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Les politiques européennes énergie-climat : entre rôle programmatique et leviers d’action importants sur les politiques des États membres

climat européennes et des initiatives locales

B- Les politiques européennes énergie-climat : entre rôle programmatique et leviers d’action importants sur les politiques des États membres

1- La lutte contre le réchauffement climatique : la compétence environnementale comme leviers d’action sur les politiques énergétiques nationales.

Les problématiques économiques (achèvement du marché intérieur) ne sont pas les seules à avoir prévalu à la construction de la politique énergie-climat communautaire. Des problématiques géopolitiques (sécurisation des approvisionnements et recherche d’une indépendance énergétique) et environnementales (lutte contre le réchauffement climatique et réduction des pollutions atmosphériques) ont également joué un rôle majeur dans cette construction. La politique énergie-climat communautaire poursuit donc trois types d’objectifs formant « le triangle européen non résolu » ou « l’équation énergétique non résolue » (Keppler, 2007, 2009) et s’inscrit dans un paradigme de développement durable. « La difficulté

d’abandonner [aujourd’hui] la mentalité du passé [s’observe], en particulier, dans l’incapacité des responsables politiques européens d’organiser les arbitrages nécessaires entre les trois objectifs stratégiques de la politique énergétique européenne » (Keppler, 2009, p. 217). Ces

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trois piliers de la politique énergie-climat communautaire ont émergé au cours des années 1970 dans un contexte de chocs pétroliers et de conscientisation environnementale. « Ces trois piliers

ont figuré au cœur de toutes les publications et décisions européennes sur l’énergie » (Aykut

et Dahan, 2014, p. 229). C’est au cours des années 1980 que la lutte contre le réchauffement climatique devient un moteur de la politique énergie-climat communautaire. L’implication de l’Europe dans cette lutte « relève de multiples objectifs, économiques (être au cœur d’une

révolution industrielle « verte »), identitaires (s’inscrire dans le thème du développement durable) et diplomatiques (reconstruire un leadership européen parfois contesté à l’international) » (Derdevet, 2009, p. 34). Cette lutte est également considérée par les instances

européennes comme un vecteur de relance du processus d’intégration (Aykut et Dahan, 2014) qui peut permettre à l’Europe de proposer « une réflexion plus ambitieuse sur l’énergie » (Vaché, 2009, p. 68). La compétence environnementale constitue ainsi un nouveau point d’entrée pour l’Europe dans la question énergie-climat.

Dès 1989, au cours de la deuxième Conférence mondiale sur le climat de La Haye, les 12 membres de la CEE s’engagent à stabiliser leurs émissions de CO2 par rapport à 1990 à l’horizon 2000. À la suite de cette conférence, la CEE lance en 1989 le programme JOULE dont le but est de permettre un développement d’énergies alternatives non nucléaires et une utilisation rationnelle de l’énergie. L’objectif de stabilisation est ensuite entériné par le Conseil européen du 29 octobre 1990 et est retenu dans la CCNUCC en 1992. À partir de 1991, la Commission européenne se voit charger d’élaborer des instruments et des mesures pour permettre cette stabilisation : il s’agit de lancer des programmes de recherche spécifiques visant l’efficacité énergétique et le développement des EnR, d’élaborer une écotaxe européenne et d’établir un « partage du fardeau » européen. Cette stratégie combine quatre mesures phares : l’élaboration d’une directive sur l’efficacité énergétique dans le cadre du programme existant

Specific Actions for Vigorous Efficiency (SAVE), la promotion des énergies renouvelables dans

le cadre du programme Alternative Energy Programme of the European Union (ALTENER), l’élaboration d’une taxe combinant énergie et émissions de CO2 et la mise en place d’un mécanisme de suivi pour les émissions de GES. « Le programme ALTENER […], doté d’un

budget de 40 millions d’écus sur cinq ans, prévoit le doublement de la part des renouvelables dans le mix énergétique européen entre 1991 et 2005 (de 4 à 8 %) » (Aykut et Dahan, 2014, p.

233). Le cinquième Programme d’action pour l’environnement (1992-2000) intègre ces différentes orientations et s’inscrit dans le paradigme du développement durable.

L’Acte unique (1986) et le Traité de Maastricht (1992) qui relancent le processus d’intégration européenne, la dissolution de l’URSS qui conduit à un repositionnent communautaire sur la scène internationale et l’absence des États-Unis sur la question climatique constituent « trois circonstances historiques particulières […] réunies pour créer un contexte

favorable à l’engagement des instances européennes sur le dossier climatique » (Aykut et

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(1986) et renforcée par les Traités de Maastricht (1992) et d’Amsterdam (1997) institue la protection de l’environnement comme objectif communautaire. Ces trois textes européens posent quatre principes essentiels, les principes d’action préventive, de précaution, du

mainstreaming et de subsidiarité (Aykut et Dahan, 2014). Ces principes guidant l’action

énergie-climat communautaire se voient renforcés par la Stratégie de Lisbonne (2000) qui vise « à faire de l’Europe [avant 2010] « l’économie de la connaissance la plus compétitive et la

plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable » » (Cans, 2009, p.

13). Le développement durable dont s’enrichit la politique économique communautaire au cours du Sommet de Göteborg (2001) constitue alors le troisième pilier de cette Stratégie.

Par son adhésion à la CCNUCC (1992) et au protocole de Kyoto (1997), l’UE s’affirme comme le leader de la lutte globale contre le réchauffement climatique même si ce leadership apparaît paradoxal, les instances européennes peinant au cours de cette même période à imposer leurs recommandations à ses États membres (Ringius, 1999 ; Sprinz et Weiß, 2001). En ratifiant le protocole de Kyoto, l’UE s’est engagée à baisser de -8 % ses émissions de GES par rapport à 1990 entre 2008-2012. L’absence d’expérience communautaire dans le recours au marché comme régulateur des questions environnementales (Godard, 2000) explique que la Commission européenne mènera après la COP-3 de Kyoto « une réflexion stratégique destinée

à assurer la mise en œuvre de ce futur engagement international […] La Commission n’entend pas cependant imposer la création d’un système spécifique d’échanges et de négoce des droits d’émission au niveau communautaire » (Leclerc, 2002, p. 117-118). La Commission

européenne propose un Livre vert97 (2000) dans lequel elle analyse l’ensemble des solutions possibles pour établir un système communautaire d’échange de droits d’émission de GES sans néanmoins prendre position. En 2001, constant que « les mesures prises individuellement par

les États membres ne permettraient pas d’atteindre l’objectif du protocole de Kyoto »

(Delalande, 2009, p. 160), la Commission européenne met en place le Programme Européen sur le Changement Climatique (PECC). Le PECC « repose sur deux principes : sélection des

mesures les plus efficaces du point de vue économique, et application à l’ensemble des secteurs » (Ibid, p. 160). Ces deux principes d’action vont encadrer l’élaboration d’un certain

nombre de directives et de règlements à l’échelle européenne dans le domaine des énergies renouvelables, de l’efficacité énergétique et de la lutte contre le réchauffement climatique. En 2003, après trois années de consultation, la Commission européenne tranche, établissant un Système Communautaire d’Échange de Quotas d’Émissions (SCEQE) 98, mise en œuvre à partir de 2005 sous le contrôle de la Commission européenne et de l’Agence Européenne pour l’Environnement (AEE).

97 Commission européenne (2000). Livre vert sur l’établissement dans l’Union européenne d’un système d’échange de droits d’émission des gaz à effet de serrre. COM (2000) 87 Final, 8 mars 2000 [en ligne], consulté le 10 septembre 2016.

Disponible sur http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=URISERV:l28109&from=FR 98 Directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 relative au système communautaire d’échange de quotas d’émissions.

128 Phase I [2005-2007] Phase II [2008-2012] Phase III [2013-2020] Pays concernés UE-25 + Roumanie et Bulgarie en 2007 UE-27 + Islande, Liechtenstein et Norvège UE-27 + Croatie en 2013 + Islande, Liechtenstein et Norvège

GES concernés CO2 CO2 + N2O CO2 + N2O + PFC

Secteurs d’activité concernés

Électricité, raffinage, fer et acier, ciment, verre, chaux, verre, céramique et papier

Idem

Idem

+ chimie, aluminium, capture CO2

Plafond 2 300 Mt/an 2 100 Mt/an 1 950 Mt/an 2013

1 700 Mt/an en 2020 Allocation de quotas Allocation gratuite à au moins 95 % Allocation gratuite à 90 % Allocation gratuite à 100 % pour le ciment et l’acier

Allocation aux enchères à 100 % pour l’électricité

Part des enchères progressive dans les autres secteurs Allocation gratuite faite sur

la base de benchmarks © Kévin Duruisseau – 2016 / de Perthuis et Trotignon (2014)

Tableau 13 – Évolution des caractéristiques du SCEQE entre 2005 et 2020

Le SCEQE s’applique initialement à sept secteurs industriels : l’énergie, la sidérurgie, la cimenterie, le verre, la chaux, la brique, la céramique et le papier. Le système concerne alors entre 11 000 et 12 000 installations industrielles représentant 40 % des émissions de GES communautaires dont la moitié provient des entreprises productrices d’électricité. Le SCEQE ne concerne donc pas « les émissions diffuses provenant des secteurs du transport, de

l’agriculture, des bâtiments et du secteur des déchets » (Alberola et Fages, 2009, p. 68).

Conformément à la directive SCEQE, un Plan National d’Allocation des Quotas (PNAQ), élaboré par chaque État membre, doit permettre l’identification des entreprises les plus émettrices et la répartition entre celles-ci des quotas d’émissions par pays accordés par les instances européennes. Au cours de la première période [2005-2007] de fonctionnement du marché, 95 % des quotas carbones autorisés sont attribués gratuitement aux installations des secteurs concernés. Au cours de la deuxième période [2008-2012] de fonctionnement du marché, 90 % des quotas carbones autorisés sont attribués gratuitement à ces mêmes installations. Au cours de la troisième période [2013-2020] le fonctionnement du marché différencie les différents secteurs concernés qui comprennent dorénavant en plus les secteurs de la chimie, de l’aluminium et de la capture du CO2. Alors que les quotas carbones autorisés restent attribués gratuitement ou de manière progressive pour les autres secteurs, les quotas carbones autorisés pour les entreprises productrices d’électricité sont mis aux enchères à 100 % [cf. tableau 13]. Entre 2005 et 2015, le SCEQE a souffert d’une surallocation de quotas carbones autorisés au cours de la première période et de la crise économique de 2008 qui ont conduit à un effondrement du prix des quotas d’émissions CO2 sur le marché libre qui chute de 30 à moins de 10 $/tCO2. Cette baisse hypothèque alors la voie de résolution de la question climatique.

Le recours au marché comme moyen de régulation des émissions de GES communautaires n’est cependant pas l’unique outil à la disposition des instances européennes dans la lutte contre le réchauffement climatique. Le développement des énergies renouvelables

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(ER) constitue une voie de plus en plus mise à contribution dans la construction de la politique énergie-climat de l’UE. Plusieurs atouts connexes expliquent ce recours aux ER, une plus grande sécurisation de l’approvisionnement énergétique en réduisant la dépendance aux hydrocarbures et des perspectives d’émergence de nouvelles filières industrielles à haute valeur ajoutée pour les entreprises européennes (Deshaies, 2014a, 2014b, 2014c). C’est ainsi qu’en 1997, soit un an après son Livre vert99 portant sur les sources d’énergie renouvelables, que la Commission européenne propose dans un Livre blanc100 de porter la part des ER dans la consommation énergétique finale communautaire à 12 % à l’horizon 2010 et qu’en 2000 dans un Livre vert101, elle propose de porter la part des ER dans la consommation électrique communautaire à 24 % à l’horizon 2010. Ces deux documents de réflexion débouchent sur la directive du 27 septembre 2001102 qui prévoit de porter la part des ER à 12 % dans la consommation énergétique finale communautaire et à 21 %103 dans la production d’électricité communautaire à l’horizon 2010. « La Commission européenne ayant constaté dès 2004 un

retard dans l’atteinte de l’objectif fixé à l’UE, la relance de la politique en faveur des [ER] et de la protection du climat a débouché sur l’adoption en mars 2007 par le Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement des objectifs dits « 3 fois 20 » » (Deshaies, 2014, p. 249-250).

2- Du paquet énergie-climat 2020 au paquet énergie-climat 2030 : l’affirmation d’une politique européenne de transition énergétique « bas carbone ».

Dans la perspective de l’évolution du régime international du climat post-Kyoto, la Commission européenne appelle en 2007, dans une nouvelle communication104, à une intensification de la lutte communautaire contre le réchauffement climatique par une politique énergie-climat plus ambitieuse s’inscrivant dans le paradigme de la croissance verte. La Commission européenne y propose une réduction de -20 % des émissions de GES et une amélioration de +20 % de l’efficacité énergétique par rapport à 1990 ainsi que de porter à 20 % la part des ER dans la consommation énergétique finale communautaire, à l’horizon 2020. L’ensemble de ces objectifs est adopté au cours du Conseil européen des 8 et 9 mars 2007. La Commission européenne reçoit alors « mandat pour faire un ensemble de propositions

99 Commission européenne (1996). Livre vert sur les sources d’énergie renouvelables. COM (96) 576 Final, 20 novembre 1996 [en ligne], consulté le 10 septembre 2016.

Disponible sur http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=URISERV:l27018&from=EN 100 Commission européenne (1997). Livre blanc sur l’énergie pour l’avenir : les sources d’énergie renouvelables. COM (97) 599 Final, 26 novembre 1997 [en ligne], consulté le 10 septembre 2016.

Disponible sur http://europa.eu/documents/comm/white_papers/pdf/com97_599_en.pdf

101 Commission européenne (2000). Livre vert. Vers une stratégie européenne de sécurité d’approvisionnement énergétique. COM (2000) 769 Final, 29 novembre 2000 [en ligne], consulté le 10 septembre 2016.

Disponible sur http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:52000DC0769&from=FR 102 Directive 2001/77/CE du 27 septembre 2001 relative à la promotion de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables sur le marché intérieur de l’électricité.

103 Avant l’élargissement de l’UE en 2004, l’objectif global était de porter la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité à 22,1 % à l’horizon 2010.

104 Commission européenne (2007). Une politique de l’énergie pour l’Europe. COM (2007) 1 Final, 10 janvier 2007 [en ligne], consulté le 10 septembre 2016.

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législatives permettant la mise en œuvre des dispositions visant à atteindre ces objectifs »

(Delalande, 2009, p. 161). Le 23 janvier 2008, elle soumet au Parlement européen, qui l’adoptera le 17 décembre 2008, le Paquet énergie-climat comprenant un ensemble de directives et règlements : une directive sur le stockage géologique du CO2, une directive sur la promotion des ER, une directive sur la réforme du marché des quotas carbone, une décision sur la réduction des émissions de GES pour les secteurs non couverts par le SCEQE, une directive modifiée sur les spécifications relatives aux carburants en Europe et un règlement sur la réduction des émissions de CO2 des véhicules légers. La nécessité pour l’UE de définir une position commune pour la COP-15 de 2009 à Copenhague et la présidence française de l’UE expliquent l’adoption très rapide du Paquet énergie-climat tranchant avec la lenteur habituel des processus législatifs européens (Vivet, 2011). Le Paquet énergie-climat se traduit donc par un renforcement des objectifs de lutte contre le réchauffement climatique et de développement des ER.

Concernant la lutte contre le réchauffement climatique, l’UE s’y fixe un objectif de réduction de -20 % par rapport à 1990 de ses émissions de GES à l’horizon 2020, soit une réduction de -14 % par rapport à 2005. Cet objectif se divise en deux sous-objectifs : une réduction de -21 % des émissions de GES des secteurs intégrées dans le SCEQE et une réduction de -10 % des émissions de GES des secteurs non-intégrés, par rapport à 2005 à l’horizon 2020. Concernant le développement des ER, l’UE s’y fixe pour objectif d’atteindre une part de 20 % d’ER dans sa consommation énergétique finale à l’horizon 2020. Les efforts à consentir sont partagés entre les États membres. La directive du 23 avril 2009105 prévoit : « l’atteinte des objectifs nationaux avec possibilité d’échanges entre États membres ; une

trajectoire et un encadrement de la Commission ; des mesures relatives à l’accès au réseau visant à favoriser ces technologies ; des assurances relatives à la durabilité des biocarburants » (Delalande, 2009, p. 166). Conformément à cette directive, chaque État

membre se trouve alors dans l’obligation d’adopter et de transmettre à la Commission européenne un plan d’action nationale en faveur des énergies renouvelables106. La participation à cet effort des États membres historiques est particulièrement importante : l’Allemagne et la France doivent accroître, respectivement, la part des ER dans leur consommation énergétique finale de +12,2 et +12,7 % entre 2005 et 2020 [cf. graphique 15].

Malgré les objectifs contraignants du Paquet énergie-climat, la Commission européenne fait le constat dans une communication107, le 10 novembre 2010, que « la stratégie existante ne

permet pas d’atteindre les objectifs que s’était fixés l’UE » (Bauby, 2014, p. 36). Cette nouvelle

communication entend esquisser une nouvelle stratégie énergie-climat communautaire qu’elle

105 Directive n°2009/28/CE du 23 avril 2009 relative à la promotion de l’utilisation de l’énergie produite à partir de sources renouvelables et modifiant puis abrogeant les directives 2001/77/CE et 2003/30/CE.

106 Les plans d’action nationaux devaient être transmis à la Commission européenne avant le 30 juin 2010. 107 Commission européenne (2010). Énergie 2020. Stratégie pour une énergie compétitive, durable et sûre. COM (2010) 639 Final, 10 novembre 2010 [en ligne], consulté le 10 septembre 2016.

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décline en cinq priorités : rendre l’Europe économe en énergie ; mettre en place un véritable marché intégré énergétique ; responsabiliser les consommateurs ; développer les capacités européennes à innover dans les nouvelles technologies de l’énergie ; et renforcer la dimension extérieure du marché énergétique européen108. « Mais force est de constater que cette

« nouvelle stratégie » ne fait que répéter les objectifs déjà clairement affichés ces dernières années […] [et] il n’y a aucune prise en compte des dispositions du traité de Lisbonne [sur

l’énergie] (Ibid, p. 37-38).

Graphique 15 – Objectifs nationaux de la part des ER dans la consommation énergétique finale (en %)

Constatant aussi l’absence d’objectifs post-Paquet énergie-climat, la Commission européenne propose dès le 15 décembre 2011 une vision à horizon 2050 dans une nouvelle communication109. Cette vision à long terme est nécessaire « pour donner une direction claire

à tous les acteurs du secteur, citoyens, entreprises, collectivités territoriales et gouvernements, et pour définir les besoins de coordination et les domaines d’intervention des institutions communautaires » (Aykut et Dahan, 2014, p. 507). La Commission européenne y présente

plusieurs scénarii de décarbonisation du système énergétique européen et de son système électrique. Elle y décrit des réductions possibles des émissions de GES entre -80 et -95 % par rapport à 1990 à l’horizon 2050. Elle y insiste également sur la nécessité de renforcer l’interconnexion des réseaux électriques nationaux conduisant à fonder un réseau paneuropéen, sur le rôle important que devront jouer les ER dans la décarbonisation du système électrique et sur la nécessité de privilégier les investissements privés plutôt que publics. La transition

108 Commission européenne (2010). Énergie 2020. Stratégie pour une énergie compétitive, durable et sûre. COM (2010) 639 Final, 10 novembre 2010 [en ligne], consulté le 10 septembre 2016.

Disponible sur http://ec.europa.eu/transparency/regdoc/rep/1/2010/FR/1-2010-639-FR-F1-1.Pdf

109 Commission européenne (2011). Feuille de route pour l’énergie en 2050. COM (2011) 885 Final, 15 décembre 2011 [en ligne], consulté le 10 septembre 2016.

Disponible sur http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=COM:2011:0885:FIN:EN:PDF 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50

© Kévin Duruisseau - 2015 / Directive n°2009/28/CE

Part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale brute en 2005 Part des énergies renouvelables dans la consommation d'énergie finale brute en 2020 Effort national à fournir

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énergétique « bas carbone » y est décrite comme un projet industriel d’envergure combinant un renforcement des entreprises existantes du secteur énergétique et la création d’entreprises innovantes, s’agissant pour les entreprises européennes d’occuper des filières énergétiques exportables à travers le monde. Cependant, « à l’instar d’autres débats portés par la

Commission européenne, celui sur la feuille de route 2050 risque toutefois de rester cantonné aux cercles habituels des initiés des affaires européennes s’il n’acquiert pas une dimension proprement politique » (Ibid, p. 509).

Pour pallier à ces défauts, le 22 janvier 2014, la Commission européenne propose, dans une nouvelle communication110, de renforcer les objectifs fixés par le Paquet énergie-climat de 2008 à l’horizon 2030 : réduction des émissions de GES à -40 % par rapport à 1990, part des ER dans la consommation d’énergie finale représentant 27 %, part des ER dans la production d’électricité représentant 45 % et accroissement de l’efficacité énergétique à +30 % par rapport à 1990. Le Conseil européen du 24 octobre 2014 entérinera ces objectifs, dessinant un nouveau Paquet énergie-climat. Cette réévaluation des objectifs s’effectue toutefois dans un cadre idéologique inchangé quant aux moyens mobilisés : pour la Commission européenne « le

principal moyen reste les mécanismes de marché et le mythe de l’achèvement du marché intérieur » (Bauby, 2014, p. 41-42).

La construction de la politique énergie-climat communautaire s’est appuyée, depuis les années 1980, sur les expériences pionnières mises en œuvre par plusieurs collectivités territoriales et certains États membres. Le Conseil International pour les Initiatives Locales en Environnement (ICLEI), créé le 8 septembre 1990, « a joué un rôle d’impulsion déterminant,

qui a conduit à la mise en place de stratégies locales de développement durable dans de nombreux pays » (Vaché, 2009, p. 97). L’ICLEI centre son action sur la réduction des émissions

de CO2 et l’élaboration d’Agendas 21 locaux dans les collectivités territoriales urbaines. En 1994, l’ICLEI a co-organisé, avec la Commission européenne, la Conférence d’Aalborg ayant débouché sur la Charte des villes européennes pour un développement durable. La Charte d’Aalborg cherche à favoriser le développement d’Agendas 21 locaux dans les collectivités territoriales de l’UE. L’association Energy-Cities, fondée en 1990 sous le nom d’Énergie-Cités, réunit quant à elle plus de 1 000 autorités locales réparties entre 30 pays européens différents et vise à renforcer les compétences énergie-climat des acteurs publics locaux, à développer et promouvoir des actions énergie-climat entre les membres et à influencer l’élaboration des politiques énergie-climat communautaires. « La plupart [de ces] réseaux de villes, apparus au

début des années 1990, a reçu l’appui des instances européennes qui s’affirment comme pilote en matière de ville durable » (Chanard, 2011, p. 167). Les politiques de développement des ER

110 Commission européenne (2014). Un cadre d’action en matière de climat et d’énergie pour la période comprise