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Le régime financier d’encadrement du PVS en France

climat européennes et des initiatives locales

C- Le régime financier d’encadrement du PVS en France

1- Le PVS : technologies et évolutions du prix des modules.

« L’effet [PV], découvert par le physicien Becquerel en 1839, permet la conversion

directe du rayonnement solaire en électricité. Lorsque les photons (particules de lumière) frappent certains matériaux, ils délogent et mettent en mouvement les électrons des atomes de ces matériaux. Or le courant électrique n’est rien d’autre qu’un mouvement d’électrons »

(Vernier, 2009, p. 22-23). Le semi-conducteur constitue la base de toute cellule PV et de multiples enjeux technico-économiques. Les différents matériaux semi-conducteurs utilisés forment trois grandes filières technologiques comprenant, elles-mêmes, plusieurs sous-filières.

La première filière PV est la filière historique silicium qui « est le matériau

semi-conducteur de prédilection pour la fabrication des modules [PV] avec une part de marché qui a oscillé entre 80 à 90 % dans la décennie 2000-2010 alors que le marché a crû d’un facteur de plus de 50 dans la même période » (Joly et Slaoui, 2013, p. 165). Cette filière, dont le

développement remonte à des recherches dans le domaine aérospatial au cours des années 1950, se compose d’une sous-filière silicium monocristallin [cf. photos 2 & 3] et d’une sous-filière silicium polycristallin [cf. photos 4 & 5]. La première exige des lingots de silicium d’une extrême pureté quand la seconde exige des lingots de silicium d’une pureté moindre.

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© Kévin Duruisseau – 2014

Photos 2 & 3 – La CPVS de Saint-Jean-du-Pin (Gard), exploitée par LA COMPAGNIE DU VENT, utilise des modules PV basés sur la technologie silicium monocristallin

© Kévin Duruisseau – 2014

Photos 4 & 5 – La CPVS [1] de Garein (Landes), exploitée par MAÏA ÉNERGIE, utilise des modules PV basés sur la technologie silicium polycristallin

La deuxième filière PV est la filière émergente couche mince dont l’intérêt réside « dans

la faible quantité de matériaux requis et l’utilisation de procédés d’élaboration compatibles avec des grandes surfaces sur tout type de substrat souple ou rigide ; avec à la clé, une réduction des coûts de production » (Roca i Caborrocas et Naghavi, 2013, p. 168). Cette filière

se compose d’une filière CdTe (tellurure de cadmium) [cf. photos 6 & 7], d’une sous-filière CIGSe (di-séléniure de cuivre-indium) [cf. photos 8 & 9] et d’une sous-sous-filière silicium amorphe. La première est la filière leader des couches minces et a connu « un développement

fulgurant ces dernières années, portée par sa compétitivité en termes de coût, de rendement de conversion et de procédé de fabrication » (Ibid, p. 168). La filière CIGSe présente les meilleurs

rendements parmi les couches minces mais ses coûts de production sont supérieurs à la filière CdTe. Ces deux premières sous-filières présentent une caractéristique commune limitante : le tellurure pour la première et l’indium pour la seconde constituent des ressources naturelles en voie de raréfaction (Arnsperger et Bourg, 2014). La troisième est la filière présentant les plus faibles rendements parmi les couches minces mais possède d’excellentes propriétés optiques.

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© Kévin Duruisseau – 2014

Photos 6 & 7 – La CPVS de Blauvac (Vaucluse), exploitée par EDF EN, utilise des modules PV basés sur la technologie couche mince CdTe

© Kévin Duruisseau – 2014

Photos 8 & 9 – La CPVS du Séquestre (Tarn), exploitée par VALECO, utilise des modules PV basés sur la technologie couche mince CIGSe

La troisième filière PV est la filière en devenir, organique et à concentration. Cette filière se compose de trois sous-filières, dites de laboratoire et/ou en voie d’industrialisation, parmi lesquelles la sous-filière à concentration s’attache à accroître considérablement les rendements des cellules PV : « pour des questions de coût, d’empreinte écologique et de conflits d’usage

(surfaces, matières premières), augmenter les rendements de conversion est encore une idée fondamentale » (Guillemoles, 2013, p. 172).

Filières silicium Filières couches minces Filières de demain

Mono cristallin

Poly

cristallin CdTe CIGSe

Silicium amorphe

Tout

organiques Hybrides Concentration

Maturité Ind Ind Ind Ind Ind R&D R&D Démo

RLabo 24,7 % 23 % 17,3 % 20,3 % 16,3 % 12 % 12 % 41 %

RExp 21 % 18 % 12,6 % 14 % 10 % 3 % 6 % 27 %

Durée 30 ans 30 ans 25 ans 25 ans 25 ans - - -

RLabo → Rendement des cellules PV obtenu en laboratoire / RExp → Rendement des cellules PV obtenu en exploitation R&D → Recherche & Développement / Démo → Démonstrateur / Ind → Industrielle

© Kévin Duruisseau – 2016

Tableau 17 – Les rendements de conversion des filières PV dans le monde en 2015

Ces trois grandes filières technologiques PV, et leurs sous-filières, présentent des rendements différents les unes des autres [cf. tableau 17]. Concernant les filières historiques et

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émergentes, les meilleurs rendements de conversion en laboratoire (24,7 %) et en exploitation (21 %) sont obtenus par la filière silicium monocristallin. Concernant les filières en devenir, les meilleures rendements de conversion en laboratoire (41 %) et en exploitation (27 %) sont obtenus par la filière à concentration.

Entre 2008 et 2015, le déploiement spatial PV dans le monde s’est accompagné d’une baisse très importante du prix des modules PV [cf. graphique 16], baisse constituant elle-même un catalyseur majeur du développement PV mondial. Entre mai 2009 et décembre 2015, le prix des modules PV silicium en Allemagne a chuté de -77,5 %, passant de 2,62 à 0,59 €/Wc contre -74,7 % en Chine, passant de 2,17 à 0,55 €/Wc. Entre mai 2009 et août 2013, le prix des modules PV couche mince a lui chuté de -67,4 %, passant de 1,78 à 0,58 Wc/an135. Entre mai 2009 et décembre 2015, le prix de l’ensemble des modules PV a donc fortement chuté. Cette baisse continue s’est effectuée majoritairement sur deux périodes : entre mai 2009 et janvier 2010 ainsi qu’entre janvier 2011 et janvier 2012.

Graphique 16 – Évolution des prix mensuels des modules PV en Allemagne/Europe et en Chine sur le marché international spot entre mai 2009 et décembre 2015 (en €/Wc)

Durant les sept mois de la première période, la décroissance mensuelle moyenne du prix des modules PV silicium européens/allemands, des modules PV silicium chinois et des modules PV couche mince a été respectivement de -3,2 %, -4,1 % et -1,4 %. Durant les 12 mois de la seconde période, la décroissance mensuelle moyenne des prix des modules PV silicium allemands, des modules PV silicium chinois et des modules PV couche mince a été respectivement de -3,1 %, -3,9 % et -3,8 %. Entre ces deux périodes, et depuis la seconde période, la décroissance du prix des modules a été plus faible mais régulière. Cette évolution du prix des modules PV résulte de la baisse du prix du silicium, à partir de 2009, après une période de raréfaction de l’offre.

135 SolarServer – PVX spot market price index solar PV modules [en ligne], consulté le 13 septembre 2016. Disponible sur http://www.solarserver.com/service/pvx-spot-market-price-index-solar-pv-modules.html

0,5 0,75 1 1,25 1,5 1,75 2 2,25 2,5 2,75 mai-09 jui l. -09 se pt. -09 nov .-09 janv. -1 0 mar s-10 mai-10 jui l. -10 se pt. -10 nov .-10 janv. -1 1 mar s-11 mai-11 jui l. -11 se pt. -11 nov .-11 janv. -1 2 mar s-12 mai-12 jui l. -12 se pt. -12 nov .-12 janv. -1 3 mar s-13 mai-13 jui l. -13 se pt. -13 nov .-13 janv. -1 4 mar s-14 mai-14 jui l. -14 se pt. -14 nov .-14 janv. -1 5 mar s-15 mai-15 jui l. -15 se pt. -15 nov .-15 en /W c)

© Kévin Duruisseau - 2016 / SolarServer - 2016

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Cette baisse est le résultat combiné d’un accroissement des capacités industrielles de raffinage de cette ressource minérale pour faire face au boom de la demande et d’un ralentissement des investissements dans le PV lié à l’évolution des politiques de soutien accompagnant le développement de cette filière. L’offre de silicium tend ainsi à être supérieure à la demande conduisant, mécaniquement, à une baisse de son prix. L’écart d’abord observé entre le prix des modules PV silicium allemands/européens et le prix des modules PV silicium chinois ne s’explique pas uniquement par un coût de la main-d’œuvre inférieur en Chine. Il résulte d’un système de dumping organisé par l’État central chinois (Goodrich et alii, 2013). Cette pratique commerciale « déloyale » consiste à vendre un bien manufacturé sur le marché international à un prix inférieur à son coût de production. La vente massive par les entreprises chinoises de modules PV à un prix inférieur à leurs coûts de production a permis à la Chine d’asseoir sa domination sur la filière amont PV à travers le monde.

La baisse du prix des modules PV est en adéquation avec le modèle dominant accompagnant toute diffusion technologique nouvelle. « Le modèle […] est linéaire, impliquant

des efforts de recherche et développement, une accumulation de savoir-faire spécifiques et des effets d’économie d’échelle, permis notamment par la production en série des équipements. Ces avancées techniques se traduisent, en pratique, généralement par une standardisation des installations et une augmentation de leur efficacité » (Grand et Veyrenc, 2011, p. 471-472). La

diffusion de toute invention technologique s’accompagne ainsi d’une amélioration de sa compétitivité économique au cours des phases successives de « maturation » : « on parle de

courbe d’apprentissage pour désigner ce phénomène qui voit la technologie devenir économiquement plus performante à mesure qu’elle est déployée » (Ibid, p. 472). Le cycle

d’invention puis de diffusion se compose de sept phases principales : recherche et développement (R&D), démonstration, lancement industriel, industrialisation, expansion, maturité et saturation. À chacune de ces sept phases correspond un niveau de diffusion de capacités de l’invention technologique. Dans le cas du PV, les principales filières technologiques se situent actuellement à des stades de « maturation » différents les uns des autres (Hansen et Percebois, 2010 ; Grand et Veyrenc, 2011) : alors que les filières silicium, et dans une moindre mesure les filières couche mince, ont déjà atteint le stade dit d’expansion, les filières organiques et à concentration se situent, respectivement, aux stades dits de R&D et de démonstration/lancement industriel. La standardisation des méthodes de production liée à la massification du marché, favorisée elle-même par une demande mondiale en constante croissance, ainsi que la diffusion de lignes de production allemandes clés en main vers les pays émergents, en particulier en Chine participent de la progression de la courbe d’apprentissage de ces technologies. Les différents niveaux de « maturation » des filières technologiques laissent espérer une progression de cette courbe. En 2010, l’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) estimait à 14 % cette progression entre 2010 et 2035 (AIE, 2010). Toutefois, l’entrée de la Chine dans la filière amont PV s’est traduit par l’apparition de surcapacités volontaires de production de modules PV visant à affaiblir les concurrences nord-américaines et européennes

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jusqu’ici leader sur ce marché émergent. À partir de 2011, s’ajoutant à cette situation d’offre excédentaire, qui a conduit à une forte baisse du prix des modules sur le marché international, une forte contraction de la demande liée à la révision des mécanismes de soutien dans de nombreux pays fait entrer le secteur dans une période de crise. Cette crise a eu des répercussions socio-économiques importantes sur l’amont et l’aval de la filière, plusieurs fleurons de cette industrie disparaissant alors.

2- Les instruments économiques favorisant le déploiement spatial PVS.

« La plupart des [EnR], dont les énergies éolienne et solaire, ne sont pas encore

aujourd’hui compétitives par rapport à la majorité des sources d’énergie classiques, particulièrement lorsqu’il s’agit de les comparer dans l’ordre d’empilement optimal d’un parc de production d’électricité inséré dans de grands réseaux » (Hansen et Percebois, 2010, p. 560).

Les pouvoirs publics disposent de trois outils pour développer les EnR : les certificats verts, les subventions en capital et les tarifs de rachat136 qui peuvent être assortis d’appels d’offre (Dinica et Arentsen, 2003 ; Rousseaux, 2005 ; Levratto et Abbes, 2008 ; Hansen et Percebois, 2010). Ces trois mécanismes d’intervention des pouvoirs publics en faveur des EnR se justifient par l’existence d’imperfections du marché (Giddens, 2009 ; Napoléon, 2015a, 2015b). « L’intervention publique dans le secteur environnemental trouve sa justification dans le

caractère sous-optimal de l’allocation des ressources qui résultent d’un libre fonctionnement du marché » (Grand et Veyrenc, 2011, p. 498). En ce qui concerne les EnR, l’existence

d’externalités environnementales et/ou technologiques des énergies de stock, les imperfections du système financier et l’existence de marché énergétique/électrique monopolistique ou oligopolistique peuvent justifier cette intervention des pouvoirs publics (Jaffe et Stavens, 1994 ; Napoléon, 2015a, 2015b).

Jusqu’au 1er janvier 2016, le soutien financier des pouvoirs publics au développement du PVS en France prend la forme de tarifs de rachat assortis, depuis le 4 mars 2011137, d’un système d’appel d’offre co-organisé par le Ministère en charge de l’Énergie et la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE). Le choix de cet outil par les pouvoirs publics français s’est

136 Les certificats verts « représentent en fait la « garantie » qu’une production d’électricité est faite au départ de RES. Ils sont vendus (ou achetés) séparément de la « commodity », c’est-à-dire de l’énergie électrique produite, et sont émis par les autorités nationales en fonction de leurs politiques spécifiques. Les [certificats verts] ont un double rôle : ils matérialisent un avantage donné aux producteurs RES et ils représentent un coût pour les producteurs classiques soumis à un quota de production d’énergie renouvelable, qui doivent acheter des [certificats verts] en fonction de la différence entre leur propre production RES et le quota imposé » (Hansen et Percebois, 2010, p. 562-563). Les subventions en capital « ont été longtemps le mécanisme le plus appliqué au niveau mondial et le sont encore parfois. La forme en est simple : un subside unique visant à couvrir le coût du capital d’un investissement RES » (Ibid, p. 563). Les tarifs de rachat sont « le mécanisme le plus fréquemment rencontré ; ils ont notablement contribué au développement des RES dans de nombreux pays, particulièrement pour l’énergie éolienne, mais aussi pour le solaire ou la biomasse, par exemple. Les [tarifs de rachat] eux-mêmes peuvent prendre la forme de tarifs de rachat propres à la technologie RES considérée ou de primes qui s’ajoutent aux prix de marché » (Ibid, p. 563).

137 Arrêté du 4 mars 2011 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil.

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basé sur l’expérience allemande : « le « succès » de la politique allemande d’obligation d’achat

à taux garantis, à partir de 2000 et davantage encore à partir de 2004, tant en termes d’expansion des marchés des [EnR] que de gisement d’emploi ou de leadership technico-industriel, l’érige rapidement en « modèle », et confère au [système des tarifs de rachat] le statut d’instrument de référence qu’il incombe seulement d’adapter aux spécificités politiques et socio-économiques nationales » (Debourdeau, 2011, p. 111).

La loi du 10 février 2000 met en place l’obligation d’achat de la production d’électricité EnR, issue d’unités ne dépassant pas 12 MWc138, sans légiférer sur le régime financier d’encadrement du développement des EnR mais il faudra attendre l’arrêté du 13 mars 2002139

pour que les premiers tarifs de rachat de l’électricité PV entrent en vigueur en France. La capacité installée maximale de 0,15 MWc pour être éligible au système des tarifs de rachat et la rémunération insuffisante de l’électricité produite que fixe cet arrêté sont incohérentes avec le stade de maturité des technologies PV et le nécessaire besoin d’économies d’échelle. Le tarif de rachat, pour tout type d’installations, garanti sur 20 ans lors de la signature du contrat de rachat avec EDF OBLIGATION D’ACHAT (EDF AO), est fixé à 15,25 c€/kWh en France métropolitaine et à 30,5 c€/kWh en Corse et dans les Départements d’Outre-Mer (DOM). Jusqu’à l’arrêté du 10 juillet 2006140, une baisse annuelle de -5 % conduira à un tarif de rachat de 13,84 c€/kWh à la fin de la période.

C’est avec l’arrêté du 10 juillet 2006 que s’amorce une réelle dynamique de déploiement spatial PV en France métropolitaine. Les unités PVS bénéficient alors d’un tarif de rachat spécifique fixé à 30 c€/kWh en France métropolitaine et à 40 c€/kWh en Corse et dans les DOM, différent du tarif de rachat appliqué aux installations sur surface bâtie. Cette augmentation considérable est ici en cohérence avec la place nouvelle que les pouvoirs publics français accordent au PV dans le système productif industriel et électrique : un accroissement de la part du PV dans le mix-électrique qui doit se combiner avec le développement d’une filière industrielle PV française. Ces deux préoccupations rejoignent la préoccupation géopolitique de ne pas laisser l’Allemagne faire cavalier seul sur ce segment de marché dans l’UE. Dans le cadre du Grenelle de l’environnement, la COMOP-10 préconise une nouvelle hausse des tarifs de rachat PV assortie d’une non-dégressivité. Cette préconisation est cohérente avec la part dévolue au PV dans les objectifs de diversification du mix-électrique français à l’horizon 2020. Ces recommandations se traduisent par une revalorisation annuelle des tarifs de rachat PVS qui passent entre 2006 et 2009 de 30 à 32,823 c€/kWh. « Dès 2009-2010, il apparaît pourtant que

les tarifs de rachat garantis ont été fixés à un niveau très généreux, qui n’a pas été modifié

138 Décret n°2000-1196 fixant par catégorie d’installations les limites de puissance des installations pouvant bénéficier de l’obligation d’achat d’électricité.

139 Arrêté du 13 mars 2002 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil.

140 Arrêté du 10 juillet 2006 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil.

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malgré les fortes baisses de coûts constatées au niveau des constructeurs » (Grand et Veyrenc,

2011, p. 517). Cette forte baisse des modules PV, importés massivement d’Allemagne et de Chine, associée à un niveau très élevé des tarifs de rachat constitue un effet d’aubaine, fondement d’une véritable bulle spéculative. Cette externalité négative du système des tarifs de rachat conduit les pouvoirs publics à modifier le régime financier d’encadrement du développement PV en France.

Type et puissance des unités photovoltaïques (PV) Tarif de rachat

Photovoltaïque (PV) intégré Bâtiment à usage principal d’habitation 58 c€/kWh

Autres bâtiments 50 c€/kWh

Photovoltaïque (PV) à intégration

simplifiée (puissance > 3 kWc) France métropolitaine 42 c€/kWh

Photovoltaïque (PV) non intégré (au sol, en sur-imposition)

Puissance < 250 kWc 31,4 c€/kWh

Puissance > 250 kWc 31,4 à 37,7 c€/kWh

Corse et DOM-TOM 40 c€/kWh

© Kévin Duruisseau – 2016 / Dubois et Thomann (2012)

Tableau 18 – Les tarifs de rachat de l’électricité PV fixés par l’arrêté du 12 janvier 2010

Dès novembre 2008, les pouvoirs publics français annoncent leur intention de baisser les tarifs de rachat PV (Debourdeau, 2011). Cette volonté trouve une traduction tardive, deux ans plus tard, dans les arrêtés du 12 janvier 2010141 et du 15 janvier 2010142 qui décrètent une baisse répondant aux inquiétudes des pouvoirs publics, de la CRE et des gestionnaires des réseaux électriques face à la croissance exponentielle des demandes de raccordement enregistrées depuis le Grenelle de l’environnement [cf. tableau 18]. En effet, les volumes de raccordement projetés nécessiteront une adaptation technico-économique importante des réseaux électriques et l’élévation de la charge financière pesant sur les consommateurs finaux assujettis à la Contribution au Service Public de l’Électricité (CSPE). Cette CSPE143 répond à la réglementation communautaire qui indique que « ce sont les ménages, consommateurs

finaux, et non le budget de l’État, qui [doivent supporter] les surcoûts liés à ce tarif de rachat préférentiel de l’électricité [PV] » (Dubois et Thomann, 2012, p. 25). Le développement

important des EnR, et plus particulière du PV, s’accompagnera donc à cette période d’une hausse importante de la CSPE. Les arrêtés du 12 janvier 2010 et du 15 janvier 2010 marquent « la volonté du gouvernement de favoriser les installations intégrées au bâti au détriment des [installations PVS] pour des raisons environnementales et paysagères » (Ibid, p. 27) [cf. tableau 18]. Ces arrêtés fixent, en effet, des tarifs fortement différenciés entre PV-toiture et PVS au net avantage du premier.

La baisse des tarifs de rachat PV n’entraînera pas un tarissement des demandes de raccordement (Grand et Veyrenc, 2011). L’absence d’effets de cette baisse amène les

141 Arrêté du 12 janvier 2010 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil.

142 Arrêté du 15 janvier 2010 modifiant l’arrêté du 12 janvier 2010 fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil.

143 Instituée par la loi du 10 février 2000, qui en confie l’évaluation du niveau des charges à la CRE, le montant annuel de la CSPE est fixé par le gouvernement.

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Ministères du Développement Durable et de l’Économie à confier une mission d’étude sur la régulation et le développement de la filière PV en France au Conseil Général de l’Industrie, de l’Énergie et des Technologies (CGIET) et à l’Inspection Générale des Finances (IGF) le 26 mars 2010144. Cette mission poursuit quatre objectifs : (i) identifier les acteurs et les mécanismes ayant conduit au phénomène de bulle spéculative ; (ii) évaluer l’efficacité et la cohérence des mesures prises par le gouvernement pour enrayer le phénomène ; (iii) proposer des mesures complémentaires pour enrayer le phénomène ; et (iv) améliorer les mesures de soutien à la filière, en particulier celles pouvant valoriser la filière PV française. Présidée par Jean-Michel Charpin, polytechnicien et inspecteur général des finances, secondé par Claude Trink, ingénieur général des mines, la Commission Charpin rend, le 29 juillet 2010, un rapport qui sonne « une violente charge critique à l’encontre des tarifs d’achat [PV] » (Debourdeau, 2011, p. 119). Le rapport préconise une baisse de 12 % des tarifs de rachat et une évolution du régime financier d’encadrement du développement PV permettant un contrôle annuel sur les