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Les formations encaissantes du Callovo-Oxfordien

2.2 Le contexte géologique du site de Meuse / Haute Marne

2.2.3 Les formations encaissantes du Callovo-Oxfordien

Les deux encaissants carbonatés immédiatement sous- et sus-jacents au Callovo-Oxfordien, le Dogger et l’Oxfordien carbonaté, sont des ensembles calcaires, qui imposent les conditions aux limites, notamment hydrauliques et chimiques, de la couche du Callovo-Oxfordien.

2.2.3.1 Le Dogger

Le Dogger (voir Figure 2.2-3), reposant sur les argiles du Lias, est une formation de 300 mètres d’épaisseur. Il correspond, à l’échelle du Bassin de Paris, au développement de grandes plates-formes carbonatées, sous une très faible tranche d’eau, dans un environnement de type tropical. Ces conditions sont responsables de la grande variété de faciès observés (débris coquilliers, sables calcaires, récifs...) qui se déposent au gré des courants et des évolutions de la profondeur d’eau. Ces rapides variations se retrouvent tant latéralement que verticalement. Un intervalle plus argileux, présent partout dans l’est de la France (« Marnes de Longwy ») et séparant les deux ensembles calcaires du Bajocien et du Bathonien, marque un approfondissement relatif des conditions de dépôt.

Au toit de la formation, la Dalle nacrée, très riche en débris coquilliers, marque le passage entre le Dogger et le Callovo-Oxfordien.

Figure 2.2-3 Représentation schématique des lithologies et des horizons poreux dans le Dogger carbonaté sur le site de Meuse / Haute-Marne

Juste après son dépôt, le Dogger a été soumis à un ensemble de processus diagénétiques qui vont contrôler des phases successives de dissolutions et de recristallisations de carbonates. Ces processus, classiques pour les formations carbonatées, s’inscrivent dans une évolution continue :

- les premières phases sont précoces et se déroulent pendant et juste après le dépôt du sédiment, - les phases suivantes sont liées à l’enfouissement de la série,

- enfin les dernières phases concernent la dénudation des séries sédimentaires et leur retour à l’affleurement.

Le Dogger présente des faibles porosités (6 à 10 %) et des perméabilités globales du Dogger (de 10-10 à 10-9 m/s). Seules quelques zones d’extensions plurikilométriques, isolées au sein des calcaires compacts et indépendantes du faciès, présenter des porosités et des perméabilités sensiblement plus élevées (respectivement 15 % et 10-8 m/s). Les productivités de ces horizons poreux sont faibles : de l’ordre du litre par minute, voire inférieures. Les circulations profondes d’eau se font principalement au sein de ces derniers.

Les eaux du Dogger sont, à l’aplomb du site, à l’équilibre chimique avec la formation. Il s’agit d’eaux très minéralisées de type chlorurées-sulfatées-sodiques, montrant un pH neutre (légèrement supérieur à 7) et réductrices ; elles sont chimiquement proches de celles observées dans la même formation ailleurs dans le bassin. Ces eaux d’origine météorique (voir ci-dessus) montrent des temps de résidence longs (de l’ordre du million d’année dans le forage MSE101), ainsi que l’indiquent les approches menées à partir des gaz rares.

À l’échelle du bassin parisien, les rejeux successifs des failles régionales (faille de Bray notamment) semblent avoir facilité les transferts verticaux entre aquifères ainsi que le suggèrent différentes approches menées à partir de modélisation et de traceurs géochimiques et isotopiques.

À l’échelle de l’auréole orientale du Bassin de Paris les approches menées plus particulièrement à partir des isotopes de l’hélium montrent que les argiles du Lias, situés sous le Dogger et le séparant du Trias, isolent efficacement ces deux formations. Cela permet, dans les modélisations, de ne pas prendre en compte les formations sous-jacentes du Dogger. Dans ce cadre, les signatures isotopiques triasiques retrouvées dans les calcites de remplissage de fractures à proximité des accidents apparaissent bien comme un phénomène très localisé, et correspondant à des communications très limitées dans le temps. Ceci est illustré par les différences de salinité existant entre les aquifères : de l’ordre de la centaine de g/l pour le Trias à quelques g/l pour le Dogger. Les salinités du Dogger restent néanmoins élevées pour des eaux météoriques : elles semblent être acquises par diffusion du sel triasique au travers du Lias argileux. Ces échanges se font donc sur des échelles de temps longues, de plusieurs millions d’années.

2.2.3.2 L’Oxfordien carbonaté

Au-dessus du Callovo-Oxfordien, l’Oxfordien carbonaté (voir Figure 2.2-4) montre des conditions de dépôt assez semblables à celles du Dogger : il s’agit, sur une épaisseur d’environ 300 mètres, de la superposition de différentes plateformes carbonatées. Cependant, les environnements de dépôt sont sensiblement plus contrastés que pour le Dogger. À la place d’une vaste plate-forme à fleur d’eau, très étendue, il est possible de distinguer, pour chacune des plates-formes de l’Oxfordien carbonaté, des environnements bien distincts. Ainsi, les faciès les plus grossiers et correspondant à de faibles tranches d’eau au moment du dépôt (sables argileux, faciès de lagon, récifs…) sont globalement situés au Nord-Est du secteur (région de Commercy) alors qu’au Sud-Ouest, au-delà de Joinville, se développent des faciès de bassin plus argileux.

L’ensemble est affecté, sous couverture, par une diagenèse importante, à l’image de celle affectant le Dogger. Comme pour ce dernier, cette diagenèse est responsable d’une recristallisation plus intense au niveau du secteur que dans les autres endroits du Bassin Parisien, notamment dans les faciès granulaires. Ainsi, sur la totalité de la formation, les perméabilités globales sont faibles : de l’ordre de 10-9 m/s, soit deux ordres de grandeurs inférieures à celles mesurées plus au centre du bassin.

Cependant, certains niveaux de l’Oxfordien carbonaté correspondant en majorité à des faciès fins

montrent des porosités et perméabilités plus fortes que dans le reste de la formation. Ces horizons dits

« poreux » sont définis à l’aplomb du laboratoire souterrain et identifiés par une numérotation de 1 à 7, soit Hp1 à Hp7. Ils correspondent principalement à certains faciès bien précis (boue carbonatée de lagon, faciès inter-récifaux…), homogènes, pour lesquels une diagenèse « crayeuse » secondaire a transformé le faciès primaire en une micrite fine homogène, montrant une porosité élevée par rapport au reste de la formation. L’organisation de ces niveaux poreux est donc directement liée aux conditions initiales de dépôt des sédiments ce qui explique leur géométrie globale et leur corrélation avec la stratification ainsi que le montre les données de sismique 3D enregistrées sur le site. À cette échelle, ces données illustrent bien que la répartition des zones les plus poreuses peut cependant devenir irrégulière, expliquant ainsi les difficultés de corrélation de détail, sans toutefois modifier sensiblement les caractéristiques hydrodynamiques globales de la formation.

Figure 2.2-4 Représentation des niveaux poreux dans l’Oxfordien carbonaté à l’état actuel

On distingue, au-dessus de faciès correspondant à la mise en place de la première plate-forme carbonatée, très peu perméables et présents sur l’ensemble du secteur (faciès C3a/C3b : perméabilité de l’ordre de 1.10-11 m/s) :

- un ensemble d’horizons poreux (Hp1 à Hp4) reconnu dans toute la partie Nord-Ouest du secteur et correspondant en grande partie à des faciès de lagon. Ces horizons montrent des porosités de l’ordre de 20 % et des perméabilités de quelques 10-8 m/s. Ils s’individualisent au sein de calcaires plus compacts (porosités de 15 % et perméabilités de 1.10-9 m/s). À quelques kilomètres au Sud et à l’Ouest du site, les résultats des forages EST321 et EST351 montrent que le passage de ces faciès de lagon à des faciès de barrière recristallisés, puis, au-delà à des faciès argileux de bassin (région de Joinville) se traduit par la disparition de ces horizons poreux ;

- dans l’Oxfordien supérieur, des horizons poreux (Hp5 à Hp7), plus minces que Hp1 à Hp4, présents systématiquement, même s’ils ne sont pas continus à l’échelle du secteur.

C’est principalement au sein des horizons poreux que les circulations d’eaux se font en profondeur.

Comme pour le Dogger, les écoulements régionaux sont globalement dirigés des zones d’alimentation que constituent les zones de plateaux au Sud et à l’Est du site, sur lesquelles la formation est karstifiée, vers le centre du bassin. Cependant, au droit du site, du fait de la proximité des affleurements, une partie de ces écoulements se dirige vers un point bas local, dans le cours de la Marne au Sud-Ouest. Ce point bas représente, pour les trajectoires passant à l’aplomb du site de Meuse / Haute-Marne, le seul exutoire actuel de l’aquifère de l’Oxfordien calcaire sur le secteur.

Une des conséquences de l’écoulement au sein d’horizons poreux bien différenciés dans l’Oxfordien carbonaté est une nette individualisation chimique, à l’aplomb du site, des eaux entre les horizons poreux inférieurs et les horizons poreux supérieurs :

- le faciès chimique des eaux des horizons inférieurs est sodique carbonaté ; elles sont réductrices, avec un pH neutre (7,5) ;

- le faciès des eaux des horizons supérieurs est magnésien carbonaté avec un pH de 7,5 également, mais elles montrent un caractère moins réducteur, voire faiblement oxydant.

Ces différences sont à relier à l’histoire géologique légèrement différente de ces deux ensembles, notamment vis-à-vis des environnements de dépôts, des paléocirculations et des processus diagénétiques.

2.2.3.3 Le Kimméridgien marneux et les calcaires du Barrois

Au-dessus de l’Oxfordien carbonaté, les marnes du Kimméridgien marquent un nouvel approfondissement des conditions de dépôt : les sédiments redeviennent plus argileux. Cette formation, de 110 mètres d’épaisseur à l’aplomb du site, est constituée de marnes avec des intercalations de calcaires argileux.

Les conditions de dépôt, à l’image du Callovo-Oxfordien, expliquent la grande constance des faciès et de l’épaisseur de cette couche à l’échelle régionale. Lorsqu’elle est à l’affleurement, sa perméabilité, initialement faible (de l’ordre de 10-11 à 10-12 m/s), augmente du fait des altérations de surface affectant plus spécifiquement les intervalles carbonatés.

Sous couverture, les eaux interstitielles du Kimméridgien montrent un faciès assez proche de celui des horizons supérieurs de l’Oxfordien carbonaté : eaux réductrices, de faciès bi-carbonaté magnésien et avec un pH de 7,5. À l’affleurement (ou sous couverture pour la partie au contact avec l’aquifère des Calcaires du Barrois), la formation est soumise à un environnement oxydant qui modifie profondément ce faciès (notamment, oxydation de la pyrite, avec production de sulfates et augmentation de la concentration en fer de la solution) et les eaux deviennent naturellement oxydantes. Ces marnes séparent la nappe aquifère des calcaires de l’Oxfordien de celle des Calcaires du Barrois.

Les calcaires du Barrois, qui sont à l’affleurement sur une grande partie du secteur, correspondent, à l’échelle du bassin de Paris, au retour des grandes plates-formes carbonatées à boues calcaires. La formation est épaisse de plus de 200 mètres lorsqu’elle est complète. La nature initiale du calcaire

(calcaires argileux, plus ou moins vacuolaires) et son évolution à l’affleurement sous l’action des eaux météoriques permettent de séparer cette formation en deux unités aux comportements bien distincts : - une unité de base (représentative des environs du laboratoire) d’une épaisseur d’une trentaine de

mètres dans laquelle les développements karstiques sont limités ;

- une unité supérieure dans laquelle les karsts sont fréquents. Ils sont d’autant plus développés que du Crétacé argilo-sableux est préservé au-dessus de la formation.

Quelle que soit l’unité considérée, les écoulements dans cet aquifère de surface fluctuent rapidement avec la pluviométrie. Les transferts, globalement en direction du Nord-Ouest, y sont rapides (plusieurs centaines à milliers de mètres par jour). Du fait de la recharge rapide de la nappe par les eaux météoriques, les eaux de formation sont oxydantes et montrent un faciès bicarbonaté calcique, plus ou moins chloruré.

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