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Partie I. Le cadre de formation du prix des services d’eau délégués en France

Chapitre 5 Les premières pistes sur les déterminants du prix de l’eau

2. Le prix et le mode de gestion

La variabilité du prix a fait l'objet d'une étude (Saussier, Ibid., 2004) permettant de la mettre en relation avec différentes caractéristiques : les modes de gestion, l'origine, la qualité et la quantité de la ressource en eau, la topographie du service, la consommation moyenne d'un abonné, la concentration de l'habitat, le fait que la région soit touristique ou non, et finalement la population (voir encadré 4).

En revanche, les différents modes de gestion incluent des prestations différentes, et n'ont pas la même structure de coût. Ainsi, il est difficile de conclure sur l'efficacité relative des différents modes de gestion.

A partir des données de l'IFEN-Scees sur l'année 1998, l'INRA a réalisé un document (Carpentier, Ibid., 2005) permettant de mettre en avant à la fois l'influence des éléments de contexte technique, des modes de gestion, en incluant l'endogénéité du choix de ce dernier, et l'organisation des services. Les estimations économétriques portent à la fois sur le choix du mode de gestion et sur le prix des services (Encadré 5), en prenant en

Encadré 4 - L'impact du mode de gestion (Saussier, Ménard et al., 2004)

Le coefficient d'ajustement de la régression (R² ajusté) est de 0,46, ce qui montre une relation de bonne qualité. La modélisation linéaire du prix (prix pour 120 m3 consommés, uniquement la part "eau potable") montre des influences fortes et significatives, toutes choses égales par ailleurs :

- Par rapport à une situation où le seul traitement de potabilisation est une désinfection, le type de traitement A2 semble augmenter le prix (environ +0,07€/m3), comme les traitements de type mixte avec A3 ou A3 uniquement (moins significatif ; resp. environ +0,08 et +0,06€/m3)

- Une origine de l'eau souterraine réduit le prix (environ -0,11€/m3)

- Le renouvellement de canalisations augmente le prix (environ + 0,08 €cents/m3/km)

- L'interconnexion du réseau avec des collectivités voisines augmente le prix (environ + 0,03€/m3) - L'organisation en intercommunalité a une influence non négligeable et très significative (+ 0,18 €/m3) - Une augmentation de la consommation individuelle réduit très significativement le prix de la facture

120 m3; l'importation d'eau en gros réduit aussi la facture.

- Il est à noter que la topographie du réseau (représentée par le nombre de stations de reprises) n'influe pas significativement sur le prix, comme les volumes perdus et la longueur du réseau. Tous les modes de gestion ont un impact positif très significatif sur le prix, relativement à la régie. En prenant en compte l'endogénéité du choix du mode de gestion, l'affermage induit une hausse de 10€ de la facture (soit + 0,08 €/m3 ou 7% de la facture moyenne). Le choix du mode de gestion n'est pas déconnecté des paramètres de complexité technique par exemple : selon les conclusions des auteurs, la régie serait préférée dans les cas où les traitements sont complexes mais où la population à desservir est importante, et où les traitements sont simples avec une population faible.

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compte cet effet de sélection endogène. Les communes de plus de 10 000 habitants présentent des résultats analogues aux petites, mais de manière moins tranchée.

Une étude économétrique

similaire (Bouba-Olga,

Chauchefoin et al., 2006) explique que le choix de l'affermage serait plus fréquent notamment dans le cas d'une intercommunalité, d'un traitement complexe, d'une forte densité de réseau et du caractère touristique de la collectivité.

Selon M. Boyer, (2006), l'efficacité technique (selon le terme économétrique) des services en régie n'est pas significativement différente de

celle des services en

délégation. Les services les plus efficaces et les moins efficaces sont en régie, dans cet échantillon. Selon la même source, le choix de la délégation est très bien Encadré 5 - Principaux résultats de l'étude de

l'INRA - LERNA (Carpentier, Nauges et al., 2005)

- Influences sur le choix de la délégation

Paramètre Influence sur le choix de la délégation

Contexte

Classement en Zone vulnérable +

Captages non protégés +

Traitement élaboré (A2) +

Aucun traitement -

Commune littorale lacustre -

Commune littorale Adour-Garonne ou Rhône-Méditerranée-Corse +

Part de résidences secondaires +

Population en 1990 (log) -

Groupement intercommunal +

Revenu par habitant (1998) +

Organisation de la production et de la distribution : facteurs techniques

Nombre d'interconnexions +

Nombre de stations de surpression/km +

Nombre de réservoirs/abonné -

Part du Volume distribué aux abonnés domestiques +

Volume importé/Volume distribué +

Longueur du réseau NS

Longueur du réseau renouvelé -

Longueur des extensions de réseau -

Volume vendu par abonné domestique -

- Influences sur le prix

Paramètre Influence sur le Prix

Contexte

Prélèvement d'eau superficielle +

Captages non protégés -

Traitement élaboré (A2) +

Aucun traitement -

Commune touristique +

Population en 1990 (log) NS

Groupement intercommunal +

Organisation de la production et de la distribution : facteurs techniques

Nombre d'interconnexions +

Nombre de réservoirs/abonné -

Part du Volume distribué aux abonnés domestiques +

Volume importé/Volume distribué +

Longueur du réseau NS

Longueur du réseau/abonné +

Programme de renouvellement prévu +

Volume vendu par abonné domestique -

Mode de gestion

Délégation +

Des influences supplémentaires de la concentration géographique des régies ont été mises en évidence : l'absence de concurrence par les régies semble augmenter le prix.

Le tableau ci-dessous présente les différences de prix selon les modes d'organisation, prenant en compte la variété des contextes (exprimée au travers des variables du tableau ci-dessus).

< 10 000 hab. > 10 000 hab Effet moyen "délégation" +13,8% +5,2% (NS) Pour les services délégués,

impact de la gestion publique - 5,8% (NS) +0,5% (NS) NS = Non significatif CemOA : archive ouverte d'Irstea / Cemagref

expliqué par 7 variables79. Des caractéristiques impactent fortement les prix en délégation alors qu'elles n'ont pas d'impact sur les prix de la régie. Les auteurs expliquent que l'amélioration de la qualité de service (une augmentation du rendement du réseau) implique une baisse de prix en délégation, ce qui n'est pas observé en régie.

En revanche, la comparaison des deux modes de gestion principaux en France (à savoir la régie et la délégation) est soumise à de nombreuses restrictions (Babusiaux, Ibid., 2005). Dans cette mesure, la validité des études économétriques est contestée, et, en toute rigueur, "(…) seule une analyse, au cas par cas, peut apporter une réponse éclairée

à la comparaison des prix" (Mahevas, 2003a). De plus, il est difficilement concevable

qu'un choix économique soit fait entre le prix estimé de la régie et celui de la délégation sans qu'une procédure Sapin ait été tentée : c'est uniquement à l'issue de cette procédure que les prix sont définis, en délégation. La collectivité n'est donc à même de comparer son estimation de la régie aux prix atteints par les opérateurs qu'au terme de la procédure. Le choix ne se place pas nécessairement sur le terrain économique, mais peut-être plus sur celui de la sécurité et de la garantie de compétence.

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consommation NS (Non significatif), rendement NS, nombre d'abonnés par km de réseau NS, intercommunalité -, capacités de production/volume distribué -, capacités de stockage/volume distribué -, capacités de pompage/volume distribué +

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