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1.4.1. Polymorphisme

Un cristal est caractérisé par un arrangement régulier et périodique des atomes et/ou des molécules qui le composent. Des polymorphes ont exactement la même composition chimique, mais des structures cristallines différentes (Figure 8c). Cependant, le polymorphisme n’est pas le seul moyen pour un solide d’exister sous plusieurs formes. En effet, les phases d’un composé diffèrent à la fois par leur structure cristalline et leur composition chimique. Ainsi, dans certains cas, la cristallisation d’une molécule dans des solutions différentes, c’est-à-dire en présence d’agents de cristallisation ou de solvants différents, ne permet pas d’obtenir différents polymorphes, mais bien des phases différentes. Les agents de cristallisation et le solvant font alors partie intégrante de la structure du cristal obtenu (Figure 8a). Néanmoins, ces différentes phases sont, en pratique, également appelées polymorphes, ou pseudo-polymorphes, par abus de langage (Mangin et al., 2008). Enfin, les co-cristaux sont des ensembles à plusieurs composants maintenus ensemble par des interactions réversibles, non covalentes (par exemple une protéine et son ligand, Figure 8b) (Schultheiss and Newman, 2009).

Les polymorphes comme les différentes phases cristallines sont bien des solides différents, avec des propriétés physiques différentes. Un exemple bien connu est celui du diamant et du graphite, deux solides composés exclusivement de carbone, mais ayant des propriétés physiques très différentes : résistance mécanique, conductivité… De la même façon, deux polymorphes auront des densités, des solubilités, des faciès ou des propriétés optiques différent(e)s (Mangin et al., 2008).

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Figure 8 : Différents types de cristaux (Schultheiss and Newman, 2009).

1.4.2. Transition de phase

Le polymorphisme est dû au fait que la cristallisation est à la fois un processus thermodynamique et cinétique. La cinétique peut favoriser la formation de la forme métastable, tandis que la thermodynamique favorise la formation de la forme stable (Bernstein, 2002). En effet, d’un point de vu thermodynamique, dans une condition donnée (température, pression, …), il n'existe qu'une seule phase stable, pour laquelle l’énergie libre du système est minimale. Les autres phases sont donc métastables, comme par exemple le diamant est une phase métastable du carbone. Lorsque la phase métastable cristallise en premier, celle-ci se transformera théoriquement en la phase stable à la fin de la cristallisation. C’est une transition de phase, qui peut être infiniment lente ou relativement rapide en fonction du système étudié (molécule, condition de cristallisation, …). Il est difficile de prédire quelle phase sera produite dans un système donné. D’autre part, une petite variation de température peut entrainer une transition de phase (Mangin et al., 2008).

1.5. Mûrissements

Dans un système fermé, la sursaturation de la solution diminue progressivement à mesure que les cristaux se forment et croissent, entrainant ainsi une diminution de la cinétique de la cristallisation. Le système se déplace alors vers un équilibre entre le cristal (ou les cristaux) et la solution : c’est la fin de la cristallisation.

1.5.1. Mûrissement d’Oswald

Lorsque la nucléation et la croissance de la phase stable sont terminées, la solution peut contenir un grand nombre de cristaux de taille et parfois de faciès différents. Cette variété est due à la diminution de la sursaturation au fil des nucléations : les cristaux ont nucléé dans des conditions différentes (Candoni et al., 2012a).

D’après l'Équation 5, seuls les cristaux qui ont atteint la taille critique r* sont stables en solution. Or cette taille critique à atteindre augmente à mesure que la sursaturation diminue. Ainsi, à toute sursaturation correspond une taille critique r* pour laquelle il n'y a ni croissance, ni dissolution. Tout cristal ayant un rayon r < r* se dissout, car, pour lui, la solution est sous-saturée. Au contraire, tout cristal ayant un rayon r > r* croît, car pour lui, la

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solution est sursaturée (Boistelle, 1985). Ainsi, la matière provenant d'un petit cristal en voie de dissolution est immédiatement récupérée par un cristal voisin plus gros qui en profite pour croître. C’est le mûrissement d’Oswald, un phénomène isotherme. Dans le cas de la cristallisation des protéines, ce phénomène est à l’origine de la croissance de cristaux à partir de certains précipités (Ng et al., 1996). Ces précipités sont en fait composés de microcristaux, les plus petits se dissolvent tandis que les plus gros croissent (Figure 9).

Figure 9 : Mûrissement d’Oswald observé pour la rasburicase. Le précipité observé au moment de la formation des gouttes conduit à la formation de cristaux (Zhang et al., 2015a).

1.5.2. Mûrissement cinétique

Dans le cas des protéines, les cinétiques de croissance et de dissolution sont très lentes lorsque la concentration est proche de la solubilité. Le mûrissement d’Oswald est donc rarement observé. Le mûrissement peut cependant être activé par des fluctuations de température aux alentours de la température d’équilibre : c’est le mûrissement cinétique (Boistelle et al., 1992). La Figure 10 montre deux cas de mûrissement cinétique de cristaux de α-amylase. La Figure 10a présente le cas d’une large distribution en taille des cristaux.

Dans un premier temps, une augmentation de la température de quelques degrés conduit à la dissolution des cristaux, petits et gros (Figure 10b). Les plus petits contenant moins de matière, ils se dissolvent plus vite. La température est ensuite diminuée, de façon à empêcher la dissolution complète des gros cristaux. Ces derniers grossissent donc en incorporant la matière disponible en solution suite à la dissolution des petits cristaux (Figure 10c). Cette méthode peut également être appliquée aux cristaux maclés (Figure 10d-f) ou aux précipités (Astier and Veesler, 2008).

Figure 10 : Mûrissement cinétique de cristaux de α-amylase en (a) par (b) dissolution partielle et (c) re-croissance. Elimination d’un défaut macroscopique observé en (d) par (e) dissolution et (f) croissance (Astier and Veesler, 2008).

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1.6. Criblage et optimisation des conditions de