• Aucun résultat trouvé

Introduction sur la conception du stockage

La conception du stockage répond à une démarche classique, qui consiste à identifier les fonctions à remplir par l’installation et à les décliner en solutions techniques. Cette déclinaison est guidée par différents objectifs, dont certains sont bien connus dans d’autres domaines que le stockage de déchets radioactifs. D’autres lui sont en revanche spécifiques.

Parmi les premiers, on compte les problématiques de constructibilité, maîtrise des coûts, gestion des flux de personnels, de matériels, de déchets. On s’intéressera plus particulièrement dans le cadre du présent tome à la sécurité des travailleurs et du public lors des opérations de construction et d’exploitation du stockage, qui renvoie à des problématiques déjà connues dans le cadre des travaux souterrains ou dans les installations manipulant des déchets de haute activité. Seule la combinaison de ces deux aspects au sein d’une même installation constitue en tant que telle une spécificité du dossier.

Deux problématiques sont en revanche entièrement spécifiques de la conception d’un stockage en formation géologique profonde. Il s’agit d’une part de l’exigence de réversibilité du stockage (voir encadré 1). Un document spécifique est consacré à l’analyse des différents niveaux de réversibilité [32] et aux dispositions à prendre pour les assurer. On évoquera ces aspects ici en tant que de besoin, mais ils ne sont pas directement l’objet du chapitre. On s’attache essentiellement à montrer qu’il n’y a pas d’incompatibilité entre cette exigence et la sûreté (voir chapitre 6).

Encadré 1 La réversibilité du stockage

Nota : cet encadré présente de manière très sommaire la manière dont l’Andra a pris en compte l’exigence de réversibilité dans les études. Le lecteur spécifiquement intéressé par ces questions est invité à se reporter au tome « architecture et gestion du stockage géologique » du dossier 2005 [22], qui traite plus en profondeur de ces questions.

L’exploitation réversible d’un éventuel stockage peut être définie comme la possibilité d’un pilotage progressif et flexible du stockage qui laisse aux générations futures une liberté de décision. Dans cette optique, le processus de stockage peut être décomposé en une succession d’étapes qui ménage, de la réalisation des premiers modules jusqu’à la fermeture éventuelle d’un module ou d’une zone de stockage, la possibilité d'un temps d'attente et d'observation, avant de décider de passer à l'étape suivante ou de revenir en arrière. Le franchissement d’une étape n'est pas un choix définitif, mais un choix raisonné, fait en toute connaissance des paramètres scientifiques, techniques, économiques, sociaux et environnementaux et des conséquences induites par le passage d’une étape à l’autre. Chaque phase n’a par conséquent pas une durée prédéfinie et impérative. La réversibilité implique de laisser au futur exploitant du stockage une latitude sur la durée des différentes étapes successives.

La réversibilité renvoie ainsi à la recherche d’une approche flexible et adaptable dans le temps et peut être appréhendée en terme de niveaux. Pour proposer une telle approche, les études et recherches de l’Andra ont consisté à :

- analyser les principales phases de la vie d’un stockage et les échelles de temps associées, afin de déterminer les étapes clefs qui nécessitent une intervention humaine ;

- imaginer une gestion du stockage par étapes, avec des jalons décisionnels. Le passage d’une étape à l’autre permettrait de rendre le stockage de plus en plus passif, tout en ne diminuant que graduellement le niveau de réversibilité et en conséquence les charges de surveillance et de maintenance.

L’Andra a pris ces objectifs en compte dans les options de conception d'un stockage proposées, au travers notamment d'une architecture modulaire, d'une recherche de simplification des opérations menées au fond, de dimensionnements et de choix de matériaux durables. La réversibilité ne correspond, pour autant, à aucun compromis vis-à-vis des objectifs de sûreté : aucune disposition technique pouvant perturber significativement une fonction de sûreté n'est retenue pour un motif de réversibilité.

La réversibilité est aussi rendue possible par la connaissance de l'évolution de l'état des ouvrages et la définition de moyens d’actions, sur une échelle de temps a minima séculaire mais pouvant être plus longue le cas échéant : cela a conduit à étudier des dispositions opérationnelles pour la gestion du stockage, notamment la reprise des colis, ainsi que des moyens d'observation qui pourraient être implantés dans les ouvrages.

D’autre part, le concepteur doit considérer l’évolution à long terme du stockage, qui doit être sûre sans intervention humaine au-delà d’une période de surveillance institutionnelle nécessairement limitée.

Cela implique que l’évolution des déchets, de la roche hôte et des matériaux constituant le stockage permette d’assurer une telle sûreté. Pour cela, trois aspects complémentaires sont à aborder :

- les déchets doivent présenter autant que possible des caractéristiques favorables à la sûreté. Le traitement et le conditionnement des déchets actuellement produits relèvent de la responsabilité de leurs producteurs, qui dialoguent avec l’Andra dans le cadre des études de faisabilité du stockage.

Certains conditionnements ont été prévus, dès l’origine, en vue d’une gestion à long terme (par exemple, la vitrification des produits de fission) ; dans d’autres cas, notamment pour les combustibles usés qui ne sont pas considérés comme des déchets, la forme physico-chimique sous laquelle ils se présentent peut offrir des caractéristiques favorables à la sûreté du stockage, même si elle n’a pas été définie dans cet objectif. Le présent dossier considère les objets potentiellement à stocker, déchets et combustibles usés, tels qu’ils sont prévus d’être livrés par leur producteur. On a pu prévoir des compléments de colisage, mais on ne retient pas de possibilité de modifier le conditionnement du déchet primaire ;

- le site retenu doit présenter des caractéristiques favorables. Deux sources permettent d’identifier quelles sont les caractéristiques pertinentes : d’une part, la RFS III.2.f. [2] recommande un certain nombre de « critères de choix de site », qui sont favorables de manière générique à l’implantation d’un stockage. D’autre part, au fur et à mesure du développement des études, le concepteur est conduit à préciser ce qu’il attend du milieu géologique, et quelles fonctions doivent être remplies.

Cela peut amener à préciser et compléter les critères de choix. Le présent dossier se place dans l’hypothèse d’un stockage dans la formation du Callovo-Oxfordien. Le processus de sélection de site est donc stricto sensu hors du domaine du dossier. On s’attache néanmoins à identifier les caractéristiques attendues de la part de la formation, et comment le Callovo-Oxfordien y répond, à la fois dans son état initial et dans son évolution prévue à long terme ;

- les éléments ouvragés prévus par le concepteur en vue de construire le stockage, l’exploiter , en assurer la réversibilité et le fermer par étape, doivent soit assurer des fonctions de sûreté en complément de la formation hôte, soit au minimum ne pas perturber les fonctions assurées par elle.

Ils doivent être choisis et dimensionnés de manière que leurs caractéristiques intrinsèques, les processus qui régissent leur devenir à long terme et leurs interactions mutuelles, ne puissent conduire à une situation où la protection de l’homme et de l’environnement ne serait plus assurée.

La conception du stockage ne peut cependant pas aborder directement l’ensemble des caractéristiques et processus qui régissent l’évolution des déchets, de la formation hôte et des composants ouvragés, et proposer d’emblée un concept offrant une réponse adaptée à l’ensemble des phénomènes qui peuvent survenir sur de longues échelles de temps. La conception du stockage s’inscrit dans une démarche itérative permettant, à chaque étape, d’identifier les phénomènes importants et de les hiérarchiser, de caractériser les échelles de temps et d’espace dans lesquels ils s’inscrivent, et de préciser au fur et à mesure le concept au regard de cette analyse.

Il ne s’agit donc pas, dans le présent chapitre, de rendre compte de manière exhaustive de la phénoménologie du stockage à toutes les échelles de temps et d’espace. Les connaissances dans ce domaine sont exposées dans l’analyse phénoménologique des situations de stockage [27, 28] et sont discutées du point de vue de leur effet sur le stockage et les fonctions à remplir dans les analyses de sûreté [33]. Un résumé de cette analyse est fourni au chapitre 6. Ne sont présentés ici que les phénomènes les plus importants, du point de vue de leurs effets sur l’évolution globale, considérés lors de la conception et autour desquels l’architecture du stockage est construite.

La conception du stockage et la compréhension des phénomènes qui le régissent, en phase d’exploitation et plus encore sur le long terme, sont indissociables. Il est paru important de situer très tôt dans la présentation les ordres de grandeur des échelles de temps et d’espace dans lesquelles s’inscrivent ces grands phénomènes en post-fermeture (paragraphe 3.2). Ces échelles sont des références importantes pour comprendre la conception du stockage ; elles sont ensuite, avec un niveau de détail plus fin, le support de l’analyse de sûreté.

Une fois ce cadre posé, et après une introduction à la méthodologie mise en œuvre (paragraphe 3.3), les grandes fonctions de sûreté du stockage sont présentées, sans référence à ce stade aux solutions techniques qui seront déployées pour y répondre. Il s’agit uniquement d’expliquer quels ont été les grands principes de conception du stockage (paragraphe 3.4).

La démarche de conception, la déclinaison de ces fonctions générales en sous-fonctions spécifiques et les moyens proposés pour y répondre, font l’objet des paragraphes 3.5, 3.6 et 3.7.

Outline

Documents relatifs