Chapitre III : LA MODERNISATION DU CADRE DE LA DEPENSE
SECTION 1: DU CADRE ADMINISTRATIF
III. La modernisation des moyens
Le constat de la faiblesse de l’informatisation des procédures n’était plus à démontrer.
L’inexistence ou l’obsolescence du matériel informatique entraînait le manque de
coordinations des tâches, l’impossibilité pour l’administration d’avoir un archivage fiable et la
redondance de certaines tâches caractérise la période d’avant modernisation. Cette période a
surtout a été marquée par un processus d’exécution de la dépense exécuté manuellement avec
des tâches fastidieuses, de larges possibilités d’erreur, un système de gestion globalement peu
fiable. Nous retenons que ces années ont été caractérisées par :
• des dépenses dépassant les crédits prévus ;
• certaines dépenses étaient exécutées deux fois (puisqu’il n’existait aucun lien entre les
différents budgets pour permettre le contrôle) ;
• des délais d’exécution trop longs ;
• le manque de traçabilité de la dépense ;
• le système de contrôle très harassant.
En outre, la faiblesse des politiques de formations des hommes et des femmes constituait l’un
des problèmes identifiés.
2. L’évolution des moyens
La modernisation des moyens est au cœur de la réforme, elle vise l’objectif pressant de
correction des tares relevées plus haut. En cela, l’essentiel de la valeur ajoutée est à mettre au
crédit de l’informatisation des services de la chaîne de la dépense publique au niveau central.
Ce nouveau dispositif a un maillon central qui est un applicatif informatique intitulé
«Système Intégré de Gestion des Finances Publiques» en abrégé SIGFIP. Son rayonnement
est assez important sur la chaîne de la dépense publique ; si bien que le commun des
utilisateurs assimile la réforme du circuit de la dépense publique à cet applicatif, en minorant
ainsi toutes les autres réformes dont celle du cadre réglementaire qui à notre avis a tracé le
sillon à tous les autres changements. Nous avons d’autres applicatifs d’accompagnement qui
doivent être arrimés au SIGFIP pour donner une véritable centralisation et automatisation du
processus. Le deuxième aspect concerne le renforcement des capacités des acteurs par le biais
de la formation.
2.1. Le SIGFIP
Le SIGFIP est un Progiciel diffusé en réseau entre tous les acteurs principaux des finances
publiques en Côte d’Ivoire (acteurs des dépenses et des recettes de l’Etat). Nous nous
intéresserons uniquement aux aspects qui concernent les dépenses, objet de nos travaux. La
mise en route du SIGFIP le 1er janvier 1999, constitue une véritable révolution pour
l’administration financière ivoirienne. Il apporte des changements profonds dans les habitudes
de l’administration.
A/ Les Objectifs généraux du système
Le SIGFIP formalise dans un même cadre l’intervention de tous les acteurs de la chaîne, en
informatisant et en intégrant tous les niveaux d’intervention dans le même système:
ordonnateur; contrôleur financier et comptable. Chacun des acteurs dispose d’une clé d’entrée
dans le Progiciel.
Le système permet d’assurer une gestion harmonieuse des recettes et des dépenses de l’Etat.
Pour ce qui concerne les dépenses, le SIGFIP permet d’instituer une politique de régulation et
de planification mensuelle des dépenses, contribuant ainsi à réduire à son strict minimum les
arriérés de paiement de l’Etat. La correction des insuffisances reprochées à l’ancienne
procédure est son objectif majeur à atteindre, à savoir assurer:
• une bonne réduction des délais d’exécution de la dépense;
• un contrôle efficace de la dépense;
• une traçabilité de toutes les opérations financières liées à la dépense publique;
• la fluidité de l’information tout au long de la chaîne de la dépense publique ;
• une meilleure communication et en temps réel entre tous les acteurs du circuit de la
dépense ;
• une meilleure gestion du budget puisque dès le vote du budget toutes les informations
budgétaires sont déversées dans le SIGFIP.
Le SIGFIP vise à sécuriser et à rationaliser toutes les opérations effectuées dans la chaîne de
la dépense. Il tient la comptabilité budgétaire des dépenses et de l’Etat. Il fournit des tableaux
de bord destinés au pilotage des finances publiques, notamment les informations comptables
pour la formation du TOFE43.
B/ L’intervention des acteurs
Les acteurs reliés au SIGFIP sont ceux qui interviennent dans le circuit des dépenses
exécutées au niveau central et au niveau déconcentré. Toutefois, les dépenses effectuées dans
les localités non connectées sont retranscrites dans le Progiciel et des moyens de nivellement
de ces dépenses sont prévus.
• Au niveau central
L’administrateur de crédits délégué, point de départ du processus de la dépense exprime ses
besoins à l’ordonnateur délégué. Ce dernier, après avoir effectué ses vérifications courantes
fait l’enregistrement à l’écran (chaque enregistrement est numéroté par ordre chronologique)
et le transmet électroniquement au Contrôleur Financier pour son contrôle. La décision du
contrôleur est exprimée par le biais du système (à l’ordinateur sous huit jours) et retournée à
l’ordonnateur. Le processus est identique pour la phase de l’ordonnancement. Le processus
conduisant à l’ordonnancement va de l’édition du mandat par l’ordonnateur au visa accordé
par le Contrôleur Financier. Si le mandat présente toutes les garanties de régularité, le visa est
accordé et retransmis à l’ordonnateur qui le valide avant de le transmettre au comptable pour
sa prise en charge suivie du paiement. Tout le processus est assisté à l’ordinateur, mais
l’usage du support papier n’est pas abandonné puisque chaque acte posé par un acteur du
processus est matérialisé sur un support papier. L’applicatif permet d’éditer à chaque étape les
éléments nécessaires d’accompagnement du dossier.
L’intervention dans le cas de la procédure simplifiée est quasiment identique à celle de la
procédure normale vue plus haut, à ceci près que l’engagement et l’ordonnancement sont
exécutés concomitamment pour aboutir au mandat de paiement qui est transmis au visa du
Contrôleur Financier avant que l’ordonnateur ne l’envoie au comptable pour le paiement. Un
nombre limité de dépenses est concerné par cette procédure44.
• Au niveau régional
Des fiches de délégation de crédit éditée de SIGFIP et émis par l’ordonnateur délégué au
profit de l’ordonnateur secondaire, des contrôleurs financiers départementaux et des
comptables assignataires permettent de suivre le rythme des consommations. Le processus
d’exécution de la dépense est identique à celui exécuté au niveau central. Depuis 2001, la
DGBF procède à une décentralisation de SIGFIP dans les départements du pays. A ce jour 31
localités sont connectées.
2.2. Les autres applicatifs
Plusieurs autres progiciels sont en phase d’expérimentation. Ces progiciels sont prévus pour
s’arrimer au SIGFIP afin de donner une véritable centralisation de l’information sur les
opérations financières de l’Etat. On peut énumérer le RICI-EPN pour les EPN, le SIGMAP
pour les marchés publics, le SIGBUB pour le Budget de l’Etat.
A/ Le RICI-EPN
Le Réseau Informatique de Comptabilité Intégrée pour les Etablissements Publics Nationaux
en abrégé RICI-EPN est un Progiciel de gestion centralisée des finances et des opérations
budgétaires des EPN. Il y aura trois acteurs connectés au Progiciel à savoir : l’ordonnateur
c'est-à-dire le directeur de l’EPN, le contrôleur budgétaire et l’agent comptable. Pour l’instant
ce projet est en phase expérimentale et seul un nombre limité d’E.P.N utilise ce progiciel.
L’objectif est de le généraliser et d’intégrer les comptes de tous les EPN dans le même
système.
B/ Le SIGBUB
La préparation du budget est facilitée par l’acquisition d’un Progiciel intitulé Système Intégré
de Gestion Budgétaire (SIGBUD). Il permet d’assurer une bonne coordination de la
préparation du budget de l’Etat avec tous les services impliqués. Cet outil vise à raccourcir les
délais de préparation et à assurer également la fluidité et la conservation de l’information
budgétaire.
C/ Le SIGMAP
Dans le cadre de la modernisation des moyens un progiciel est en élaboration et permettra de
gérer tous les aspects concernant les marchés publics. Ce progiciel est disponible, il est en
phase d’expérimentation et est intitulé Système Intégré de Gestion des Marchés Publics
(SIGMAP). Il retracera toutes les étapes de la passation des marchés publics, gèrera toutes les
étapes et permettra de vérifier tous les détails d’exécution. Il servira de cadre d’échange
d’informations entre la Direction des Marchés Publics et tous les acteurs publics impliqués
dans le processus de passation des marchés. Il facilitera l’archivage des données et la
production des statistiques liées aux marchés publics de façon générale. C’est un logiciel qui
va être diffusé entre tous les acteurs.
2.3 Le renforcement des capacités
La formation des acteurs est un grand défi après l’informatisation et l’organisation des
services. Cela est d’autant vrai qu’il s’agit de transformer des habitudes, en réalité créer des
hommes et des femmes nouveaux rompus à l’utilisation des nouvelles techniques et méthodes
de travail. Le constat est que la grande majorité des décideurs de l’administration a été formée
à une époque où les moyens informatiques n’étaient pas développés en Côte d’Ivoire. Bien
souvent, les concernés n’ont pas fait un effort personnel de mise à niveau. Pour les amener à
s’adapter au nouvel environnement, il y avait une urgence et un effort à faire par l’Etat.
L’administration ivoirienne s’est donc saisie de cette nécessité et forme régulièrement ses
cadres sur des financements publics et sur des appuis d’organismes de financement à la
formation tel que l’ACBF45 et la Coopération Française. A titre d’illustration l’ACBF a formé
par le biais de la Cellule Analyse des Politiques Economiques (CAPEC) cent quatre vingt
douze (192) cadres de l’administration sur des thèmes en rapport avec l’administration
économique et financière de 2000 à 2004.
Ainsi que l’on peut remarquer, la modernisation du circuit de la dépense est une nécessité
pour l’administration. L’amélioration de la phase administrative de la dépense que nous
venons de voir ne peut avoir un sens que si elle s’accommode parfaitement à un cadre
comptable adapté. Une tentative de réponse est présentée dans les pages suivantes.
Dans le document
Master en administration publique Des Fonctionnaires internationaux 2004-2005
(Page 43-47)