PARTIE II – OFFRE DE REPRISE DANS LE CADRE D'UN PLAN DE CESSION
B-‐2 ) V ALIDATION DES INFORMATIONS CHIFFREES : LA VALEUR AJOUTEE DE L ' EXPERT ‐
COMPTABLE
Pendant la période d'observation, l'intervention de l'expert-‐comptable permet souvent de rassurer le Tribunal sur les éléments chiffrés qui lui sont transmis. Pour autant, il convient que sa mission soit légitimée non seulement par une lettre de mission comme l'impose l'article 11 du Code de Déontologie des Experts-‐Comptables, mais que ce document
contractuel soit accepté par l'Administrateur Judiciaire137.
(a) Vérification de la capacité de l'entreprise à faire face à son passif
Dans un premier temps, l'expert-‐comptable devra élaborer le business plan post-‐
restructuration. Pour cela, il conviendra de distinguer les éléments récurrents et ceux qui
ne le sont pas comme les déménagements, les indemnités de licenciement, les frais de justice…
Le Tribunal appréciera avoir le même format que les éléments chiffrés communiqués pendant la période d'observation afin de faciliter les comparaisons.
Les hypothèses sous-‐jacentes devront être clairement expliquées et justifiées,
notamment pour l'extrapolation sur l'ensemble de la durée du plan, exercice périlleux, mais indispensable au plan de continuation.
Dans un deuxième temps, le prévisionnel de trésorerie sera établi sur la base du business plan en tenant compte des investissements nécessaires au renouvellement de l'appareil
productif et des variations du besoin en fonds de roulement. Il est indispensable de modéliser les flux de trésorerie sur toute la durée du plan proposé.
La proposition d'apurement du passif ne se positionne qu'en-‐dessous de ce prévisionnel de
trésorerie, l'idéal étant de pouvoir montrer qu'une marge de sécurité a été conservée pour faire face à une difficulté temporaire.
(b) Autres travaux spécifiques de l'expert-‐comptable
1) Suivi des dettes de la période d'observation (anciennement "article 40")
L'article L.622-‐17 du Code de Commerce est venu remplacer le célèbre "article 40" dont certains professionnels font encore référence en référence à la loi du 25 janvier 1985 pourtant abrogée depuis l'ordonnance du 18 septembre 2000.
Le privilège créé par cet article concerne les créanciers qui ont fait confiance à l'entreprise
pendant toute la période d'observation. En effet, il est accordé à ces derniers d'être payés
prioritairement avant toute créance antérieure à la procédure collective.
Le suivi des dettes de la période d'observation revêt donc un caractère extrêmement important et la validation d'un expert comptable sécurisera les organes de la procédure.
2) Re-‐contrôle de l'état des dettes fourni par le Mandataire Judiciaire Voir Partie III -‐ Section A-‐2) §(b) Optimiser la vérification des créances.
3) Comités de créanciers
Applicable uniquement pour les entreprises de plus de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires et/ou l'effectif est supérieur à 150, les comités de créanciers sont définis par les
articles L.626-‐20 à L.626-‐35 du Code de Commerce. L'expert-‐comptable pourra apporter son assistance pendant cette phase de consultation des créanciers. Cet aspect, s'éloignant du sujet du présent mémoire, ne sera pas développé ici.
4) Reconstitution des capitaux propres
L'article L. 225-‐248 (al.1) du Code de Commerce dispose pour les sociétés par actions138 que
"si, du fait de pertes constatées dans les documents comptables, les capitaux propres de la
société deviennent inférieurs à la moitié du capital social, le conseil d'administration ou le directoire, selon le cas, est tenu dans les quatre mois qui suivent l'approbation des comptes
138 C. com. art. L. 223-‐42 (al. 1) pour les SARL
Reprendre une entreprise à la barre du Tribunal – Guide pratique pour l'expert-‐comptable du repreneur 95
ayant fait apparaître cette perte, de convoquer l'assemblée générale extraordinaire à l'effet de décider s'il y a lieu à dissolution anticipée de la société".
Pour reconstituer ses capitaux propres à un montant au moins égal à la moitié du capital social, la société peut recourir à divers moyens :
-‐ augmentation de capital en numéraire ou par incorporation de créances,
-‐ réduction du capital de sorte que le montant des pertes n’excède pas la moitié du capital,
-‐ réalisation de bénéfices permettant de résorber les pertes,
-‐ abandon de créance : souvent employé au sein d'un même groupe ou lorsque le repreneur procède à des rachats de créances post-‐redressement judiciaire (voir ci-‐
après Partie III -‐ Section C-‐3) §(a) Le rachat de créances), il convient de néanmoins
de bien analyser les conséquences fiscales de ces abandons de créances (profits exceptionnels).
En matière de restructuring, le moyen le plus utilisé est le "coup d'accordéon", réduction du capital à zéro suivi immédiatement d'une augmentation de capital (voir ci-‐après Partie III -‐ Section C-‐3) §(b) Le "coup d'accordéon").
De même, la réévaluation libre permet à la fois l'utilisation des déficits fiscaux mais également d'assainir la structure financière (par contre, aucune compensation avec les pertes n'est possible (voir ci-‐après Partie III -‐ Section C-‐3) §(c) L'optimisation fiscale).
Aucune sanction pénale n’est prévue à l’encontre des dirigeants qui n’ont pas reconstitué
les capitaux propres de leur société dans le délai imparti de deux ans. Toutefois, leur
responsabilité civile peut être engagée si leur inaction a causé un préjudice à la société. En
outre, tout intéressé (créancier, associé) peut demander au Tribunal de Commerce la dissolution de la société. Cependant, le Tribunal peut accorder à la société un délai de six mois pour régulariser sa situation sachant que la dissolution ne peut pas être prononcée si, à la date où il statue, cette régularisation a eu lieu.
Néanmoins et spécifiquement pour la présentation du plan de sauvegarde/continuation, il est nécessaire d'indiquer, dans le plan, les modalités de reconstitution des capitaux
propres conformément à l'article L.626-‐3 (al.2) du Code de Commerce.