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Orientation des fibres dans un fluide ` a seuil en ´ ecoulement

L’existence d’une contrainte seuil peut impliquer la formation de zones mortes, i.e. de zones dans lesquelles cette contrainte critique n’est pas atteinte. Deux r´egimes sont alors `a prendre

6.3 Orientation des fibres dans un fluide `a seuil en ´ecoulement

en compte dans la description du processus d’orientation des fibres. Ces r´egimes sont mis en ´evidence sur la Figure 6.2 lors de l’´ecoulement dans un canal transparent d’un gel `a cheveux d’environ 30Pa de seuil, auquel des fibres de facteur d’aspect 50 ont ´et´e ajout´ees.

Figure 6.2 – ´Ecoulement d’un gel `a cheveux de 30Pa de seuil renforc´e en fibres de facteur d’aspect

50. Dans chaque insert, la repr´esentation polaire de l’´etat d’orientation des fibres est indiqu´ee, issue du

logiciel INTERCEPT [222].

Dans les zones tr`es proches des parois (de l’ordre d’une longueur de fibre), nous avons vu au cha- pitre pr´ec´edent que les fibres sont soumises `a de forts effets de parois. Au del`a de cette distance, dans les zones soumises aux d´eformations de l’´ecoulement, le taux de cisaillement est maximal `

a la paroi du fait de la condition de non glissement et d´ecroˆıt vers le centre de l’´ecoulement. Les d´eformations du fluide contribuent `a l’alignement de la fibre avec la direction de l’´ecoulement, comme le d´ecrit la loi d’´evolution de Jeffery (cf. Figure6.2insert du haut). Le temps n´ecessaire `

a une fibre pour adopter une orientation proche de cette asymptote d´epend de son orientation initiale. On peut cependant constater sur la Figure6.2 qu’une fibre initialement proche de la paroi du moule, quelle que soit son orientation initiale, s’oriente presque instantan´ement. En s’´eloignant de la paroi, la contrainte de cisaillement d´ecroˆıt, et avec elle le taux de cisaille- ment, vers le plan de sym´etrie de l’´ecoulement (ou la surface libre selon selon l’´ecoulement), o`u la contrainte dans le fluide est nulle. Ainsi sur l’insert du haut de la Figure 6.2, l’orientation des fibres est tr`es forte dans les zones les plus proches des parois, et de moins en moins marqu´ee lorsqu’on se rapproche du centre de l’´ecoulement. Il existe donc une ´epaisseur critique o`u la contrainte dans le fluide atteint le seuil du mat´eriau τc. Au del`a de cette ´epaisseur, la contrainte

de cisaillement induite par l’´ecoulement n’est pas assez ´elev´ee pour d´epasser le seuil. Le taux de cisaillement est nul, le fluide n’est soumis `a aucune d´eformation plastique, un bouchon se

Comportement des fibres lors de l’´ecoulement

forme au sein duquel les fibres conservent leur isotropie initiale (cf. Figure 6.2insert du bas). Le mat´eriau se comporte dans cette zone comme un solide transport´e avec l’´ecoulement `a la vitesse de l’interface avec la zone cisaill´ee (vitesse maximale de l’´ecoulement).

Il est possible de pr´edire dimensionnellement l’orientation dans ces diff´erents r´egimes d’´ecoule- ment. Le mod`ele de Jeffery peut en effet ˆetre appliqu´e dans les zones o`u le mat´eriau s’´ecoule. Cependant, l’interface zone cisaill´ee/zone morte reste une zone d’incertitude, d’une ´epaisseur inf´erieure `a la longueur des fibres, dans laquelle l’´ecoulement n’est pas homog`ene `a l’´echelle de la fibre. En effet, une fibre situ´ee dans cette zone peut ˆetre soumise `a la fois au comportement solide du bouchon et `a l’´ecoulement de la zone cisaill´ee `a ses deux extr´emit´es. Dans ce cas, la contrainte due `a l’´ecoulement et appliqu´ee sur l’extr´emit´e de la fibre situ´ee dans la zone cisaill´ee est reprise par l’extr´emit´e de la fibre situ´ee dans la zone non cisaill´ee. Le comportement de cette fibre d´epend alors de sa longueur L1 situ´ee dans la partie cisaill´ee par rapport `a sa longueur L2

plong´ee dans le bouchon (cf. Figure 6.3). Si la force appliqu´ee sur la longueur L1 de la fibre

par l’´ecoulement est sup´erieure `a la force qui peut ˆetre reprise par l’autre partie de la fibre, alors la fibre s’aligne avec l’´ecoulement.

Zone morte Zone cisaillée Écoulement L1 L2 x y y Vx p c xy ∂ ∂ + =τ µ τ c xy

τ

τ

Figure 6.3 – Fibre situ´ee dans la zone de transition entre la zone cisaill´ee et la zone morte

On en d´eduit que, si L1 est sup´erieure `a L2, la force due `a l’´ecoulement et appliqu´ee sur la fibre

est plus importante que celle que la fibre peut supporter, et celle-ci s’oriente petit `a petit avec l’´ecoulement. On ne peut par contre pas pr´edire l’´evolution de l’orientation de la fibre pour un ratio des longueurs inf´erieur `a 1. L’´epaisseur de la zone d’incertitude est alors r´eduite `a une demi- longueur de fibre au maximum. En conclusion, il existe une zone d’incertitude d’une ´epaisseur inf´erieure `a la demi-longueur des fibres autour des zones mortes dans laquelle le comportement des fibres est difficile `a pr´evoir. Une fibre dans cette zone soit ne subit aucune d´eformation, soit s’aligne avec l’´ecoulement au bout d’un temps plus long que celui n´ecessaire aux fibres situ´ees dans les zones cisaill´ees. On peut noter que, pour des fibres couramment utilis´ees en g´enie civil, d’une longueur de l’ordre du centim`etre, la zone d’incertitude ne s’´etend que sur quelques mil- lim`etres d’´epaisseur, ce qui repr´esente un tr`es faible volume de fluide par rapport aux volumes concern´es dans les coulages industriels.