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Physiopathogénie et Aspects Génétiques

Dans le document LE CORTICOSURRENALOME MALIN CHEZ L'ENFANT (Page 139-143)

| TABLE DES MATIERES

B. Physiopathogénie et Aspects Génétiques

Etant donné la rareté de ce cancer, surtout chez l’adulte, avec peu d’examens cytogénétiques réalisés de routine chez les patients pris en charge, les données sur ce plan sont relativement minces. Néanmoins, plusieurs éléments pointent vers l’implication de facteurs génétiques dans l’oncogenèse des corticosurrénalomes malins, parmi lesquels figurent la disparité de fréquence entre adultes et enfants, en faveur de ces derniers, et la coexistence des corticosurrénalomes avec d’autres tumeurs les faisant rentrer dans le cadre de tumeurs syndromiques [52-54].

1. Analyse de clonalité et de ploïdie :

Les études de la composition clonale des cellules constituant les corticosurrénalomes démontrent que ces tumeurs sont généralement monoclonales. Autrement dit, qu’elles découlent d’une seule cellule ayant acquis un phénotype malin [53, 55].

En termes de nombre de chromosomes, L’aneuploïdie est fréquemment retrouvée dans le corticosurrénalome malin, dans près de 75% des cas, confirmée par plusieurs études, les distinguant des tumeurs surrénaliennes bénignes où l’aneuploïdie est peu fréquente avoisinant les 10% [53, 56, 57]. L’aneuploïdie serait également corrélée à un score de Weiss >3 [58], mais n’aurait pas d’impact sur la survie globale [59].

2. Analyse cytogénétique :

La haute fréquence des corticosurrénalomes chez l’enfant serait expliquée en grande partie par la mutation germinale TP53, retrouvée chez presque 50-80% des enfants atteints par ce cancer [53, 60, 61], résultats contrastant nettement avec

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les 3-7% retrouvé chez l’adulte selon les dernières études [62, 63], suggérant une implication moindre de ce gène chez cette catégorie de patients. L’on pourrait en émettre l’hypothèse qu’il s’agirait de deux maladies totalement différentes, hypothèse corroborée par la disparité de pronostic entre adultes et enfants, avec une évolution souvent péjorative chez l’adolescent et l’adulte contrairement aux plus jeunes [50]. Il est important de noter que malgré le caractère génétique de ce cancer chez l’enfant, il est fréquent de ne retrouver aucun antécédent familial, cette mutation survenant de novo dans près de 25% des cas [64].

Outre cette mutation phare, les corticosurrénalomes malins sont caractérisés par de nombreuses et fréquentes altérations chromosomiques complexes, là encore peu fréquentes dans les tumeurs bénignes [53, 65]. Via l’hybridation génomique comparative (CHG), plusieurs zones de remaniements ont été mises en évidence. Ainsi, les zones de gains les plus fréquentes seraient : 4q, 4p16, 5p15, 5q12–13, 5q32-qter, 9q34, 12q13, 12q24, et 19p ; tandis que les zones de pertes les plus fréquentes seraient : 1p, 2q, 11q 17p, 22p, 22q, 17p13, 11q15, et 2p16 [65, 66].

A côté des délétions et additions, l’hyperméthylation a également été identifiée comme mécanisme mutagène fréquent dans les corticosurrénalomes malins, entrainant l’inactivation de certains gènes, notamment : H19, PLAGL1, G0S2, et NDRG2. Ces mutations seraient qui plus est corrélées à un pronostic plus péjoratif [53, 65].

Les possibilités de remaniements sont multiples et variées, démontrées par de nombreuses études [53, 65]. Néanmoins, les chromosomes 5, 12 et 17 seraient les plus impliqués dans la transformation néoplasique, avec un rôle central du chromosome 17 avec sa zone 17p13 contenant le gène TP53 [53, 67, 68]. Les

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autres gènes les plus fréquemment retrouvés impliqués sont : MEN1, IGF2, IGF2R, et p16/INK4A (CDKN2A).

L’implication d’anomalies des voies de signalisation cellulaire dans la carcinogénèse a également été bien documentée. On retrouve ainsi trois principales voies impliquées : IGF, WNT et VEGF.

L’IGF est fortement impliqué dans la croissance normale de la surrénale. Durant la vie fœtale, l’IGF-1 stimule la croissance de la capsule et l’IGF-2 celle du cortex [7, 53]. Par la suite, les deux types d’IGF entrent dans la stimulation de la stéroïdogenèse, à la fois basale et ACTH induite [69, 70]. La surexpression de l’IGF est fréquemment retrouvée dans les corticosurrénalome malins, dans près de 80-90% des cas, cette expression étant plus de 100 fois plus importante que la normale ou que dans les formes bénignes [71-74].

La voie de signalisation WNT/β-caténine est l’une des voies majeures impliquées dans le développement de divers organes, dont la corticosurrénale où elle joue un rôle crucial dans le développement embryonnaire et le maintien du cortex [53, 75]. De récentes études ont démontré l’accumulation de β-caténine dans les corticosurrénalomes malins [76].

L’implication du VEGF dans le maintien et le développement de la vascularisation des divers carcinomes n’est plus à démontrer. Chez les patients atteints de corticosurrénalome malin, de hauts taux de VEGF ont été retrouvés dans le sang [77, 78].

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3. Corticosurrénalomes malins syndromiques : a) Syndrome de Li-Fraumeni :

Le syndrome de Li Fraumeni est une prédisposition génétique à la survenue de plusieurs cancers primitifs, secondaire à une mutation du gène TP53. Le corticosurrénalome malin est l’un des principaux cancers retrouvés dans ce syndrome, dans 3-10% des cas, au côté du reste de la panoplie : cancers du cerveau, du plexus choroïde, sarcomes, certaines leucémies et le cancer du sein précoce [53, 79, 80]. Ainsi, la recherche de la mutation TP53 chez tout enfant présentant un corticosurrénalome malin est fortement recommandée [64, 81].

b) Syndrome de Beckwith-Wiedemann :

Le syndrome de Beckwith-Wiedemann associe une hyperplasie, des malformations congénitales et une prédisposition tumorale. On peut retrouver ainsi chez le nouveau-né ou le nourrisson une macroglossie, une hémi-hypertrophie, une omphalocèle, un faciès caractéristique et une tendance à l’hypoglycémie en période néonatale. Ce syndrome expose à plusieurs tumeurs : corticosurrénalome malin, neuroblastome, hépatoblastome, néphroblastome et rhabdomyosarcome [82]. Les anomalies génétiques impliquées dans ce syndrome sont complexes, parmi lesquels figure une altération de la méthylation de l’ADN au niveau du locus 11p15, qui contient des régions codantes pour l’IGF-2, et qui jouerait un rôle angulaire dans la tumorigénèse [53, 83].

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