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5.2.2.1 - Les organismes benthiques

Les contaminants liés aux sédiments peuvent avoir des effets nocifs sur les macroinvertébrés benthiques et les poissons qui s’alimentent d’invertébrés contaminés. Il existe peu de données sur la toxicité aigüe de l’uranium vis-à-vis des organismes benthiques. Les rares études menées dans ce domaine concernent des invertébrés (mollusques bivalves, crustacés amphipodes, larves d’insectes, etc.).

Le rapport d’Environnement Canada (2003) évoque une étude menée sur des adultes et des juvéniles de Hyalella azteca exposés pendant 14 j à des sédiments contaminés par de l’uranium. Cette étude a permis de calculer une CL20 de 15 mg U/kg de sédiments (poids sec) et une CL50 de 57 mg U/kg de sédiments (poids sec) pour les juvéniles tandis que la CL50 et la CL20 étaient

respectivement de 436 et de 116 mg U/kg pour les adultes. Les amphipodes juvéniles se sont donc avérés beaucoup plus sensibles à l’uranium que les adultes.

Par comparaison, des essais de toxicité de sédiments contaminés à l’uranium d’une durée de 10 j ont permis d’obtenir une CL50 et une CL25 pour Chironomus tentans de respectivement 10,5 et 4,8 g U/kg (poids sec). Au cours de la même étude, des effets sur la croissance ont été notés à des CE50 et CE25 de respectivement 2,7 et 1,4 g U/kg (Environnement Canada, 2003).

5.2.2.2 - Les organismes pélagiques

Pour ce qui concerne les espèces évoluant au sein de la colonne d’eau, le nombre d’études s’élargit considérablement. Les différents travaux portent notamment sur des modèles d’invertébrés (principalement les daphnies) et de vertébrés (poissons).

Cas des organismes zooplanctoniques

Parmi les études répertoriées dans l’article de synthèse de Sheppard et al. (2005) faisant notamment état de la toxicité de l’uranium vis-à-vis des invertébrés d’eau douce, les valeurs de toxicité déterminées dans l’étude de Pickett et al. (1993) seraient les plus drastiques. Ainsi, ces auteurs dégagent de leurs travaux menés sur Ceriodaphnia dubia une valeur de CE25 à 7 j égale à 3 µg/L d’uranium. Cette valeur est en effet la plus basse parmi celles inventoriées par Sheppard et al. si l’on considère l’ensemble des données relatives aux invertébrés dulçaquicoles. De manière générale, les autres études menées sur des cladocères donnent des valeurs de CE25 comprises entre 15 et 900 µg/L (Poston et al., 1984 ;Hyne et al., 1993 ; Barata et al., 1999 ;Semaan et al., 2001).

En termes de létalité, une étude de Trapp (1986) menée en eau douce chez Daphnia pulex mentionne une CL50 à 48 h de 220 μg/L et une CL50 à 96h de 150 µg/L. Bywater et al. (1991) ont quant à eux signalé des CL50 à 24 h allant de 0,14 à 0,9 mg/L pour quatre espèces de cladocères dans une eau de faibles dureté et alcalinité.

Plus récemment, Liber et George (2000 - citée par Environnement Canada, 2003) ont étudié la toxicité de l’uranium pour Ceriodaphnia dubia dans l’eau d’un ruisseau dont la dureté naturelle est d’environ 27 mg/L de CaCO3 et le pH de 7,3. Dans cette eau, la CL50 à 48 h de C. dubia était de 430 μg U/L. Au cours d’essais de toxicité chronique de 7 j sur l’eau du ruisseau ajustée à une dureté de 60 mg/L de CaCO3, une concentration seuil avec effet sur la reproduction de 19 ± 2 μg

U/L a été obtenue. Après ajustement de l’eau d’exposition à une dureté de 120 mg/L de CaCO3, ces valeurs de toxicité ont été notablement réduites, la concentration seuil avec effet sur la reproduction étant alors de 218 μg U/L.

Cette variabilité des résultats obtenus en fonction des qualités d’eau d’exposition rappellent donc que les concentrations élevées de calcium ou de magnésium peuvent influer sur la toxicité de l’uranium et doivent donc être pris en compte dans l’interprétation des données toxicologiques.

Cas des poissons

L’état des connaissances actuelles sur la toxicologie aigüe de l’uranium chez les poissons repose sur de nombreuses études (Tarzwell et Henderson, 1960 ; Davies, 1980 ; Parkhurst et al., 1984 ; Vinot et Larpent, 1984 ; Bywater et al., 1991 ; Holdway, 1992 ; Hamilton, 1995 ; Buhl et

Hamilton, 1996; Labrot, 1996 ; Hamilton et Buhl, 1997 ; Sheppard et al., 2005). Les CL50 à 96 h

varient de 0,7 mg d’U/L (Bywater et al., 1991) à 135 mg d’U/L (Tarzwell et Henderson, 1960) en fonction de facteurs biotiques (espèce, stade de maturité) et abiotiques (température, dureté, pH).

Comme pour les invertébrés, la toxicité de l’uranium chez les poissons semble fortement dépendante de la dureté de l’eau d’exposition. Tarzwell et Henderson (1960) ont rapporté des CL50

à 96 h chez le cyprinidé Pimephales promelas variant de 2,8 mg/L (pour une eau caractérisée par une faible dureté : 20 mg/L) à 135 mg/L (pour une eau très dure : 400 mg/L). Bywater et al. (1991) ont quant à eux constaté des CL50 à 96 h variant de 0,73 à 3,46 mg d’U/L chez six espèces de poissons tropicaux (Melanotaenia nigrans, Melanotaenia splendida inornata, Craterocephalus marianae, Pseudomugil tenellus, Ambassis macleayi et Mogurnda mogurnda). Cette étude a impliqué deux stades de vie différents (7 et 90 j post-éclosion) et a été réalisée dans une eau très douce (dureté : 4 mg/L). Holdway (1992) a observé des résultats comparables chez Melanotaenia splendida inornata et Mogurnda mogurnda, les CL50 à 96 h variant de 1,39 à 3,29 mg d’U/L, pour une eau également très douce (3,2 mg/L). Parkhurst et al. (1984) ont quant à eux trouvé une CL50 à 96 h chez un salmonidé (Salvelinus fontinalis) de 5,5 mg d’U/L dans une eau douce (dureté : 35 mg/L) mais de 23 mg d’U/L dans une eau dure (dureté : 208 mg/L). L’étude de Hamilton (1995) a quant à elle permis d’obtenir une CL50 à 96 h de 46 mg/L commune à trois espèces de poisson (Ptychocheilus lucius, Xyrauchen texanus et Gila elegans) et pour trois stades de vie différents et

une eau dure (dureté : 110 mg/L). Une étude plus récente de Labrot et al. (1996) impliquant le Danio rerio, donne une valeur de CL50 à 96 h de 3,02 mg d’acétate d’uranyle/L (pour une eau caractérisée par une dureté de 178 mg/L).

Cette influence de la dureté des eaux d’exposition sur les données de toxicité aigüe de l’uranium chez les poissons a notamment été résumée dans l’article de Sheppard et al. (2005). Une corrélation entre le critère de létalité et le paramètre de dureté (mg/L de CaCO3) a ainsi été établie sur la base de la fonction mathématique suivante : CL10 = -0,52 + 0,96 x log10(dureté).

Ces données de toxicité aigüe permettent souvent de classer les contaminants les uns par rapports aux autres. Selon différentes classifications et notamment celle de Passino et Smith (1987) qui vise à ranger les valeurs de CL50 à 96 h en mg/L, on observe quatre niveaux de toxicité : extrêmement toxique de 0,01 à 0,1 ; hautement toxique de 0,1 à 1 ; modérément toxique de 1 à 10 et quasiment non toxique de 10 à 100). L’uranium, du point de vue de sa toxicité aigüe est donc considéré comme un élément modérément toxique chez les poissons.