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Première Partie

IV. MESURE DE LA SATISFACTION CLIENT-PATIENT :

2. Les outils de mesure de la satisfaction

Pour mesurer la satisfaction de leurs clients, les entreprises ont à leur disposition plusieurs outils. Toutefois, l’entreprise pharmaceutique peut se servir de ces outils dans l’évaluation de la satisfaction de sa patientèle. Chaque officine peut mesurer ou évaluer celle-ci à son choix, l’important sera d’en observer les évolutions, de les analyser et de traiter les insatisfactions. D’après mes lectures, il en ressort ce qui suit de sources d’évaluation les plus courantes :

a. Les indicateurs de satisfaction :

Pour mesurer la satisfaction de leur clients-patients, les officines de pharmacie pourraient se procurer des trois indicateurs suivant qui sont en effet les plus utilisés par les entreprises :

 Le NPS ou Net Promoter Score : précédemment cité dans la mesure de la fidélisation client (Cf. la relation entre la satisfaction et la fidélisation client), cet indicateur s’intéresse à la satisfaction générale, il permet de déterminer à quel point vos clients se sentent attachés à votre entreprise. Plus précisément cet indicateur permet de mesurer de manière factuelle le bouche à oreille de l’aspect que l’entreprise souhaite évaluer (par exemple : le conseil du pharmacien, la qualité du personnel ou la disponibilité du produit...etc.). Il s’agit de mesurer la propension des clients-patient à recommander votre service et/ou votre produit. Le NPS est construit à partir des réponses à la question « Sur une

échelle de 0 à 10, quelle est la probabilité que vous recommandiez notre pharmacie (ou notre produit... etc.) à votre entourage? ». Le principe est de soustraire aux promoteurs (notes 9 et

10) de la marque les détracteurs (notes de 0 à 6), afin d’avoir un score de "recommandation" : NPS = % PROMOTEURS - % DETRACTEURS

Cet indicateur permet d’une part de connaître les promoteurs de la pharmacie d’officine, ce qui est d’un intérêt stratégique à l’heure des réseaux sociaux. D’autre part il permet d’identifier les détracteurs qui peuvent potentiellement nuire à l’image de l’officine. En plus, la connaissance des clients-patients à risque permettra à l’entreprise de les transformer éventuellement en promoteurs (97).

 Le CSAT ou Customer Satisfaction Score : c’est l’indicateur le plus basique, le plus intuitif et le plus utilisé par les équipes marketing. Le CSAT est tout simplement construit à partir des réponses à la question « Etes-vous satisfait de X (pharmacie, un service

particulier, un produit particulier...etc.)?» suite à la réalisation d’une interaction précise (par

exemple un achat). Nous utilisons souvent une échelle de réponse composée de quatre choix : Très satisfait /Plutôt satisfait /Peu satisfait /Pas du tout satisfait. Le CSAT est ainsi obtenu par additionnement des réponses positives (Très satisfait + Plutôt satisfait) dont la somme sera divisée par la somme des réponses totales avant de multiplier le tout par 100 pour avoir un résultat en pourcentage.

CSAT = [∑ REPONSES POSITIVES / ∑ REPONSES TOTALES] x100

Bien qu’il soit polyvalent, le CSAT ne nous permet pas de mesurer la fidélisation client car il se focalise sur la satisfaction relative à une interaction définie : achat, service, etc. (98).

 Le CES ou Customer Effort Score : cet indicateur est relativement récent mais s’avère de plus en plus utilisé par les entreprises. Ilévacue toute la dimension subjective et humaine de la relation client pour se focaliser sur une approche fonctionnelle et objective : le niveau d’effort fourni. Il s’agit de demander à vos clients d’évaluer le niveau d’effort qu’ils ont dû déployer pour que leur demande obtienne satisfaction à travers la question « quel

niveau d’effort avez-vous dû employer pour que votre demande soit traitée ? ». Les

clients-patients seront donc invités à répondre sur une échelle de 1 à 5 (1 : le degré d’effort le plus faible et 5 : le degré d’effort le plus élevé). Suite à leurs réponses, nous allons pouvoir déterminer le niveau de qualité du service client-patient (98).

Pour avoir une vision complète et plus précise de la pharmacie d’officine, il est préférable de mixer les différents indicateurs et d’évaluer leur évolution. Toutefois, ces indicateurs ne répondent pas à toutes les questions, en particulier, ils n’expliquent pas la raison sur laquelle le client ou le client-patient s’est appuyé pour apporter ses réponses. D’où l’intérêt des enquêtes de satisfaction que nous allons définir dans les prochaines lignes.

b. Les enquêtes de satisfaction :

Ces enquêtes prennent la forme d’un questionnaire direct, sous format papier ou électronique. Ce questionnaire est conçu après avoir défini un objectif précis et identifié les différents aspects que l’entreprise souhaite évaluer : conseils apportés au moment de la dispensation du produit, la qualité du personnel ou du produit, la qualité du service en général ou la qualité du point de vente par exemple, etc. Dans un même questionnaire, nous pourrons inclure des questions pour mesurer chacun des indicateurs de performance présentés plus haut. Pour cela, ces questionnaires prennent soit la forme de questions ouvertes, permettant ainsi au client-patient de s’exprimer, soit de questions fermées, avec des réponses ou un système de notation prédéfinis. Les questions doivent être bien choisies afin que les résultats soient significatifs (99). L’analyse des réponses permettra aux pharmaciens officinaux d’identifier les différents points de disfonctionnement, de mieux cerner les besoins et attentes de leur patientèle et d’améliorer la personnalisation de la relation pharmacien client-patient.

c. Les boîtes à suggestions :

Il s’agit de mettre en place une boîte ou un registre où les clients-patients pourraient consigner leurs suggestions et leurs remarques ou critiques. C’est une stratégie qui permettra à l’organisation d’évaluer la satisfaction de sa clientèle tout en décelant les raisons d’insatisfaction (100).

d. Les modèles d’évaluation :

Si les questionnaires permettraient d’identifier les attentes des clients et les axes d’amélioration possibles, la mise en place d’un modèle d’évaluation de la satisfaction est utile pour garantir la satisfaction de ses clients. Il s’agit de comprendre les éléments qui ont un fort impact sur la satisfaction de ses clients. Il serait intéressant pour les entreprises de créer une typologie de la satisfaction en se basant sur un modèle d’évaluation de satisfaction client déterminé comme le modèle de KANO.

Il s’agit d’une théorie développée en 1984 par le professeur Noriaki Kano et ses collègues de l’Université Rika de Tokyo. Ce modèle de satisfaction client classe les attributs en fonction de la façon dont ils seront perçus par les clients et de leur effet sur la satisfaction

de la clientèle (101). Cette théorie se fonde sur le constat que la satisfaction et l’insatisfaction ne sont pas deux expressions symétriquement opposées d’une même perception. En effet une caractéristique particulière d’un produit ou d’un service peut générer beaucoup de satisfaction auprès du client qui la découvre sans pour autant que son absence aurait symétriquement générer de l’insatisfaction (102). Autrement dit, certains éléments influent spécifiquement sur la satisfaction, d’autres principalement sur l’insatisfaction et d’autres sur les deux.

Sur la base de cette compréhension, le modèle de KANO classe les différentes attentes du client en fonction de leur capacité à satisfaire leur clientèle. Cela suggère qu'il existe trois catégories d’attentes qui ont des impacts différents sur la satisfaction du client, car le niveau de satisfaction des clients varie (103):

Les attentes de base ou indispensables : quasiment toujours implicites du fait qu’elles sont considérées comme essentielles. Leur contentement n’apportera pas de satisfaction particulière. A l’inverse, ne pas y répondre génèrera une forte insatisfaction, ressentie comme légitime.

Les attentes proportionnelles ou de performance : c’est-à-dire les attentes dont la réponse apportera une satisfaction proportionnelle au niveau de performance délivré.

Les attentes attractives : celles-ci amènent à un niveau de satisfaction élevé, leur perception constituera une heureuse surprise, mais leur absence n’entraînera pas de mécontentement. Ces attributs augmentent la satisfaction de manière implicite: ils correspondent à des besoins latents ou émergents. Ces attentes sont un terrain propice à l’innovation.

Le diagramme de KANO est donc une représentation simple et didactique de ces types d’attentes et des conséquences de leur satisfaction ou non. Il a été conçu en se basant sur deux effets : un effet symétrique et un effet asymétrique :

L’effet symétrique (Figure 7) est symbolisé par une droite passant par le centre et représente une satisfaction corrélée linéairement et positivement à la présence ou à l’absence d’une caractéristique. Ce sont les attentes de performance,

proportionnelles ou linéaire : la satisfaction et l’insatisfaction sont unidimensionnelles et résultent de l'adéquation de la performance constatée par rapport à la performance annoncée ou suggérée. Lorsque ces attributs sont présents et fonctionnent, le client est satisfait. En revanche, lorsque ces attributs sont absents ou ne correspondent pas à l’attente créée, le client est insatisfait. Il s’agit de la qualité linéaire, elle répond aux besoins explicites (104).

Figure 7: Effet symétrique (104).

L’effet asymétrique (Figure 8) est symbolisé par deux courbes :

- La courbe rouge qui représente les attentes de base, obligatoires ou indispensables. Elle montre une satisfaction limitée lorsque les caractéristiques ou les fonctionnalités attendues sont présentes, mais une insatisfaction forte et rapide dès que celles-ci disparaissent. Il s’agit de répondre à la qualité minimale attendue ; aux caractéristiques obligatoires (104).

La courbe bleue qui représente les attentes attractives. Elle présente un niveau de satisfaction normal même en l’absence d’une caractéristique dont le client ignore l’existence. La satisfaction s’intensifie rapidement lorsque la caractéristique ou la fonctionnalité est composée. C’est l’effet « bonne surprise » ou « heureux surprise » (104).

Figure 8: Effet asymétrique (104).

L'analyse de ces deux effets donne lieu à trois positionnements principaux sur la courbe de KANO qui représentent les trois principales attentes que nous avons abordées précédemment: de base, proportionnelles et attractives. Ces attentes sont repérées sur le graphe suivant qui comporte deux axes :

Un axe horizontal qui représente le degré de réalisation ou la présence/ absence d’une fonction, caractéristique ou d’une performance. A droite la fonction est présente, la couverture de l’attente est forte. A gauche la fonction est absente, la couverture de l’attente est faible voire inexistante (103).

Un axe vertical qui représente le degré de satisfaction du client ou la réaction du client. En haut, le niveau de satisfaction est au summum. En bas, l’insatisfaction est totale (103).

Figure 9: Diagramme de KANO (105).

Ce modèle est construit à partir d’un processus intitulé: enquête de KANO. Cette enquête repose sur un questionnaire qui utilise deux questions pour chaque élément que nous souhaitons évaluer pour déterminer à quelle catégorie il comporte : une question dans le sens positif pour évaluer la satisfaction si l’élément est présent et une question dans le sens négatif pour évaluer la satisfaction si cet élément est absent. Ce double questionnement est la clé de la méthode, partant du postulat que la satisfaction et l’insatisfaction ne sont pas symétriquement opposées. Pour chaque paire de question, cinq réponses sont possibles :

Question positive : Que ressentez-vous si la fonctionnalité (l’attente que nous souhaitons évaluer) est présente :

Je suis content C’est normal

Je suis neutre (indifférent)

Je fais avec (je n’ai pas vraiment le choix) Je suis mécontent

Question négative : Que ressentez-vous si la fonctionnalité (l’attente que nous souhaitons évaluer) est absente:

Je suis content C’est normal

Je suis neutre (indifférent)

Je fais avec (je n’ai pas vraiment le choix) Je suis mécontent

Sur cette base, les résultats devront être décodés sur une matrice qui en croise les réponses. Il suffirait donc de se référer à cette matrice pour catégoriser les attentes de sa clientèle.

Si la fonctionnalité est absente, vous êtes :

Je suis content

C’est normal

Je suis

neutre Je fais avec

Je suis mécontent S i la fo n ct ion n a li e st p se n te , vou s êt es : Je suis

content Bizarre Attractive Attractive Attractive Proportionnelle C’est

normal

Anti-fonctionnel Indifférent Indifférent Indifférent Indispensable Je suis

neutre

Anti-fonctionnel Indifférent Indifférent Indifférent Indispensable Je fais

avec

Anti-fonctionnel Indifférent Indifférent Indifférent Indispensable Je suis mécontent Anti-fonctionnel Anti-fonctionnel Anti-fonctionnel Anti-fonctionnel Bizarre

Fondé sur la perception réelle ou potentielle du client, ce modèle est très intéressant pour préciser l’évaluation de la contribution des différents éléments à la satisfaction de la clientèle. La catégorisation des éléments n’est pas basée que sur la satisfaction liée à la présence de la fonctionnalité: il évalue aussi l’impact de son absence. Il permet donc de mesurer la satisfaction des clients en évaluant leurs attentes grâce au niveau de satisfaction associé. Sous ce rapport, il prend en compte les attentes explicites mais peut faire émerger les attentes implicites du client. En plus, l’enquête KANO permet d’éviter les investissements couteux qui laissent les clients indifférents, et permet de cerner les attentes sur lesquelles les clients seront intraitables (103).

Ce modèle aussi captivant est cependant très délicat car l'échelle de subjectivité d'un individu peut être importante et l'agrégation de préférences individuelles en une fonction de préférence collective demeure un exercice délicat (103).

En plus, dans le diagramme de KANO, nous avons parlé des attentes attractives et plus précisément de l’effet « heureux surprise » dont le client ne s’attendait pas. Procurer un tel effet est un avantage concurrentiel tant que celui-ci n’est pas imité. Or, deux effets vont affecter ce phénomène : sa banalisation par l’imitation des concurrents d’une part et l’accoutumance du client d’autre part. Petit à petit " l’heureux surprise" devient un du, une normalité. Du coup, lorsque la caractéristique qui provoque cet effet disparaît, l’insatisfaction apparaît. Cette fonctionnalité est donc passée plus ou moins vite d’une attente attractive à une attente basique d’où l’importance de la variable temporelle dans ce modèle (103).

Pour profiter de ses différents avantages, ce diagramme doit donc être réalisé avec soin et adapté à la nature de l’entreprise et de sa clientèle. La pharmacie d’officine, pourrait être une entreprise propice pour la mise en place d’un tel modèle, dans l’objectif d’évaluer la satisfaction de ses clients-patients.

En guise de conclusion, la mesure de la satisfaction client est d’une grande importance. Les méthodes de mesure optées par les entreprises sont nombreuses. Néanmoins, il n’existe pas de méthode prédéfinie pour les organismes, chaque outil doit être adapté à la nature de l’entreprise et à celle de sa clientèle. Quel que soit la méthode utilisée, l’évaluation de la satisfaction de sa clientèle en officine de pharmacie permettra de conserver les clients-patients, d’améliorer leur expérience et surtout de garder une bonne image de sa pharmacie.

Enquête d’évaluation de la satisfaction