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Action poutre

2.5 Poutres vs Dalles

Dans cette partie, les différences entre des spécimens poutres et les spécimens dalles seront mis en évidence. En effet, certains codes analytiques comme l’EC2 (European Concrete Platform ASBL 2008) prévoient des formules différentes pour chaque cas bien que la plupart des campagnes expérimentales soient réalisées sur des éléments poutres. D’autres codes comme l’ACI 318-14 considèrent la contrainte de cisaillement indépendante de la largeur de l’élément. Ainsi, la résistance au cisaillement est proportionnelle à la largeur de l’élément.

2.5.1 La largeur des spécimens

2.5.1.1 Influence de la largeur de section sur la contrainte de cisaillement : cas des charges linéiques

Afin de vérifier l’existence d’éventuelles disparités entre la résistance au cisaillement des poutres et des dalles, il faut analyser l’influence de la largeur des spécimens sur la contrainte de cisaillement 𝑣𝑐.

En 1948 Richart (Frank E. Richart 1948) a remarqué , à travers ses résultats expérimentaux sur des murs en B.A et poteaux, que la manière à laquelle la ruine est atteinte variait selon les proportions de la section de poutre: pour des sections carrées, il a observé une rupture pyramidale en poinçonnement, tandis que dans le cas de sections rectangulaires étroites et longues la ruine est atteinte à travers un plan incliné diagonal (cisaillement). Le rapport 𝑏𝑤

𝑑 a varié de 6 à 7.2.

En 1962, Diaz de Cossio (Committee 326 1962) a présenté une critique de l’ACI 326, qui ne prend pas en compte le rapport 𝑏𝑤

𝑑 parce que les essais pris en compte par l’ACI ne comptaient que des éléments rectangulaires avec des rapports 𝑏𝑤

𝑑 de 0.5. Il a testé 22 éléments dalles avec des largeurs qui varient de 4 à 8 fois l’épaisseur. Il a conclu que la force de cisaillement est correctement représentée par une contrainte nominale de cisaillement d’environ 0.33√𝑓𝑐′ pour des sections situées à d/2 jusqu’à 0.75 𝑑 de la zone chargée. Une légère augmentation en force peut être à prévoir dans les dalles travaillant dans les 2 directions.

76 Kani (M. Kani, Huggins, and Wittkopp 1979) a vérifié expérimentalement si une poutre étroite avec une largeur bw = 254mm se comportait différemment par rapport à une poutre 4x plus large (𝑏𝑤 = 1016𝑚𝑚). 4 pairs de poutres avec des rapports de l’élancement à la hauteur a/d différents ont été testées. Les résultats donnaient des écarts variant de 10% en dessus et en dessous en moyenne. Ainsi, augmenter la largeur du spécimen ne semble pas influer sur la contrainte de cisaillement selon Kani.

En 2004, Lubell (Lubell et al. 2004) compare des résultats d’essais sur poutres étroites et poutres larges à caractéristiques similaires. L’écart entre les contraintes de cisaillement est inférieur à 2%. Cette étude confirme la conclusion de Kani qui stipule que la résistance au cisaillement est directement proportionnelle à la largeur de poutre.

Sherwood et al (Sherwood et al. 2006) a testé 9 bandes de dalles en béton sous chargement linéique en 3 points pour vérifier si les aspects du cisaillement ne sont pas conservatifs quand ils sont appliqués aux dalles épaisses et larges. Encore une fois, la largeur n’affecte pas la contrainte de cisaillement en rupture pour les dalles unidirectionnelles et les poutres larges. La présence d’armatures transversales inférieures n’a d’ailleurs pas influencé la résistance au cisaillement.

Gurutzega (Gurutzeaga et al. 2015) de son côté, a rassemblé des données expérimentales de près de 79 dalles testées au cisaillement et a analysé l’influence du rapport 𝑏𝑤

𝑑. Le graphique obtenu (Figure 2-55) n’a pas permis d’observer l’effet de ce paramètre, il aurait même tendance à confirmer les auteurs précédents qui nient l’implication de la largeur dans la contrainte de cisaillement.

Plus récemment, Conforti et al (Conforti, Minelli, and Plizzari 2017) s’est intéressé au rapport 𝑏

𝑑 de manière plus globale. En rassemblant les données issues de sa campagne expérimentale avec ceux récoltés dans la littérature d’essais de chargements linéiques, il a comparé les résultats de près de 40 spécimens dont 𝑏

𝑑 varie entre 0.12 et 6.67 (Figure 2-56) a permis d’effectuer les observations suivantes :

- Lorsque 𝑏

𝑑 est inférieur à 1 l’évolution de la résistance au cisaillement est faiblement observée.

- Lorsque 1 < 𝑏

𝑑< 3 une augmentation d’environ 25% de la résistance au cisaillement normalisée est relevée.

- Pour 𝑏

𝑑 > 3 les valeurs de la contrainte de cisaillement normalisée semblent indépendantes de l’accroissement de ce paramètre.

Selon Conforti, un rapport b

d> 1 influence le développement de la fissure à travers la largeur du spécimen, conduisant à des fissures de flexion et de cisaillement sans propagation uniforme le long de la largeur de l'élément, avec des déviations et bifurcations possibles (ce phénomène est plus évident pour les valeurs b

d dépassant 2). Cela entraîne des fissures plus nombreuses et plus étroites dans la partie centrale de l'élément par rapport aux parties externes, garantissant un mécanisme de transfert de cisaillement plus efficace par engrènement des granulats. Cela permet aux membres avec b

d> 1 d'atteindre une capacité de résistance au cisaillement plus élevée.

78 Figure 2-56 La résistance au cisaillement normalisée en fonction du rapport 𝒃

𝒅

En résumé, la plupart des auteurs avancent que la résistance au cisaillement est indépendante de la largeur des éléments. Cependant l’étude élargie mené par Conforti en 2017, a permis de relever l’influence du rapport 𝑏

𝑑 lorsqu’il varie entre 1 et 3 avec une contrainte de cisaillement qui peut augmenter de près de 25%. En revanche, la transition entre poutres larges et dalles se fait sans aucun gain dans la contrainte de résistance au cisaillement.

Bien que la largeur ne semble pas influer sur la contrainte de cisaillement, il est important de définir son implication dans l’effort résistant en entier.

2.5.1.2 La largeur effective : cas des charges concentrées

• Définition et pertinence

La largeur effective 𝑏𝑒𝑓𝑓 a été introduite par Goldbeck en 1917 (Goldbeck 1917). Elle représente selon l’auteur, la largeur de dalle qui devrait être utilisée dans les formules de poutres rectangulaires lorsqu’appliquées aux dalles. En d’autres termes, elle est largeur qui supporte effectivement la charge appliquée. Pour cela, il considère la largeur vérifiant que l’effort résistant

causé par une contrainte maximale distribuée sur toute une longueur soit égal à l’effort résistant induit par des contraintes variables sur toute la largeur réelle (Figure 2-57). Du fait de la faible largeur des poutres par rapport à la hauteur utile, celle-ci apparaît entièrement dans les formules de calcul. Cependant pour les dalles avec des charges concentrées près de l’appui, la résistance au cisaillement « poutre » doit être calculée en prenant en compte une largeur effective 𝑏𝑒𝑓𝑓.

Figure 2-57 Principe de largeur effective beff: surface sous la courbe de contrainte v(x) sur une longueur

b égale à celle générée par 𝒗𝒎𝒂𝒙 avec beff

Les études récentes concernant les dalles sont essentiellement concentrées sur les charges linéiques qui ont un comportement similaire à celui des poutres et que les codes de calcul conduisent à une approximation.

Regan (Lantsoght, Veen, and Walraven 2012) (1982) a suggéré que les dalles sous charges concentrées près de l’appui ont une plus grande résistance au cisaillement en se basant sur les formules de cisaillement des poutres.

Lantsoght (Lantsoght, Veen, and Walraven 2013) a réalisé une étude comparative entre le rapport 𝑎

𝑑 et la largeur effective. Quand la distance appui-charge 𝑎 diminue, le rapport 𝑎/𝑑 est réduit, il en va donc de même de largeur utile 𝑏𝑒𝑓𝑓.

La résistance au cisaillement est donc théoriquement plus faible 𝑉𝑢 = 𝑉𝑢 𝑏𝑒𝑓𝑓 𝑑

Il y a une dimension supplémentaire à prendre en considération dans le cas des dalles en comparaison avec les poutres :

Pour les poutres il existe une unique bielle de compression qui puisse se développer. Dans les dalles, un système bielles-tirants 3D se construit avec plusieurs chemins possibles entre la charge et l’appui. Cet état résulte de l’équilibre tridimensionnel. Les différents chemins permettent

v(x)

beff