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Principales fonctions de sûreté à long terme

3.4 Principales fonctions de sûreté du stockage

3.4.3 Principales fonctions de sûreté à long terme

Les fonctions de sûreté dites « à long terme », c'est-à-dire en phase de post-fermeture, constituent la véritable spécificité du stockage. On se limite ici à celles de plus haut niveau, très largement indépendantes des architectures de stockage retenues in fine. On exposera la manière dont elles sont mises en œuvre, éventuellement en les détaillant en sous-fonctions de sûreté, au paragraphe 3.7.

3.4.3.1 Isoler les déchets des phénomènes de surface et des intrusions humaines

Il s’agit là de la première fonction de sûreté du stockage, qui fonde l’un des principes d’une installation en formation géologique profonde. Il s’agit de privilégier une solution de gestion dans laquelle les déchets sont maintenus hors d’atteinte des populations, afin d’empêcher que celles-ci se trouvent exposées à la radioactivité (exposition au rayonnement que les déchets émettent ou risque d’ingestion / inhalation), et ce pendant des durées en rapport avec la décroissance de la radioactivité.

On cherche donc à éviter que des phénomènes de surface tels que les événements climatiques, l’érosion, les inondations, ainsi que des activités humaines « banales », ne conduisent à de telles situations. En ce sens, une installation d’entreposage peut répondre à la même fonctionnalité, mais sur des périodes qui ne sont pas réputées pérennes. Le principe du stockage géologique est de réaliser cette fonction de manière passive, c’est-à-dire sans nécessiter de surveillance au-delà d’une période définie.

Il s’agit là d’un objectif général, qui ne vise pas de phénomène de surface ou de type d’action humaine bien spécifique. Pour autant, on ne peut véritablement déterminer que les déchets sont à l’abri de telles atteintes qu’après avoir conduit une analyse de sûreté permettant d’identifier largement les différentes actions possibles, leur vraisemblance dans le contexte particulier considéré, et leurs effets potentiels.

Certains types d’action, telle une intrusion humaine fortuite à la suite d’un forage profond, ne peuvent jamais être totalement exclus bien que leur probabilité d’occurrence, ainsi que leurs conséquences potentielles, puissent être réduites.

3.4.3.2 Préserver la mémoire du stockage

La règle fondamentale de sûreté RFS III-2.f précise que la protection des personnes doit être assurée

« sans dépendre d'un contrôle institutionnel sur lequel on ne peut pas se reposer de façon certaine au-delà d'une période limitée (...) (500 ans) ». Cela n’est pas contradictoire avec la volonté de maintenir la mémoire du site aussi longtemps que possible.

Le souci du maintien de la mémoire commence dès la phase d’exploitation où il s’agit d’assurer la préservation des connaissances et des compétences techniques nécessaires à la gestion des installations. Dans un second temps, après le stockage des colis de déchets, la mémoire peut constituer un élément de défense en profondeur permettant notamment d’éviter les risques d’intrusion à l’intérieur du stockage, ou d’y pénétrer en toute connaissance de cause. Sur ce dernier point, elle se rattache à la fonction précédente, mais couvre également un objectif plus large. Nonobstant, l’oubli à long terme du stockage, qui ne peut être totalement exclu, ne doit pas avoir de conséquence néfaste pour la sûreté.

3.4.3.3 Fonctions de sûreté visant à protéger l’homme et l’environnement des relâchements d’éléments toxiques (radionucléides et toxiques chimiques)

De même que les déchets doivent être protégés des phénomènes qui se produisent en surface, l’environnement de surface doit également être protégé contre une possible remontée des radionucléides contenus dans les déchets, ou des toxiques chimiques. Les fonctions qui visent à protéger l’environnement de surface des atteintes liées aux déchets consistent à maîtriser les voies de transfert qui peuvent conduire à long terme les éléments nocifs (radionucléides et toxiques chimiques) des déchets jusqu’à l’homme.

Ces voies sont potentiellement variées. Il s’agit de :

- la voie aqueuse, les éléments étant susceptibles de se mettre en solution et de cheminer jusqu’à la surface ;

- la voie gazeuse, certains radionucléides pouvant exister et migrer sous cette forme ;

- la voie solide uniquement dans le cas où un événement particulier provoquerait une remontée d’une partie des déchets à la surface, du fait d’une intrusion humaine dans la plupart des cas.

Pour ce qui relève de la voie gazeuse à long terme, la majorité des radionucléides gazeux sont à vie courte au regard des temps de transfert dans la formation (krypton 85, tritium…). Parmi les éléments à vie longue, seuls l’iode 129, le chlore 36 et le carbone 14 sont susceptibles de migrer significativement. Les deux premiers ont des propriétés telles que, dans les conditions qui prévalent au sein du stockage, ils seront mis en solution rapidement. Seul le carbone 14 pourrait se maintenir en phase gazeuse plus longtemps bien qu’en faible quantité.

Cette question sera abordée plus avant au chapitre 6, paragraphe 6.2.10. À ce stade, on peut cependant constater qu’au regard du faible inventaire radiologique concerné et de la probabilité importante que les gaz se dissolvent au sein du stockage, la voie gazeuse n’apparaît pas une voie très significative de transfert des radionucléides. Elle ne nécessite pas de mesure de conception spécifique. Cela ne préjuge pas de dispositions d’une autre nature, visant à gérer les gaz inactifs qui pourront s’accumuler dans le stockage (gaz de corrosion, gaz de radiolyse, etc.). De manière plus générale, on emploiera dans le reste du dossier le terme « hydraulique » pour désigner les questions faisant appel à la fois aux voies de transferts par l’eau et par le gaz, la prise en compte de ces deux modes de transfert conduisant à des dispositions de conception similaires. Par défaut, c’est l’eau qui est traitée ; la spécificité des gaz est soulignée autant que de besoin au fil du texte.

La conception s’oriente autour de la maîtrise des transferts de radionucléides par les voies hydrauliques, et plus spécifiquement par l’eau. Ceux-ci peuvent se produire par convection, c’est-à-dire par un phénomène d’entraînement des radionucléides accompagnant un flux d’eau, ou par diffusion, c’est-à-dire par un mouvement brownien des éléments dans l’eau.

z « S’opposer à la circulation d’eau »

La diffusion des éléments est inévitable à terme, lorsque les colis de stockage n’assurent plus un rôle d’isolation suffisant. Il est en revanche possible de limiter très fortement la convection, c'est-à-dire les circulations d’eau, au sein du stockage (voir Figure 3.4-1). On a vu au paragraphe 3.2.2 que le Callovo-Oxfordien présentait des propriétés favorables à cet égard.

La limitation de la convection contribue à la protection du stockage dans la première phase qui suit sa fermeture, au cours de laquelle la roche, puis les composants du stockage lui-même, se resaturent.

L’absence de mouvements convectifs contribue à une cinétique lente et mieux maîtrisée des processus de dégradation. La limitation de la convection est également favorable à plus long terme, vis-à-vis du transfert des radionucléides ; dans un milieu relativement perméable, elle pourrait devenir comparable ou plus rapide que la diffusion.

Figure 3.4-1 S’opposer à la circulation d’eau

z « Limiter le relâchement des radionucléides et les immobiliser dans le stockage » Il s’agit de limiter le relâchement des radionucléides, et par extension des toxiques chimiques, c’est-à-dire d’empêcher leur mise en solution, et quand cela devient inévitable, de favoriser leur précipitation ainsi que les formes chimiques peu mobiles des solutés (ce que l’on désigne par le terme

« immobiliser »). Cette fonction est généralement effective en champ proche, au plus près des colis, là

où les conditions physico-chimiques sont réunies pour qu’elle s’accomplisse (voir Figure 3.4-2). Cet objectif est cohérent avec la pratique plus générale en termes de sûreté, de gestion du risque « au plus près de la source ». Cette fonction est maintenue tout au long de la vie du stockage, mais prend différentes formes selon les échelles de temps, comme on a pu l’évoquer dans l’exemple cité en introduction du paragraphe 3.3.

Cette fonction fait appel, au moins dans les premières phases, aux propriétés favorables des colis de déchets. Elle renvoie donc notamment à la nécessité de protéger les colis de déchets de l’eau, et de les placer dans des conditions physico-chimiques favorables.

Figure 3.4-2 Limiter le relâchement des radionucléides et les immobiliser dans le stockage

z « Retarder et atténuer la migration des radionucléides »

Une fois les radionucléides en solution, et moyennant le fait que la première fonction de sûreté est efficace, le mécanisme de transfert dominant des radionucléides, et par extension des toxiques chimiques, doit être la diffusion. Il est possible de les retarder et d’atténuer leur transfert.

« Retarder » signifie augmenter la durée du transfert vers la surface, ce qui permet de réduire l’impact du fait de la décroissance radioactive. « Atténuer » la migration doit se comprendre dans une double acception, à la fois dans le temps et dans l’espace. Pour un temps de parcours moyen donné et à quantité constante, un flux de radionucléides sera d’autant moins nocif qu’il s’étend sur une plus grande distance et que son arrivée dans la biosphère est répartie sur une période plus longue (voir Figure 3.4-3 et Figure 3.4-4).

Figure 3.4-3 Illustration schématique du retard et de l’atténuation apportés sur une concentration de radionucléides en solution, en fonction du temps

Cette fonction n’intervient pas tant que la fonction « limiter le relâchement des radionucléides et les immobiliser dans le stockage » est totalement efficace (puisque la diffusion n’a pas encore lieu) mais commence à agir dès les premiers relâchements. Elle est disponible également en cas de perte prématurée de confinement, sous l’effet d’un incident. On la dit pour cette raison « latente » dans les premiers temps du stockage (voir cette notion au paragraphe suivant).

Figure 3.4-4 Limiter et atténuer la migration des radionucléides Retard

Décroissance radioactive

temps

Atténuation

temps

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