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Le statut de « combattant terroriste étranger » est applicable aux individus participant à des conflits armés. Le Conseil de Sécurité répond ainsi au problème selon lequel « les

combattants terroristes étrangers contribuent à intensifier les conflits, à les prolonger et à en compliquer singulièrement le règlement ».386 Les violences auxquelles se livrent ces

384 Résolution S/RES/2178, op. cit., préambule p. 2.

385 De GUTTRY (A.), « The Role Played by the UN in Countering the Phenomenon of Foreign Terrorist Fighters », op. cit., p. 271.

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« nouveaux » terroristes auraient des effets sur les conflits armés et c’est pourquoi ce nouveau statut, adopté pour lutter spécialement contre eux, doit être reconnu applicable en de tels contextes. Ce statut assurerait alors l’applicabilité du droit antiterroriste aux étrangers responsables d’actes terroristes dans des conflits armés.

Néanmoins, pour mettre en œuvre la résolution 2178 qui ne définit pas le terroriste, c’est aux autres sources légales internationales, régionales et nationales qu’il faut se référer.387 Or, nombre de ces sources prévoit expressément que

« les activités des forces armées en période de conflit armé, au sens donné à ces termes en droit international humanitaire, qui sont régies par ce droit ne sont pas régies par la présente Convention, et les activités menées par les forces armées d’un État dans l’exercice de leurs fonctions officielles, en tant qu’elles sont régies par d’autres règles de droit international, ne sont pas non plus régies par la présente Convention. »388

Cette disposition tirée de l’article 19 de la Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif (1997) revient notamment, en des termes similaires ou identiques, dans les textes suivants : la Convention internationale contre la prise d’otage (1979)389 ; la Convention internationale pour la répression des actes de terrorisme nucléaire (2005)390 ; la Convention du Conseil de l’Europe pour la prévention du terrorisme (2005)391 ; la Directive (UE) 2017/541 du Parlement européen et du Conseil de l’UE (2017)392 ; l’Article 141bis du Code pénal belge.393 Par ailleurs, la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme (1999) définit l’acte terroriste en renvoyant à la définition donnée par la Convention sur les attentats terroristes à l’explosif de 1997.394

387 Voir supra, pp. 93-106.

388 Art. 19, par. 2, Convention internationale pour la répression des attentats terroristes à l’explosif, op. cit.

389 Art. 12 de la Convention internationale contre la prise d’otage, Nations Unies, 17.12.1979 [Entrée en vigueur : 03.06.1983 ; Ratifications : 176 ; Signatures 39].

390 Art. 4, par. 2, Convention internationale pour la répression des actes de terrorisme nucléaire, op. cit.

391 Art. 26, par. 5, Convention européenne pour la prévention du terrorisme, op. cit.

392 Directive (UE) 2017/541 op. cit., par. 37, préambule.

393 Art. 141bis, Code pénal belge, op. cit.

394 Art. 2, par. 1er, a), Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, op. cit. ; de manière intéressante, cette même convention précise également qu’un acte est terroriste lorsqu’il est « destiné à tuer ou blesser grièvement […] toute […] personne qui ne participe pas directement aux hostilités dans une situation de conflit armé » (Art. 2, par. 1er, b), et il faudra y revenir lorsque seront traités les actes en cause, voir notamment infra, pp. 305 et suivantes.

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Or, puisque cette dernière prévoit le régime d’exclusion précité, alors la Convention sur le financement du terrorisme intègre ce régime.395 Sans aller jusqu’à affirmer l’universalité de la définition de cette dernière Convention – qui ne propose en réalité que « des éléments de

définition » et ne se fonde sur une définition que sectorielle396 – il faut relever que le régime d’exception bénéficie alors d’une place centrale au sein du corpus antiterroriste international du fait que 188 États397 ont effectivement ratifié cette Convention ; l’idée de l’inapplicabilité de la définition de l’acte terroriste aux activités des forces armées parties à un conflit armé apparaît largement admise.

Ce qu’il faut comprendre ici, c’est que ces régimes empêchent que ceux qui ont la qualité de membre d’une force armée partie à un conflit armé ne peuvent être identifiés comme terroristes, si leurs actes sont déjà régis par le droit international humanitaire, car ces actes n’entrent pas dans le champ d’application de ces textes antiterroristes et ne peuvent donc être qualifiés, par eux, d’actes terroristes.

Cette affirmation implique deux choses : d’une part, de déterminer quels sont les actes (des « combattants étrangers ») concernés et comment ils sont régis par le DIH, ce qui sera l’objet de la seconde partie de thèse ; d’autre part, ce qu’est une force armée partie à un conflit armé, et qui peuvent en être les membres de sorte que leurs actes soient effectivement régis par le DIH, ce à quoi sera consacré le chapitre suivant. Pour l’heure, il faut en revanche noter que la notion de « forces armées » dans ces régimes concerne les forces armées étatiques mais également non étatiques, c’est-à-dire les groupes armés organisés.398 En effet, les régimes d’exclusion précisent que la notion doit être interprétée au sens qui lui est donné par le DIH, or ce sens inclut effectivement les entités non étatiques suffisamment organisées pour

395 SASSÒLI (M.), « La définition du terrorisme et le droit international humanitaire », op. cit., pp. 41-42.

396 Sectorielle dans le sens où un seul type d’acte est alors défini comme terroriste, le terrorisme n’est pas défini ; voir KLEIN (P.), « Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme », United Nations Audiovisual Library of International Law, p. 2. [En ligne : Consulté le 19.10.2019]

397 Site internet des Nations Unies, « Collection Des Traités », « Dépositaire », « État des Traités », « Chapitre XVIII – Questions pénales », « 11. Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme ». [Consulté le 19.10.2019]

398 À ce titre il faut noter que la justice belge a effectivement eu l’occasion de reconnaître l’applicabilité de ce régime au groupe armé non étatique du PKK dans : Tribunal de Première Instance de Bruxelles, Affaire PKK, op. cit., 03.11.2016 ; sur l’applicabilité du régime aux forces armées non étatiques, voir également KRÄHENMANN (S.), « Foreign Fighters under International Law », op. cit., p. 35.

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constituer des parties belligérantes à un conflit. De plus, la formulation, identique pour tous les textes prévoyant ces régimes, précise seulement dans un second temps que ce traitement d’exception est également applicable hors conflit armé aux seules forces étatiques cette fois-ci. Cela implique donc, a contrario, que les forces non étatiques sont couvertes lorsqu’une interprétation au sens du DIH est exigée et qu’il n’est pas précisé que seules les forces armées étatiques sont concernées. Enfin, pour le cas de la disposition belge qui constitue une transcription au niveau national d’une disposition européenne, il apparaît dans les motifs du projet de Loi, ayant conduit à son adoption, que le Législateur a expressément prévu son applicabilité aux parties belligérantes non étatiques dans le cas d’un conflit armé non international.399 D’ailleurs, ces régimes s’appliquent aux conflits armés internationaux et non internationaux puisque les forces armées non étatiques, couvertes par l’exception, ne peuvent être parties qu’à ces derniers.

Ce type de régime a pour objectif d’éviter que deux corpus soient applicables à un même acte400, ainsi que d’éviter aux membres des forces armées, notamment étatiques, l’infamie du qualificatif terroriste401. C’est donc précisément parce que des actes d’hostilité

en conflit armé peuvent systématiquement être qualifiés de terroristes en vertu du droit antiterroriste402 et que l’appellation terroriste est politique et subjective, que les États ont prévu l’exclusion des questions relatives à la lutte contre le terrorisme lorsqu’il est question de force armée partie à un conflit armé. Cela renforce d’ailleurs l’affirmation selon laquelle le qualificatif terroriste est éminemment subjectif et ne peut permettre de connaître à l’heure actuelle l’étendue réelle du nouveau statut.

Au regard de l’exposé de ces régimes d’exclusion du droit antiterroriste au profit du droit international humanitaire pour déterminer la qualification d’un individu et de ses actes,

399 Projet de loi relatif aux infractions terroristes, Chambre des Représentants, Royaume de Belgique, 1e

Session de la 51e législature, Doc 51 0258/001, 06.10.2003, pp. 15-16 ; l’article final 141bis provient de la proposition d’article 136septies qui n’avait fait l’objet d’aucun commentaire lors des discussions, voir à ce propos : Avis 34.362/4 de la Section de Législation du Conseil d’État, Royaume de Belgique ; Projet de loi relatif aux infractions terroristes, Chambre des Représentants, Royaume de Belgique, Doc 51 0258/004, 07.11.2003, p. 23 ; Compte Rendu Intégral avec Compte rendu analytique traduit des interventions, Séance Plénière, Chambre des Représentants de Belgique, CRIV 51 PLEN 020, 13.11.2003, p. 41.

400 KLEIN (P.), Le droit international à l’épreuve du terrorisme, op. cit., pp. 243-244.

401 Idem., p. 239.

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quelles conséquences doivent en être tirées sur l’étendue du statut de « combattant terroriste étranger » pour identifier les « combattants étrangers » ?

B. L’inapplicabilité du nouveau statut aux « combattants étrangers »

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