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II CADRE THEORIQUE

FORMATION II-3-1 Situation et milieu

II- 1-2 Organisation didactique

Une organisation praxéologique qui est liée à la modélisation du travail mathématique est appelée organisation mathématique ; lorsque la praxéologie est en rapport avec l’activité d’étude mathématique, elle sera appelée organisation didactique (Chevallard 1997). De plus en plus, les manuels essayent de donner des éléments sur les méthodes d’enseignement de notions mathématiques en classe. Ils ont souvent structurés avec, entre autre, l’introduction d’une notion par des travaux pratiques et un rappel historique, une partie comportant la mention « à retenir » et des exercices d’application et d’approfondissement. Cette façon de

Type de tâches

Déterminer le coefficient de proportionnalité d’un tableau de proportionnalité de 2 lignes

Type de tâches

Montrer que exp(x+y) = exp(x) + exp(y)

Environnement technologico-théorique

(Q, +, .) est un corps, tout élément non nul est inversible

Technique

Déterminer l’image d’un vecteur unitaire par une application linéaire

Technique

Comparer les rapports entre les nombres d’une même colonne Environnement technologico-théorique Notion d’homomorphisme de modules Technique La fonction ln est un isomorphisme de (R* +, .) vers (R, +)

faire est une imitation du travail du professeur dans sa classe. Comme toute imitation, elle essaye de reproduire les grandes facettes de l’original : dans le cadre de l’enseignement des mathématiques ces facettes sont appelées les moments didactiques. Comme le précise Chevallard (ibidem) :

« […] Quel que soit le cheminement de l’étude, certains types de situations sont nécessairement présents, même s’ils le sont de manière très variables, tant au plan qualitatif qu’au plan quantitatif. On appellera donc ces moments de l’étude, ou moments didactiques, de tels types de situations, parce qu’on peut dire que, quel que soit le cheminement suivi, il arrive forcément un moment où tel geste devra être accompli ».

Les moments didactiques ne renvoient pas à une réalité chronologique. Ils sont souvent en interrelation, ce qui explique la difficulté de les dissocier lorsqu’on veut les analyser. Mais, le fait de découper l’activité d’étude mathématique en moments didactiques est un bon moyen pour faire son analyse. Etant donné un thème d’étude mathématique Θ analyser les pratiques des enseignants revient à analyser d’abord la réalité qui se construit dans la classe où Θ est étudié (l’organisation mathématique (OMΘ)) pour analyser, ensuite, l’organisation didactique (ODΘ), c’est-à-dire la manière dont l’(OMΘ) a été réalisée (moments didactiques).

a) Le premier moment

Le premier moment est celui de la première rencontre avec l’organisation mathématique OMΘ. Cette rencontre peut avoir lieu de plusieurs manières. Pour Chevallard (1999), un mode de rencontre - ou de « rerencontre » - inévitable, sauf à rester à la surface de l’œuvre, est celui qui consiste à rencontrer l’OMΘ à travers l’un au moins des types de tâches constitutifs de l’œuvre […]. Cette première rencontre joue également un rôle important dans l’économie de l’apprentissage, parce que, étant donné l’investissement institutionnel et personnel qu’elle impose, elle oriente en général fortement le développement ultérieur des rapports institutionnels et personnel à l’objet rencontré. Il reste évident que cette première rencontre ne détermine pas entièrement le rapport à l’objet qui ne peut se construire que dans un long processus d’étude.

b) Le deuxième moment

Etant donné un type de tâches ti d’un thème d’étude mathématique Θ, le deuxième moment est celui de l’exploration de ti et de l’élaboration d’une technique relative à ti. Il faut noter que ce moment doit être au cœur de l’activité mathématique. Les élèves, en interaction entre eux et avec un problème spécialement conçu par le professeur, doivent passer du rôle d’observateur à celui d’artisan laborieux qui élabore patiemment ses techniques mathématiques (Chevallard 1998). Ce travail sur la technique permettra à chaque « artisan » de satisfaire des commandes et d’étendre son savoir-faire sur des objets divers et plus complexes.

c) Le troisième moment

Le troisième moment est celui de la constitution de l’environnement technologico-théorique relatif à un thème d’étude mathématique Θ. Ce moment est, en général, en interrelation étroite avec chacun des autres moments. Ainsi, dès la première rencontre avec un type de tâches il y a, généralement, mise en relation avec un environnement technologico-théorique. Les

enseignants doivent savoir qu’il ne s’agit pas seulement de livrer des informations mais de construire des connaissances. La constitution d’un environnement technologico-théorique doit justifier mais aussi générer des techniques.

d) Le quatrième moment

Le quatrième moment est celui du travail de la technique. Ce moment du travail de la technique doit améliorer la technique en la rendant à la fois plus efficace et plus fiable. Ce moment de mise à l’épreuve de la technique suppose des corpus de tâches adéquates, tant sur le plan quantitatif, que qualitatif. Précisons que la quantité renvoie ici à la diversité, au nombre et que la qualité du corpus, elle, renvoie à sa représentativité par rapport à des corpus de tâches assez larges. On peut penser, par exemple, que le fait de déterminer le coefficient de proportionnalité pour dix tableaux du même type n’est pas la meilleure façon de travailler la technique de détermination du coefficient de proportionnalité.

e) Le cinquième moment

Le cinquième moment est celui de l’institutionnalisation. Il a pour objet de préciser ce qui est, pour le professeur, l’objet de son enseignement en le distinguant de tous les autres éléments qui ont concouru à la construction de l’organisation mathématique. Ce moment est le moment d’officialisation, le moment qui engage l’avenir mathématique. Ce moment de l’institutionnalisation est celui où, dans sa construction « brute » qui, peu à peu, a émergé de l’étude, vont être séparés, par un mouvement qui engage l’avenir, le « mathématiquement nécessaire » qui sera conservé et le « mathématiquement contingent » qui, bientôt, sera oublié (Chevallard 1999). Dans une perspective de formation continue à distance de professeurs de mathématiques, ce moment est particulièrement délicat. Le contenu à institutionnaliser doit être soigneusement contrôlé par le concepteur, pour éviter que des enseignants reprennent des erreurs contenues dans une ressource. L’enseignant qui utilise une ressource doit également comprendre que tout se joue au cours de la séance. Il doit aussi savoir que l’apprentissage d’un discours pré-programmé n’est pas toujours productif et que le contenu à institutionnaliser est le fruit d’une construction faite dans la classe qui, dans bien des cas, l’oblige à improviser.

f) Le sixième moment

Le sixième moment est celui de l’évaluation. C’est le moment où l’on fait le point : le moment où l’on interroge sa propre pratique. C’est le moment où l’on examine ce que vaut ce qui a été appris : le moment d’évaluation. Mais, l’opération d’évaluation doit être entendue aussi en un sens plus large : au-delà de l’interrogation sur la maîtrise d’une technique, par exemple, on doit s’interroger également sur la technique elle-même. Pour Sokhna (2002), le modèle de ressource du SFoDEM structuré avec, entre autre, une fiche de compte-rendu d’expérimentation facilite l’organisation de ce moment. Cette fiche permet à l’enseignant, avec un léger différé, de s’interroger sur sa pratique, sur le travail de ses élèves et sur les objets mathématiques construits.

II-1-3 Le topos

Lorsqu’un type de tâches mathématique est proposé par le professeur et que l’environnement technologico-théorique est constitué par la classe (les élèves de façon coopérative sous l’impulsion du professeur), chaque élève peut se dire qu’il a joué son rôle, chacun occupe une place dans ce travail : ce lieu-là est son topos. Selon Chevallard (1999) :

« L’une des difficultés didactiques les plus ordinaires et la plus pressante pour un professeur est celle qu’il rencontre pour « donner une place aux élèves », c’est-à-dire pour créer, à leur intention, et à propos de chacun des thèmes étudiés, un topos approprié, qui donne à l’élève le sentiment d’avoir un « vrai rôle à jouer ». Lorsque le professeur s’engage dans une tâche où il opère en autonomie relative, cette tâche apparaît généralement comme une sous-tâche au sein d’une tâche plus vaste, où il coopère avec l’élève […] derrière l’activité du professeur, on doit sans cesse apercevoir l’activité de l’élève ».

Conclusion

L’approche anthropologique du didactique est apparue comme l’une des pièces maîtresse de cette recherche. Elle a permis de concevoir et d’organiser les outils d’analyse de la méthodologie (paragraphe §III). Elle nous a aussi offert des pistes de réflexion sur la conception du modèle de ressources pédagogiques. Enfin, elle nous a facilité l’articulation des outils théoriques développés dans ce chapitre §II et l’organisation des activités des enseignants expérimentateurs. La notion de topos par exemple est au creuset des outils travaillés dans la modélisation de pratiques enseignantes (§II-3-3) et sur le travail collaboratif (§II-3-2).