PARTIE II – OFFRE DE REPRISE DANS LE CADRE D'UN PLAN DE CESSION
C-‐2 ) S ORT DES CONTRATS DE TRAVAIL
En cette période de crise économique où le chômage atteint plus de 10%, le nombre d'emplois repris revêt un élément essentiel de l'offre, souvent plus important que le prix de cession en lui-‐même. D'ailleurs, comme le constate Maître Hélène BOURBOULOUX, Administrateur Judiciaire, "le prix de cession est inversement proportionnel au nombre de
salariés repris" de sorte que "les salariés sont souvent considérés comme des passifs
latents et non des actifs potentiels"99.
(a) La règle édictée par l'article L.1224-‐1 du Code du Travail
Cet article stipule dans son alinéa 2 : "S'il survient une modification dans la situation
juridique de l'entreprise, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise".
Ainsi, la cession d'entreprise n'altère pas le principe selon lequel tous les contrats de
travail (attachés à l'exploitation) subsistent entre le nouvel employeur et les salariés. Ce
principe du droit du travail trouve une exception lorsque des licenciements sont notifiés
en exécution d'un plan de cession adopté par le Tribunal en application des articles
L.631¬19 et suivants du Code de Commerce. La Cour de Cassation100 considère que les
licenciements notifiés sur décision du Tribunal et dans le respect des règles spécifiques afférant au plan de cession sont réguliers.
(b) La détermination du nombre d'emplois repris
Il revient à l'offreur de préciser le nombre d'emplois qu'il propose de reprendre dans chacune des catégories professionnelles existantes au sein de l'entreprise. Notons que la
liste des emplois repris ne peut pas être nominative. Les raisons économiques à la reprise
partielle des salariés devront être justifiées dans l'offre de reprise.
(c) La notification et la charge des licenciements
C'est le Tribunal qui, par son jugement arrêtant le plan, autorise et ordonne le licenciement des salariés non repris dans les catégories professionnelles concernées.
Lorsqu'il y a un Administrateur Judiciaire, c'est à lui que revient la charge de procéder aux
licenciements dans un délai d'un mois à compter de la date du jugement adoptant le plan.
La procédure de licenciement est elle-‐même soumise aux règles du droit commun et
notamment celles relatives à :
§ l'obligation de reclassement avant licenciement, § l'ordre des licenciements,
99 Propos tenus au séminaire du Conseil National des Administrateurs Judiciaires et des Mandataires Judiciaires de La Colle-‐sur-‐Loup en Juin 2012
Reprendre une entreprise à la barre du Tribunal – Guide pratique pour l'expert-‐comptable du repreneur 73 § la consultation des instances représentatives du personnel et l'obligation de plan
de sauvegarde de l'emploi, § la situation des salariés protégés.
Dès lors que les licenciements ont été autorisés par le jugement arrêtant le plan et qu'ils sont notifiés régulièrement, la charge qui en découle s'impose à la société cédante.
(d) Autres aspects liés à la reprise des contrats de travail
1) La modification d'un élément du contrat de travail
Dans certains cas, l'offreur peut souhaiter la poursuite de contrats de travail en
demandant que soient modifiés certains éléments (exemple : la qualification, le salaire, le
lieu de travail, la durée du travail, etc).
Cependant, le salarié repris ne peut se voir imposer une modification de son contrat de
travail sans son accord. Cet accord doit être recherché avant l'examen du projet de plan
par le Tribunal et dans les formes prévues par le droit du travail, c'est-‐à-‐dire avec un délai de réflexion d'un mois accordé au salarié.
Si le salarié accepte la modification, l'accord est formalisé par un avenant au contrat de travail qui définira les termes modificatifs du contrat initial et qui sera assorti d'une
condition suspensive : l'adoption du plan en faveur de l'offreur auteur de la proposition.
2) L'incidence de l'obligation de reclassement
L'employeur, y compris en procédure collective, a l'obligation de rechercher par des démarches concrètes et individualisées le possible reclassement des salariés non repris,
et ceci avant tout licenciement.
En l'espèce, l'Administrateur Judiciaire sera donc amené à interroger les candidats-‐ repreneurs et à les faire réfléchir sur un possible reclassement des salariés non repris au sein de leurs propres entreprises.
3) L'ordre des licenciements
Si, dans les catégories professionnelles concernées par des licenciements, un ordre des
départs doit être appliqué, celui-‐ci relève de l'Administrateur Judiciaire et non pas de l'offreur. Les critères seront ainsi fixés par l'Administrateur Judiciaire après consultation des
pratique, qu'une réunion informelle se tienne entre l'Administrateur Judiciaire et le repreneur pressenti afin de présenter les critères d'ordre choisis.
4) La priorité de réembauchage
Le salarié licencié pour motif économique bénéficie d'une priorité de réembauchage
durant un délai d'un an à compter de la date de rupture de son contrat de travail, s'il
manifeste le désir d'user de cette priorité dans ce délai.
Cette priorité est attachée à la nature de l'emploi que le salarié occupait au moment de la rupture de son contrat de travail. Elle vaut aussi pour tout emploi auquel ce salarié peut prétendre, au bénéfice d'une formation adaptation, et aux emplois qu'il peut occuper à la suite d'une qualification qu'il a acquise et dont il informe l'employeur.
Cette priorité de réembauchage s'applique également aux salariés non repris dans le cadre d'un plan de cession. Aussi, le repreneur devra tenir compte de cette priorité de
réembauchage qui peut également concerner les salariés licenciés pendant la période d'observation, voire avant la procédure collective.
5) La situation des salariés protégés
Le repreneur sera tenu de reprendre les salariés protégés dont le licenciement inclus dans
les dispositions du plan ne serait pas autorisé par l'inspection du travail.