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Chapitre I. Etude bibliographique

1. Aspects généraux sur la métallurgie des aciers austénitiques

1.4. Eléments d’interprétation de l’évolution du comportement en traction jusqu’à 400°C

1.4.2. Paramètres influençant le maclage

Dans la littérature, deux paramètres clés sont discutés pour expliquer la dépendance en température du maclage :

- L’énergie de Défaut d’Empilement (EDE), - La contrainte appliquée.

Nous proposons de nous intéresser à l’influence respective de ces deux paramètres sur le maclage puis de discuter de leur couplage.

1.4.2.1. Rôle de l’Energie de défaut d’empilement (EDE)

L’énergie de défaut d’empilement est susceptible d’évoluer avec la température. Très peu de données sont disponibles pour les aciers austénitiques inoxydables. Toutefois, un article d’intérêt (Rémy et al., 1978) présente des évolutions de l’EDE en fonction de la température pour différents systèmes ternaires Fe-Cr-Ni, comme illustré par la Figure I. 11.

Figure I. 11 : Variation de l'EDE en fonction de la température pour des aciers de type Fe-Cr-Ni à gauche d’après (Latanision, Ruff, 1971) et à droite d’après (Abrassart, 1973), (Rémy et al., 1978).

On note principalement une élévation générale de l’EDE lorsque la température augmente. Deux domaines se distinguent : une forte croissance est observée jusqu’à 400 ou 500K, suivie d’une phase de stabilisation pour des températures allant jusqu’à 600K. Durant la première phase, une approximation linéaire permet d’estimer une valeur de coefficient directeur comprise entre 0,05 et 0,10 mJ/m²/°C (Rémy et al., 1978).

Il existe une corrélation directe entre les valeurs d’EDE et les mécanismes de déformation actifs (S Allain et al., 2004 ; Lee et al., 2010 ; Dumay et al., 2008 ; Sato et al., 1989 ; Frommeyer et al., 2003 ; Kim et al., 2011) :

- Lorsque l’EDE est élevée (supérieure à 35-40 mJ/m²), la dissociation des dislocations parfaites n’est pas favorable. Seul le glissement de dislocations parfaites peut se produire. Du glissement dévié peut également survenir.

- Lorsque l’EDE se situe à des valeurs intermédiaires (entre 20 mJ/m² et 35-40 mJ/m²), la dissociation des dislocations parfaites est courante et des macles peuvent se former. - Lorsque l’EDE est faible (inférieure à 20 mJ/m²), la forte multiplication des défauts

d’empilement peut aboutir à la formation de martensite ε.

L’EDE de l’acier 316 estimée entre 20 mJ/m² et 35 mJ/m² à 20°C selon l’équation (I. 9) permet de justifier l’activité du maclage observée à cette température sur la Figure I. 9(b). Avec un taux de croissance de 0,10 mJ/m²/°C, l’EDE de l’acier 316 est contenue dans l’intervalle entre 38 mJ/m² et 53 mJ/m² à 200°C. Ceci permet d’expliquer la disparition du maclage à cette température comme vu sur la Figure I. 9(d).

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1.4.2.2. Rôle de la contrainte

Selon (Cottrell, 1964 ; 1975), la distance de dissociation des dislocations parfaites 𝑑 est inversement proportionnelle à l’EDE et peut être calculée grâce à l’équation suivante :

𝑑≈ 𝐺(𝑏4 𝜋 𝛾𝑝)2 (I. 10)

𝐺 est le module de cisaillement et 𝑏𝑝 la norme du vecteur de Burgers des dislocations partielles. Pour un acier austénitique, 𝑑est de l’ordre d’une dizaine de nanomètres. Or la taille de certains défauts d’empilement peut atteindre la dizaine de micromètres. Si l’équation (I. 10) est appliquée pour une telle distance de dissociation, cela conduirait à une EDE invraisemblablement basse. Par conséquent, ce n’est pas l’EDE seule qui peut contrôler l’activité de maclage (Byun et al., 2003).

D’autres auteurs soulignent qu’une faible EDE est une condition nécessaire, mais non suffisante pour activer le maclage (Allain, 2004).

(Byun et al., 2003)suggèrent que c’est la contrainte macroscopique lors de l’essai, qui gouverne le

maclage. Ainsi, il est possible de définir trois domaines de contraintes comme illustré, pour des aciers 316 et 316LN, sur la Figure I. 12 :

- Lorsque la contrainte appliquée est inférieure à 400 MPa, le glissement et l’enchevêtrement des dislocations parfaites est le mécanisme majoritaire.

- Entre 400 et 600 MPa, les premiers défauts d’empilement apparaissent parallèlement au glissement des dislocations parfaites.

- Au-dessus de 600 MPa, le maclage mécanique devient le mécanisme dominant. Cette valeur est considérée comme critique pour l’activation du maclage.

Figure I. 12 : Evolution des mécanismes de déformation en fonction de la contrainte pour un acier 316LN (Byun et al., 2003).

Cette représentation permet d’expliquer correctement les évolutions des microstructures de déformation de la Figure I. 10 entre -100°C et 400°C. Lorsque la température augmente, la résistance

maximale en traction (𝑅𝑚) du 316 LN recristallisé diminue, comme vu sur les courbes de la Figure I. 7. Par exemple, à 400°C, 𝑅𝑚vaut environ 400 MPa. Le matériau n’a donc pas suffisamment durci pour atteindre la valeur critique de contrainte pour l’activation du maclage. De ce fait, seulement des enchevêtrements de dislocations parfaites sont observés en Figure I. 10(a). A -100°C, 𝑅𝑚 vaut environ 1000 MPa, la valeur critique de contrainte pour l’activation du maclage est dépassée, l’acier macle (Figure I. 10(d)).

Selon (Byun et al., 2003), lacontrainte critique d’activation du maclage pour les aciers 316 et 316LN se situe donc à ~600 MPa.

1.4.2.3. Dépendance de la contrainte de maclage en fonction de l’EDE

Il est possible de définir une cission résolue critique de maclage

𝜏

𝑇

,

qui est directement proportionnelle à l’Energie de Défaut d’Empilement. Elle s’écrit le plus couramment selon l’équation (I. 11) (De Cooman et al., 2018).

𝜏

𝑇

= ∝

𝑏𝛾𝑝

+ 𝐶𝑡𝑒

(I. 11)

Les paramètres

et

𝐶𝑡𝑒

sont souvent ajustés pour chaque matériau. Le terme

𝐶𝑡𝑒

prend en compte des effets comme, entre autre, la taille de grain, des longueurs de dislocations ou des tailles de boucles de dislocations.

Pour les aciers inoxydables austénitiques, cette relation peut s’écrire sous la forme (I. 12) proposée par (Byun, 2003).

𝜏

𝑇

= 2

𝑏𝛾𝑝 (I. 12)

𝜏

𝑇peut être reliée à la contrainte macroscopique d’activation du maclage

𝜎

𝑇

,

via le facteur de Schmid

moyen (

𝑆𝐹),

comme précisé sur l’équation (I. 13).

𝜎

𝑇

=

𝑆𝐹1

2𝛾𝑏𝑝 (I. 13)

En ce qui concerne

𝑆𝐹

, (Byun, 2003) sélectionne la valeur de 0,326, proposée par (Taylor, Floyd, 1938) pour les aciers inoxydables polycristallins. La relation devient donc :

𝜎

𝑇

= 6,14

𝑏𝛾𝑝 (I. 14)

Dans le cas d’un acier 316 avec une EDE estimée à 14,2 mJ/m² à 20°C,

𝜎

𝑇se situe aux alentours de 600

MPa, comme suggéré au paragraphe précédent (

𝑏

𝑝est égal à 0,145 nm).

Certains auteurs, comme (Wu et al., 2006), révisent cette relation en déterminant

𝑆𝐹 = 0,465

pour un acier 316L. Par ailleurs, avec les valeurs d’EDE fournies par (Rémy et al., 1978), les auteurs évaluent l’évolution de

𝜎

𝑇en fonction de la température. Sur la Figure I. 13, elle est comparée à l’évolution de

la résistance maximale en traction (appelée contrainte de striction) de l’acier 316L. On remarque que

𝜎

𝑇 augmente continûment en fonction de la température, alors que la résistance maximale quant à

elle ne cesse de diminuer. A partir de 120°C, la contrainte critique de striction est plus faible que

𝜎

𝑇. Cela signifie qu’au-delà de cette température,

𝜎

𝑇 ne peut jamais être atteinte. C’est la raison pour

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Figure I. 13 : Dépendance en température de la résistance maximale en traction,de𝜎𝑇 et de la limite d’élasticité pour un acier 316L (Wu et al., 2006).