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Le problème particulier que pose la société utilisée comme véhicule de titrisation,

497 Article 239 alinéa 1 CO : "La donation est la disposition entre vifs par laquelle une personne cède tout ou partie de ses biens à une autre sans contre-prestation correspondante. " Contesté par OBERSON (2002), N 9 p. 383, pour qui "on peut notamment douter qu'une personne morale puisse faire une donation. " Pourtant, à Genève, on considère comme donation "toute dispo-sition entre vifs par laquelle une personne physique ou morale cède, à une autre personne physique ou morale, sans contrepartie correspondante, tout ou partie de ses biens" (OBERSON (2002), N 9 p. 383).

498 En fait, tous les cantons sauf Schwytz et Lucerne.

499 Cf. OBERSON (2002), N 5 p. 382.

5°° Article 23 de la loi sur les droits d'enregistrement du 9 octobre 1969 (LDE - RS-GE D 3 30).

••o' Article 4 alinéa 1 de la loi fédérale sur l'impôt anticipé du 13 octobre 1965 (LIA - RS 642.21 ):

"L'impôt anticipé sur les revenus de capitaux mobiliers a pour objet les intérêts, rentes, par-ticipations aux bénéfices et tous autres rendements : a. Des obligations émises par une per-sonne domiciliée en Suisse (...)"

5°2 Article 13 alinéa 1 lettre a LIA.

5°3 Article 56 de la loi fédérale sur les fonds de placement du 18 mars 1994 (LFP RS 951.31).

''o-i Article 84 CC.

505 La liberté de fonder des sociétés anonymes a été une des conquêtes du libéralisme écono-mique. En France, par exemple, la constitution d'une société anonyme était soumise à l'au-torisation du gouvernement (système de l'octroi) jusqu'à la loi de 1867 introduisant la liberté de constitution dans le cadre d'une forme légalement prévue (système normatif). Cf. RUEDIN (1999), § 52 p. 12. En Suisse, la liberté en matière de société anonyme a définitivement tri-omphé avec le Code fédéral des obligations du 14 juin 1881 (CFO).

est que si la protection de ses actionnaires y est d'une importance tout à fait secon-daire, la protection des investisseurs y est primordiale. Les investisseurs doivent protégés contre une collusion des actionnaires du véhicule et de l'initiateur. Or, leur position est celle d'investisseurs obligataires506 classiques, c'est-à-dire protégés

avant tout par la législation spéciale des articles 1156-1186 CO507. Rappelons que

le droit des sociétés prévoit d'autres règles protectrices des obligataires : l'artide

663e alinéa 3 chiffre l CO impose rétablissement d'un compte de groupe par la société débitrice d'un emprunt obligataire508, et l'article 697h alinéa l chiffre l CO

impose la publication des comptes annuels et des comptes de groupe par la société débitrice d'un emprunt obligataire509. Pour l'essentiel, nous devons nous deman-der si les règles du titre trente-quatrième du CO sont aptes à assurer une protec-tion efficace des obligataires dans le contexte particulier de la titrisaprotec-tion. De par la

loi (article 1157 alinéa l CO), les obligataires constituent une communauté des

créanciers, qui n'a pas la personnalité morale et dont la nature juridique, contes-tée, serait celle d'une communauté de fait511, impliquant le droit de tous les créan-ciers obligataires à un traitement égal512. Parmi les moyens de défense des intérêts des obligataires, la communauté peut élire un ou plusieurs représentants (article 1158 alinéa 2 CO), mais elle ne peut pas exercer elle-même l'action en

responsabi-lité pour le prospectus d'émission de l article 1156 alinéa 3 CO, sauf peut-être pour

obtenir la simple constatation du comportement illicite de l auteur du prospec-tus513. D'une manière générale, elle n'a pas qualité pour agir en réparation d'un dommage éprouvé directement par les obligataires514 - la solution inverse serait

incompatible avec le principe de l'égalité de traitement. En cas de faillite de l'émet-teur (ici le véhicule de titrisation), la loi ne favorise guère les obligataires, créanciers

ordinaires colloques en troisième classe. La plupart des émissions d'emprunts par obligations font d'ailleurs expressément mention de la clause pari passu, mettant les créanciers obligataires sur pied d'égalité avec tous les autres créanciers (non pri-vilégiés), présents et futurs, de l'émetteur515.

A notre avis, le droit suisse ne permet pas de prendre en considération le besoin accru de protection des investisseurs dans le cadre d'une opération de titrisation.

506 Sur les relations entre la SA et ses obligataires, cf. FORSTMOSER / MEIER-HAYOZ / NOBEL (1996),

§ 48, NN 23-39, pp. 628-630.

507 Ces articles constituent le titre trente-quatrième du CO : "Des emprunts par obligations."

5°8 Cf. FORSTMOSER / MEIER-HAYOZ / NOBEL (1996), § 51, NN 190-255, pp. 712-719.

''09 Cf. FORSTMOSER / MEIER-HAYOZ / NOBEL (1996), § 48, NN 57-62, p. 634.

5'° Cf. DAENIKER(1992),P. 58.

SU Cf. DAENIKER(1992),P.60.

s12 Cf. DAENIKER (1992), p. 61 : "Anspruch auf Gleichbehandlung."

s'3 Cf. DAENIKER(1992), pp. 103-106.

^ Arrêt Banque cantonale de Saint-Gall du 23 juin 1 987. ATF113 II 283, JdT 1988 I 79.

s's Sur la clause pari passu, cf. DAENIKER (1992), pp. 188-189, et LOMBARDINI (2002), §45 p. 535.

En effet, les obligations "ordinaires" sont émises par des sociétés de taille respecta-blé, qui ont un passé, des états comptables, une activité. Dans le cas de la titrisation, l'investisseur prête son argent à une SA qui a un capital insignifiant, aucune activité commerciale et pas de passé ; il investit en fait indirectement dans des actifs dont il ne peut certes pas connaître le détail. Même si ces actifs disposent de garanties excel-lentes (par exemple, des créances hypothécaires), l obligataire n est pas mieux

pro-tégé : c'est le véhicule de titrisation qui est le créancier gagiste des débiteurs cédés,

les investisseurs ne restant que les créanciers non privilégiés du véhicule. La loi

pré-voit (article 1160 alinéa 2 CO) que le représentant de la communauté des créanciers

peut prendre part, avec voix consultative, aux délibérations des organes sociaux du débiteur, mais seulement si celui-ci est déjà en retard dans l'exécution des obliga-tions que lui impose le contrat d'emprunt. Aucune protection particulière n'est pré-vue pour les créanciers du véhicule tant que celui-ci semble fonctionner normale-ment.

Si l'on se réfère aux dispositions édictées par la Bourse suisse en 1997, il est visi-blé que ce sont surtout des mécanismes non juridiques qui doivent assurer la pro-tection des investisseurs. Dans le cadre des opérations de titrisation, la Bourse suisse renonce à exiger du véhicule ce qui est normalement exigé des débiteurs obligatai-res dont les emprunts sont cotés en bourse. Les émetteurs de titobligatai-res adossés à des actifs échappent à l'obligation des trois ans d'existence prévue à l'article 7 du

Règle-ment de cotation du 24 janvier 1996, ainsi qu'à l'obligation d'un capital minimum

de 25 millions de francs prévue à l'article 8516. Il faut remarquer au passage que c'est cette exemption qui nous permettra par la suite d'envisager la possibilité de l'utili-sation d'une SARL comme émettrice des obligations dans le cadre d'une titril'utili-sation avec placement public et cotation des titres en Bourse, puisque la règle de l'article 8 du Règlement de cotation aboutirait autrement à l exclusion de cette forme de

société dont la loi (article 773 CO) limite le capital à un maximum de 2 millions.

Les investisseurs sont supposés être protégés par les mécanismes de rehaussement

du crédit et par la notation de l'émission, notation qui doit être fournie par

Moody s, Standard & Poor's ou Fitch517, et qui est une condition de la cotation. La Bourse suisse exige cependant une description détaillée de la transaction518, en insis-tant particulièrement sur les risques juridiques519, ainsi qu'une attestation du chef de file du syndicat de placement qu'il a obtenu un avis de droit à propos des ques-tions juridiques les plus pertinentes pour la transaction520. Aucune de ces règles n'aménage cependant de véritables moyens de contrôle pour les investisseurs.

516 Cf. SWX, p. 25.

517 Cf. SWX, p. 27. En fait, le règlement mentionnait aussi DCR (autrefois Duff& Phelps), absorbé en 2000 par Fitch.

^ Cf. SWX, pp. 29-35.

5i9 Cf. SWX, p. 34.

"° Cf. SWX, p. 26.

On a vu, en revanche, que le droit étasunien des trusts, avec l'existence de l'acte de trust, l'instauration éventuelle d'un protector et les règles strictes imposées au trustee par le Trust Indenture Act, ou les règles françaises sur le FCC, assuraient une protection bien supérieure des investisseurs - à tel point que le droit français se dispense de prévoir une assemblée des porteurs de parts du FCC.

Jusqu'à présent, nous avons envisagé la SA de droit suisse comme un véhicuïepay-throiigh. On peut cependant supposer que la SA utilisée comme véhicule émette direc-tement ses actions dans le public, achète les actifs à l'initiateur et vive ensuite des flux entrants liés aux actifs titrisés. Cette configuration va même au-delà de la situation d'un véhicule pass-through, puisque le véhicule acquiert une telle indépendance qu'il lui devient même possible de ne rien distribuer aux investisseurs si ceux-ci le déci-dent. A notre avis, on s'éloigne du domaine de la titrisation : une telle opération reviendrait à un investissement en capital dans une société qui aurait pour but l'acquisition de créances. On passerait en quelque sorte de la titrisation à la fondation d'une société assurant certains des services d'un affactureur. La protection des inves-tisseurs minoritaires apparaît minimale. Mais surtout, cette solution est peu sédui-santé pour l investisseur moyen. Nous avons déjà signalé que l'on constate une nette préférence des marchés pour un investissement en titres de dette émis par le véhicule

plutôt qu en titres de propriété sur la fortune du véhicule, préférence d'autant plus

compréhensible que le comportement des titres adossés à des actifs s'apparente à celui

des obligations. Mais apparaît ici un inconvénient supplémentaire : la faible liquidité

des actions d une telle société. En effet, les dispositions adoptées en 1997 par la Bourse suisse sur la cotation des asset-backed securities ne permettent pas de leur assimiler les actions de la société utilisée comme véhicule, laquelle serait soumise aux exigences

ordinaires du Règlement de cotation du 24 janvier 1996 (RC) : trois ans d'existence (article 7) et dotation en capital d au moins 25 millions de francs (article 8). Cette dernière condition ne devrait pas poser de problèmes, puisque la société devrait plus

raisonnablement avoir un capital de plusieurs centaines de millions de francs pour pouvoir acquérir les actifs titrisés lors d'une opération de moyenne importance. En revanche, la première condition serait très gênante, interdisant aux investisseurs de pouvoir espérer revendre leurs actions sur un marché liquide avant plusieurs années.

Dans l'ensemble, cette structure est très lourde par rapport à la modicité de moyens

recherchée dans la titrisation et sort du champ de cette thèse (rien n'interdit que la

société, après avoir acquis les actifs, ne décide de les revendre, de changer son but social et de se lancer dans la sidérurgie ou l'immobilier, puisqu'elle est une SA comme n'importe quelle autre, dirigée par ses organes). Enfin, sur le plan fiscal, la situation

serait entièrement différente de celle de la SA utilisée comme véhicule pay-throngh.

En effet, dans la situation que nous envisageons ici, la personnalité morale de la SA va jouer ici en défaveur des investisseurs, qui devront payer l'impôt sur les dividen-des, alors que le véhicule aura lui-même dû s'acquitter de l'impôt sur le bénéfice. Au total, cette structure apparaît très désavantageuse.

9.2.6 Avantages et inconvénients de la SA comme véhicule de titrisation

Nous résumerons ainsi notre opinion sur la société anonyme de droit suisse par rapport aux qualités attendues d'un véhicule de titrisation, telles que nous les avons

décrites dans les généralités sur le véhicule de titrisation (chapitre 6) :

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