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Le manuscrit est divisé en deux parties principales : la première traîte de la description

et de la modélisation des écoulements turbulents en rotation et la seconde du couplage

RANS/LES zonal sous les aspects dynamiques et thermiques.

La première partie est introduite par un rappel de la phénoménologie de base des

écou-lements turbulents et des outils permettant son étude (chapitre 2). Puis les principaux

phénomènes physiques que l’on trouve dans les écoulements en rotation sont décrits au

chapitre 3. Ce sont ceux qu’un modèle de turbulence doit être en mesure de reproduire.

On verra que cette phénoménologie est aujourd’hui assez bien expliquée par des études

théoriques sur l’équation de Navier–Stokes en référentiel tournant, modèle de base pour

l’étude des écoulements en rotation.

Le chapitre 4 est consacré à la modélisation de ces écoulements, suivant les deux

ap-proches « historiques » RANS et LES. Le chapitre commence par un rappel des contraintes

physico-mathématiques nécessaires ou non pour une modélisation générale et réaliste des

écoulements courbes ou en rotation. Puis on s’arrête sur l’approche RANS. L’avantage

intrinsèque de la fermeture au second ordre des équations de Reynolds est confirmé par les

calculs mais on compare également plusieurs propositions qui ont été faites dans la

litté-rature pour combler les lacunes des modèles de viscosité turbulente pour les écoulements

en rotation. Concernant la LES, plusieurs modèles populaires sont comparés sur le cas test

du canal tournant, tant du point de vue statistique que des structures cohérentes que l’on

trouve dans l’écoulement. L’influence du modèle de sous-maille est plus importante à cet

égard. On s’intéresse également aux contraintes de maillage qu’impose spécifiquement la

rotation du canal.

La seconde partie du manuscrit commence par une revue bibliographique des méthodes

hybrides RANS/LES, globales ou zonales (chapitre 5). Puis, le chapitre 6 traite du couplage

zonal aux faces de bord par la méthode SEM (Jarrin et al., 2006, 2009). On montre

notam-ment dans quelle mesure le couplage tire partie de l’estimation anisotrope des contraintes

turbulentes fournie par un modèle de fermeture au second ordre dans le domaine RANS.

Des simulations chaînées RANS/LES dans un canal en rotation montrent que la SEM

permet un développement satisfaisant de la turbulence dans le domaine LES, malgré

l’in-stabilité Coriolis–cisaillement qui amortit la turbulence dans une large partie du canal.

Ces simulations confirment également que la fermeture au second ordre doit être préférée

aux modèles de viscosité turbulente corrigée pour la rotation dans le domaine RANS. La

méthode SEM est ensuite généralisée pour la génération de fluctuations de température

à l’entrée du domaine LES. La généralisation (T–SEM), simple et fidèle au modèle de

base, permet de reproduire des fluctuations de température cohérentes en entrée et

présen-tant une variance et des flux thermiques turbulents cibles. La validation de cette méthode

dans un canal en convection forcée montre que la distance nécessaire à l’obtention d’une

turbulence thermique pleinement développée est sensiblement réduite par rapport à la

mé-thode SEM sans fluctuations thermiques. Une application de couplage à un modèle RANS

thermique est également présentée.

Enfin le chapitre 7 traite du couplage RANS/LES zonal volumique par force de rappel.

Une nouvelle force de rappel (ALF) est proposée. Ce forçage est principalement une

géné-ralisation anisotrope d’un forçage linéaire isotrope introduit par Lundgren (2003). Dans le

contexte du couplage RANS/LES zonal, elle généralise également plusieurs forçages

propo-sés dans la littérature. On montre notamment sur une turbulence homogène que le forçage

1.5Organisation du manuscrit 7

ALF permet d’imposer toutes les anisotropies possibles de la turbulence. Le forçage est

pa-ramétré dans un canal plan avec ou sans rotation. On présente des applications de couplage

RANS/LES zonal qui montrent que le forçage ALF sur une courte zone de recouvrement

peut être une alternative intéressante à la SEM ou être associé à elle pour améliorer le

développement des fluctuations turbulentes dans le domaine LES. La faisabilité d’un

for-çage tangentiel en proche paroi est également démontrée. Le chapitre 7 se termine par une

généralisation du forçage ALF pour la thermique (TLF) et sa validation dans un canal en

convection forcée.

Première partie

Description et modélisation des

écoulements turbulents en rotation

Chapitre 2

Introduction à l’étude de la

turbulence

Pour appréhender l’étude de la turbulence, on peut commencer par observer une

manifes-tation du phénomène (figure 2.1). Alors que pour un écoulement laminaire, le déplacement

des particules fluides se fait de manière ordonné, suivant des trajectoires bien régulières,

un certain désordre apparent règne au sein d’un écoulement turbulent. Ce brouillage de

l’écoulement n’est pourtant pas total puisqu’il n’empêche pas la formation de structures

relativement cohérentes, ou tourbillons, de tailles variables. Cette large gamme d’échelles

impliquées est d’ailleurs l’une des caractéristiques principales de la turbulence.

En plus de ces caractéristiques directement observables, les outils développés pour

l’étude de la turbulence, et brièvement présentés dans ce chapitre, ont permis de

don-ner la phénoménologie suivante : la turbulence est créée ou produite aux grandes échelles

du mouvement. Ces échelles sont celles qui détiennent la plus grande partie de l’énergie

turbulente. À l’inverse, la turbulence est détruite ou dissipée en chaleur aux plus petites

échellesdu mouvement, par frottement visqueux des particules fluides entre elles. Entre ces

deux mécanismes, l’énergie turbulente transite de proche en proche entre toutes les échelles

de l’écoulement par le biais de lacascade d’énergie (L.F Richardson, A.N. Kolmogorov).

Figure 2.1 – Écoulement turbulent en aval d’un cylindre (d’après Dyke, 1982)

Le comportement d’apparence aléatoire à l’échelle macroscopique d’un système

(l’écou-lement turbulent) est inédit en mécanique. Il a conduit au développement d’un formalisme

statistique pour l’étude du phénomène (O. Reynolds). Le modèle déterministe classique de

la mécanique des fluides, les équations de Navier–Stokes, est conservé mais les variables de

l’écoulement, vitesse et pression principalement, sont décrites comme des variables

aléa-toires. C’est le caractère chaotique du système, c’est-à-dire dont les solutions sont

extrème-ment sensibles à des variations infinitésimales, incontrôlables d’un point de vue pratique,

des conditions limites et initiales, qui justifie de décrire les variables de l’écoulement comme

des variables aléatoires.

Du point de vue statistique, connaître la turbulence c’est savoir caractériser les moments

statistiques de vitesse et de pression. En anticipant sur les notations données plus bas

dans ce chapitre, introduisons simplement le tenseur des corrélations centrées de vitesse

fluctuante en deux points :

R

ij

(x,y)

def

= u

i

(x)u

j

(y). (2.1)

Si l’on connaissait une expression générale pour ce tenseur, le problème de la turbulence

pour les applications industrielles serait assez largement résolu ! Ceci n’étant pas le cas, les

études sur la turbulence se concentrent souvent sur certains cas plus simples, d’une

turbu-lence idéalisée. Elles peuvent également chercher à caractériser les échelles de longueur et

de temps du mouvement turbulent ou encore l’énergie contenue par les différentes échelles.

L’objet de ce chapitre est d’introduire les outils et notions qui seront utilisés dans le

manuscrit. Ce faisant, il constitue une (très) courte introduction à l’étude de la turbulence,

où la phénoménologie de base donnée ci-dessus est précisée, et qui pourra utilement être

complétée par des cours dédiés comme ceux de Chassaing (2000) ou Sagaut (2007) dont

la présente rédaction s’est inspirée. Les aspects modélisations ne sont pas abordés (ils

apparaîtront au chapitre 4).

Dans un premier temps, les équations de Navier–Stokes pour les écoulements

incompres-sibles sont introduites. Puis on présente succinctement l’approche statistique pour l’étude

de la turbulence. Le cadre d’étude des turbulences « idéalisées » est présenté dans un

troi-sième temps et enfin quelques éléments sur l’approche spectrale pour la description de tels

écoulements sont donnés.

2.1 Équations de Navier–Stokes incompressible

Pour décrire le mouvement macroscopique d’un fluide, comme de beaucoup d’autres

corps, on peut en général utiliser le principe fondamental de la dynamique (deuxième loi

de Newton ou théorème de la quantité de mouvement). Ce principe postule que dans un

référentiel galiléen, la variation par unité de temps de la quantité de mouvement mud’un

corps (mdésigne la masse du corps etusa vitesse) est égale à la somme des forces s’exerçant

sur celui-ci. Appliqué à un volume fluide V de frontière S, ce principe s’écrit :

d

dt

Z

V

ρudv=

Z

V

ρfdv+

Z

S

Σ·ndσ, (2.2)

où dv est un volume élémentaire et dσ une surface élémentaire. f désigne l’ensemble des

forces en volume par unité de masse qui s’exercent sur le fluide (la gravité par exemple).

Le tenseur Σ contient l’ensemble des contraintes s’exerçant sur l’élément de surface dσ.

L’intégrale de surface dans le membre de droite de (2.2) peut s’écrire sous la forme d’une

intégrale volumique à l’aide du théorème d’Ostrogradsky. En utilisant en outre la formule

de dérivation d’une intégrale, le bilan (2.2) peut s’écrire sous la forme locale (c’est-à-dire

sans signe intégral) :

∂(ρu)

∂t +·(ρu⊗u) =ρf+∇·Σ. (2.3)

Dans la suite, on considère qu’aucune force en volume n’agit sur le fluide :f = 0. Le tenseur

des contraintes Σ peut pour sa part être divisé en une contribution isotrope qui s’exerce

même en l’absence de mouvement (pression hydrostatique) et une contribution τ

µ

liée au

2.1Équations de Navier–Stokes incompressible 13

frottement des couches de fluide entre elles au cours du mouvement : ce sont les contraintes

de viscosité. On écrit alors :

Σ

ij

ijµ

−pδ

ij

, (2.4)

avecp la pression hydrostatique, et le bilan de quantité de mouvement devient :

∂(ρu)

∂t +·(ρu⊗u) =−∇p+∇·τ

µ

. (2.5)

Pris sous cette forme, le bilan de quantité de mouvement contient beaucoup plus

d’incon-nues que d’équations ; le système est ouvert. On modélise donc le tenseur des contraintes

visqueuses. Ces contraintes ne se manifestent pas dans un fluide en translation uniforme

ou en rotation uniforme. Elles sont donc liées aux déformations que subit le fluide. Ces

déformations sont mesurées par le tenseur des taux de déformation S qui est la partie

symétrique du tenseur gradient de vitesse :

S

ij def

= 1

2

∂u

i

∂x

j

+

∂u

j

∂x

i

. (2.6)

Le modèle des fluides newtoniens, valable pour une grande variété de fluides et

d’écoule-ments, considère une dépendance linéaire entre les contraintes visqueuses et la déformation,

via le coefficient de viscosité dynamiqueµ :

τ

ijµ

= 2µS

ij

. (2.7)

La pression est toujours une inconnue du système ; on utilise alors le bilan de masse pour

fermer le système. En ce sens, on peut voir la pression comme l’entité qui assure la

conserva-tion de la masse au cours du mouvement pour un écoulement incompressible. Sans apport

extérieur de masse, le bilan de masse dans le volume fluide V s’écrit :

d

dt

Z

V

ρdv

= 0,

soit sous forme locale :

Dt +ρ·u= 0. (2.8)

avec D/Dt = ∂/∂t +u ·∇ la dérivée particulaire. Si l’écoulement est incompressible

(Dρ/Dt = 0), la masse volumique est constante le long d’une trajectoire et l’équation

de conservation de la masse traduit alors simplement la conservation du volume :

∇·u= 0. (2.9)

En utilisant le modèle des fluides newtoniens (2.7) et la condition d’incompressibilité du

fluide (2.9), le bilan de quantité de mouvement prend la forme suivante :

∂u

∂t +·(u⊗u) =−1ρ∇p+ν∇

2

u, (2.10)

avecν =µ/ρla viscosité cinématique (enm·s

−1

). C’est l’équation de Navier–Stokes pour

les écoulements incompressibles de fluides newtoniens.