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4.2 Modélisation des corrélations statistiques : approche RANS

4.2.1 Généralités

La modélisation RANS (Reynolds Averaged Navier–Stokes) vise à caractériser les

mo-ments statistiques d’un écoulement. C’est l’approche la plus utilisée aujourd’hui pour les

études numériques d’écoulements industriels. Deux raisons principales expliquent cette

po-pularité : la maturité de l’approche (un demi-siècle de pratique et un cadre d’étude bien

défini) et son coût modéré en termes de ressources informatiques

3

. Mais la maturité de

la discipline ne nuance qu’en partie le fait que le coût modéré de l’approche RANS tient

surtout aux limitations physiques qu’elle engendre. En effet, la description statistique de

l’écoulement ne rend pas bien compte des aspects locaux et instantanés induits par les

structures turbulentes cohérentes.

Pour caractériser les moments statistiques de l’écoulement, la modélisation RANS utilise

comme base les équations de transport de ces moments, notamment l’équation de transport

de la vitesse moyenne (2.13) et l’équation de transport du tenseur de Reynolds (2.19).

Cette approche est confrontée à un problème de fermeture car, à cause de la non-linéarité

de l’équation de Navier–Stokes notamment, si l’on se donne des moments statistiques pour

inconnues primaires, le système formé par leurs équations de transport possède d’autres

inconnues secondaires, qui sont des corrélations statistiques que l’on ne peut pas calculer

directement à partir des inconnues primaires. L’objet de la modélisation RANS est de

fermer le système : on cherche à représenter le plus fidèlement possible les corrélations

inconnues en fonction des moments qui figurent parmi les variables primaires du système.

Usuellement, on dit que l’on fait une fermeture à l’ordrensi c’est l’équation des moments

centrés d’ordrende la vitesse sur laquelle porte la modélisation. La majeure partie des

mo-dèles RANS correspondent à des fermeture d’ordre un ou deux, de sorte que l’on modélise

soit directement le tenseur de Reynolds, soit les corrélations inconnues qui apparaissent

dans son équation de transport.

4.2.1.1 Fermeture au premier ordre

Dans le cadre d’une fermeture au premier ordre, on modélise directement le tenseur de

Reynolds. Le plus souvent, cela se fait en utilisant une hypothèse de viscosité turbulente.

3. À titre d’exemple industriel standard, 3.6 tours de rotor sur le dernier étage complet

ro-tor/stator/diffuseur d’une turbine à vapeur (ie une géométrie « complexe ») sont simulés par Stanciu

et al.(2011) en trois semaines (un délais « acceptable ») sur une machine de 16 processeurs de 2.6 GHz

La première proposée, qui est encore la plus utilisée aujourd’hui, fut introduite par

Bous-sinesq qui, en s’inspirant du modèle des fluides newtoniens (cf paragraphe 2.1, équation

2.7) propose que la partie déviatrice – de trace nulle – des contraintes turbulentes soit

proportionnelle au tenseur des taux de déformation moyens viaun coefficient de viscosité

turbulente ν

t

, ce qui s’écrit

4

:

u

i

u

j

2

3

ij

=−2ν

t

S

ij

. (4.6)

Comme la viscosité cinématique ν, la viscosité turbulente ν

t

s’exprime en m

2

·s

1

et il

faut donc se fournir une échelle de longueur et de temps de la turbulence pour l’évaluer.

Excepté dans les modèles purement algébriques de longueur de mélange, où ces échelles

sont prescrites, celles-ci sont généralement construites à partir d’une (ou plusieurs)

gran-deur(s) turbulente(s) calculée(s) en résolvant une équation de transport. Ces équations

sont modélisées ; notamment elle peuvent utiliser l’hypothèse de viscosité turbulente de

nouveau.

Pour illustrer ces généralités sur les modèles de fermeture au premier ordre, prenons

l’exemple du modèle k−εà deux équations de transport. Ce modèle utilise l’hypothèse de

viscosité turbulente (4.6) avec :

ν

t

=C

µ

k

2

/ε. (4.7)

Une équation de transport surket surεdoivent donc être modélisées. L’équation modélisée

dekse base sur l’équation de transport exacte (2.20). Grâce à l’hypothèse (4.6), on trouve

pour le terme de production l’expression :

P = 2ν

t

S

ij

S

ij

. (4.8)

La viscosité turbulenteν

t

intervient également dans le modèle pour la diffusion turbulente :

D

T

=

∂x

j

ν

t

σ

k

∂k

∂x

j

. (4.9)

L’équation modélisée de ks’écrit donc finalement :

Dk

Dt =P −ε+

∂x

j

(ν+ ν

t

σ

k

)

∂k

∂x

j

, (4.10)

en faisant usage de (4.7) et de (4.8). Le taux de dissipationεn’est pas directement modélisé,

mais obtenu en résolvant une équation de transport. L’équation modélisée de ε s’écarte

totalement de sa forme exacte, qui est trop complexe pour être modélisée simplement.

Celle-ci est directement « calquée » sur celle de k : terme source, terme « puits », terme

diffusif. Elle s’écrit :

Dt =

C

ε1

P−C

ε2

ε

τ +

∂x

j

(ν+ ν

t

σ

ε

)

∂ε

∂x

j

. (4.11)

Dans cette équation, la division par l’échelle de temps τ = k/ε intervient uniquement

pour satisfaire l’analyse dimensionnelle. Pour finir, le jeu de constante retenu par accord à

l’expérience est le suivant :

C

µ

= 0.09, C

ε1

= 1.44, C

ε2

= 1.92, σ

k

= 1, σ

ε

= 1.3. (4.12)

4. Bien sûr, il s’agit ici d’une acceptation moderne du concept introduit par Boussinesq (1842–1929),

mais la discussion historico-scientifique de Schmitt (2007) montre que l’essentiel des idées sous-jacentes

étaient présentes dans les communications originales de Boussinesq, de sorte que la paternité qui lui est

faite du concept de viscosité turbulente n’est pas usurpée.

4.2Modélisation des corrélations statistiques : approche RANS 51

Si l’on considère les équations (2.13), (4.10), (4.11) et que l’on fait usage de (4.6)–(4.8) et

(4.12), on a obtenu un système fermé. Pour résoudre ce système, il reste à se donner des

conditions au bord pour chaque variable résolue, point important dont il est question au

paragraphe 4.2.1.3.

D’après cet exemple, on voit qu’avec un modèle de fermeture RANS au premier ordre,

on peut accéder au champ moyen statistiquement. Grâce aux équations supplémentaires

qui sont résolues (équations 4.10, 4.11 pour le modèle k−ε), on dispose aussi d’une

ap-proximation de la répartition spatiale de l’énergie cinétique turbulente k. La répartition

« détaillée » de cette énergie entre les composantes du tenseur de Reynolds est quant à

elle régie par l’hypothèse de viscosité turbulente à proprement parler. Sous l’hypothèse de

Boussinesq (4.6) par exemple, le tenseur d’anisotropie b définit par :

b

ij def

= u

′ i

u

′ j

2 3

ij

2k , (4.13)

qui, comme son nom l’indique, mesure l’anisotropie du tenseur de Reynolds, est supposée

alignée avec le tenseur des taux de déformation moyensS. Cette hypothèse est forte. Elle

est mise en défaut y compris dans des configurations relativement simples. Par exemple,

pour un écoulement turbulent de canal (cf annexe B.1), seule la composante ∂u/∂y du

gradient moyen est non nulle. Par suite l’hypothèse de viscosité turbulente (4.6) conduit à

u

2

=v

2

=w

2

, résultat en forte contradiction avec la réalité physique de cet écoulement.

4.2.1.2 Fermeture au second ordre

Dans les modèles de turbulence au second ordre, on ne modélise pas directement le

tenseur de Reynolds, mais son équation de transport (2.19). Celle-ci fait intervenir des

corrélations statistiques inconnues, les termes φ,ε etD

t

, qu’il faut donc modéliser. On a

vu que dans les modèles au premier ordre, l’anisotropie de la turbulence était contrainte par

l’hypothèse de viscosité turbulente. Ce n’est plus le cas pour une fermeture au second ordre,

de sorte que ce niveau de fermeture esta priorimieux à même de représenter l’anisotropie

de la turbulence. Néanmoins, les termes φ et ε à modéliser jouent précisément un rôle

important dans la distribution de l’énergie entre les composantes du tenseur de Reynolds

(φ, de trace nulle d’après l’équation 2.21, ne joue d’ailleurs qu’un rôle de redistribution) et

un soin particulier doit donc être apporté à la modélisation de ces termes pour tirer parti

d’une fermeture au second ordre. À l’inverse, le terme de productionP, qui ne dépend que

du gradient de vitesse moyenne et des composantes du tenseur de Reynolds, ne demande

aucune modélisation. Il en va de même du terme de production de Coriolis G, dans un

référentiel tournant (voir paragraphe 4.2.2). C’est un avantage majeur des fermetures au

second ordre par rapport aux fermetures au premier ordre.

Principes de base de la modélisation au second ordre

Donnons quelques remarques très générales sur la modélisation des termes de pression–

déformation φet de dissipation ε. En ce qui concerne φ, on décompose souvent ce terme

en deux contributions additives :

φ

ij

(1)ij

(2)ij

. (4.14)

Cette décomposition provient de celle de la pression fluctuante, solution de l’équation de

Poisson suivante (obtenue en prenant la divergence de 2.14) :

1

ρ∇

2

p

= 2

2

∂x

i

∂x

j

(u

′ i

u

j

) +

2

∂x

i

∂x

j

(u

′ i

u

j

−u

i

u

j

). (4.15)

Si le domaine spatial est infini, le formalisme de Green permet d’exprimer la solution de

cette équation sous la forme générale (Chou, 1945) :

1

ρp

(x) = 1

Z

R3

2

∂x

i

∂x

j

(u

′ i

u

j

)

x

dx

kx−x

k

| {z }

p′(1)

+ 1

Z

R3

2

∂x

i

∂x

j

(u

′ i

u

j

−u

i

u

j

)

x

dx

kx−x

k

| {z }

p′(2)

,

(4.16)

et la décomposition (4.14) correspond à :

φ

(1)ij

=p

′(1)

∂u

′ i

∂x

l

+

∂u

j

∂x

l

, φ

(2)ij

=p

′(2)

∂u

′ i

∂x

l

+

∂u

j

∂x

l

. (4.17)

La décomposition (4.16) est intéressante car elle souligne que le terme de pression–déformation

contient une partielenteassociée àp

′(2)

– non linéaire en la vitesse fluctuante – et une

par-tie rapideassociée à p

(1)

– linéaire en la vitesse fluctuante – et qui est la seule à dépendre

explicitement du gradient de vitesse moyenne. Pour une turbulence homogène, ce gradient

est constant et on a donc :

φ

ij

=A

ij

+M

ijkl

∂u

k

∂x

l

. (4.18)

Cette relation exacte est une bonne base pour modéliser le terme de corrélation pression–

déformation. Mais elle ne montre que trop bien la complexité de la tâche : les tenseurs A

et M à modéliser mettent en jeu cinquante coefficients libres (en tenant compte du fait

queφ

ij

est symétrique et de trace nulle) qui dépendent chacun des corrélations doubles en

deux points sur tout le domaine ! Dans les modèles au second ordre que l’on utilisera dans

la suite (paragraphe 4.2.4), qui sont parmi les plus populaires, cette relation sera remplacée

par une relation impliquant au plus 5 coefficients, constants ou dépendants de corrélations

en un point.

En ce qui concerne la modélisation du terme lentφ

(2)ij

, on a vu qu’il s’agit d’un terme de

redistribution qui agit même en l’absence de gradient moyen. Effectivement, on constate

expérimentalement que si on laisse librement (c’est-à-dire sans gradient moyen) évoluer

une turbulence initialement anisotrope, celle-ci a tendance à retourner vers l’isotropie. Ce

type d’écoulement, révélateur des situations que l’on peut appréhender avec un modèle de

fermeture au second ordre et non avec un modèle au premier ordre, peut donc servir à

construire une modélisation pour le terme lent φ

(2)ij

. En fait ce terme n’est pas le seul

res-ponsable du retour à l’isotropie. Le déviateur du tenseur de dissipationε−

13

ε

kk

Idistribue

également l’énergie entre les composantes du tenseur de Reynolds et ce même en l’absence

de gradient moyen. Par suite, ces deux termes sont parfois modélisés conjointement, car

leur effet individuel est difficile à isoler. On modélise alors :

T

ij

(2)ij

− ε

ij

1

3ε

kk

δ

ij

.

Un aperçu plus concret de la modélisation au second ordre sera fourni au paragraphe 4.2.4

où les modèles « emblématiques » que l’on a utilisés sont brièvement introduits.

Équations différentielles ou équations algébriques

Une fois que l’équation (2.19) est fermée, la voie la plus naturelle est de résoudre

numé-riquement cette équation de transport modélisée et d’obtenir ainsi le tenseur de Reynolds.

Cette procédure porte, en général, à sept le nombre d’équations supplémentaires (une

équation par composante distincte du tenseur de Reynolds plus une équation pour la

dissi-pation) pour fermer les équations de Reynolds. Une deuxième voie, assez largement étudiée

dans la littérature, est celle des modèles algébriques. Ces modèles sont bâtis sur l’hypothèse

4.2Modélisation des corrélations statistiques : approche RANS 53

que le tenseur d’anisotropie (4.13) est à l’équilibre, c’est-à-dire constant le long d’une ligne

de courant (Pope, 1975) :

Db

ij

Dt = 0, (4.19)

=⇒ Du

′ i

u

′ j

Dt −u

′ i

u

′ j

k

Dk

Dt = 0. (4.20)

L’équation (4.19) est appelée hypothèse d’équilibre faible. Le développement (4.20) montre

que si l’on substitue les termes de dérivée matérielle Du

i

u

j

/Dtet Dk/Dtpar leur expression

issue d’une modélisation au second ordre, on obtient une équation algébrique (implicite) sur

les composantesu

i

u

j

du tenseur de Reynolds. En outre, si cette équation peut s’écrire sous

la forme d’une simple combinaison linéaire d’un nombre réduit d’arguments

5

, la théorie

des invariants permet, sans introduire trop de non linéarité (celles-ci alourdissent la

pro-grammation des modèles et nuisent à sa stabilité numérique) de rendre la relation explicite

(voir Pope, 1975; Gatski et Speziale, 1993 ; et plus récemment Oceni et al., 2010).

Avec un modèle au second ordre algébrique explicite, aucune équation supplémentaire

par rapport à un modèle au premier ordre ne demande à être résolue et, comme pour

le premier niveau de fermeture, cela est possible grâce à une hypothèse sur l’anisotropie

du tenseur de Reynolds. Mais l’hypothèse d’équilibre faible est moins forte que

l’hypo-thèse de viscosité turbulente : avec cette dernière, l’anisotropie du tenseur de Reynolds est

« présupposée » c’est-à-dire imposée, tandis qu’avec un modèle au second ordre algébrique,

l’anisotropie est simplement supposée à l’équilibre, c’est-à-dire constante le long d’une ligne

de courant.

4.2.1.3 Prise en compte des parois

Les équations de Reynolds fermées par un modèle au premier ou au second ordre, il

reste à imposer des conditions au bord pour les variables du système. En particulier, en

supposant que les parois sont fixes dans le référentiel d’étude, l’adhérence voudrait que la

condition imposée au bord soit nulle pour la vitesse moyenneu et le tenseur de Reynolds.

Cependant, la physique de la turbulence est complexe en proche paroi. La turbulence

devient fortement anisotrope en atteignant une limite à deux composantes (v

= 0). Le

caractère non local de la pression fluctuante, mis en évidence par l’équation (4.16)

6

, joue

un rôle important dans ces mécanismes de proche paroi (voir Manceau, 1999, par exemple).

En pratique, beaucoup de modèles de turbulence ne sont pas assez riches physiquement

pour être intégrés jusqu’à la paroi.

Lois de paroi

Cependant, les expériences d’écoulements turbulents sur des géométries simples (canaux

ou conduites par exemple) indiquent que, jusqu’à une certaine distance adimentionnelle

y

+

de la paroi, la production et la dissipation se compensent. La turbulence est alors

en équilibre local. Dans ce cas, on peut alors montrer analytiquement que le profil de

la composante longitudinale de vitesse moyenne adimensionnelle U

+

a un comportement

5. À ce titre, une hypothèse supplémentaire sur l’anisotropie de la diffusion :

D

ij

=u

i

u

j

2k D

kk

,

avecD

ij def

= D

ν ij

+D

T ij

, est très utile.

6. Cette équation a été obtenue sous l’hypothèse d’un domaine spatial infini, mais une écriture similaire

s’obtient dans le domaineR×R

+

universel(y

+

etU

+

sont adimensionnées par la vitesse de frottement pariétalu

τ

, équation

B.14, et la viscositéν) :

U

+

= 1

C

κ

lny

+

+C, (4.21)

avec C

κ

≈0.41 la constante de Kármán etC≈5.5. Ce comportement universel est utilisé

pour élaborer des lois de paroi. Ces formules analytiques permettent de fixer les conditions

au bord, en fonction de la distance à la paroi du premier point de calcul. L’hypothèse

d’équilibre local permet également d’élaborer ce type de lois pour le tenseur de Reynolds

ou la dissipation (voir Chassaing, 2000, p. 382 ; Pope, 2006, p. 442). En admettant ce

comportement universel de l’écoulement turbulent en proche paroi, on peut utiliser ces

lois pour toutes géométries, mais un soin particulier doit être apporté à la construction

du maillage, pour que les premiers points de calcul au bord du domaine se situent dans le

domaine de validité des lois de parois.

Modélisation spécifique

Bien que l’utilisation de lois de paroi ne soit pas toujours perçue dans l’industrie comme

contraignante, dans la mesure où cela dispense de mailler finement jusqu’à la paroi, ce qui

allège beaucoup la durée des simulations, les moyens de calcul actuels justifient, pour

accé-der à une physique plus fine en proche paroi, que l’on cherche à s’affranchir de l’utilisation

de lois de paroi. À ce titre, des modèles ditbas-Reynolds(élaborés pour être valides lorsque

la turbulence est faible, ce qui est le cas près des parois) ou deproche paroi(élaborés

spé-cifiquement pour rendre compte des effets de proche paroi) ont été développés. Bien sûr,

ces modèles demandent de mailler finement jusqu’au bord, la condition d’adhérence étant

directement imposée. Une revue de modèles au second ordre bas-Reynolds ou de proche

paroi est disponible dans Manceau (1999). L’auteur dénonce que ces modèles se présentent

souvent comme des corrections modérées à des modèles existants, sans remettre en cause

les hypothèses de base de ces modèles (hypothèse de localité et de quasi-homogénéité

no-tamment).

En rupture avec ce type d’approche, Durbin (1993) a introduit le concept de relaxation

elliptique, repris plus tard par Manceau et Hanjalić (2002) pour développer le modèle

au second ordre à pondération elliptique (Elliptic Blending Reynolds Stress Model,

EB-RSM), cette seconde approche réduisant le nombre d’équations impliquées et améliorant la

stabilité de la première approche. Une équation elliptique, analogue à celle dont la pression

moyenne est solution, est résolue pour un coefficient α mesurant l’influence « à distance »

de la paroi sur l’écoulement. Le coefficientαest alors utilisé pour passer continuement d’un

modèle valide en proche paroi à un modèle classique valable loin des parois (voir annexe

D).

Comportement asymptotique en proche paroi

Un outil particulièrement efficace pour la modélisation de la turbulence en proche paroi

est le développement en série de Taylor, qui permet de déduire le comportement

asympto-tique à la paroi d’une grandeur exacte ou de son modèle.

En se limitant à l’ordre deux, le développement en série de Taylor de la vitesse au

voisinage de x= (x,0, z) un point de la paroi s’écrit :

u

i

(x, y, z, t) =a

i0

+a

i1

y+a

i2

y

2

+O(y

3

), avec a

ij

(x, z, t) = 1

j!

j

u

i

∂y

j

(x,0,z,t)

(4.22)

des coefficients indépendants de y. La condition d’adhérence implique :

4.2Modélisation des corrélations statistiques : approche RANS 55

et la condition d’incompressibilité, à la limite y→0, nous donne :

∂v

∂y

(x,0,z,t)

=a

21

= 0. (4.24)

En retenant le terme prépondérant du développement (4.22) et en tenant compte de (4.23)

et (4.24), on obtient les comportements asymptotiques suivants en proche paroi :

u∼y, v∼y

2

et w∼y. (4.25)

Ces résultats ne sont vrais qu’asymptotiquement, c’est à dire très près de la paroi. En

revanche, il sont parfaitement généraux : ils ne dépendent pas de l’écoulement (homogène

dans les directions x et z ou pas, en particulier). On a simplement utilisé les propriétés

d’adhérence et d’incompressibilité, de sorte que tout champ L(u), pour L un opérateur

linéaire, vérifie les mêmes comportements. En particulier, c’est le cas de la vitesse moyenne

u et de la vitesse fluctuante u

.

Les comportements asymptotiques (4.25) permettent de déduire ceux de plusieurs

gran-deurs turbulentes, par exemple le tenseur de Reynolds. En général, la consistance entre le

comportement asymptotique d’un modèle et celui de la grandeur exacte qu’il représente est

une condition nécessaire pour une modélisation efficace en proche paroi. C’est un des points

importants sur lesquels sont basés les modèles à relaxation ou pondération elliptique.