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2.2 Le contexte géologique du site de Meuse / Haute Marne

2.2.2 La formation hôte

Au sein de la série sédimentaire, la formation argileuse étudiée est celle des argilites du Callovo-Oxfordien. Cette couche a pour origine la sédimentation de matériaux détritiques (minéraux argileux jusqu'à 60 % en masse, quartz fins) et de carbonates dans une mer relativement calme. Elle présente une grande extension géographique.

Dans une zone d’environ 200 kilomètres carrés définie à partir du site du laboratoire de recherche souterrain, la formation du Callovo-Oxfordien présente des caractéristiques physiques et chimiques transposables ou similaires par rapport à celles observées sur le site du laboratoire, on parle de zone de transposition.

Sur cette zone, le Callovo-Oxfordien est une couche homogène, peu perméable, dont le toit se trouve à une profondeur variant de 420 mètres (correspondant au site du laboratoire) à plus de 600 mètres suivant la direction du pendage, et dont l’épaisseur varie aussi progressivement de 130 mètres au Sud à 160 mètres au Nord de la zone.

Verticalement, les proportions des phases minéralogiques principales varient et s'organisent en trois séquences sédimentaires10. La séquence supérieure se caractérise par une teneur en carbonates plus élevée.

Le Callovo-Oxfordien est encadré par deux grandes formations calcaires, le Dogger sous-jacent et l’Oxfordien carbonaté sus-jacent, au sein desquels se trouvent des horizons sédimentaires poreux où s'écoule de l'eau. Toutefois la perméabilité de ces horizons est faible et ils ne sont pas aquifères au sens de l'hydrogéologie (ils ne représentent pas une ressource en eau).

La zone de transposition est située à l’écart des failles régionales, comme le fossé de la Marne au sud-ouest. En particulier, aucune faille n’y a été mise en évidence dans le Callovo-Oxfordien et les horizons sus-jacents.

2.2.2.1 L’évolution de la formation depuis son dépôt

Entre la fin de son dépôt et la fin du Jurassique (de -150 à -135 millions d’années), la couche d’argilites est recouverte par au moins 500 mètres de sédiments. Elle subit ensuite différents processus successifs, dits diagénétiques. Le premier de ces processus est la compaction progressive des sédiments, avec expulsion d’eau, sous le poids des dépôts ultérieurs. Interviennent ensuite des modifications physico-chimiques (dissolutions et précipitations minérales) pilotées par les augmentations de pression et de température liées à l’enfouissement ainsi que par la circulation des fluides. Ces processus n’ont eu que peu d’impact sur la couche durant la période étant données les profondeurs atteintes à la fin du Jurassique (5 à 600 mètres).

Par la suite, les grands événements de l’histoire géologique de la fin du Crétacé (retrait de la mer), puis du Tertiaire (phase pyrénéenne, distension oligocène puis phase alpine) ont peu d’effets sur la formation. Ses caractéristiques actuelles sont acquises pour l’essentiel durant le Crétacé, ainsi que le suggère la datation du dernier épisode diagénétique (antérieur à 100 millions d’années). Cet épisode, de faible intensité, a concerné certains échanges entre argiles et carbonates dans de très petits volumes de roche. Les phases initiales et notamment les minéraux argileux n’ont pas été affectés par des modifications majeures de leur cristallochimie et de leur texture.

Le Callovo-Oxfordien apparaît donc comme une formation géologique formée il y a 155 millions d’années dans un contexte stable. Les transformations minéralogiques postérieures au dépôt de la couche sont des processus limités dans l’espace et précoces, antérieurs à 100 millions d’années, affectant essentiellement les ciments carbonatés. L’évolution thermique modérée de la couche durant son histoire n’a pas permis d’initier de transformations minéralogiques des phases argileuses (illitisation notamment).

2.2.2.2 Les propriétés texturales et la porosité

Le volume poreux est conditionné par l’arrangement des trois principales phases minérales :

- les phases argileuses (majoritaires – 60 % au maximum) se présentent sous forme d’agrégats de minéraux argileux (plaquettes de formes plus ou moins régulières) de taille de l’ordre de plusieurs dizaines à la centaine de micromètres de longueur et de quelques dizaines de nanomètres d’épaisseur. Ces agrégats jouent le rôle de matrice et s’organisent grossièrement, selon la stratification ;

- les éléments détritiques quartzeux, de petites tailles (5 à 10 micromètres) sont répartis de manière homogène dans cette matrice ;

- la phase carbonatée se présente sous forme d’éléments de tailles variables, parfois assez gros (jusqu’à millimétriques) correspondant à des bioclastes et des cristaux automorphes résultant de néoformations secondaires à la suite des phénomènes diagénétiques.

Etant données les proportions relatives des phases argileuses et des autres éléments, ces derniers ne sont pas jointifs et apparaissent dispersés au sein de la matrice.

Cet arrangement détermine dans la roche deux types de porosités :

- la porosité interne à la matrice argileuse (autour des agrégats et des particules d’argiles) qui concerne les tailles de pores infra micrométriques, correspondant à la méso- et à la microporosité (90 % du volume poreux) ;

- la porosité à l’interface entre la matrice argileuse et les particules quartzeuses et les bioclastes qui concerne des tailles de pores micrométriques et des tailles de pores infra micrométriques pour les carbonates néoformés, correspondant à la macroporosité (10 % du volume poreux).

Le volume poreux total ainsi défini est de l’ordre de 18 % du volume total de la roche. Cette porosité induit une tortuosité importante, liée à l’arrangement des agrégats argileux entre eux.

Une représentation schématique de la texture et de la porosité du Callovo-Oxfordien est donnée en Figure 2.2-2.

DOSSIER2005 ARGILE -TOME EVALUATION DE SURETE DU STOCKAGE GEOLOGIQUE

Schématisation de la texture et de la porosité du Callovo-Oxfordien

2.2.2.3 Le statut de l'eau et les écoulements dans le Callovo-Oxfordien

D’une manière générale, l’eau se structure (i.e. s’organise en réseau) au voisinage des surfaces minérales et plus particulièrement près de celles portant une charge électrique résiduelle. Dans un milieu poreux, on définit ainsi une eau liée, et donc non mobile, et une eau libre, non affectée par cet effet.

Les particules d’argiles portent une charge permanente et ont donc un effet important sur la structuration de l’eau à leur voisinage, contrairement au quartz ou aux carbonates, qui présentent des charges permanentes de surface beaucoup plus faibles.

Autour des particules argileuses, il en résulte un film d’eau liée, qui peut boucher certains pores (« goulet électrochimique »). Pour un sédiment tel que les argilites du Callovo-Oxfordien, la taille des pores ainsi obstrués par ce « goulet électrochimique » est de l’ordre de 10 nanomètres. La porosité de la roche se distribuant essentiellement dans la matrice argileuse, la proportion d’eau liée, au contact des particules, est importante. Elle correspond à environ 50 % de l’eau contenue dans la porosité totale. Cette eau liée ne participe pas aux écoulements au sein de la roche.

Ces propriétés texturales confèrent aux argilites du Callovo-Oxfordien une faible perméabilité sur toute son épaisseur.

Les vitesses liées aux écoulements sont dans le détail assez différentes, du fait de la structure porale du milieu. De même, certains pores ne sont pas connectés et ne peuvent participer à cet écoulement.

Aussi, on définit une porosité dite cinématique, qui est une fraction de la porosité totale, permettant, macroscopiquement, de calculer une vitesse moyenne de l’eau dans la direction du gradient de charge.

Pour le Callovo-Oxfordien, cette porosité cinématique correspond à la fraction d’eau libre dans la roche, soit 9 % environ, correspondant à la moitié de la porosité totale.

2.2.2.4 La composition chimique de l’eau interstitielle dans le Callovo-Oxfordien.

La faible teneur en eau de la formation, 7 à 8 % en pondéral, ainsi que sa faible perméabilité, ne permettent pas d’analyser directement la composition des eaux porales. Celle-ci a été déterminée à partir d’analyses sur échantillons du Callovo-Oxfordien et de modélisations géochimiques. Cette composition est considérée homogène sur toute l’épaisseur de la formation, en cohérence avec l’homogénéité lithologique globale de celle-ci. Les compositions des eaux ainsi évaluées montrent un pH neutre (légèrement supérieur à 7). Elles sont réductrices, comme le montre la présence de pyrite et de matière organique. Chimiquement, les eaux présentent un caractère calco-sodique carbonaté. Les analyses des isotopes stables de l’eau, confirmées par celles réalisées sur les gaz (H2O et CO2) dissous, montrent que celle-ci a clairement une origine météorique. Cette eau aurait donc remplacé l’eau au cours de processus très anciens. En revanche, les données sur les isotopes stables du carbone démontrent l’équilibre chimique et isotopique des eaux interstitielles avec les phases carbonatées. Les eaux sont également sulfatées et chlorurées (la chlorinité étant déterminée analytiquement). Les autres éléments (cations majeurs et silicium) sont contrôlés par les différentes phases minérales.

Les concentrations de certaines espèces mobiles (chlore notamment) varient sur l’épaisseur de la couche (entre 1 000 et 500 mg/l, de bas en haut pour le Cl, à l’aplomb du site), traduisant un échange de ces espèces entre le Callovo-Oxfordien et les formations encaissantes. À l’échelle du secteur, ces profils montrent :

- un contrôle du profil de salinité dans le Callovo-Oxfordien par la salinité du Dogger (sensiblement plus forte au Nord-Est qu’au Sud-Ouest),

- des salinités basses de l’Oxfordien carbonaté, contrastant avec celle du Callovo-Oxfordien et du Dogger.

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