Chapitre III : LA MODERNISATION DU CADRE DE LA DEPENSE
SECTION 2 : DU CADRE COMPTABLE
II. Au plan organisationnel
La réforme est également au niveau de l’architecture organisationnelle de la mission
comptable. Ce changement parait tout à fait pertinent dans la mesure où l’évolution du cadre
juridique et l’utilisation de nouveaux moyens de travail appellent une nouvelle organisation.
A ce niveau, on peut observer également deux grands aménagements.
1. Le centralisme, pendant de l’ancienne architecture organisationnelle
1.1 Les différentes échelles de responsabilité
Les anciens textes établissent deux ordres de responsabilité. On a d’abord les comptables
principaux qui sont les quatre comptables centraux de la DGTCP, à savoir : l’Agent
Comptable Central de la Comptabilité, l’Agent Comptable Central de la Dépense Publique,
l’Agent Comptable Central des Ressources Publiques, l’Agent Comptable Central des
Chancelleries Diplomatiques et Consulaires ; on y ajoute également les Comptables
départementaux. Les Comptables principaux ainsi désignés et le Directeur général de la
DGTCP sont justiciables de la Chambre des comptes de la Cour suprême. Les autres
comptables constituent la deuxième catégorie. Ils sont des comptables secondaires et rendent
compte aux comptables principaux. Malgré cette répartition des responsabilités comptables, la
grande caractéristique de la situation d’avant réforme était marquée par le manque de
cohérence entre les grands services comptables dans leur fonctionnement au quotidien.
1.2 La centralisation de l’information comptable
Le centralisme caractérisait le traitement de l’information comptable de la dépense. En effet,
toutes les informations comptables de l’Etat étaient acheminées à la Sous Direction
informatique (SDI) appelée à juste titre la Sous-Direction de la centralisation. Toutes les
données étaient saisies dans ce service. Cette méthode entraînait beaucoup de risques
d’erreurs humaines et de pertes d’informations.
En effet, la collecte, l’acheminement et le traitement de l’information comptable étaient faits
selon une procédure bien réglementée de la DGTCP. Dans chaque poste l’on disposait d’une
sacoche destinée à collecter tous les quinze jours les documents de comptabilité, on y classait
par ordre chronologique toutes les opérations effectuées. Ces documents remontent vers le
Comptable principal dont relève le poste comptable. Quand le comptable principal reçoit tous
les comptes relevant de sa circonscription, il procède à une vérification et à une régularisation
de tous les comptes y compris le sien en cas de besoin. Il établit une fiche récapitulative de
toutes les comptabilités qu’il range dans une valise puis il l’achemine à la sous-direction de la
centralisation pour saisie. Cette méthode harassante engendrait l’impossibilité d’organiser à
l’échelon central une véritable situation comptable nette de l’Etat. Il était également
impossible d’obtenir à la demande une situation des postes comptables.
2. Les innovations
Le décret 97-582 du 08 octobre 1997 apporte une réforme de l’organisation de la comptabilité
publique. En effet, au niveau des grandes fonctions comptables, cette nouvelle organisation
tient compte des nouvelles missions du Trésor public. Désormais, le Trésor gérera une caisse
unique de l’Etat, cette volonté de réforme est marquée par la disparition de la CAA. Pour
remplir cette nouvelle mission la DGTCP crée un poste comptable spécialement chargé de la
gestion de la Dette publique.
Dorénavant les postes de comptables principaux au niveau central sont au nombre de six. Il y
a un élargissement du nombre de comptables principaux pour respecter une volonté de
recherche d’efficacité et une lutte contre le centralisme qui était la faiblesse de l’ancien
dispositif. Le vocabulaire des finances publiques ivoiriennes s’est enrichi avec la qualification
de comptables supérieurs pour désigner les six comptables généraux. On a désormais, les
principaux comptables suivants au niveau central:
• l’Agent Comptable Central du Trésor (ACCT);
• le Receveur Général des Finances (RGF);
• le Payeur Général du Trésor (PGT);
• le Trésorier Général pour l’Etranger (TGE);
• l’Agent Comptable de la Dette Publique (ACDP);
• l’Agent Comptable des Créances Contentieuses (ACCC).
Toujours dans un souci de recherche d’efficacité, des fonctions de conseillers techniques du
Directeur Général du Trésor et de la Comptabilité Publique ont été instituées, leur mission est
de contrôler, pour le compte du Directeur général, la marche des postes comptables supérieurs
et d’en rendre compte à leur mandataire.
Au niveau déconcentré l’échelle de hiérarchie administrative s’est rallongée avec la création
du poste de trésorier régional. Ces différents niveaux ci-dessus désignés forment avec les
trésoriers départementaux le groupe des comptables principaux de l’Etat. Leurs
responsabilités devant la Chambre des comptes et sur les autres comptables qui forment la
classe des comptables secondaires ne changent pas. On désigne désormais de comptable non
centralisateur les comptables secondaires, de comptable centralisateur les comptables
principaux. Au niveau des comptables principaux, on a les comptables centralisateurs de
deuxième degré qui sont les comptables généraux et ceux de premier degré qui sont les
trésoriers régionaux et les trésoriers départementaux. L’Agent Comptable Central du Trésor
est chargé de centraliser toutes les informations comptables et de produire les comptes de tous
les comptables.
Au niveau de la diffusion et du traitement des données comptables, les choses changent pour
tenir compte de l’introduction de l’outil informatique dans la gestion moderne.
III. La modernisation des moyens
La modernisation des moyens est marquée, tout comme dans la phase administrative de la
dépense, par une informatisation globale du circuit comptable. Elle est également caractérisée
par une formation des acteurs pour les adapter aux changements qui s’opèrent dans leur
nouvel environnement de travail.
1. Informatisation du circuit comptable
Les services de la Comptabilité publique étaient peu informatisés. De ce fait, il n’y avait pas
une intégration des services comptables, si bien qu’il était difficile d’établir une situation
globale des comptes de la Nation. Les problèmes identifiés se résumaient en une
centralisation excessive de l’information due à l’absence d’équipements informatiques pour
enregistrer les écritures comptables au niveau déconcentré. Ce sont ces insuffisances que la
modernisation par l’introduction de l’informatique cherche à atténuer. La matérialisation de
cette ambition est portée par un projet d’informatisation et de centralisation de l’information
intitulé ASTER, du nom du Progiciel qu’il est chargé de produire. ASTER va chambouler tout
le schéma d’organisation comptable. Il s’agit principalement des procédures de la circulation
de l’information et des documents.
ASTER est un Progiciel informatique qui est chargé de gérer la comptabilité de l’Etat, il
remplace un autre programme intitulé Programme Intégré d’Application Financière (PIAF)
comptable. ASTER est un programme dont la mise en place a impliqué trois acteurs
principaux, à savoir le Ministère de l’économie et des Finances de la Côte d’Ivoire, le
Ministère de la Coopération ainsi que le Ministère de l’Economie et des Finances de France.
De ce point de vue, on peut affirmer que ASTER est d’abord le produit de la coopération
entre la France et la Côte d’Ivoire. C’est un projet pilote qui est prévu d’être exporté dans
d’autres pays si l’expérience ivoirienne est concluante.
1.1 L’organisation du Système
ASTER est un grand maillage qui prend en compte tout le cheminement de l’information
comptable publique. Il permet l’intégration des comptes entre les domaines qui couvrent la
Comptabilité Générale de l’Etat50 et les domaines de la Comptabilité Auxiliaire51. ASTER
apparaît comme un outil de changement structurant. La centralisation de l’information
comptable se fera dorénavant avec plus d’assurance et plus d’efficacité à partir des postes
comptables reliés au Progiciel.
L’interface de ASTER avec les services en amont de la dépense est assurée par sa connexion
avec le SIGFIP pour les dépenses. ASTER est également connecté à la Direction Générale
des Impôts (DGI) et à la Direction Générale des Douanes (DGD) pour les ressources
publiques.
Le cheminement dans ASTER est reparti en deux grands modules. On a le module de la
Comptabilité Auxiliaire des Dépenses (CAD) et le module de la Comptabilité Générale d’Etat
(CGE). Il y a une migration entre ces deux modules. Le module de la CAD gère la
centralisation de l’information budgétaire, quant au module CGE, il correspond au deuxième
niveau de centralisation et gère de façon globale tous les comptes et la passation de toutes les
écritures comptables.
A/ Le module de Comptabilité Auxiliaire des Dépenses (CAD)
C’est un module de comptabilité de gestion des dépenses budgétaires. Il gère toutes les
informations afférentes à la gestion du budget autant en dépenses qu’en recettes; entre autres
informations, la vérification des visas du contrôleur financier, le contrôle des dotations
budgétaires, le suivi de la consommation des crédits. Ce module est utilisé par le PGT et le
RGF. Il est géré selon une comptabilité en partie simple, c’est un module de contrôle des actes
administratifs de l’ordonnateur. La centralisation de la gestion se fait au niveau de l’agent
comptable central du Trésor.
B/ Le module de Comptabilité Générale de l’Etat (CGE)
Le module de Comptabilité Générale de l’Etat gère les écritures des comptables
centralisateurs de premier niveau. Il gère également les comptes de l’Agent Comptable
Central du Trésor (ACCT). La centralisation des écritures comptables à ce niveau est
annuelle. Toutefois à la décade, l’ACCT procède à une sommation automatique des
comptabilités au même moment que se fait la centralisation dans les postes comptables de
premier niveau, avant de les intégrer annuellement dans sa propre comptabilité. Il est utile de
signaler qu’avec ASTER chaque comptable peut éditer sa balance à la demande ou au mois.
Dans la pratique, les écritures passées par les postes comptables remontent à la décade vers le
comptable centralisateur dont ils dépendent et c’est à ce niveau que la saisie se fait dans
ASTER. C’est ce qui est prévu à ce niveau d’avancement dans l’automatisation de la gestion
comptable des finances publiques. Toutefois, il faut noter que tous les comptables
centralisateurs de premier niveau ne sont pas encore reliés au réseau, compte tenu de la crise
socio-politique qui rend difficile l’accès à tout le territoire national. Mais à terme cela devrait
être fait. Chaque comptable relié à ASTER n’a accès qu’aux fonctions entrant dans son champ
de compétence.
Le circuit de la centralisation de l’information budgétaire au niveau comptable
Figure :1
La centralisation de l’information comptable peut être vue comme ci-dessus illustré. SIGFIP,
communique les informations budgétaires dans ASTER. Il les reçoit et les prend en compte
dans son module CAD. Ces informations budgétaires traitées dans le module CAD vont
migrer vers le module CGE où ils s’ajouteront à d’autres informations comptables pour
donner la Comptabilité Générale de l’Etat.
1.2 Les productions de ASTER
ASTER est l’outil privilégié du comptable. Il traite toutes ses opérations jusqu’à la production
de synthèses nationales. Ainsi donc, avec ASTER, on a désormais la production d’états de fin
de gestion et d’extractions diverses pour les comptes de la Nation. Depuis l’année 2003 la
DGTCP produit le Compte Général de l’Administration des Finances (CGAF) dans un délai
assez court. Le CGAF est l’outil de base pour la préparation de la loi de règlement. Dans le
CGAF, on a les éléments suivants:
• la balance générale de fin de gestion et d’inventaire ;
• le bilan agrégé ou développé ;
• la variation des éléments d’actif et du passif ;
• le développement des comptes de résultat (le résultat d’exécution des lois des finances,
le résultat de type patrimonial, le découvert du Trésor) ;
• l’état des recettes et des dépenses budgétaires.
Ce progiciel rapproche ainsi la gestion du comptable public de celle issue de la comptabilité
privée.
ASTER permet d’avoir en cours de gestion différents états qui orientent le comptable et les
décideurs publics. On peut citer entre autres états :
• les restes à payer ;
• la gestion des bons de caisse;
• le suivi des oppositions (retenues opérées par les comptables) ;
• la gestion des avoirs fiscaux.
Comme on a pu le remarquer à travers le développement des différentes fonctionnalités, le
comptable public a dorénavant les moyens de la modernisation de sa gestion.
SIGFIP
CAD
2. Le renforcement des capacités
Au niveau Institutionnel la mise en place des corps d’inspecteurs contribue à renforcer et à
maintenir une surveillance permanente sur la recherche de la qualité des prestations des
services de la DGTCP. De plus, le système de production est soumis à une obligation normée
ISO 9001.
Les grands changements tels que la DGTCP se les approprie ont nécessité une adaptation des
acteurs. Cette obligation a imposé la mise en place d’une direction spécialement chargée de la
formation à la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique qui forme à toutes
les questions nécessaires à la maîtrise de tous les bouleversements en cours. A titre
d’illustration, en 1999 trois cent quatre vingt (380) agents des postes déconcentrés ont été
formés aux nouvelles techniques.
Dans le document
Master en administration publique Des Fonctionnaires internationaux 2004-2005
(Page 49-54)