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6. Activités d’enseignement, encadrement d’étudiants et direction de

6.5. Encadrement de thèses et appui à la recherche

6.5.3. Organisation et animation de formations de chercheurs

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par la réflexion préalable qu’elle requiert, les contacts qu’elle suppose avec des intervenants de qualité, l’enrichissement scientifique d’une communauté de chercheurs qui sont

partenaires ou peuvent être amenés à le devenir sous des formes formalisées ou informelles, la création d’un réseau de chercheurs ayant des compétences théoriques, méthodologiques ou thématiques en commun.

Pour toutes ces raisons, et aussi de par le fait que ma propre situation de chercheur expatrié m’ait rendu particulièrement sensible à l’isolement en recherche et aux outils permettant de maintenir et d’élever le niveau scientifique d’une communauté de chercheurs isolés, je suis intéressé par le montage d’écoles chercheurs, au titre d’un collectif en acte ou en devenir.

Ayant fait mes armes avec la toute petite communauté de chercheurs en géographie dans le cadre sous-régional du PRASAC en Afrique Centrale savanicole, j’ai petit à petit changé d’échelles pour mobiliser des intervenants de plus en plus variés et reconnus du domaine scientifique traité par l’ecole-chercheur :

• 2005 : Co-organisation de l’école-chercheur “Estimation de la biomasse et de la

productivité des formations forestières en zone sèche” (avec pour acronyme

SAVAFOR) (Bamako, du 19 au 27 novembre 2005) et co-créateur du réseau du même nom visant à mettre en synergie les chercheurs de la sous-région Afrique de l’Ouest travaillant à l’estimation de la biomasse et de la productivité des formations forestières de zones sèches (réseau de compétences).

Organisé conjointement par le CIRAD, le CIFOR et l'IER, et financé par l’ASDI

(Coopération suédoise), le CIRAD et la coopération française, l’école-chercheur a réuni 21 participants de la sous-région (Burkina Faso, Cameroun, Mali, Niger, Sénégal). Cet atelier avait pour objectif de faire le point sur les méthodes d'estimation de la biomasse et de la productivité des savanes sèches d'Afrique de l'ouest, en réunissant les principaux chercheurs de la sous-région travaillant sur le sujet. Il avait également pour objectif de créer une synergie sur le sujet, en sortant les chercheurs de la sous- région de leur éventuel isolement, et en proposant la constitution d'un réseau de chercheurs.

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● un exposé inaugural qui visait à poser les définitions de la productivité forestière et lancer des pistes de débat sur sa mesure ;

● des exposés des participants sur leur thème de travail et les dispositifs de recherche qui ont été mis en œuvre pour répondre aux questions, suivi de discussions

● des séances de débat autour de questions identifiées par le groupe de l’école- chercheur : Comment estimer la productivité d’une formation ligneuse ? Quels dispositifs expérimentaux et quels types de mesures ? Comment pérenniser un réseau de compétences sur la question de la productivité des savanes? ;

● un travail en commun d'analyse de jeux de données apportés par les participants, qui avait pour objectif à la fois d'apporter un appui en statistiques, et de réfléchir concrètement ensemble sur des questions communes ;

● des sorties sur le terrain (deux jours) qui ont permis de discuter concrètement des dispositifs d’évaluation de la productivité mis en place dans le cadre d’un projet de coopération français associant l’IER et le CIRAD. Elles ont aussi permis de voir différents aspects des marchés ruraux de bois énergie autour de Bamako : visite de forêts villageoises, discussions avec une structure rurale de gestion du bois, une association de charbonnières, ainsi qu’avec un bureau d’étude chargé de réaliser un inventaire forestier préalable à la mise en place d’un marché rural de bois.

La conclusion de l'atelier a été la mise en route d'un réseau de chercheurs pour le suivi de la productivité des formations savanicoles en Afrique tropicale sèche. Ce réseau est matérialisé par un site internet que j’ai créé (http://savafornetwork.ifrance.com/) et animé à tour de rôle par ses membres.

• 2007 : Co-organisation de l’école-chercheur “Intégration agriculture-élevage et environnement”, dans le cadre du Desert Margin Program (Bamako, du 8 au 13 janvier 2007).

L’objectif global du projet DMP était de freiner la dégradation des terres dans les zones en marge du désert de l’Afrique via des activités de démonstration et de renforcement des capacités institutionnelles. Débuté en 2003, ce Projet régional de 6

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ans en 3 phases de 2 ans, coordonné par l’ICRISAT a été mis en œuvre par de nombreuses institutions de recherche et de développement en Afrique du Sud, Burkina Faso, Botswana, Kenya, Mali, Namibie, Niger, Sénégal et Zimbabwe. L’apport du Fonds pour l’environnement mondial (GEF) a permis au programme de traiter certaines questions d’importance globale sur l’environnement, en plus des questions d’importance économique, notamment la perte de la biodiversité, la réduction de la séquestration du carbone, l’érosion et la sédimentation du sol.

La contribution du CIRAD au DMP a concerné l’échange de connaissances et l’apprentissage entre politiques, chercheurs, société civile et acteurs locaux pour améliorer la prise en compte de l’environnement dans les décisions et la réforme de politiques. Elle est mise en œuvre via une plateforme expérimentale impliquant les nouvelles technologies de l’information et de la communication, des forums et de la formation, des études de cas et de la modélisation.

Dans ce cadre, l’objectif de l’école-chercheur que j’ai co-organisée était d’apporter aux scientifiques, techniciens, décideurs et membres de la société civile les outils d’analyse des différents types d’associations entre agriculture et élevage et des méthodes de coordination pour une gestion durable de l’environnement au bénéfice de l’ensemble des usagers des ressources naturelles. Les différentes dimensions de cette intégration technique, économique, sociale, territoriale et environnementale ont été présentées, illustrées et débattues. Une des ambitions de cet atelier était notamment de montrer que l’intégration agriculture-élevage ne se limite pas à l’analyse des conflits entre agriculteurs et éleveurs ou à l’amendement des sols par la fumure animale au sein d’une exploitation mais consiste à une intégration entre systèmes de culture et d’élevage à plusieurs échelles (parcelle, exploitation, village, région).

Le cas du Mali était particulièrement approprié pour débattre de ces questions d’intégration agriculture-élevage. Les activités d’élevage rencontrent en effet fréquemment celles liées à l’agriculture, du fait de son gradient écologique et des usages qui sont faits des ressources naturelles par des sociétés diverses, pastorales ou sédentaires. Les problèmes ou les atouts qu’offrent cette rencontre ne sont pas les mêmes au nord et au sud, à l’est ou à l’ouest de ce vaste pays. Posant tantôt des questions de cohabitation des activités d’élevage et d’agriculture sur de mêmes

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espaces, tantôt des questions de valorisation de l’élevage pour intensifier l’agriculture et rendre cet élevage plus performant en retour, ces questions nécessitent d’être bien appréhendées et bien outillées pour faire en sorte que des activités qui pourraient être localement conflictuelles deviennent synergiques. La diversité des situations agriculture-élevage au Mali est perçue dans cette formation comme une opportunité pour les participants de dépasser leurs perceptions et leurs pratiques professionnelles pour acquérir une vision intégrative de l’articulation entre élevage et agriculture. Dans le détail, cette vision intégrative de l’agriculture et de l’élevage peut servir à :

● Améliorer la capacité nationale à observer et à anticiper les articulations entre élevage et agriculture, voire à les canaliser et à les rendre synergiques par le biais de l’aménagement du territoire

● Améliorer les décisions de gestion au niveau local dans le sens d’une véritable intégration de l’agriculture et de l’élevage qui bénéficie aux deux activités sans engendrer davantage de conflit ou de dégradation.

Le public visé par l’atelier était constitué de jeunes chercheurs, de représentants d’ONG et de techniciens. Des représentants du monde paysan étaient également présents. La prise en compte de la diversité des situations d’interactions agriculture élevage et des points de vue pour l’aborder étant un des points clefs de la formation, une attention particulière a été donnée à la représentation de ces points de vue dans l’audience et à son expression au cours de la formation. Le pré-requis pour pouvoir assister à la formation était d’être confronté dans sa pratique professionnelle à des questions d’interactions agriculture – élevage qui posent des problèmes socio- économiques ou environnementaux à résoudre et c’est pourquoi la mixité chercheurs / acteurs du monde du développement a été souhaitée pour cet atelier.

• 2009 : Co-organisation de l’école-chercheur en “Political Ecology” (Montpellier du 29 juin au 3 juillet 2009)

Pour analyser les luttes de pouvoir et ajustements en matière de gestion de l’environnement et des territoires, un certain nombre de courants de pensée se sont développés depuis une quinzaine d’années, en référence notamment au fameux article de Hardin sur la tragédie des communs (Hardin, 1968). Parmi ces approches, un

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courant de pensée s’est imposé dans le monde de la géographie et de l’anthropologie anglo-américaine, qui est peu développé en France : celui de la Political Ecology, imparfaitement traduit en français par le terme d’écologie politique.

La Political Ecology, que je définirai plus avant dans le volume 3 de la HDR, est une posture de recherche radicale qui prend racine dans l’analyse des luttes de pouvoir en matière de gestion des territoires et de l’environnement. La démarche originale qu’ont développée les chercheurs qui se rattachent à ce courant s’appuie notamment sur l’analyse des discours et des récits, et en particulier ceux qui fondent les idées dominantes et les politiques environnementales. Le discours dominant sur l'environnement et le développement peut être considéré comme une structure qui est façonnée par un réseau d'acteurs ayant leurs intérêts propres, y compris les chercheurs. En ce sens, la Political Ecology comporte une perspective structurelle qui conduit à étudier comment les processus à l’œuvre à l’échelle locale sont influencés par les processus et structures globaux, parmi lesquelles les discours.

Les objectifs de l’école-chercheur en Political Ecology étaient les suivants :

● Faire le point sur ce courant de pensée, sur ses sources d’inspiration théoriques et sur les avancées qu’il propose en tant que perspective pluridisciplinaire et par rapport aux autres courants de pensée dominants sur la gestion environnementale ;

● Elaborer avec les participants une démarche et une méthodologie de recherche, leur permettant de structurer leurs recherches futures ou de revisiter et de valoriser des recherches passées ;

● Aider les participants à publier leurs recherches dans des revues pour lesquelles la Political Ecology est un gage de qualité scientifique.

Cette école-chercheur a été la première pierre de la création d’une communauté de chercheurs français inspirés par le courant de la Political Ecology ou souhaitant davantage le connaître. Nous avons créé un site web, avec ma collègue Monica Castro, en accueil post-doc au CIRAD, pour fédérer cette communauté, échanger de l’information et dialoguer avec nos parrains en Political Ecology : Paul Robbins, Nancy Peluso, Tom Bassett et Tor Benjaminsen (http://www.politicalecology.fr/).

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Les interventions qui ont été données à cette école-chercheur donneront également lieu à une publication de vulgarisation de la Political Ecology en France, livre dont je serais le co-éditeur avec Tor Benjaminsen et qui devrait sortir courant 2012.

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7. En guise de point d’étape, à l’ombre des