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Le processus de production bancaire

Essayons, dans une perspective avant tout pédagogique, de pousser la logique industrielle de la banque le plus loin possible. Que seraient les activités bancaires dans un environnement appliquant parfaitement la stratégie d'optimisation et de création de valeur ? L'idée est de présenter de manière simple le processus de production bancaire (cf. encadré 2).

Encadré 2 – Comment mesurer la production d'une banque ?

(43).

En comptabilité nationale, la production dans les services s'apprécie de manière indirecte, c'est-à-dire par la somme des valeurs des marges réalisées. La production des services bancaires et financiers correspond au total des revenus diminué du total des intérêts versés. Il s'agit donc des intérêts nets. Le banquier utilise aussi le concept de chiffre d'affaires mais cette mesure, dans les institutions financières, n'est pas identique à celle d'une entreprise industrielle. Dans les institutions financières le chiffre d'affaires correspondrait au total des commissions et des intérêts bruts reçus. Mais les banquiers raisonnent le plus souvent en termes de commissions et d'intérêts nets. Ils retiennent donc le concept de produit net bancaire (PNB). Le PNB correspond à la somme des intérêts et commissions nets, des revenus, des plus-values du portefeuille ainsi que des produits d'arbitrage et des opérations Sur les nouveaux instruments financiers.

Suite de l’encadré 2

On considère deux types d'approches pour mesurer la production bancaire. La première est qualifiée d'approche « par la production » ou en volume puisqu'elle tente d'appréhender la production bancaire à travers des indicateurs physiques.

La deuxième est intitulée approche « par l'intermédiation » ou en valeur. Elle privilégie l’intermédiation considérée comme la séquence centrale dans le processus de production bancaire.

L’approche par la production.

Selon cette approche, la production bancaire s'appuie sur une mesure physique. Elle correspond au nombre d'opérations traitées. Cette production nécessite l'utilisation de deux inputs principalement du capital et du travail. Le nombre de comptes de dépôts et le nombre d'opérations de crédit seraient les meilleures mesures de l'output bancaire. Cependant, cette approche néglige la dimension financière de la production bancaire. Elle conduit au « paradoxe de la productivité bancaire » : il serait préférable pour une banque d'ouvrir plusieurs comptes pour une personne très pauvre qu'un seul compte pour une personne très riche. Prenons l'exemple suivant. Soit deux clients A et B domiciliés auprès d'une même banque. Le client A ouvre trois comptes :

· Un compte courant sur lequel il verse 200 euros, · Un Codevi sur lequel il verse 500 euros,

· Un compte d'épargne-logement sur lequel il verse 1 000 euros.

Le client B ouvre auprès de cette même banque un seul compte courant sur lequel il verse 100 000 euros.

Ainsi, d'un point de vue industriel, le client A améliore la productivité de la banque plus que ne le fait le client B. Cependant, d'un point de vue financier le client B est plus rentable pour la banque que le client A, d'autant qu'il coûte moins cher à la banque car plus le nombre d'opérations s'accroît plus les coûts opératoires augmentent. Les indicateurs physiques peuvent donc paraître insuffisants parce qu'ils n'appréhenderaient que de manière partielle la production bancaire. Or, une vision exhaustive ne peut éluder le phénomène d'intermédiation.

L’approche par l'intermédiation

Cette approche prend en compte la dimension financière des opérations. La production bancaire est mesurée par des agrégats financiers exprimés en unités monétaires.

Suite de l’encadré 2

Les produits bancaires sont les montants, exprimés en unités monétaires, des dépôts, des crédits et des autres actifs financiers. Dans cette perspective, les dépôts ainsi que le travail et le capital sont considérés comme des inputs.

Source : D'après Saïdane, « La nouvelle banque », opcit, p. 86.

L'activité bancaire peut être séparée en trois domaines différents : le crédit, l'épargne et les services bancaires (44). L'activité la moins réglementée parmi les trois est celle de l'offre de crédit qui s'apparente à la vente d'un bien (l'argent) à un prix déterminé (le taux débiteur). Les établissements bancaires, comme n'importe quel établissement industriel, transforment ainsi une matière première (l’argent) en produit (le crédit). Ils achètent sur le marché des capitaux des ressources pouvant prendre la forme de dépôts ou d'emprunts obligataires. Cette matière première est ensuite transformée en crédits et distribuée par le réseau après qu'elle a été adaptée aux caractéristiques de la demande en termes d’échéance (court terme ou long terme) et de taux (fixe ou variable).

Une application des conditions de la concurrence au marché du crédit suppose que les banques respectent une condition de base : chaque banque distribue du crédit jusqu'à égaliser soit coût marginal de production à son taux de refinancement. Une illustration de cette règle est proposée dans l'exemple qui Suit (Cf. encadré 3).

Encadré 3 – Le processus de production bancaire un exemple simplifié

Objectif

Cet exemple simplifié présente la situation d'un marché du crédit fonctionnant en concurrence parfaite. Il indique comment le taux débiteur dépend principalement des conditions de refinancement sur le marché financier, des contraintes de fonds propres et du taux de rémunération de ces fonds propres. Partons d'un bilan simplifié.

Bilan simplifié Actif Passif Crédits (L) Dépôts à vue (DAV) Ressources de marché (RM) Fonds propres (FP)

Suite de l’encadré 3

Le profit de la banque noté ∏ s'écrit ∏ (L) =rLL-C(L) avec · L le montant des crédits accordé,

· rL le taux moyen débiteur et · C(L) le coût total de production.

Le coût de production correspond à C(L) = FG+ ∑ avec (FG) les frais généraux, ou coûts opératoires induits par la collecte des dépôts et par la distribution des crédits, et R le coût de refinancement. Ce dernier, appelé aussi coûts financiers, correspond au Coût des éléments du passif. Il s'exprime ainsi R = ∑ , avec ici i = 1, 2, 3 ou Ri représente les i catégories de ressources de la banque et ri leur coût respectif.

Admettons que les ressources de la clientèle correspondent exclusivement à des dépôts à vue (DAV) assortis d’un taux, r1.

Notons (RM) les ressources de marché payées au taux r2 et (FP) les fonds propres réglés au taux r3. Ainsi on peut écrire le total des ressources: ∑ . . . .

Par ailleurs, la contrainte d’équilibre de bilan s’écrit : ∑ .

On suppose que les dépôts à vue ne sont pas rémunérés donc r1 = 0 %. Par contre r2 = 5 %, le taux moyen sur le marché des capitaux et r3 = 10 % le coût des fonds propres après impôts.

L’hypothèse d’un marché du crédit bancaire en concurrence pure et parfaite admet qu’à l’équilibre la banque maximise son profit sous contrainte d’équilibre de bilan. En outre, le taux débiteur est supposé fixe. Dès lors, le programme de la banque devient :

La solution est donnée par la condition du premier ordre suivante 0 soit rL =Cm(L).

A l’équilibre, le taux débiteur rL dépend du coût marginal du crédit Cm(L) lié au niveau de productivité de la banque.

Suite de l’encadré 3

Application.

Si l’on retient que le ratio de fonds propres procurés à 10 % respecte le ratio Cooke (45) c’est-à-dire représente 8 % du montant des crédits offerts. Il reste donc 92 % de ressources à trouver sur le marché au taux de 5 %. Dès lors le coût marginal de banque devient :

0 . 5% . 10%

92 % . 5 % 8 % .10 % 5,4 %. A l’équilibre, le taux débiteur rL doit donc être égal à 5,4 %. Source : V. D. Saïdane, « La Nouvelle Banque », opcit, p. 88.

Section II