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La proposition d’un modèle de caractérisation des outils du pilotage patrimonial

PATRIMONIAL PUBLIC LOCAL

2.1 La constitution d’une grille d’analyse instrumentale du pilotage patrimonial local

2.1.3 La proposition d’un modèle de caractérisation des outils du pilotage patrimonial

Afin de proposer un modèle de caractérisation des outils d’une gestion patrimoniale performante, nous retenons trois axes d’analyse. Ceux-ci s’appuient tout d’abord à la fois sur les composantes de la gestion patrimoniale, mais aussi sur les caractéristiques pluridimensionnelles de sa performance. Ensuite, cette proposition découle également du résultat de la conjonction entre un besoin, lié au métier de gestion patrimoniale, un support, appréhendant l’organisation de la fonction patrimoniale, et enfin un objet focalisé sur la nature du patrimoine immobilier. De surcroît, ces axes de caractérisation ambitionnent de dépasser le simple cadre de la gestion patrimoniale, avec une mise en cohérence de la définition des axes et des facteurs limitant la portée managériale des informations comptables et financières proposée par BREID (1994).

Dans l’objectif de permettre à la fonction patrimoniale de s’intégrer pleinement à la stratégie d’une institution, et de contribuer ainsi à l’amélioration de la performance globale de celle-ci, il apparaît indispensable de se doter d’un cadre conceptuel nous permettant de définir les outils et leur articulation dans un système global de management. Ainsi, nous pouvons formuler une première proposition de recherche dans le but de caractériser les outils du pilotage patrimonial :

Proposition 1 : Les outils du pilotage patrimonial public local sont caractérisés selon leur niveau d’utilisation, leur temporalité et leur finalité.

Dans ce cadre, le premier de nos axes d’analyse concerne le niveau d’utilisation ou d’action de l’outil de gestion, et comporte trois modalités. En effet, l’instrumentation de gestion du patrimoine s’inscrivant dans un système global, il est possible de distinguer trois niveaux de contrôle dans une organisation : le niveau stratégique, de gestion ou administratif, et opérationnel (ANTHONY, 1965, 1988).

Au demeurant, selon LONING et al. (2013), il est indispensable que les outils de pilotage soient tournés vers le terrain, encore trop souvent oublié des démarches de contrôle. Or, le pilotage d’une organisation doit s’enrichir des « données physiques et qualitatives » générées par la

« prise décision au quotidien », afin de compléter les données agrégées et de synthèses qui sont traditionnellement manipulées par le contrôle de gestion. Dès lors, il semble nécessaire que le pilotage patrimonial se décline dans tous les niveaux d’une organisation, du stratégique vers l’opérationnel.

Le niveau stratégique concerne, tout d’abord, le pilotage de la fonction patrimoniale ; la cohérence avec la stratégie globale de l’institution étant assurée par ailleurs. Le niveau administratif pour sa part, inclût les activités de nature administrative ayant pour objectif de répondre aux obligations légales qui s'imposent aux propriétaires, mais également les obligations conventionnelles pouvant résulter des contrats d'assurance, des obligations environnementales et réglementaires applicables aux ouvrages et aux activités que ces derniers abritent. Enfin, au niveau opérationnel, nous trouvons l’ensemble des processus techniques indispensables à l’utilisation des locaux.

Cet axe d’analyse, en particulier à travers la modalité stratégique, appréhende ainsi d’importants facteurs clés de succès, tels que la satisfaction des usagers ou la qualité des prestations réalisées. Dans une activité de service, comme dans le cas de collectivités locales, il semble primordial que l’instrumentation de gestion intègre des mesures qualitatives de la performance organisationnelle. GERVAIS et THENET (2004) soulignent dans ce sens que la productivité d’une activité de service ne doit pas strictement se mesurer en rapportant le temps passé à la production obtenue. Lorsque c’est le cas, cette mesure peut nuire à la réalisation des différentes composantes de la prestation attendue par le client, telles que l’adaptabilité à ses besoins ou la qualité de la prestation. Dans ce sens, VAN CAILLIE (1999) précise que l’instrumentation doit tenir compte de l’aptitude de l’organisation, non seulement à innover pour rencontrer les attentes des utilisateurs, mais aussi à adapter ses processus internes pour tenir compte rapidement de tout changement dans son environnement. Ces adaptations ne peuvent en conséquence se faire que si les outils de pilotage concernent toutes les strates d’une institution. Compte tenu de ces éléments, sur cet axe, nous réalisons la proposition suivante :

Proposition 1.1 : Les outils du pilotage patrimonial public local couvrent des niveaux d’utilisation à la fois stratégiques, administratifs et opérationnels.

Le second axe, complémentaire, représente, lui, l’horizon temporel des outils de la gestion patrimoniale. Comme nous l’avons rappelé, le patrimoine immobilier concerne aussi bien des activités quotidiennes que des projets à très long terme. Nous proposons ici de prendre en considération trois modalités, en distinguant les outils de gestion à portée infra-annuelle, annuelle et pluriannuelle.

En effet, comme l’indique BREID (1994), il est difficile de piloter une organisation sur la base de mesures strictement court-termistes et opérationnelles. De même, des mesures essentiellement comptables et financières appréhenderont avec difficulté la complexité de l’organisation publique locale (CROZIER, 1991). Directement rattachés au système d’information, ces indicateurs comptables et financiers permettent principalement de répondre, de manière légale, à la délégation de responsabilités entre autorités politiques et administratives. Le type d’information produit est alors principalement focalisé sur les besoins des acteurs externes à l’organisation, que ce soit les collectivités locales ou bien l’Etat. C’est pourquoi, ce type de mesure connait de nombreuses limites, particulièrement lorsque les informations qui en découlent ne semblent pas favoriser une mesure de l’activité pertinente facilitant la prise de décision. Les outils de gestion strictement financiers n’ont ni la précision, ni la robustesse nécessaire au management d’une organisation (ATKINSON et al., 1997). D’autre part, compte tenu de leur horizon temporel, les mesures comptables et financières ne décrivent que l’histoire récente. Ainsi, celles-ci ne peuvent pas participer à l’exercice nécessaire de la prédiction, dans la mesure où ses principes constitutifs mettent en avant le calcul de la valeur patrimoniale de l’institution. En outre, plus les outils mis en œuvre par les collectivités locales se focalisent sur des indicateurs court-termistes, plus la capacité future de l’organisation à générer et à adapter ses ressources immobilières en fonction de ses besoins sera réduite. Toujours en se rapportant au facteur temps, il s’avère que ces mesures constituent des indicateurs trop tardifs, lorsqu’ils sont produits, pour éclairer et influencer la décision des responsables publics locaux. Au total, l’horizon temporel étant réduit, ce type d’indicateur ne permet pas de démontrer si la performance comptable et financière dégagée est en cohérence avec les stratégies et les objectifs d’une organisation.

Au regard de ces nombreuses limites, et comme nous l’avons déjà évoqué, plusieurs auteurs suggèrent la mise en place de systèmes multidimensionnels de mesure de la performance comme outils de management complémentaires aux outils traditionnels (KAPLAN et NORTON, 1992 ; OTLEY, 1999). Les mesures court-termistes axées sur des dimensions comptables et financières, malgré leurs insuffisances, ne sont toutefois pas écartées, mais complétées par des mesures plus long-termistes et qualitatives permettant de prendre en considération d’autres dimensions nécessaires à l’appréciation de la performance globale d’une organisation.

En effet, comme le souligne BUSSON-VILLA (1999), « à une logique sur les principes s’ajoute, et non se substitue, une logique orientée sur les résultats ». Les organisations du secteur public local ont pris en compte, dans une certaine mesure, ces évolutions cruciales, à travers une redéfinition de la notion de contrôle interne. Pour les collectivités locales, cette évolution s’est alors traduite par le dépassement de la vision traditionnelle du contrôle, pour intégrer des logiques propres au contrôle de gestion, au contrôle stratégique et à l’évaluation des politiques publiques (BATAC et al., 2009), focalisées sur un raisonnement de long terme. C’est dans cette logique que, sur cet axe, nous réalisons la proposition suivante :

Proposition 1.2 : Les outils du pilotage patrimonial public local couvrent des temporalités court, moyen et long-termistes.

Enfin, un troisième axe d’analyse nous est donné par la finalité managériale couverte par les outils de gestion du patrimoine. De la sorte, il s’agit d’évaluer la portée et l’objectif que permet d’atteindre un instrument, en reprenant la typologie des activités de la gestion patrimoniale que nous avons précédemment exposée (Cf. 1.3.2.1). Dans le sens déjà décrit, nous identifions ainsi trois occurrences au niveau de cet axe, en distinguant la gestion d’actifs immobiliers (« Asset Management »), l’administration de biens (« Property Management ») et l’exploitation de parc (« Facility Management »). Sur cette dimension, nous réalisons donc la proposition suivante :

Proposition 1.3 : Les outils du pilotage patrimonial public local couvrent les finalités managériales immobilières d’Asset, de Property et de Facility Management.

Nous reprenons en conséquence nos propositions ci-dessus dans un schéma de caractérisation des outils de pilotage de la performance patrimoniale.

Figure 12 - Schéma de caractérisation des outils du pilotage patrimonial public local

Source : Inspiré de BREID (1994)

Une fois la logique de ce cadre d’analyse explicitée, il nous appartient d’étudier la pratique instrumentale de la fonction patrimoniale des collectivités locales, en recensant les outils de gestion mobilisés et en les caractérisant au regard de nos trois axes d’analyse. Cette analyse fera notamment l’objet de la seconde partie de cette thèse. De cette façon, il nous sera possible d’appréhender le degré de cohérence entre le cadre conceptuel d’analyse du pilotage patrimonial et les pratiques actuelles, au regard des modalités particulières des outils de

gestion du point de vue de leur couverture temporelle, des acteurs mobilisés et des finalités couvertes.

A côté de cette première grille d’analyse instrumentale, cette recherche doctorale cible le champ organisationnel de la gestion du patrimoine. Ce dernier semble en effet essentiel à l’étude et la caractérisation des pratiques de gestion patrimoniale des collectivités locales.

2.2 Elaboration d’une grille d’analyse des modes d’organisation

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