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CHAPITRE 2 LE CADRE THÉORIQUE

2.4 RÔLE DES DIFFÉRENTES COMPOSANTES DU PROCESSUS DE

2.4.2 Le problème

2.4.2.1 Définitions : Qu’entend-on par problème ?

Étymologiquement, ce mot dérive du latin Problema et du grec Problêma, qui signifie question à résoudre, point obscur que l’on veut éclaircir. C’est le premier sens qui lui est donné dans le Grand Robert (2001). Le deuxième sens se situe dans l’ordre de la pratique, de l’action et là le problème traduit une difficulté qu’il faut résoudre pour obtenir un résultat, ou encore une situation dangereuse qui exige une décision.

En situation pédagogique, Raynal et Rieunier (1997) considèrent que “ poser un problème à un élève, c’est lui demander d’agir pour résoudre le problème de manière satisfaisante en faisant appel à ses connaissances ” (p. 295). Legendre (2005, p. 1078) considère le problème comme “ une mise en situation volontaire d’un élève qui, disposé et motivé à atteindre un but clairement prédéterminé, participe personnellement à la découverte, à l’agencement et à la réalisation de moyens qui lui sont nouveaux pour y parvenir ”. Signalons en passant que pour ce même auteur (2005, p. 1079), le problème concerne l’ensemble d’une situation pédagogique et il doit être signifiant et stimulant pour le sujet. En fait, en éducation le concept de problème est inclus dans celui plus large de situation-problème qui, selon Poirier-Proulx (1999), “ propose une tâche à l’élève, pour laquelle il ne dispose pas pour le moment de tout ce qui lui est nécessaire pour l’accomplir ” qui la situation proposée doit ressembler à une situation authentique, proche de la vie réelle (p. 103).

On peut aussi caractériser un problème selon son type et il est intéressant de noter à ce propos la typologie proposée par Tardif(1992) qui distingue deux grands types de problèmes : bien définis et mal définis. Pour lui, un problème est bien défini lorsque le but désiré est très clairement énoncé et que les données initiales et les contraintes sont très clairement indiquées. Par contre, un problème est mal défini quand l’un de ces traits est imprécis dans l’énoncé : la personne doit donc définir davantage les données initiales du problème (p. 241-243). Cette typologie a des implications en éducation, car dans la vie réelle les problèmes sont plus souvent mal définis que bien définis et, dans le milieu scolaire, ce sont ces problèmes mal définis qui seraient plus susceptibles de favoriser le transfert des connaissances.

Donc le problème est un élément-clé pour l’apprentissage, mais pour cela il doit être “signifiant ”, rattaché à un contexte, une situation perçue comme un problème par l’apprenant, être “ mal défini ” et amener le questionnement et conduire à la démarche de résolution de ce problème

Schmidt (1983) a précisé les caractéristiques d’un bon problème utilisé en APP en médecine; il devrait consister en une description neutre d’un événement ou d’un ensemble de phénomènes qui ont besoin d’explication, conduire à une activité de résolution de problème, être formulé aussi concrètement que possible et avoir un degré de complexité adapté aux connaissances antérieures de l’étudiant, figurer parmi ceux rencontrés les plus fréquemment en milieu de pratique et représenter une menace réelle pour la vie.

DesMarchais et Dumais (1992) ajoutent qu’un “ bon problème ” doit inviter au processus d’analyse, guider vers l’identification des objectifs d’apprentissage, activer l’intérêt et la motivation. Selon Gallagher (1997), les problèmes doivent être mal définis pour pousser l’étudiant à se poser des questions et le faire s’engager dans la résolution de ce problème comme un apprenti médecin. Dans le même sens, Van Berkel et Dolmans (2006) considèrent que c’est le rôle du problème de fournir un contexte d’apprentissage signifiant pour les étudiants.

On voit donc que, que ce soit en éducation générale ou en médecine, les bons problèmes partagent les mêmes caractéristiques : être mal définis, tout en restant assez concrets, être complexes en restant adaptés au niveau de l’étudiant et l’engager vers la démarche de résolution de problèmes.

Comme mentionnée précédemment, la rencontre avec un problème constitue pour Vygotski aussi le point de départ du processus de formation des concepts. Ce problème doit être stimulant et référer à une tâche qui doit avoir du sens par rapport à l’insertion de l’apprenant dans la vie culturelle, professionnelle et sociale. “ Si le milieu ne stimule pas le développement intellectuel à l’aide de nouveaux buts, ne présente pas d’exigences nouvelles, alors la pensée de l’adolescent n’accèdera pas à des formes supérieures ” (Vygotski 1997, p. 208).

2.4.2.2 Recherches empiriques sur le problème lors de l’APP en médecine

Sur quoi juge-t-on “ l’efficacité du problème ” dans le processus d’apprentissage? L’étude de Dolmans et coll. (1993) par exemple, peut nous éclairer à ce sujet. Ces auteurs

ont exploré l’efficacité du problème d’apprentissage en la définissant comme la correspondance entre le nombre d’objectifs d’apprentissage générés par les étudiants et ceux déterminés par la faculté. La recherche a eu lieu à l’Université de Limburg à partir d’un cours de six semaines portant sur l’accouchement, la grossesse et le développement du fœtus, réparti sur 12 tutoriaux. Cent vingt étudiants ont été enrôlés dans cette étude et 12 paires de tuteurs étaient chargés d’analyser de façon indépendante les objectifs générés par les étudiants. Leur analyse devait porter sur trois points : déterminer le nombre d’objectifs générés par les étudiants et la concordance avec ceux de la faculté, déterminer le nombre et le type d’objectifs non trouvés par les étudiants, déterminer le nombre d’objectifs non prévus par la faculté et trouvés par les étudiants. Un coefficient kappa était calculé pour tenir compte du hasard dans la concordance inter juges.

Leur étude a démontré que 520 objectifs avaient été générés, dont 64,2 % concordaient avec ceux prévus par la faculté, 15 % n’ont pas été retrouvés par les étudiants et 6,2 % ont été générés par les étudiants sans avoir été prévus par la faculté. Le niveau de concordance entre les juges variait de 67,5 % à 97,3 %, avec une moyenne de 78,9 % et le coefficient de corrélation variait de .24 à .64, un coefficient de .45 correspondant à un niveau moyen d’agrément entre les juges. En comparant leurs données à celles peu nombreuses de la littérature, ces auteurs ont retrouvé des résultats variables : 68 % de concordance pour Tam et coll. (1986) mais 42 % pour Coulson et Osborne (1984). Les auteurs concluent en soulignant l’intérêt de leur étude, car la détermination des objectifs d’apprentissage permet de savoir ce que les étudiants planifient d’étudier. Pour eux, les problèmes utilisés dans l’APP devraient tenir compte des connaissances antérieures de l’étudiant, être formulés concrètement et se référer à la profession future des étudiants, être brefs et assez ouverts pour stimuler la discussion.

Toutefois, malgré la qualité méthodologique, nous contestons cette définition de l’efficacité du problème par le nombre et la concordance des objectifs d’apprentissage générés car d’autres études ont montré que cela ne dépend pas que du problème. En effet, l’expertise du tuteur joue aussi un grand rôle comme nous le verrons à la section suivante concernant le tuteur. Elle peut faire doubler le nombre d’objectifs générés par le étudiants (Eagle et coll., 1992; Gilkinson, 2003). De plus, Van Den Hurk et coll. (2001), dans leur

étude sur la qualité des objectifs d’apprentissage produits par les étudiants, ont souligné qu’il y a des objectifs que les étudiants comprennent de façon implicite; ils ne les exprimeront pas forcément, mais néanmoins ils savent ce qu’ils ont à étudier.