n° 24.

203 RUBELLIN-DEVICHI (J.), " L'adoption de l'enfant du conjoint ", RTD. civ. 1988.714.

204 CA de Paris – 3 mai 2012 – RG n° 11/17010.

205 C.A. Grenoble, 3 septembre 2007, R.G. no 06 / 03160.

128 – Une objection. Si la proposition du Professeur RUBELLIN-DEVICHI a le grand

mérite d’attirer l’attention sur les conséquences néfastes que pourraient engendrer certaines décisions d’adoption plénière et d’ouvrir la voie vers une moralisation du prononcé de l’adoption plénière à travers une prudence imposée au juge, elle ne revalorise pas pour autant l’adoption simple.

Au contraire, elle fait de cette dernière, une adoption à l’essai. L’adoption simple ici est considérée comme une pré-adoption, un engagement d’adoption plénière à l’essai.

Une telle mesure présente le risque de rendre instable l’état de l’enfant et aggrave sa vulnérabilité. Aussi, en permettant une conversion de plein droit de l’adoption simple en adoption plénière après l’écoulement d’un certain temps, la filiation adoptive risque-t-elle de se complexifier. Le souci de l’auteur pourrait avoir satisfaction avec l’instauration future et souhaitable d’un placement avant le prononcé de l’adoption simple, tel que cela existe en matière d’adoption plénière. Cette période de placement étant considérée comme une période de test pour mesurer la capacité de l’adoptant à satisfaire aux besoins207 de l’enfant, ou du moins à combler les attentes de l’enfant qui lui est confié de façon provisoire.

129 - Solution prospective. La solution la mieux adaptée, nous semble-t-il, serait de retenir,

comme principe, le prononcé systématique de la forme simple de l’adoption et d’ouvrir la « fenêtre » de l’adoption plénière à titre exceptionnel pour certains types d’enfants, notamment ceux qui n’ont aucune chance ou qui ont perdu tout espoir de retrouver un jour leurs parents d’origine et qui ne sauraient rester éternellement dénués de tout lien de filiation.

b. Une adoption plénière exceptionnelle

130 - Les bénéficiaires de l'adoption plénière. Les enfants en faveur de qui une décision

d’adoption plénière peut être prononcée à titre exceptionnel seraient uniquement les enfants déclarés abandonnés et sans parents connus, c'est à dire les enfants dont la filiation n'a pu être identifiée en raison des circonstances dans lesquelles ils ont été recueillis. Seraient donc exclus du bénéfice de l’adoption plénière et ce, en raison de leur droit à la connaissance de leur origine et de leur droit à la préservation de leur lien familial d’origine, les enfants dont les père et mère consentent à leur adoption plénière. En effet, nous pensons qu'il est inadmissible qu'un parent puisse décider volontairement de mettre "un trait" sur le lien de filiation qui l'unit à son enfant. D'ailleurs, l'abandon d'enfant est considéré au Mali comme un délit208. Une

207 Il s’agit ici des besoins affectifs et matériels dont l’enfant a besoin.

208 L'article 219 du Code pénal malien dispose que : " Celui qui aura volontairement abandonné, dans des conditions telles que son salut dépende du hasard, un enfant ou un incapable de se protéger soi-même, ou qui aura volontairement interrompu la fourniture d'aliments ou les soins qui lui étaient dus, sera, s'il en est résulté

telle mesure, en plus de redorer le « le blason » de la forme simple de l’adoption, a le mérite de moraliser l’institution de l’adoption, qui, faut-il le rappeler, a pour finalité primordiale de donner une famille à un enfant qui n’en a pas ou n’en a plus et non le contraire.

Ces réformes seraient le gage d’un regain de considération pour la forme « modeste » de l’adoption. Une telle considération ne serait cependant possible que si le régime de cette forme d’adoption à effets limités était auparavant renforcé.

131 - Le renforcement du régime de l’adoption limitée. L’adoption limitée, compte tenu de

ses spécificités, s’est vue attribuée, avec juste raison, un régime différent de celui de l’adoption plénière. Cette différence s’exprime surtout par une certaine flexibilité des conditions et des effets de la forme simple de l’adoption. Si cette souplesse a le mérite de simplifier et, par conséquent, de faciliter l’adoption de certains enfants en besoin familial, elle présente cependant l’inconvénient majeur de ne pas protéger suffisamment l’enfant qui en fait l’objet. Ce déficit de protection de l’enfant apparaît notamment dans certaines des conditions et certains des effets de l’adoption limitée. Pour remédier à cette situation et revigorer l’adoption limitée, il serait souhaitable non seulement de réaménager certaines conditions de l’adoption limitée, mais également certains de ses effets dans le sens d’une meilleure prise en compte de l’intérêt de l’enfant.

132 - Le réaménagement des conditions de l’adoption limitée. L’adoption limitée, tout

comme l’adoption plénière, vise la constitution ou la consolidation d’une relation parentale. Afin de revaloriser l’adoption limitée en tant que filiation additive fondée sur l’intérêt de l’enfant, certaines modifications devraient être envisagées pour rapprocher les deux types d’adoption. Par exemple, le recueil préalable et le placement en vue de l’adoption permettraient de s’assurer de l’adaptation de l’enfant à sa nouvelle famille avant le prononcé de l’adoption, s’il ne vit pas déjà au sein de cette famille209. A cet égard, il est regrettable qu’aucune disposition, dans les droits positifs malien et sénégalais, ne fait mention d’un

une mutilation, une infirmité ou une maladie permanente, puni de cinq à dix ans de réclusion. Lorsque l'abandon aura occasionné la mort, l'action sera considérée comme meurtre et punie comme telle.

S'il est résulté de l'abandon d’une maladie ou incapacité de plus de vingt jours, la peine sera de un à cinq ans

d'emprisonnement.

Dans les autres cas, la peine sera de un à trois ans d'emprisonnement. " V. La Loi n° 01-079 du 20 août 2001 portant Code pénal au Mali.

209 Le placement fait partie du train de mesures nouvelles visant à réduire sinon à tarir les conflits autour de l’enfant à adopter et à assurer ainsi une meilleure intégration de cet enfant dans sa famille nouvelle. Le législateur ne l’a prévu que pour l’adoption plénière et d’ailleurs, même dans cette hypothèse, il n’est pas toujours un préalable nécessaire. L’étude du placement sera développée dans le chapitre 2 du présent titre.

accueil préalable de l’adopté simple au foyer des adoptants. L’objectif recherché dans le placement pré-adoptif étant de s’assurer du succès de la rencontre entre adopté potentiel et adoptant potentiel et la garantie que ce dernier s’occupera bien de l’adopté futur, il serait dès lors pertinent de prévoir une phase pré-adoptive pour l’adoption limitée, quitte à l’aménager en la réservant uniquement aux enfants mineurs.

133 - Avantages. Ces aménagements de fond permettront à l’adoption limitée d’être réhabilitée et revitalisée et de pouvoir répondre plus adéquatement aux besoins de certains enfants que ne le ferait l’adoption plénière. Le principal critère de distinction pour déterminer laquelle de l’adoption limitée ou de l’adoption plénière est la plus appropriée devrait être la présence ou l’absence de liens significatifs - réels ou symboliques - avec les parents d'origine. Une telle démarche ne peut se réaliser sans que soit abandonnée une hiérarchisation qui ne convient plus à la conception moderne de l’adoption. D’une part, les considérations patrimoniales sont devenues marginales dans les cas d’adoption des mineurs. D’autre part, l’importance du maintien du lien d’origine pour assurer le développement identitaire et harmonieux de certains enfants justifie de se défaire des conceptions héritées du passé.

Le législateur malien devrait envisager d’introduire, comme son homologue sénégalais l’a fait, une adoption filiation aux effets limités pour permettre à l’institution de donner une réponse satisfaisante aux besoins de certains enfants.

134 - Implications. Ces démarches impliquent toutefois de se tourner vers l’enfant d’abord et avant tout, afin de déterminer, au cas par cas, quel est le mécanisme juridique le mieux en mesure de répondre à ses besoins, ses droits, son intérêt. Au demeurant, le renforcement de certains effets de l’adoption limitée pourrait conduire à l’établissement d’une forme nouvelle d’adoption limitée réhabilitée et beaucoup plus soucieuse de l’intérêt de l’enfant.

135 - Le réaménagement des effets de l’adoption limitée : Généralités. Les effets de

l’adoption limitée à l’égard de la famille d’origine se restreignent principalement aux droits héréditaires210 et à l’obligation alimentaire subsidiaire211. Néanmoins, l’adjonction du nom de l’adoptant à celui d’origine de l’adopté212 traduit la double appartenance familiale de ce

210 Article 247 alinéa 1 du Code sénégalais de la famille.

211 Voir article 263 in fine du Code sénégalais de la famille : « Dans l’adoption limitée, lorsque cette obligation alimentaire, restreinte à l’adoptant et l’adopté, ne peut être exécutée, l’adopté peut réclamer des aliments à sa famille d’origine ».

212 Voir article 6 al. 2 du Code sénégalais de la famille : « L’enfant faisant l’objet d’une adoption limitée porte le nom de l’adoptant qu’il ajoute à son nom de famille; cependant le juge peut, dans l’intérêt de l’enfant, décider

dernier. Ainsi, l'enfant adoptif porte le nom de l'adoptant qu'il ajoute à son nom de famille. Il porte alors deux noms patronymiques213. Mais, en revanche, le Code sénégalais de la famille ne fait aucunement mention d’un éventuel droit de visite pouvant être accordé aux membres de la famille d’origine qui se fonderait sur le maintien du lien de droit entre eux et l’adopté. En transférant toutes les prérogatives de puissance paternelle aux adoptants, la loi laisse entre les mains de ces derniers le soin de décider si l’enfant doit continuer à entretenir ou non des liens avec sa famille d’origine. Pour remédier à cette maladresse législative et restaurer à l’adoption limitée sa finalité, il urge pour le législateur d’accorder un droit de visite à la famille d’origine de l’adopté lorsque l’intérêt de l’enfant le justifie. Par ailleurs, le succès de l’adoption limitée passerait-il d’une part, par la remise en cause de la substitution du nom de l’adoptant à celui de l’adopté214, et, d’autre part, par un renforcement des droits successoraux résultant de l’adoption limitée.

136 - La remise en cause de la substitution du nom de l’adoptant à celui de l’adopté.

L’absence de rupture avec la famille par le sang et le rattachement à la famille adoptive font qu’une superposition du nom de l’adopté au nom de l’adoptant a, en principe, lieu215. Il symbolise aux yeux des tiers, comme à ceux de l’adopté lui-même, l’existence de sa double filiation. Cependant, le législateur permet de violer ce principe dans la mesure où il pose une exception à l’alinéa 2 in fine de l’article 6 du Code sénégalais de la famille. Il s’agit de la possibilité offerte au juge de substituer au nom de l’adopté celui de l’adoptant216. Cette faculté vise, sans l’assumer, à contourner le port du nom de la famille d’origine au profit du nom de la famille adoptive en mobilisant la notion d’intérêt de l’enfant. Elle pourrait être considérée légitimement comme une contradiction avec l’existence du double lien consacré par l’adoption limitée. En effet, la finalité de l’adoption limitée étant de conserver les racines de