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membres étrangers des forces armées belligérantes

Lorsqu’ils sont détenus par la partie adverse, le droit international humanitaire continue à régir la situation des membres, même étrangers, des forces armées parties à un conflit armé international (1) et non international (2).

1. Le statut de prisonnier de guerre pleinement applicable aux « combattants étrangers » des forces armées parties à un conflit armé international

En vertu de l’article 4 de la Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre du 12 août 1949 (ci-après Convention de Genève III ou CG III), seront considérés comme prisonniers de guerre – et bénéficieront donc du statut y afférant – les individus tombés au pouvoir de l’ennemi et appartenant aux catégories suivantes : « les

membres des forces armées d’une Partie au conflit, de même que les membres des milices et des corps de volontaires faisant partie de ces forces armées »636, mais également, « les

membres des autres milices et les membres des autres corps de volontaires, y compris ceux des mouvements de résistance »637 respectant les quatre conditions relatives à leur organisation, ainsi que « les membres des forces armées régulières qui se réclament d’un

gouvernement ou d’une autorité non reconnus par la Puissance détentrice »638. Or, l’étendue de ce statut comprend très certainement les membres étrangers de ces entités.

D’abord, il faut noter que lorsque la Convention de Genève III liste les entités dont les membres bénéficient du statut de prisonnier de guerre, il n’est à aucun moment précisé que les membres étrangers seront exclus. Ainsi, « les membres [de ces] forces armées […]

quels que soient […] leurs nationalités […] bénéficient du statut de prisonnier de guerre en cas de capture ».639 À ce titre, il est intéressant de noter que dans l’Affaire Blaskić, le TPIY a reconnu l’application du statut de prisonnier de guerre aux membres de l’armée de

636 Art. 4, A., 1), CG III, op. cit.

637 Ibid., Art. 4, A., 2) ; voir à ce propos PICTET (J.), Les Conventions de Genève du 12 août 1949 – Commentaire III, op. cit., p. 66.

638 Art. 4, A., 3), CG III, op. cit.

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Herzégovine, incluant les membres de la 7ème Brigade Musulmane du 3ème Corps d’armée de l’ABiH640, c’est-à-dire notamment les volontaires étrangers de l’unité El Moudjahidin « composante musulmane de l’armée de Bosnie-Herzégovine »641 et dont il était question dans les développements précédents.

Ensuite, il faut relever que, point essentiel dans ce travail sur la situation des étrangers participant aux hostilités, le statut de prisonnier de guerre doit être accordé et appliqué de manière égale entre les nationaux et les étrangers des forces armées étatiques. Déjà en 1907 la cinquième Convention de La Haye avait prévu que le ressortissant d’un État tiers au conflit ne pourrait plus se prévaloir de sa neutralité s’il prenait « volontairement du service dans les

rangs de la force armée de l’une des Parties » mais ne pouvait toutefois pas être « traité plus rigoureusement […] que ne pourrait l’être, à raison du même fait, un national de l’autre État belligérant. »642 La simple proposition d’interdire les États d’accepter dans les rangs de leurs forces des ressortissants d’États tiers (neutres) ayant conduit à de vives objections de la part de plusieurs Délégations,643 il ne semble pas vraiment surprenant que la formulation finale de cette Convention insiste sur la nécessité de traiter ces ressortissants étrangers – autrement dit ces « combattants étrangers » – comme les nationaux. D’ailleurs, en 1949, la troisième Convention de Genève ira plus loin en précisant à l’article 16 que

« compte tenu des dispositions […] relatives au grade ainsi qu'au sexe, et sous réserve de tout traitement privilégié qui serait accordé aux prisonniers de guerre en raison de leur état de santé, de leur âge ou de leurs aptitudes professionnelles, les prisonniers doivent tous être traités de la même manière par la Puissance détentrice, sans aucune distinction de

640 TPIY, Le Procureur c. T. Blaskić, Affaire n°IT-95-14-T, op. cit., par. 147 ; SOMMARIO (E.), « The status of Foreign Fighters under International Humanitarian Law », op. cit., p. 149.

641 Ibid., par. 78 ; à la page x de l’annexe, cette même décision précise que des « soldats étrangers (Moudjahidin) » composent cette unité.

642 Art. 17, Convention (V) concernant les droits et les devoirs des Puissances et des personnes neutres en cas de guerre sur terre, La Haye, 18.10.1907 [Entrée en vigueur : 26.01.1910 ; Ratifications : 34 ; Signatures : 17].

643 « Deuxième conférence internationale de la paix, 15 Juin-18 Octobre 1907 : actes et documents », op. cit., p. 81 :

« Plusieurs Délégations objectèrent à cette interdiction qu'il n'y a pas de raison pour empêcher des particuliers neutres d'offrir leurs services à un belligérant et qu'il serait inadmissible, soit de défendre à ce dernier de les accepter, soit d'obliger un État neutre à en empêcher ses ressortissants. »

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caractère défavorable, de race, de nationalité, de religion, d'opinions politiques ou autre, fondée sur des critères analogues. »644

En d’autres termes, il ne fait aucun doute que les étrangers des forces armées parties à un conflit armé international pourront bénéficier de l’entièreté645 du statut de prisonnier de guerre, au même titre que les membres nationaux de ces forces.646 Dès lors, puisque ce statut consiste en un régime régi par le DIH, l’exclusion du droit antiterroriste est encore applicable aux membres étrangers capturés bénéficiant du statut de prisonnier de guerre.

Si les présentes conclusions sont sans appel pour ce qui concerne l’application du statut de prisonnier de guerre aux étrangers membres d’une force partie à un conflit armé international, quelles sont-elles concernant la détention en contexte de conflit armé non international ?

2. Les garanties de traitement lors de la détention en conflit armé non international reconnues aux membres étrangers des forces armées belligérantes

Prévu uniquement dans les textes applicables en conflit armé international, il faut commencer par noter qu’il n’est pas prévu de statut de prisonnier de guerre durant un conflit armé non international ; et ceci concerne aussi bien les combattants des groupes armés non étatiques que les membres des forces armées étatiques.647 Néanmoins, un ensemble de règles est tout de même prévu par le DIH, dans le but d’encadrer la situation juridique des membres d’une partie belligérante qui seraient capturés et détenus par la partie adverse. Or, comme pour le statut de prisonnier de guerre, il ne fait aucun doute que le régime de la détention en conflit armé non international est également applicable aux membres étrangers des forces armées belligérantes. Dès lors, leur situation et les activités qui les concernent dans le cadre de cette détention restent régies par le DIH et enclenchent les régimes d’exclusion du droit

644 Art. 16, CG III, op. cit.

645 La présente conclusion étant celle de l’entière applicabilité du statut de prisonnier de guerre aux étrangers des forces armées étatiques, il faudra se référer directement à la troisième Convention de Genève de 1949 afin de connaître l’ensemble des dispositions détaillées qui devront alors être mises en œuvre.

646 Il faut remarquer que les travaux préparatoires ayant mené à l’adoption de la CG IV ne font état d’aucune proposition contraire.

647 PILLOUD (C.), DE PREUX (J.) et autres, Commentaire des Protocoles additionnels du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 août 1949, op. cit., p. 1410, par. 4570.

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antiterroriste. Ainsi, même après qu’ils aient cessé de le combat du fait de leur captivité, ces « combattants étrangers » membres d’une partie au conflit non international ne devraient pas pouvoir être juridiquement identifiés par le statut de « combattant terroriste étranger ». En plus de démontrer pourquoi l’analyse du régime de la détention dans un CANI permet d’affirmer sa pleine applicabilité aux membres étrangers des forces armées engagées, ce développement sera finalement l’occasion de mettre en lumière les grandes lignes du régime qui doit effectivement être accordé à ces « combattants étrangers » qui seraient capturés lors des combats.

En premier lieu, une protection générale constituée des garanties fondamentales relatives aux traitements des personnes au pouvoir de l’ennemi leur est reconnue. Ainsi placés hors de combat, ils obtiennent la protection rattachée à cet état de fait, au même titre que les malades, blessés et naufragés. La protection contre les attaques et les mauvais traitements, ainsi que l’obligation d’assistance et de soin, reconnues à ces derniers, doivent être appliquées aux

« membres de forces armées [au sens large] qui ont déposé les armes [et] qui ont été mis hors de combat par […] détention […] sans aucune distinction de caractère défavorable basée sur la race, la couleur, la religion ou la croyance, […], ou tout autre critère analogue. »648

Il ne fait aucun doute que la formule « ou tout autre critère analogue » inclut la nationalité et la résidence habituelle. En effet, les Conventions de Genève de 1864, 1906 et 1929 prévoyaient expressément que la nationalité ne pourrait permettre de justifier un traitement plus défavorable aux étrangers hors de combat.649 Or, l’énumération de l’article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949 est précisément formulée de telle sorte d’y inclure toutes les situations qui n’auraient pas été anticipées et qui surviendraient dans des conflits postérieurs aux trois Conventions précitées.650 Il est ainsi certain que l’exclusion de

648 Art. 3, 1) commun aux Conventions de Genève, op. cit. ; voir également Art. 4, par. 1., PA II, op. cit.

649 Art. 6, Convention de Genève pour l’amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne, 22.08.1864 ; Art. 1er, Convention pour l'amélioration du sort des blessés et malades dans les armées en campagne, Genève, 06.07.1906 ; Art. 1er, Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre, 27.07.1929.

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