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Le test des comètes (ou “single cell gel electrophoresis assay”) est une technique d’électrophorèse sur gel d’agarose mise au point par Singh et al. (1988) permettant de détecter des fragmentations de l’ADN de cellules individualisées (figure 18). L’analyse se fait sur des cellules incluses dans un gel d’agarose, auxquelles on applique un traitement aboutissant à une digestion de l’intégralité du matériel extranucléaire (membrane nucléaire comprise) sous l’action de détergents et de sels à forte concentration. L’ADN se trouve alors réduit à une structure “pseudo-nucléaire” résiduelle : le nucléoïde (McKelvey-Martin et al., 1993). Suite à cette lyse, l’ADN est déroulé par rupture des liaisons hydrogènes à pH > 13. L’ADN ainsi préparé est ensuite placé dans un champ électrophorétique permettant la migration différentielle des fragments (les fragments, chargés négativement, cheminant donc vers l’anode à une vitesse inversement proportionnelle à leur longueur). Les molécules d’ADN intactes vont quant à elles peu migrer sous l’effet du champ électrique (du fait de leur haut poids moléculaire), et vont donc décrire une sphère compacte.

Echantillon de départ : Suspension cellulaire (érythrocytes, hépatocytes ou cellules spermatiques)

Etape 1 : Inclusion des cellules au sein de différentes couches de gels d’agarose successivement déposés et laissés polymérisés sur une lame de

microscopie.

Etape 2 : Lyse des cellules (1 h à l’obscurité).

Etape 3 : Déroulement des molécules d’ADN (40 min toujours à l’obscurité). Etape 4 : Electrophorèse (20 V (soit 0,7 V/cm); 300 mA, 24 min) à l’obscurité. Etape 5 : Neutralisation puis marquage de l’ADN par du bromure d’éthidium.

Un ADN endommagé va, quant à lui, présenter des fragments de taille hétérogène et ainsi voir migrer ses fragments les plus courts en dehors de cette sphère (du fait d’une vitesse de migration plus importante), formant ainsi un “halo” d’ADN s’étirant en direction de l’anode. Les figures obtenues sont alors tout à fait comparables à des comètes.

Il existe différentes versions de l’essai, avec des protocoles décrivant des conditions de déroulement et d’électrophorèse alcalines ou neutres, suivant le type de dommage que l’on cherche à mettre en évidence (Olive, 2002). En conditions alcalines, les ruptures de chaîne simple et double brins ainsi que les sites alcali-labiles (attestant de la modification chimique de bases azotées) peuvent être révélés. Ceci est expliqué par le fait que, comme précisé précédemment, on observe un désappariement des bases de l’ADN en milieu alcalin par rupture des liaisons hydrogènes. Les brins vont alors migrer indépendamment, permettant ainsi de faire apparaître les lésions mono- ou bicaténaires. En revanche, la version neutre de l’essai n’entraîne pas cette dissociation des deux brins qui vont alors migrer conjointement. Seules les cassures double brins, évènements généralement beaucoup plus rares que les cassures simple brin, seront alors mises en évidence.

Quel que soit le protocole utilisé, alcalin ou non, le marquage de l’ADN après migration se fait généralement au moyen d’un fluorochrome de type intercalant de base tel que le bromure d’éthidium ou l’iodure de propidium (Rojas et al., 1999). Le bromure d'éthidium (EtBr), souvent utilisé, présente une structure aromatique plane qui lui permet de s'intercaler entre les paires de bases. La formation du complexe ADN-EtBr s'accompagne d'une relaxation de la double hélice, et d'une émission de lumière (fluorescence) dans le rouge-orange lorsque celui-ci est excité. Les versions alcalines de l’essai, conduisant à une migration monocaténaire des molécules d’ADN nécessitent donc une étape de neutralisation après électrophorèse, permettant un réappariement partiel des brins et ainsi d’assurer l’intercalation du fluorochrome (Tice et al., 2000).

Différentes méthodes de quantification des dommages visualisés dans cet essai ont été développées. Tout d’abord, un système d’estimation visuelle des dommages a été utilisé, s’appuyant sur une discrimination en différentes classes suivant l’apparence des comètes (et donc suivant le niveau d’endommagement). Un score étant attribué à chaque classe, une estimation relative du dommage peut ensuite être réalisée. Des mesures relatives à la longueur de la queue de

la comète par rapport au rayon de la tête peuvent également fournir des données intéressantes pour rendre compte du niveau de dommage. Du fait de l’intérêt grandissant pour cette technique, divers logiciels informatiques associés à des systèmes vidéo couplés aux microscopes à épifluorescence, ont permis l’émergence de nouveaux outils, améliorant la résolution de l’essai (figure 19). Il est ainsi possible de s’intéresser tout particulièrement à la translation de la fluorescence de la tête de la comète vers sa queue. Le “tail moment”, produit du pourcentage d’ADN dans la queue (“tail DNA”) et de sa longueur (“tail length”), est par exemple un paramètre très intéressant pour la quantification du niveau de dommage (McKelvey-Martin et al., 1993).

Figure 19. Analyse d'une comète par un système informatique (Komet 4.0) couplé à une caméra digitale installée sur un microscope à épifluorescence. Cadre du bas : La comète est positionnée dans le cadre de lecture (représenté en noir), le logiciel définit alors trois repères (en bleu, rouge et vert) délimitant les différentes parties de la comète (tête et queue). Cadre du haut : Profil d’intensité de fluorescence généré à partir de la figure précédente. En abscisse : longueur (en µm) de la comète et de ses différentes parties. En ordonnée : intensité de fluorescence du signal, tracé bleu = tête de la comète, tracé vert = queue.

7.1.2 - Protocole

Cet essai a été réalisé sur trois types cellulaires : des érythrocytes d’une part, et les cellules spermatiques et hépatiques obtenues à l’issue d’un isolement cellulaire d’autre part (cf. paragraphe 4.2.2.2). Dans le cas des cellules sanguines, l’essai a été pratiqué à partir de prélèvements congelés (-80 °C pendant plusieurs semaines). Dans le cas des cellules obtenues après isolement cellulaire, aucune congélation n’a pu être possible du fait de leur fragilisation par le protocole de dissociation tissulaire. Leur analyse par l’essai des comètes a donc dû être réalisée

extemporanément après isolement. Quel que soit le modèle cellulaire concerné, la densité cellulaire des suspensions a été normalisée de façon à approcher les 106 cellules/mL. Ainsi, les suspensions érythrocytaires congelées ont dû subir une dilution d’un facteur 10 dans du PBS après décongélation lente sur bain de glace. Les suspensions hépatiques et testiculaires ont, quant à elles, été normalisées à l’issue du protocole d’isolement (cf. paragraphe 4.2.2.2). Le protocole auquel les cellules ont alors été soumises est le suivant.

Quatre vingt dix microlitres d’un mélange à parts égales de suspension cellulaire et d’agarose à bas point de fusion (solution à 1 % préparée dans du PBS) sont déposés sur une lame microscopique (pré-enduite d’une solution à 0,8 % d’agarose à point de fusion normal). Une lamelle est ensuite posée sur la préparation afin de l’étaler de manière homogène sur la surface de la lame. Le tout est alors placé sur un plateau métallique flottant sur un bain de glace afin d’accélérer la polymérisation du gel. Après avoir retiré la lamelle, 90 µL d’agarose à bas point de fusion (solution à 0,5 % dans du PBS) sont redéposés, afin d’assurer une protection du mélange cellules-agarose. Une nouvelle lamelle est ajoutée avant de réitérer le protocole de polymérisation du gel d’agarose. Une fois la lamelle retirée, la lame est prête.

Les lames sont ensuite placées dans une cuve et recouvertes d’une solution de lyse préparée extemporanément à partir d’une solution mère (NaCl 2,5 M, EDTA disodique 100 mM, Tris 10 mM, ajustée à pH 10 avec du NaOH) à laquelle on ajoute un détergent, le Triton X100 (1 % final), et du DMSO (10 % finaux). La lyse est réalisée pendant 1h et à l’obscurité, tout comme la suite du protocole (l’ADN ainsi mis à nu étant hautement photosensible).

Après la lyse, les lames sont transférées dans la cuve à électrophorèse et sont immergées durant 40 min dans un tampon de déroulement (NaOH 0,3 M, EDTA 1 mM). A l’issue du déroulement, le générateur basse tension (20 V) est activé, délivrant ainsi le courant nécessaire à l’établissement du champ électrophorétique (0,7 à 1 V/cm, 300 mA). La durée de cette électrophorèse est fixée à 24 min.

Afin d’obtenir une structure bicaténaire des fragments d’ADN au sein du gel après migration, un tampon de neutralisation (Tris 0,4 M ajusté à pH 7,5 avec de l’HCl concentré) est versé délicatement sur les lames, à deux reprises, à 5 min d’intervalle.

Le dépôt de 50 µL d’une solution de bromure d’éthidium (20 ng/mL) permet ensuite le marquage des lames en vue de leur analyse sous un microscope à épifluorescence (utilisant une lampe à vapeur de mercure).

Une caméra CDD couplée à un système informatique doté d’un logiciel d’acquisition (Komet 4.0, Kinetic Imaging Ltd) permet ensuite de procéder à l’acquisition des résultats (“tail length”, “tail DNA” et “tail moment” notamment).