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Première Partie

II. LA NOTION DU MARKETING RELATIONNEL

4. La confiance dans la relation pharmacien client-patient :

Comme nous l’avons précédemment cité dans la pyramide de Maslow, la confiance et la sécurité figurent en deuxième lieu dans les besoins primaires de l’Homme. Cependant, cette notion ou ce sentiment qui apparaît dans nos relations affectives ou professionnelles est définie dans l’approche psychologique comme un sentiment spontané et individuel. Elle est parfois envisagée dans le monde managérial pour devenir une compétence parmi d’autres à acquérir par les professionnels de santé dans une visée certes humaniste, mais surtout d’efficience organisationnelle (33).

La confiance est présentée comme le fondement, l’ingrédient attendu de toute relation. Elle semble partout présente mais visible seulement par son absence et son abus. Sans la confiance, nous ne pourrons pas nouer des relations avec autrui, c’est la condition de base, l’objet, l’objectif et le résultat des échanges humains. Elle nous permet de poser pas après pas sans nous soucier du possible chute. Sans elle, comment accepter de confier notre vie à autrui, comment accepter qu’une personne prenne soin de nous, comment tout simplement accepter notre humaine vulnérabilité ? (33)

Le "New Oxford English Dictionary" (1998) attribue quatre sens au mot "confiance":

« Sentiment / croyance que l'on peut avoir foi en quelque chose ».

« Etat de confiance certaine en la vérité de quelque chose ».

« La confiance en soi découlant de l’appréciation de ses propres capacités / qualités ».

« Raconter des choses de confiance mutuelle ».

Fondamentalement, la confiance consiste à avoir la conviction en une organisation, son personnel et ses services. Bien que l’importance de la confiance soit bien reconnue dans la littérature en particulier en ce qui concerne son rôle dans le soutien des relations entre les entreprises visant une clientèle d’entreprises (business to business) que dans le soutien des relations entre entreprises et consommateurs (business to consumer) (34). Nous suggérons que la confiance, ou son absence, ne nécessite aucun contact préalable avec l'organisation. Il

existe de nombreuses organisations avec lesquelles beaucoup de gens n’ont que peu ou pas de contact. Cependant, la notion de confiance est particulièrement importante dans le secteur public, comme les écoles, les hôpitaux, les services sociaux, les tribunaux et la police, où les clients et les utilisateurs, ne peuvent pas aller ailleurs s'ils manquent confiance dans l'organisation. Le sentiment de confiance du client envers les organisations en général ou en particulier, peut avoir un impact important sur leur sentiment de bien-être et sur la qualité de vie. Cela affectera également leur disposition envers ceux qui n’ont pas encore utilisé les services. Ce sentiment de confiance pourrait influer non seulement sur leur probabilité d’achat (ou d’utilisation), mais affecter les services de ces organisations (35). Si nous avons confiance dans les services de police, nous serons peut-être plus disposés à coopérer avec la police en tant que témoin devant un incident. Pareil dans les pharmacies, quand les clients-patients se sentent en confiance le premier jour, ils auront une vision positive de cette expérience ce qui va les pousser à ne pas hésiter à s’y rendre en cas de besoin.

L’étude de la confiance dans les relations personnelles en contact-client suscite l’intérêt des chercheurs et praticiens depuis le début des années quatre-vingt-dix. Elle est d’abord reconnue comme une variable importante dans ces relations et dans l’explication des comportements de prise de décision (36). A cet égard, la relation pharmacien client-patient a beaucoup évolué depuis ces dernières années. En effet, nous ne sommes plus la simple personne qui délivre les médicaments, mais un professionnel de santé qui s’engage auprès du client-patient, en entretenant une relation d’aide et de confiance. Nous regroupons sous le terme d’alliance thérapeutique, un échange entre le pharmacien et le client-patient, fondée sur la crédibilité du pharmacien envers son patient, et la confiance de ce dernier qui en découle. Comme nous l’avons vu, le pharmacien devrait faire preuve d’empathie à l’égard des clients- patients afin de comprendre leurs besoins. Ainsi, il va pouvoir établir une relation de confiance avec eux. La pharmacie, étant non seulement un lieu de délivrance mais également un lieu d’entrevue et de contact, le client-patient a besoins de se sentir en confiance par rapport à l’acte de dispensation; qui consiste à analyser et préparer l’ordonnance, puis donner le bon conseil à son client-patient ; et aussi que nous lui procurons toute l’intimité dont il aura besoin (21).

Le secret professionnel est une condition indispensable au lien de confiance qui préside dans la relation entre le client-patient et le professionnel de santé. Le pharmacien devrait veiller au quotidien à garantir le secret des informations concernant un patient, qui ont été portées à sa connaissance dans le cadre de son exercice professionnel, sous peine d’éventuelles poursuites pénales, civiles et/ou disciplinaires. Sont concernés tous types d’informations, que celles-ci lui a été communiquées par l’intéressé lui-même, par l’un de ses collaborateurs, par tout tiers, ou qu’elles aient été déduites de la nature des médicaments dispensés. Confidentialité des registres papier ou informatique, conversation au comptoir à propos d’une délivrance, confidences d’un client-patient à un membre de l’équipe, personnalisation de comptes rendus ou d’examens, échanges de données entre professionnels, etc, le pharmacien veille au respect du secret professionnel à tout moment et en toutes circonstances de son exercice (37).

Le code de déontologie est explicite, l’article 6 et 7 stipulent que: «Le secret professionnel s’impose à tous les pharmaciens dans les conditions établies par la loi. Afin d’assurer le respect du secret professionnel, le pharmacien s’abstiendra de discuter en public, notamment à l’officine, de questions relatives aux maladies de ses clients et à leur traitement. Il évitera toute allusion de nature à compromettre le secret professionnel dans ses publications.». Au-delà des textes, c’est un élément clé de la relation de confiance avec la population et les clients- patients, qu’il s’agisse de leur santé ou de leur vie privée (38). Pour garantir le secret professionnel au comptoir, un espace de confidentialité serait donc nécessaire. De ce fait, nous pourrons mettre en place des aires de consultations confidentielles ou semi-confidentielles, de la musique de fond pour réduire la possibilité d’entendre les discussions, un espace d’attente pour éviter les attroupements devant le comptoir de l’officine, voire même un bureau fermé pour la consultation. Cette obligation à la fois morale et juridique permettra de maintenir la relation de confiance instaurée entre le pharmacien et son client-patient.

Détenteur de solides connaissances sur les médicaments, le pharmacien est reconnu par tous comme un conseiller de référence en la matière. Pour les usagers, l’officine est le lieu où l’on se procure les médicaments et où l’on reçoit une information adéquate pour les utiliser de façon optimale. Des études ont déterminé divers facteurs influençant la confiance dans les professions de santé mais nous allons se concentrer sur les éléments essentiels de la confiance identifiés dans un document de discussion élaboré par le "Nuffield Trust" en 2004 intitulé «TrustinHealthcare» (39) :

 La compétence en connaissance : tous les professionnels de la pharmacie doivent développer leurs connaissances et compétences professionnelles en matière d’apprentissage tout au long de leur vie, avec l'obligation de maintenir et d'améliorer la qualité de la pratique en maintenant ces connaissances et ces compétences à jour et adaptées à leurs rôles et à leurs responsabilités. Afin de maintenir la confiance du public dans leurs capacités, les pharmaciens doivent respecter des normes de pratique fiables et efficaces tout au long de leur carrière. Les professionnels de santé commencent à gagner la confiance des patients en connaissant bien leur domaine de pratique. Par conséquent, les clients-patients se sentent en confiance dans les conseils fournis (39).

Les pharmaciens d’officine pourraient prendre en considération ces points pour renforcer leurs compétences en connaissance :

 Assurer une formation continue au pharmacien et au personnel.

 Travailler toujours dans les limites de nos connaissances et consulter ou demander conseil si nécessaire.

 Encourager une culture d'ouverture au sein de l’équipe, enregistrer et signaler toutes les erreurs et les incidents, effectuer des analyses de causes profondes des erreurs et partager tout apprentissage avec l'ensemble du personnel

 S’assurer que tout le personnel sait comment traiter les plaintes des patients de manière ouverte et honnête.

Cependant, des erreurs pourraient se produire, leur signalement et leur partage permettra un apprentissage des quasi-incidents afin de renforcer la sécurité des patients. Ces derniers sont beaucoup plus susceptibles de faire confiance aux pharmaciens et aux professionnels de la santé qui adoptent une approche ouverte et honnête, admettent leurs erreurs et présentent des excuses pour les rectifier. Nous allons citer ci-dessous quelques actions tirés de la brochure "Say sorry" du "NHS Litigation Authority leaflet", que nous pourrons entretenir face à une erreur (39) :

 La rapidité : la discussion initiale avec le client-patient et sa famille devrait avoir lieu le plus tôt possible après avoir commis l’erreur.

 L’explication : les clients-patients et leurs familles devraient recevoir une explication étape par étape de ce qui s'est passé.

 Les informations : les clients-patients et leurs familles devraient recevoir des informations claires et non ambiguës et non pas des informations contradictoires de la part des différents membres de l’équipe. L'utilisation de jargon médical et d'acronymes devrait être évitée.

 Le soutien continu : les clients-patients et leurs familles devraient disposer d'un interlocuteur unique pour toute question ou demande. Ils devraient également bénéficier d'un soutien adapté à leurs besoins.

 La confidentialité : le pharmacien serait tenu de respecter la confidentialité du client-patient, sa famille et son personnel.

 La continuité des soins: les clients-patients sont en droit de s’attendre à ce qu’ils continuent à recevoir tous les traitements habituels et qu’ils continuent à être traités avec dignité, respect et compassion. Si un client-patient exprime une préférence pour que ses soins de santé doivent être pris en charge par une autre équipe, les dispositions appropriées devraient être prises afin de lui permettre de recevoir un traitement ailleurs.

 Les compétences sociales : tous les pharmaciens et les professionnels de la santé sont tenus de développer leurs compétences sociales et devraient adapter leur style de communication aux besoins du client-patient. Les compétences de communication efficaces comprennent la prise de conscience de la communication non verbale et verbale. Comme nous l’avons précédemment précisé (Cf. la compréhension des besoins du client-patient), il est important que les clients-patients aient le sentiment d'être écoutés et de recevoir des informations de manière respectueuse et sans jugement. Il faudrait également que les pharmaciens fassent preuve d’empathie pour encourager la divulgation complète de leurs interlocuteurs (39).

Tous les professionnels de santé sont tenus de fournir des soins centrés sur le client-patient. Celles-ci signifient que ces derniers devraient avoir la possibilité de participer pleinement à toutes les décisions qui les concernent. Les pharmaciens devraient veiller à prendre des décisions en commun lorsqu’ils conseillent les clients-patients et à leurs fournir les informations dont ils auront besoin pour prendre une décision en connaissance de cause. Les pharmaciens devraient également accepter la décision du client-patient, même si elle ne correspond pas à ce qu’ils pensent être dans l’intérêt supérieur de ce dernier (39).

 L’honnêteté : les pharmaciens sont censés agir avec honnêteté et intégrité pour maintenir la confiance du public et préserver la réputation de la profession. Il serait essentiel que les clients-patients aient confiance en la capacité de leur pharmacien, en ses conseils, de croire qu’il agit dans leur intérêt, à tout moment. Si ils estiment que les pharmaciens sont malhonnêtes, ils risqueraient de perdre leur respect et leur crédibilité (39).

 Faire preuve de respect : le respect est un élément très important pour une relation professionnelle durable. Les pharmaciens et les professionnels de la santé ont l'obligation de ne laisser aucun préjugé personnel les empêcher de dispenser des soins de qualité. Sur ce, les limites professionnelles devraient également être maintenues en tout temps; si celles-ci sont croisées ; les clients-patients risqueraient de perdre confiance dans les pharmaciens et tous les professionnels de santé. Chaque patient mérite d'être traité avec dignité et respect. En les encourageant à délibérer et à faire des choix à travers une prise de décision partagée, leur autonomie sera préservée. Faire preuve de compassion, accorder à chaque patient le temps approprié, faire preuve d’écoute active et l’aider à résoudre ses problèmes, contribueront tous à établir une relation de confiance et de respect (39).

Les pharmaciens et les professionnels de santé ont l'obligation morale de créer un climat de confiance avec les clients-patients et de représenter leur profession de manière digne de confiance. Il est important de rappeler que la confiance est un concept fragile. Une fois la confiance interpersonnelle perdue, il pourrait être difficile de la reconstruire. Dans des conditions de travail souvent difficiles et stressantes, les pharmaciens et les professionnels de la santé doivent s’efforcer de relever le niveau des normes de sorte que toute possibilité d’interaction avec les patients ou en leurs noms aide à établir et à maintenir un climat de confiance (39).

Pour résumer, les clients-patients doivent savoir qu'ils peuvent faire confiance aux pharmaciens et aux professionnels de la santé pour qu'ils respectent leur vie privée et leur dignité, sinon cela pourrait les empêcher de pouvoir demander des conseils ou de partager des informations. Si la confidentialité d'un patient est violée, cela pourrait non seulement nuire à la relation individuelle avec lui, mais également à la confiance qu'il a établie avec tout professionnel de la santé. La confidentialité est une exigence légale, c'est pourquoi il est important que le personnel soit formé de manière à ce qu'il soit non seulement au courant des lois et des règlements, mais également de la manière dont ils s'appliquent dans la pratique quotidienne.

A l'origine de tout comportement se trouve un besoin, des désirs, des attentes à accomplir. Le marketing vient pour influencer ces désirs de sorte que le besoin se traduit par une demande. Le domaine du marketing relationnel ne cesse de croiser le succès croissant notamment dans le secteur pharmaceutique. La compréhension du client, la communication, la confiance et l’intelligence émotionnelle, seraient donc les principaux outils du marketing relationnel permettant ainsi d’atteindre l’objectif thérapeutique fixé et viser un objectif de satisfaction et de fidélisation des consommateurs que nous allons détailler dans les prochains chapitres.