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Proposition d’interprétation du TAC selon une vision développementale

3. APPORT DE LA PSYCHOPATHOLOGIE DEVELOPPEMENTALE

3.3. Proposition d’interprétation du TAC selon une vision développementale

3.3.1.

Identification de sous-types de TAC

Une récente étude de Vaivre-Douret (2011 a) a permis une avancée dans l'identification de la sémiologie pouvant rendre compte des sous-types de TAC chez l'enfant, en se basant sur des investigations cliniques des différentes fonctions cérébrales. Le but est de mieux comprendre les mécanismes physiopathologiques sous-jacents et la part de la comorbidité.

Vaivre-Douret et al. (2011 b), sur la base d’inférences cliniques et de critères diagnostics développementaux, identifient 3 sous-types du Trouble de l'Acquisition de la Coordination (TAC) ou de la dyspraxie développementale 11 :

- Sous groupe 1 : souffrant de dyspraxie IdéoMotrice (IM),

- Sous groupe 2 : souffrant de dyspraxie Visuo-Spatiale et/ou visuo-Constructive (VSC), - Sous groupe 3 : souffrant de dyspraxie MiXte (MX), associant les deux types de dyspraxies pures (IM et VSC) avec une comorbidité d'autres anomalies, incluant les troubles spécifiques de la coordination motrice, avec plus de comorbidité de signes discrets et de déficits cognitifs.

11 à partir d’une population de 5 à 15 ans (Moy= 8,31 ± 2,39 ans, effectif de 43 sujets, d’intelligence normale :

Le sous-groupe 1 : souffrant de dyspraxie IM (12 % de la population étudiée) présente des troubles de la plus forte intensité, avec des difficultés au niveau de la motricité globale, de la posture. Les sujets sont déficitaires sur les praxies digitales, les gnosopraxies et les gnosies digitales. L'hypotonie axiale ou globale, le trouble de l'organisation tonique et gestuelle spontanée de la latéralité, ainsi que l’intégration (gauche/droite) de l'orientation spatiale corporelle (surtout par rapport à autrui) restent des variables majoritairement échouées (Vaivre-Douret, 2008).

L'identification de ce groupe correspond à certains travaux déjà cités dans la première partie [Ayres (1972), Cermak (1985), Denckla (1974), Dewey et Kaplan (1994, 2002), Vaivre- Douret (2002 a)], mettant en évidence les difficultés sur des mouvements non habituels ou séquentiels. Ces difficultés, d'un point de vue sémiologique, évoquent pour les troubles du groupe IM des difficultés de planification motrices liées en partie à des difficultés somatosensorielles et de régulation du contrôle du tonus et de la motricité à un niveau de programmation motrice, impliquant des structures sous-corticales dont le thalamus (Vaivre- Douret 2011 a), les noyaux de la base et du cervelet en accord avec Lundy-Ekman et al. (1991).

Le sous-groupe 2 : souffrant de dyspraxie VSC (44% de la population) est caractérisé par des troubles de l'intégration visuo-motrice, la structuration visuo-spatiale et les troubles visuo-spatiaux constructifs : les élèves ont des problèmes pour poser les opérations, faire des quadrillages, se repérer dans la page, effectuer le travail de géométrie, au niveau de l'habillage.

C’est le groupe qui présente des troubles de la plus faible intensité et chez qui il n'existe pas de troubles de la coordination motrice. En revanche, on note dans plus de 50 % des cas des troubles de la réfraction visuelle (myopie, astigmatisme, hypermétropie). La dysgraphie est particulièrement notée dans ce groupe.

Cette approche apparait en cohérence avec les travaux de Lyytinen et Ahonen (1988), Hoare (1994) et Macnab et al. (2001) qui montrent une séparation possible des fonctions perceptives et motrices. Dewey et Kaplan (1994), Shoemaker et al. (2001) mettent en évidence que les difficultés visuo-perceptivo-motrices des TAC ne sont pas objectivées par des troubles visuo- perceptifs. Avec Vaivre-Douret (2011 b), il apparaît significativement dans le groupe VSC des troubles spécifiques perceptivo-moteurs associés à des troubles de la poursuite oculaire, sans l’existence de troubles visuo-perceptifs ou neuro-visuels perceptifs sensoriels.

Milner et Goodale (1995) rappelle qu’il faut distinguer deux systèmes de la vision (on peut noter qu'il y a consensus sur cette question), l'un orienté vers la perception et l'identification (voie visuelle ventrale occipito-temporale qui permet de déterminer de quel objet il s'agit – «le quoi ») et l'autre vers la localisation et l'action (voie visuelle dorsale occipito-pariétale qui permet de repérer où se trouve l'objet - « le où »). Ce second système, plus archaïque, semble être plus particulièrement affecté dans le sous-type VSC de la dyspraxie. Si un trouble visuo- perceptif altère le geste et peut être facilement confondu avec la dyspraxie, l'origine des mécanismes cérébraux en jeu ne sont pas les mêmes.

Notre travail se situant sur un niveau développemental et non neuro-psychologique cet aspect ne sera donc pas approfondi.

Le sous groupe 3 (dont les troubles se situent à une intensité intermédiaire) : souffrant de dyspraxie MX (44% de la population étudiée) associe la dyspraxie IM et la dyspraxie VSC, présente des anomalies qui ne sont pas retrouvées dans les deux autres types de dyspraxies, notamment au niveau de la coordination motrice (trouble de l’habilité manuelle, de la coordination bimanuelle, des troubles praxiques bucco-linguo-faciales,…).

Il existe dans ce groupe des troubles de la motricité volontaire exécutive (spasticité discrète), des signes neuromoteurs discrets impliquant significativement des syncinésies et dysdiadococinésies, ainsi que des troubles significatifs au niveau des fonctions exécutives et plus de troubles cognitifs au niveau de la mémoire, de l'attention que dans les 2 autres groupes. Il a déjà été rapporté une certaine comorbidité des troubles d'apprentissage avec des troubles de l'acquisition de la coordination dans différentes études : association fréquente avec un déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité, avec des troubles du langage (Rasmussen & Gillberg, 2000). Le tableau clinique des sujets de ce groupe se rapproche de ce que Rourke (1995) appelle le syndrome de dysfonction non verbale (qui associe des difficultés au niveau du langage et de l'interaction sociale), souvent décrit comme syndromes de l'hémisphère des dysfonctions non verbales. Il apparaît clairement, dans ce groupe MX, des dysfonctionnements impliquant des mécanismes sous-corticaux et corticaux qui peuvent rendre difficile la compréhension du retentissement fonctionnel.

3.3.2.

Une relecture développementale du phénomène

TAC

Les auteurs (Vaivre-Douret et al., 2011 a et b) proposent une classification descriptive basée sur les symptômes (comme celle de Mazeau d’ailleurs) qui leur permettent d’effectuer un diagnostic différentiel et de souligner les critères cliniques prédicteurs des sous-types de TAC (voire de discuter des hypothèses étiologiques). Cette typologie qui s’articule sur une description de symptômes, renvoie à des âges d’apparition plus ou moins précoces, et présente un gradient d’intensité qui va :

- d’une intensité faible : des difficultés dans la représentation motrice de l’exécution du geste, d’une altération de la structuration visuo-spatiale de la motricité (groupe VSC),

- à une intensité forte : une perturbation de la coordination motrice touchée sur le versant du contrôle postural, à des problèmes de motricité tactile (groupe IM).

Si l’on interprète cette typologie en terme développemental, comme le décrit Vaivre- Douret et al. (2011 b), la forte intensité correspond à des difficultés, renvoie à des troubles plus précoces. Les difficultés du sous-groupe 1 (IM), avec des troubles du tonus, renverrait à un trouble précoce du développement. Les difficultés du sous-groupe 3 (VSC), avec des troubles liés aux aspects représentatifs de l’action, seraient d’apparition plus tardive dans le développement. Avons-nous à faire à des troubles qui renvoient à différents niveaux de développement de la motricité ?

En d’autres termes, si l’on se réfère au développement ontogénétique de la motricité, nous sommes amenés à penser que l’intensité, au sens décrit ci-dessus, renvoie à des troubles inscrits plus ou moins précocement dans le développement.

Notre échelle permettrait-elle de repérer un trouble indifférencié ? Ou le résultat donné par notre échelle pourrait-il évoquer des pistes de différenciation développementale ? Les 22 items qui ont été sélectionnés correspondent plus particulièrement aux difficultés du groupe 2 (dyspraxie MX) et du groupe 3 (dyspraxie VCS).

Nous rappelons que nous avons mis en évidence la sensibilité développementale de notre échelle, qu’un groupe relevait de difficultés légères (score jusqu’à 27), qu’un autre relevait de difficultés plus lourdes (score à partir de 31).

4. LA QUESTION DES ADAPTATIONS PEDAGOGIQUES :