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conviction dans le travail pour les uns et l‟amateurisme pédagogique pour les autres prestant parfois sans formation requise, seraient, entre autres, l‟un des principaux facteurs explicatifs de la baisse du niveau et de la qualité de l‟enseignement offert en RDC en général et à

Kinshasa en particulier »219.

La prise en compte du diplôme qualifié pour l‟enseignement se justifie par le fait que

« l‟identité professionnelle enseignante se construit notamment par la formation »220. Ainsi,

la qualité de la formation professionnelle d‟un enseignant et le type de diplôme qui le sanctionne ont un impact sur ses représentations de la profession.

b.3 Raisons du choix de la profession enseignantechez les enseignants enquêtés

Les raisons du choix Nombre Pourcentage

Passion pour la discipline 5 23.81

Rester en contact du savoir 6 28.58

L‟autonomie dans le travail 3 14.29

Pour le temps libre 2 9.52

Pour le prestige social de la profession

3 14.29

Pour la promotion sociale. 2 9.52

Total des enquêtés 21 100

Tableau 29

La majorité des enseignants (28,58%) dans le tableau 21à Kinshasa ont choisi de rester dans la profession pour des raisons de contact du savoir. Le côté finance n‟est pas évoqué dans la mesure où la plupart des enseignants souhaiteraient un emploi plus rémunéré. Selon une

étude du Pnud221 réalisée en 2012, sur 9000 diplômés sortant chaque année des universités

congolaises, moins de 100 parviennent à trouver un emploi stable. Par contre, 23,80% ont la passion pour la discipline quand bien pour le prestige social (14,29%) et l‟autonomie dans la fonction (14,29%) concourent au choix du métier.

Autres informations

219 Mopondi « Trajectoires, profils et insertion professionnelle des enseignants du secondaire à Kinshasa en République Démocratique du Congo » Université Catholique de Louvain. In : Revue de l‟Association Francophone Internationale de Recherche Scientifique en Éducation N º 10 (2013), p 13

220 Altet, M., Innovation et formation des enseignants. Un dispositif de formation initiale des enseignants, innovant et théorisé, Recherche et formation, 31, 1999 p. 25

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La profession d‟enseignant.e qui jouissait d‟un prestige il y a près de six décennies, au Congo-Kinshasa, exerçait une véritable fascination sur ceux qui en avaient la vocation. Peu après l‟accession du pays à la souveraineté nationale, le 30 juin 1960, des mutations profondes et permanentes de l‟environnement sociopolitique ont ébranlé le système scolaire dont les pratiques de gestion des ressources humaines ont subi le contrepoids de ce qui est ressenti aujourd‟hui comme un malaise par certains enseignants. La légitimité du statut d‟enseignant a été remise en question.

Le type de trajectoires pédagogiques et professionnelles de ceux-ci ainsi que le contexte global de l‟exercice professionnel sont devenus problématiques. D‟où le manque d‟assurance de la qualité du personnel enseignant et de la capacité pour l‟institution scolaire à accomplir ses missions fondamentales de formation, d‟éducation et de socialisation à court, moyen et long termes. L‟efficacité du système éducatif congolais, son efficience et son équité sont devenues quasi hypothétiques.

Par ailleurs, de nombreuses recherches indiquent qu‟un relèvement de la qualité des enseignant.e.s serait une des mesures susceptibles d‟améliorer l‟efficacité des institutions scolaires (OCDE, mars 2006, p. 25).

Le système scolaire reste un moyen incontournable pour contribuer au développement social.

A en croire Phambu222, de plus en plus de « diplômés du supérieur parmi les enseignants du

secondaire sont recrutés indistinctement dans toutes les filières d‟études de l‟enseignement supérieur et universitaire, tant publiques que privées sans qualification pédagogique. D‟aucuns estiment que le mode actuel de pilotage du système éducatif ainsi que l‟atypisme des trajectoires pédagogiques et professionnelles du personnel enseignant sont, entre autres,

des éléments révélateurs des lacunes profondes qui le traversent ».

Le système, en recrutant prioritairement sur base des titres académiques et en négligeant bien souvent la prise en compte de la composante pédagogique ou psychopédagogique, ne serait certainement plus en mesure garantir la qualité de l‟enseignement offert et l‟exercice efficient du rôle social qu‟on en attend. Aussi, la question qui se pose est celle du profil social des enseignants. Qui sont ces enseignants, leurs représentations du métier d‟enseignant, celles de leurs trajectoires scolaires et professionnelles ?

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b.4 Raisons du choix de la profession enseignantepar les enseignantes enquêtées

Les raisons du choix Nombre Pourcentage

Passion pour la discipline 3 15.79

Rester en contact du savoir 6 31.58

L‟autonomie dans le travail 3 15.79

Pour le temps libre 2 10.53

Pour le prestige social de la profession

3 15.78

Pour la promotion sociale. 2 10.53

Total des enquêtées 19 100

Tableau 30

Dans le tableau ci-dessus, « la passion pour la discipline » et « le prestige social » sont des items qui partagent le même pourcentage soit 15,78% .Cela montre au Congo-Kinshasa que la profession enseignante ne représente pas pour les femmes une priorité, mieux une profession qui attire. Si les enseignantes, en dépit des difficultés socioéconomiques, souhaitent rester dans le métier, c‟est justement par simple « contact du savoir » (31,57%). Par contre, la « promotion sociale » qui représente 10,52% constitue l‟item a mieux de rendre explicite les préoccupations des enseignantes au Congo-Kinshasa confrontées au climat social rigide, notamment la difficulté de gérer leurs foyers matrimoniaux conséquence de la cherté des premiers alimentaires de première nécessité.

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b.4 L’accès au métier : aux origines sociales du métier

ORIGINE SOCIALE DES METIERS DES PARENTS DES ENQUÊTE.E.S

Solda t agriculteu rs Artisan Femme au foyer enseignant Profession libérale PERE 6 1 1 0 3 2 MERE 2 1 2 2 2 ONCLE 1 1 1 1 0 1 TANTE 0 1 1 1 0 1 FRERE 6 1 1 0 1 Total des métiers 15 5 6 4 3 7

Tableau 31 : L‟accès au métier, origine sociale des métiers des parents des enquêté.e.s

Le tableau ci-dessus présente une occurrence assez élevée du nombre des parents exerçant le métier de soldat dont sont issus la plupart des enseignant-e-s/objet. C‟est dire qu‟au Congo-Kinshasa, l‟armée est le premier employeur vu les privilèges souvent accordés, du genre gratuité des transports, non observation des files d‟attente en cas de flux. D‟autres métiers comme agriculteurs (paysan) et profession libérale présentent la même occurrence et témoignent l‟autre itinéraire, l‟attachement à l‟agriculture de consommation, puisque non motorisée. Dans ce cas, les professions constituent des éléments essentiels de la structure sociale et de sa régulation morale. Elles représentent des enjeux et sont inscrites dans des trajectoires historiques. Nous constatons que les parents enseignants, les femmes au foyer et autres artisans, ayant la même fréquence sont moins représentatifs.

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Dans notre échantillon, seulement 3 enseignants sur 21 sont issus de parents enseignants. C‟est dire que l‟influence a été plus porteuse que sur ceux qui sont issus de parents soldats. Ce métier étant considéré comme dernier recours quand on n‟a pas réussi ailleurs.

Notons que « agriculteur » est pris dans le sens de celui qui possède des terres et les met en valeurs avec des outils traditionnels du genre machette, houe et rarement un tracteur. Le vocable le plus à traduire cette réalité est paysan. L‟artisan se confondant parfois avec la profession libérale, c‟est-à-dire celui qui travaille à son propre compte. Par contre la profession de la mère est pyramidale. Au sommet se situe la « femme au foyer » (ménagère aux Congo), caractéristique des sociétés traditionnelles où la femme s‟occupe de l‟éducation des enfants dans la mesure où elle passe plus de temps avec les enfants à domicile. Nous

sommes en présence d‟une société dans laquelle le père, le pater familias, est la figure

dominante sur les rapports avunculaires.

b.5 Accès au métier chez les hommes enquêtés au Congo-Kinshasa

Tableau 32

Autres informations :

Pour éclairer le rapport au métier, il nous semble nécessaire d‟analyser les raisons qui

interviennent dans le choix de la profession. En effet, selon Nault223, le choix du métier

correspond à plusieurs moments où déjà se construit une image idéalisée de ce que l‟enseignant doit être, pouvant influencer le développement ultérieur de l‟identité professionnelle. Pour cela il note trois moments d‟entrer dans le monde du travail : l‟anticipation, le choc de la réalité et la consolidation des acquis. Les enseignant.e.s au Congo-Kinshasa ont choisi pour la plupart leur profession à 71,43%, même si 28,57% manquent de choix. Leur métier a perdu de plus en plus son prestige d‟antan. Quel est le statut de l‟enseignant congolais aujourd‟hui, quelles sont ses conditions de travail, l‟avenir de sa profession et le sien? Le tableau que les enseignants dressent de leur profession est plus

223 Nault, G., « Insertion, identité et développement professionnels : trois concepts aux liens étroits ». In :

Pédagogie collégiale. Vol. 20, n°2, 2007, p19

Choix du métier Nombre Pourcentage

N‟ont pas choisi la

profession

6 28.57

Ont choisi la profession 15 71.43

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que sombre et leur statut terni. Dans ces conditions certains n‟hésitent pas à avoir des comportements peu professionnel vu la rémunération mensuelle modique.

A noter qu‟un enseignant-e congolais en monnaie locale perçoit autour de 60 000 francs congolais, soit près de 43 euros. Les autorités reconnaissent que la rémunération participe à la valorisation de la fonction enseignante. C‟est ainsi qu‟une loi cadre, n° 086-005 du 22 septembre 1986 faisant référence au statut particulier a été institué afin de valoriser la fonction et assurant des conditions de travail motivant et rassurant. Aujourd‟hui, l‟application de la loi cadre n‟est qu‟un vain espoir puisque le quotidien plonge plus les enseignant.e.s dans la précarité. D‟ailleurs Joséphine de l‟école Saint Esprit ne cache pas son désespoir

quand elle perçoit son salaire modique : « Quand je touche ma paie, imaginer la

gymnastique, payer le loyer, la nourriture, le transport pour le travail, impossible d‟ouvrir

une épargne ». A cela s‟ajoute des « conditions de travail presque moyenâgeuses ». A ce

sujet, nous avons pu avoir un témoignage d‟un enseignant d‟une école de la province de

Bandundu, à l‟Ouest de Kinshasa : « des salles de classe bondées et mal éclairées, des élèves

à même le sol, les conditions de travail de l‟enseignant congolais relèvent d‟un autre âge. Dans une école de la province de Bandundu… l‟argile remplace les tableaux en bois. Et pour le noircir, les enseignants recourent à un mélange d‟épinard sauvages pilés et d'une solution d‟huile de palme et de braise. Des cossettes de manioc sont utilisées comme craie. Ingénieux

non? ».

Cette description de l‟école renforce l‟idée selon laquelle l‟école congolaise tout comme l‟éducation au Congo-Kinshasa sert de marchepied aux futurs jeunes qui vont grossir les rangs des sans emplois. Au lieu d‟attirer les jeunes pour se familiariser avec les connaissances universelles, certains d‟entre eux ne voient plus l‟intérêt des études en voyant leurs ainés diplômés sans travail. Les critères de choix du métier sont également fortement liés au genre.