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6.2 L’INTÉGRATION DE LA POLITIQUE URBAINE

ENCADRÉ 6.1 LE DÉVELOPPEMENT URBAIN DANS LES PLANS NATIONAUX DE DÉVELOPPEMENT:

RWANDA ET AFRIQUE DU SUD

Au Rwanda, l’objectif à long terme (Vision 2020) fait de l’urbanisation un élément essentiel de l’entrée du pays dans la catégorie des pays à revenu intermédiaire, avec comme cible une population urbaine de 30 % de la population totale par le développement planifié de Kigali et de six villes secondaires (Ministère des finances et de la planification économique, 2000).

De même, la stratégie de développement économique et de réduction de la pauvreté affirme que dans le cadre des priorités de la transformation économique, les six villes secondaires seront développées comme des pôles de croissance, des plaques tournantes de l’activité non agricole. On prévoit de réaliser des projets économiques stratégiques et d’améliorer les liens entre la capitale et les autres villes et les zones rurales par une amélioration de l’infrastructure tangible et intangible, mais la stratégie conserve à Kigali son rôle de pôle sous-régional. L’urbanisation verte sera un des piliers de l’économie verte retenus par la stratégie. Celle-ci présente expressément les liens entre transformation structurelle et urbanisation (Ministère des finances et de la planification économique, 2013).

En Afrique du Sud, le Plan national de développement à l’horizon 2030 considère la croissance urbaine comme une chance à saisir. Ce plan comporte une analyse des grandes tendances et de l’économie mondiale, et, dans ce cadre, il examine l’impact de l’essor de la classe moyenne sur la consommation et les perspectives d’activité. Le plan note également que l’urbanisation non seulement réduit le nombre de personnes employées dans la petite agriculture, mais aussi facilite la diversification de l’économie. Les effets conjugués d’une diminution des taux de dépendance et de l’urbanisation devraient avoir un effet appréciable sur la productivité de la main-d’œuvre (p. 86).

Le plan mentionne également l’augmentation prévisible du revenu discrétionnaire dans les villes et l’effet positif des dépenses de consommation sur l’activité des banques, des entreprises de télécommunications et sur les fabricants d’articles de grande consommation, mais il constate aussi que les villes ne sont pas assez productives pour créer suffisamment d’emplois en raison d’une part, de leur peine à retenir le pouvoir d’achat local ou à attirer l’investissement productif ou, d’autre part, de la performance médiocre de l’industrie. Le plan définit une approche du développement spatial qui crée des agglomérations urbaines dynamiques, équilibrées et fonctionnellement bien intégrées (Commission nationale de planification, sans date).

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URBANISER POUR INDUSTRIALISER: MESURES INDIQUÉES

car ces sous-secteurs sont ceux qui souvent permettent le mieux de réaliser les priorités de développement définies dans les plans de développement national.

Une industrie manufacturière à forte intensité de main-d’œuvre doit donc figurer en bonne place en raison de sa capacité unique d’absorber une main-d’œuvre nombreuse et semi-qualifiée tout en posant les bases d’une convergence de la productivité et d’une large croissance (voir chap. 3).Un tel ciblage doit également faire une place importante aux femmes dans la formation et le recrutement pour réaliser l’égalité des sexes.

Beaucoup d’États africains ont récemment confirmé qu’ils devaient se doter d’un plan national de développement comprenant des objectifs à long terme et les moyens de les réaliser. Le plan est le cadre général idéal pour relier les objectifs de l’urbanisation et de l’industrialisation.

Mais les pronostics de développement urbain diffèrent nettement d’un plan à l’autre. La plupart des plans n’ont qu’une approche limitée, privilégiant le logement ou cloisonnant les mandats des administrations, mal reliées entre elles, et rares sont ceux qui considèrent l’urbanisation dans l’optique des objectifs généraux de croissance. En outre, ces plans n’ont pas de perspective spatiale (de même que les plans d’urbanisme oublient l’aspect économique), même si certains pays sont plus avancés que d’autres à cet égard (encadré 6.1).

Une fois qu’on a bien compris que l’urbanisation et l’industrialisation se renforcent mutuellement, on peut choisir des mesures de politiques intégrées qui comprennent un bon ciblage sous-sectoriel, des mesures de politique industrielle, un ciblage spatial et des politiques urbaines ou régionales s’inscrivant dans le cadre plus général de la planification nationale du développement (fig. 6.1).

CIBLAGE DES SOUS-SECTEURS PAR LA POLITIQUE INDUSTRIELLE

L’impact de l’investissement et des ressources publiques sera d’autant plus grand qu’ils aideront à renforcer l’activité de certains sous-secteurs industriels et leur chaîne de valeur en fonction des objectifs de développement inscrits dans le plan national de développement.

PRIORITÉ AUX INDUSTRIES DE MAIN-D’ŒUVRE L’activité manufacturière à forte intensité de main-d’œuvre doit être un élément privilégié en raison du nombre d’emplois qu’elle peut créer (voir chap. 3).

Réciproquement, les politiques qui encouragent avant tout les sous-secteurs à forte croissance mais créent peu d’emplois – directement ou par leur effet multiplicateur – contribueront peu à la transformation structurelle et ne parviendront pas à exploiter le dividende démographique ni à mettre fin à la pauvreté. C’est un problème particulier Plan national de développement

Ciblage des sous-secteurs

Ciblage spatial

Politiques industrielles

Politiques urbaines et

régionales Planification

économique Planification urbaine

et spatiale

FIGURE 6.1 Les liens entre les politiques de développement national, industriel et urbain

Source: Auteurs

RAPPORT ECONOMIQUE SUR L’AFRIQUE

pour les pays fortement tributaires des ressources naturelles. Ces pays doivent utiliser le revenu que procurent les ressources naturelles pour investir dans des réseaux urbains fonctionnels, qui sont la base d’une croissance économique stable à long terme, et privilégier les politiques et les investissements de création de valeur ajoutée établissant des liens avec les industries à forte densité de main-d’œuvre.

VALORISATION DES AVANTAGES COMPARATIFS EN FONCTION DE LA DOTATION DE RESSOURCES ET DE LA GÉOGRAPHIE DU PAYS

Le ciblage des sous-secteurs à retenir pour l’industrialisation et la bonne gestion des arbitrages entre les stratégies d’investissement doivent examiner leurs avantages comparatifs. Pour les pays, ces avantages peuvent être le résultat de la combinaison de leur dotation en ressources naturelles, de leur trajectoire de croissance, de leur situation géographique et de la dynamique régionale. Il est important de choisir les sous-secteurs industriels où l’économie du pays peut être compétitive en fonction des ressources naturelles disponibles, mais il peut y avoir des avantages à entrer dans des sous-secteurs à plus forte productivité où il n’y a pas encore d’avantages comparatifs, ceux-ci pouvant être acquis progressivement (Redding, 1999).

L’élargissement et l’approfondissement des chaînes de valeur liées à la dotation en ressources naturelles sont d’importance critique pour la politique industrielle en Afrique. Les rapports précédents ont bien souligné l’importance d’une industrialisation basée sur les matières premières comme moyen de diversifier les économies africaines à long terme tout en constituant progressivement des avantages compétitifs dans les pays riches en ressources (ERA 2014). La politique industrielle doit retenir de préférence les sous-secteurs qui peuvent répondre à la croissance et à la refonte des structures de la consommation urbaine, en tenant compte du potentiel agricole du pays, de sa dotation en ressources naturelles et des chaînes de valeur correspondantes.

Les avantages comparatifs liés à la géographie peuvent résulter de la proximité des marchés continentaux et non africains ou des liaisons avec ceux-ci; c’est le cas de Tanger, dont l’industrie automobile prospère en raison en partie de la proximité des marchés européens.

Le commerce international de l’Afrique présente des possibilités d’un grand intérêt, et les exportations intra-africaines représentent une gamme plus diversifiée de marchandises et de services que les exportations vers les autres continents.

Au niveau sous-régional, les avantages géographiques, en particulier, devraient être renforcés par les communautés

économiques régionales de l’Afrique et par la zone continentale de libre-échange qui est proposée. Par exemple, le Rwanda est un pays enclavé dont le marché intérieur est réduit, mais c’est aussi un leader dans les services exposés au commerce international, qui pourraient être mieux reliés aux industries sous-régionales, et son industrie agroalimentaire pourrait mieux desservir les marchés sous-régionaux si la logistique et les ports intérieurs étaient mieux organisés.

Sur la base de la dotation en ressources naturelles, le ciblage spatial des sous-secteurs industriels doit être coordonné avec le développement urbain. Les sous-secteurs qui dépendent le plus des ressources naturelles ou dont les facteurs de production sont peu mobiles se concentreront sans doute dans des localités qui possèdent ces avantages. Ces préférences peuvent être guidées et soutenues, tout en étant reliées à la conception d’ensemble de l’urbanisation et du réseau urbain national.

SOUTIEN AUX SOUS-SECTEURS EXISTANTS

Les sous-secteurs industriels existants ne doivent pas être oubliés, en particulier ceux qui se sont développés spontanément en réponse à la demande. Ces sous-secteurs peuvent être créateurs d’emplois et améliorer la compétitivité du pays moyennant une politique bien conçue, en particulier dans la petite activité manufacturière informelle où les petites entreprises sont paralysées par le mal qu’elles ont à se procurer les principaux facteurs de production (terrains, électricité, crédit ou qualifications).

À l’aide de données par industrie et par entreprise, il est indispensable de repérer les sous-secteurs qui sont en pointe, ou au contraire en retard, naissants ou en déclin. Les dirigeants peuvent également examiner la position du pays dans chaque espace de produit2 pour orienter l’activité industrielle du pays vers un ensemble d’articles dont la production est susceptible d’améliorer les qualifications, les capacités et les liens avec d’autres articles similaires, ouvrant ainsi des possibilités de diversifier l’économie vers des produits similaires.

L’impact de l’investissement et des

ressources publiques sera d’autant

plus grand qu’ils aideront à renforcer

l’activité de certains sous-secteurs et

leur chaîne de valeur en fonction des

objectifs de développement inscrits dans

le plan national de développement.