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POTENTIEL DES SYSTÈMES URBAINS COMME FACTEURS CLEFS

chAPiTRe 4 LIENS ENTRE URBANISATION ET INDUSTRIALISATION

4.2 POTENTIEL DES SYSTÈMES URBAINS COMME FACTEURS CLEFS

Les villes n’existent pas dans le vide. La contribution économique d’une ville et son aptitude à soutenir le développement industriel dépendent de son rôle dans le système urbain national et de sa connectivité aux marchés régionaux, voire internationaux. Le choix des sites d’implantation des industries et leur succès en matière de productivité et de compétitivité dépendent des caractéristiques de la ville et de sa place dans les systèmes nationaux et internationaux de villes – taille, diversité des activités économiques et proximité et liens avec les marchés régionaux et internationaux (encadré 4.2).

Une politique relative au système urbain s’impose pour hiérarchiser les investissements: les pays doivent bien affecter leurs ressources limitées pour éviter de diluer l’impact des investissements à un point où ils ne produisent que peu de changements. Les systèmes de villes devraient avoir une logique économique. Alors

qu’une logique politique sous-tend parfois la répartition des dépenses publiques administratives entre les provinces, l’État ou le district, les politiques relatives aux infrastructures et les politiques ciblées d’attraction des investissements devraient se concentrer sur quelques villes économiquement stratégiques et leurs liens, par exemple la ville principale, les villes situées le long des principaux couloirs commerciaux régionaux, et les villes industrielles et portuaires existantes, ainsi que les villes ayant des liens avec des secteurs industriels ciblés (notamment l’agro-industrie et les ressources naturelles).

L’investissement devrait cibler les chaînes de valeur au cœur de la création d’emplois industriels, y compris le soutien au développement des compétences dans les villes, ainsi que les liaisons de transport à l’intérieur des villes et entre elles.

Les services aux entreprises sont essentiels à la productivité industrielle, en particulier la fabrication et la construction, et

constituent une voie vers la transformation

structurelle et la croissance économique.

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LIENS ENTRE URBANISATION ET INDUSTRIALISATION

Botswana

Éthiopie Ghana

Kenya Malawi

Maurice

Nigéria

Sénégal

Afrique du Sud

Maroc

Égypte Tanzanie

0 2 4 6 8 10

0 2 4 6 8 10 12 14 16

VALEUR AJOUTÉE DE LA CONSTRUCTION (EN POURCENTAGE DU PIB)

VALEUR AJOUTÉE DES SERVICES AUX ENTREPRISES (EN POURCENTAGE DU PIB)

Botswana Éthiopie

Ghana Kenya Malawi

Maurice

Nigéria Sénégal

Afrique du Sud

Maroc Égypte

Tanzanie Zambie

0 1 2 3 4 5 6 7 9 9 10

0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

EMPLOIS DANS LE SECTEUR DE LA CONSTRUCTION (EN POURCENTAGE DE LA MAIN-D'ŒUVRE)

EMPLOIS DANS LE SECTEUR DES SERVICES AUX ENTREPRISES (EN POURCENTAGE DE LA MAIN-D'ŒUVRE)

FIgURE 4.7 Emplois dans les secteurs de la construction et des services aux entreprises, moyenne 2006-2010, pays africains choisis

FIgURE 4.8 Valeur ajoutée dans les secteurs de la construction et des services aux entreprises, moyenne 2006-2010, pays africains choisis

Source : Groningen Growth and Development Centre 10-Sector Database.

Source : Groningen Growth and Development Centre 10-Sector Database.

RAPPORT ECONOMIQUE SUR L’AFRIQUE Dans un système fonctionnel de villes, chaque grande ville (primaire et secondaire) joue un rôle particulier et complémentaire. La ville primaire peut bien avoir une perspective internationale, tandis que les villes secondaires la complètent en accueillant des activités qui requièrent

des coûts plus bas associés à une plus petite taille ou à la proximité des intrants tels que l’agriculture ou les ressources naturelles.

Les liaisons et les couloirs régionaux influencent la répartition des fonctions entre les villes et les réseaux de transport interurbains. Les liaisons vers

les marchés internationaux et régionaux sont une composante importante d’un tel système, qui exige des politiques et des investissements coordonnés à l’échelle internationale pour établir l’environnement propice qu’il faut.

ENcADRé 4.2 UN SYSTÈME NATIONAL DE VILLES FONcTIONNEL

Ville primaire : Centre du savoir et de l’innovation ; établissement de nouvelles entreprises ; centre de services,

R-D ; Sièges

Villes secondaires : Pôles industriels spécialisés ; industries à forte intensité

de main-d’œuvre ; Valorisation des ressources naturelles, agro-industrie

Villes tertiaires et villes-marchés : Transport, logistique, services

Mouvements des biens, des services, de la main-d'œuvre

et des investissements

Liens internationaux : Monde

Liaisons régionales : Afrique

LOcALISATION DES INDUSTRIES

Les théories de localisation des industries se sont concentrées sur les caractéristiques géographiques de

« première nature »9 (facteurs naturels) et de « seconde nature » (découlant de l’activité humaine), mettant en évidence la géographie économique.

Les plus anciennes théories mettaient l’accent sur les différences de première nature telles que le climat, la topographie et la dotation en ressources, ou l’abondance d’un facteur de production relativement immobile. Par exemple, la distance pour rallier les marchés ou les centres urbains a été l’élément central du modèle de localisation

des industries de Von Theonen (1826), des théories de lieux centraux de Christaller (1933) et de Losch (1940) et d’autres économistes qui leur ont succédé (Fujita, Krugman et Venables, 1999). Selon Alfred Weber (1909), les industries peuvent s’installer plus près d’une source d’intrants si un produit « perd du poids » (plus lourd avant le traitement) ou plus proche des marchés s’il « gagne en poids » (plus lourd ou plus périssable après traitement) (Bogetic et Sanogo, 2005). Les théories commerciales de l’avantage comparatif traitent également du choix de l’emplacement: selon le modèle de Heckscher-Ohlin (1933), les industries qui dépendent plus d’un facteur de production moins mobile peuvent bien se concentrer dans des localités dotées de ce facteur.

FIGURE DE L´ENCADRÉ 4.1 Un système de villes liées et complémentaires

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LIENS ENTRE URBANISATION ET INDUSTRIALISATION

Les plus récentes théories de la localisation des industries se concentrent sur les avantages de la seconde nature tels que la diffusion du savoir, la « richesse »10des marchés en compétences spécialisées et les liens en amont et en aval associés aux grands marchés locaux. Le modèle de la nouvelle géographie économique, mis au point par Paul Krugman (1991) et le vaste travail qui a suivi, ont permis d’analyser la nature et le processus d’autorenforcement des économies d’échelle et du regroupement spatial.

Dans ce modèle, l’interaction entre les économies d’échelle, les coûts de transport et les mouvements des facteurs de production influe sur la concentration spatiale des activités économiques (Fujita, Krugman et Venables, 1999). Les économies d’échelle dans la fabrication et la mobilité du travail créent et perpétuent les économies d’agglomération.

Au début du développement industriel dans le monde, les facteurs géographiques de la première nature étaient déterminants dans la localisation des industries. Aux États-Unis et en Europe occidentale, les industries et les villes ont longtemps eu tendance à se situer autour des cours d’eau pour tirer parti des avantages liés au coût du transport. D’après Glaeser (2009): « Avant le XXe siècle, les avantages financiers des bateaux étaient si manifestes que la localisation de toutes les 20 plus grandes villes d’Amérique, des plus vieilles comme New York et Boston, à la plus jeune, Minneapolis, était déterminée par les cours d’eau ». Il en est de même des mégalopoles côtières de l’Asie qui ont dominé son économie après la Seconde Guerre mondiale, notamment les régions de Séoul et de Pusan en République de Corée, les régions de Taiwan, Taipei (Chine) et de Kaohsiung, et des deltas de la rivière des Perles et du fleuve Yangtsé, en Chine (Annez et Buckley, 2009). Les avantages initiaux de la première nature en termes de localisation, fondés sur les coûts de transport, se sont mués en avantages liés à l’échelle avec l’agglomération de la main-d’œuvre et des entreprises (encadré 4.3).

Si les facteurs géographiques de la première nature restent importants, les entreprises opérant dans les économies de marché à l’heure de la mondialisation attachent une grande valeur aux facteurs géographiques de la seconde nature découlant des économies d’agglomération et des avantages économiques de la concentration.

AggLOMéRATION OU DISPERSION ET DIFFéRENcES SEcTORIELLES

Les forces centrifuges de l’agglomération attirent les entreprises vers les concentrations urbaines, en s’opposant aux forces centripètes qui poussent les entreprises hors des villes.11 Les deux ensembles devraient être gérés de façon à offrir des choix d’implantation de grande qualité

aux industries et aux entreprises. À mesure que les villes se développent, l’encombrement, la congestion et la demande de ressources limitées induisent une hausse des coûts des terrains et de la main-d’œuvre. Des enquêtes sur les entreprises et des études économétriques portant sur la Chine, l’Inde et l’Indonésie, résumées dans Deichmann et al., (2008, tableau 4.3), indiquent que si les décisions d’implantation des entreprises manufacturières reposent sur une foule de facteurs, notamment les infrastructures, l’effet d’agglomération constitue une variable importante pour plusieurs industries. Cela est particulièrement vrai pour les secteurs à forte composante technologique et à haute productivité tels que celui du matériel de bureautique et des industries axées sur les ressources naturelles comme le bois, le caoutchouc et le plastique.

Ces facteurs sont moins importants pour les industries sans attache, comme les vêtements et les textiles, qui ont tendance à chercher une main-d’œuvre bon marché.

Les effets d’agglomération s’accompagnent d’une hausse des salaires qui relève les coûts, d’une augmentation des loyers et des coûts de transport causés par la congestion, autant de facteurs qui contribuent à repousser les entreprises. Les gains nets tirés de l’agglomération varient donc selon le type d’industrie, ce qui fait de la délocalisation ou de la relocalisation un choix plus fréquent pour les secteurs à main-d’œuvre peu qualifiée et utilisant des technologies normalisées (Deichmann et al., 2008). Les résultats empiriques résumés au tableau 4.3 ci-dessous mettent en évidence les différences concernant les préférences d’implantation des entreprises dans trois pays asiatiques.

Les entreprises manufacturières à plus forte valeur ajoutée manifestent une nette préférence pour l’accès aux marchés (Fedderke et Wollnik, 2007; Rothenburg, 2011). Une étude sur les entreprises manufacturières en Inde montre que la productivité était principalement liée à un tel accès (mesurée par la proximité de la population et des ports nationaux, pondérée par les temps de déplacement) (Lall et Mengistae, 2005). L’Inde dispose d’un marché intérieur important, mais pour les villes côtières, l’accès aux marchés étrangers (distance du port) était plus important pour la détermination de la productivité (Lall et Mengistae, 2005). En Afrique, l’IDE a marqué une préférence pour les villes et les pays ayant un bon accès aux marchés intérieurs du continent (Zhang, Wei et Liu, 2013).

Les forces centrifuges de l’agglomération attirent les entreprises vers les

concentrations urbaines, en s’opposant

aux forces centripètes qui poussent

les entreprises hors des villes.

RAPPORT ECONOMIQUE SUR L’AFRIQUE

Les caractéristiques géographiques de la première nature – les ressources naturelles et les liaisons de transport – ont été les principaux facteurs explicatifs des agglomérations urbaines d’Afrique avant et pendant la période coloniale ; il en va de même pour les villes commerciales précoloniales telles que Mombasa (Kenya), Stone Town (Tanzanie), et les villes le long de la vallée du Nil qui ont poussé comme des champignons en raison de ces avantages naturels. Le système urbain précolonial soudanais reposait d’abord sur la localisation des zones agricoles productives et des villes-marchés, renforcés par de nouvelles routes commerciales (Sarzin et Mehta, 2011). Au Nigéria, Kano est devenu une métropole prospère, sans doute déjà au VIIe siècle, véritable plaque tournante de l’industrie textile et étape d’une route commerciale s’étendant du nord du Nigéria, au Tchad, au Soudan et jusqu’aux ports d’Afrique du Nord (Bloch, R. et al., 2015).

Jedwab (2013) montre l’influence plus récente du cacao et d’autres cultures de rente sur la formation des systèmes urbains en Côte d’Ivoire et au Ghana, qui a suivi la configuration spatiale de la production des cultures. Si les capitales et les deuxièmes villes ne comptaient qu’un peu moins de la moitié de la croissance de la population urbaine dans ces deux pays entre 1901 et 2000, une grande partie de la croissance restante se produisait dans les zones propices au cacao : 66,3

% au Ghana et 80 % en Côte d’Ivoire.

Les investissements durant l’ère coloniale, en particulier dans les chemins de fer, ont renforcé l’influence des ressources naturelles et des villes commerciales sur les systèmes urbains africains. Au Nigéria, la construction de chemins de fer a eu un impact majeur sur le système urbain naissant du pays au début des années 1900, notamment en reliant les régions de production agricole et minière au nord avec Port Harcourt et Lagos. Cela s’est traduit par l’importance économique croissante de ces deux villes côtières, la croissance des villes le long de la ligne de chemin de fer (comme Ibadan et Kano), la naissance de nouvelles villes proches du chemin de fer (comme Kaduna et Enugu) et le déclin des villes contournées par le chemin de fer et qui étaient par le passé importantes, notamment à l’époque précoloniale (comme Oyo, Ile-ife et Bénin City) (Bloch, R. et al., 2015). Les investissements dans les chemins de fer pendant la période coloniale ont aussi influencé durablement les systèmes urbains de la République démocratique du Congo, du Kenya et du Soudan (voir la figure de l’encadré 4.2).

ENcADRé 4.3 cONTEXTE HISTORIQUE DE L’éMERgENcE DES VILLES AFRIcAINES

La dynamique de la croissance urbaine a, à de nombreux endroits, permis de surmonter les avantages de la première nature des villes historiquement importantes au fil du temps, en faisant d’elles de puissants centres économiques et pôles de croissance, quoique certaines villes présentent à la fois des avantages de première et seconde nature, par exemple le centre économique intérieur de la province de Gauteng et les centres de plus petite taille du Cap, Durban et Port Elizabeth (Fedderke et Wollnik, 2007). Dans le cas extrême, les avantages cumulés de la concentration des infrastructures et des activités industrielles, ainsi que des fonctions administratives et gouvernementales, ont conduit à la création d’une « ville primaire » dont l’influence économique dépasse ses limites géographiques et domine l’ensemble du paysage urbain, comme Dakar, Khartoum, Kinshasa et Monrovia.

FIGURE DE L´ENCADRÉ 4.2 Développement de l’Afrique et incidences des chemins de fer coloniaux

Source: Kerby, Moradi et Jedwab (2014).

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LIENS ENTRE URBANISATION ET INDUSTRIALISATION

LIEU ET éTUDEDONNéESPRIX DES FAcTEURSMAIN- D’ŒUVRE ET gLEMENTATION QUALITé DE L’éLEcTRIcITéINcITATIONSAcS AU MARcHé ET INFRASTRUcTURE DE TRANSPORT ENTREPRISES DE L’INDUSTRIE EN AMONT

ENTREPRISES DANS SON PROPRE SEcTEUR chine (Head and Riles, 1996)Investissements étrangers dans 54 villes

Pas d’effet--PositifTrès positifTrès positif pour les voies ferrées et les ports

Très positif chine (Amiti and Javorcik, 2005)

Investissements étrangers---Positif ; les obstacles aux échanges entre les provinces découragent l’investissement

Très positifTrès positif Inde (Lall and Mengistae, 2005)

Données sur les entreprises de 40 villes dans 8 secteurs manufacturiers Négatif pour certaines industries

NégatifPositifPositifPositif--Positif Inde (Lall and chakravorty, 2005)

Investissements des entreprises--Négatif----Positif---- Inde (Mani, Pargal and Huq, 1997) 418 projets d’investissement dans 14 États Positif pour certaines industries

NégatifPositif--- Indonésie (Deichmann et al., 2005)

Données sur les entreprises de 294 districts concernant 15 industries Négatif pour la majorité des industries Négatif pour certaines industries Positif pour certaines industries Positif pour certaines industries

Positif pour la majorité des industries Indonésie (Henderson, Kuncoro and Nasution, 1996)

Données sur les entreprises de fabrication de produits non alimentaires kabupaten (régences) Négatif--Positif--Positif (proximité de la zone métropolitaine)

--Positif Source: Deichmann et al. (2008).

TABLEAU 4.3 Résultats d’études économétriques choisies sur les implantations industrielles en chine, en Inde et en Indonésie

RAPPORT ECONOMIQUE SUR L’AFRIQUE

Les industries à forte intensité de compétences et les secteurs axés sur le savoir sont plus enclins à se regrouper et à s’installer dans les grandes villes. Ce regroupement est lié au fait que les retombées de la connaissance se produisent sur des zones très localisées (Rosenthal et Strange, 2004). Et, parce que les secteurs axés sur le savoir sont souvent engagés dans l’innovation, la recherche et l’expérimentation, ils ont tendance à se situer dans des villes plus vastes et diversifiées afin de bénéficier des échanges fructueux et du dynamisme qu’elles offrent (Puga, 2010). Il existe également un lien entre les niveaux de compétences, la taille de la ville et l’apprentissage (Glaeser et Resseger, 2010). Les avantages de la productivité des grandes villes ont été clairement démontrés lorsque la main-d’œuvre est plus instruite, en particulier dans les villes ayant des secteurs à forte intensité de compétences comme celui des services professionnels, des arts et du divertissement, de l’information et des finances (Abel, Dey et Gabe, 2012).

Certaines entreprises, en particulier dans les industries bien établies et les secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, semblent mieux prospérer dans les villes spécialisées avec des niveaux plus élevés de regroupement d’entreprises du même secteur et moins de diversité de types d’entreprises. En République de Corée, la plupart des industries lourdes (comme celles des métaux, des produits chimiques et du matériel de transport) se sont installées dans quelques villes hautement spécialisées (Vernon, Shalizi et Venables, 2001). Également dans ce pays, en dehors des industries de haute technologie, les industries traditionnelles telles que celles du textile et de la transformation alimentaire tirent parti non de la très grande taille de la ville elle-même (Henderson, Lee et Lee, 2001), mais de l’appartenance à des groupements plus grands (Henderson, 2010).

Les entreprises manufacturières ont tendance à se déconcentrer une fois établies. La concentration globale du secteur manufacturier en République de Corée est passée de 76 % dans la région métropolitaine de Séoul en 1970 à seulement 30 % en 1993 (Henderson, 2014).

Duranton et Puga (2001) montrent qu’en France, 70 % des entreprises établies qui changent de site vont d’une grande ville à une ville plus spécialisée. Ces résultats sur l’importance du groupement des entreprises du même secteur sont renforcés par des études de cas relatives à des pôles industriels (Overman et Venables, 2005) et des

groupements d’entreprises exportatrices au Bangladesh, en Chine, en République dominicaine, au Honduras, en République de Corée, au Pakistan et à Taiwan (Chine) (Hausmann et Rodrik, 2003).

VILLES PRIMAIRES ET VILLES DE PLUS PETITE TAILLE

Dans de nombreux pays africains, la concentration des industries dans un seul centre urbain a contribué à la création d’un système urbain dominé par une ville primaire (« la primauté »). Les systèmes de villes dans les économies développées tendent à suivre la loi « rang-taille », les villes diminuant en taille suivant un ratio commun (O’Sullivan, 2007). Alors que presque tous les pays ont des villes de différentes tailles, les pays africains se caractérisent par des systèmes déséquilibrés où les activités économiques et les fonctions administratives sont concentrées dans la capitale ou la plus grande ville, plus qu’on s’y attend selon la loi « rang-taille ». Comparés au reste du monde, les pays africains ne comptent pas de villes dont la population est comprise dans la fourchette de 1 à 5 millions d’habitants (Freire, Lall et Leipziger, 2014) et la part moyenne de la population dans la plus grande ville d’un pays moyen d’Afrique (hors Afrique du Nord), est supérieure à celle de la ville correspondante dans d’autres régions.

Une explication courante de l’importance excessive accordée à la ville primaire en Afrique est la centralisation du pouvoir et le favoritisme dans l’affectation des ressources, qui peuvent avoir des effets négatifs sur la qualité de la vie, y compris la mortalité infantile et l’éducation (Henderson, Shalzi et Venables, 2001). Dans ces systèmes, les villes de petite et moyenne taille ne jouent pas un grand rôle dans l’accueil des populations et des investissements urbains croissants, à moins qu’ils n’atteignent un seuil minimal de taille concurrentielle ou que les grandes villes deviennent invivables (O’Sullivan, 2007).

L’existence de villes primaires en soi n’est pas un problème.

En fait, selon Henderson (2003), en concentrant spatialement l’industrialisation, souvent dans les villes

Les pays africains se caractérisent par des systèmes déséquilibrés où les activités économiques et les fonctions administratives sont concentrées dans la capitale ou la plus grande ville, plus qu’on s’y attend selon la loi « rang-taille ».

Les industries à forte intensité de

compétence et les secteurs axés sur le

savoir sont plus enclins à se regrouper

et à s’installer dans les grandes villes.

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LIENS ENTRE URBANISATION ET INDUSTRIALISATION

côtières, les pays à faible revenu peuvent conserver

« leurs rares infrastructures économiques et ressources managériales ». La déconcentration et la relocalisation peuvent aller de pair avec le développement à mesure que davantage de ressources sont disponibles et que les villes commencent à nécessiter des interventions plus coûteuses pour soutenir la qualité de la vie. Les pays peuvent prévoir ce processus en s’attaquant aux imperfections du marché qui entravent l’efficacité ou déforment la structure de taille elle-même et entraine

« leurs rares infrastructures économiques et ressources managériales ». La déconcentration et la relocalisation peuvent aller de pair avec le développement à mesure que davantage de ressources sont disponibles et que les villes commencent à nécessiter des interventions plus coûteuses pour soutenir la qualité de la vie. Les pays peuvent prévoir ce processus en s’attaquant aux imperfections du marché qui entravent l’efficacité ou déforment la structure de taille elle-même et entraine