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Cette opportunité se justifie aussi par l’importance de la place de société anonyme dans l’économie des pays de l’espace Ohada En ce que la contractualisation participe à la

modernisation du droit des sociétés, révéler le niveau d’infiltration de la société anonyme par le phénomène contractuel apparaît comme un gage du renforcement de son attractivité ainsi que de son rôle économique. Ayant en effet été, jusque dans un passé récent, l’« unique société de

capitaux qui puisse être constituée dans les états membres de l’Ohada »128, la société anonyme a longtemps été l’« instrument du prodigieux essor économique »129 escompté par les initiateurs

125 O. BOTOE-BI-EVIE, Pour une promotion de la liberté contractuelle en droit OHADA des sociétés, thèse,

Université d’Aix-Marseille, 2014, p. 43, n° 37 ; voir aussi J.-P. BERTREL, « Liberté contractuelle et sociétés, essai d’une théorie du juste milieu en droit des sociétés » : RTD com. 1996, p. 595.

126 P.-G. POUGOUE, J.-C. JAMES et alii, « Actes uniformes », in Encyclopédie du droit Ohada, Lamy, 2011, p.

62, n° 152. ; J. PAILLUSSEAU, « L’acte uniforme sur le droit des sociétés » : Petites aff. n° 205, 13 oct. 2004, p. 19.

127 A. FENEON, Droit des sociétés en Afrique (Ohada), LGDJ, 2015, p. 736, n° 1892.

128 F. ANOUKAHA, A. CISSE, N. DIOUF, et alii, OHADA : Sociétés commerciales et GIE, éd. Bruylant, 2002,

p. 404, n° 857.

129 E. ESCARRA et J. RAULT et alii, Traité théorique et pratique de droit commercial. Les sociétés commerciales,

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de l’Ohada. Qualifiée par beaucoup comme étant la structure la mieux adaptée à l’entreprise130, elle a toujours joué un rôle économique de premier plan dans l’espace Ohada131. « Elle

représente l’instrument idéal de concentration de capitaux et de puissance économique, qu’il s’agisse de rassembler d’importants fonds ou d’en assurer la gestion »132. En tant que telle, elle demeure la forme sociale la plus adaptée aux entreprises importantes qui nécessitent des moyens financiers détenus par un grand nombre d'investisseurs133. L’importance de son attrait sur la pratique et son utilité économique légitiment donc selon nous, la nécessité de déconstruire certains mythes qui sont souvent présentés en droit Ohada comme étant le fondement de la rigidité du droit qui lui est applicable. Il importe pour cela de démontrer la perméabilité de la société anonyme aux mécanismes contractuels, c’est-à-dire d’exposer la liberté que les actionnaires ont désormais d’imprimer de la souplesse dans le régime juridique des sociétés anonymes, qu’elles soient ou non cotée en bourse. Pour ces dernières, il convient toutefois de préciser que la question de la question de la liberté des associés présente quelques spécificités en leur sein134. Elles doivent répondre à certaines règles propres au droit des marchés financiers dont le fonctionnement requiert de la transparence135. Sans pour autant s’opposer au principe de la contractualisation du droit des sociétés, cette exigence de transparence influence alors le régime des pactes d’actionnaires dont elle commande la publicité136.

130 J. PAILLUSSEAU, « L’acte uniforme sur le droit des sociétés » : Petites aff. n° 205, 13 oct. 2004, p. 20. 131 P. C. EWANE MOTTO, La gouvernance des sociétés commerciales en droit OHADA, thèse, Université Paris-

Est, 2015, p. 34.

132 En ce sens, voir notamment Ph. KHAN, « Les investissements étrangers dans les pays en voie de

développement » : Penant 1971, p. 163 et s. ; B. LASSEHIN, L’information des actionnaires, instrument de contre- pouvoir dans les sociétés anonymes de l’espace Ohada, thèse de doctorat, Université d’Abomey-Calavi, 2014, p.

1.

133 En ce sens, voir J. GATSI, L’effectivité du droit de l’OHADA, PUA, 2005.

134 Voir F.-X. LUCAS, « Les libertés d’organisation et de transmission. La liberté des associés », in Entreprise et liberté. Journées nationales-Association Henri CAPITANT, Tome X, Dalloz, 2008, p. 75. L’auteur écrit

notamment que « si la société fait appel public à l’épargne, si elle est cotée, il est évident que le problème [de la place de la liberté des associés] ne se pose pas dans les même termes ».

135 Voir à ce sujet D. MAZEUD et F. MARTIN LAPRADE, « L’ordre public en droit des sociétés … cotées « : Rev. sociétés n°1, 2012, p. 290. Adde A. REYGROBELLET, Les vertus de la transparence. L’information légale dans les affaires, Presse de Scences Po-CREDA, 2001.

136 Sur la spécifité des conventions entre actionnaires de sociétés cotées en bourse, voir O. DEXANT DE

BAILLIENCOURT, Les pactes d’actionnaires dans les sociétés cotées, Dalloz, 2012. Selon C. LEROY, « Des raisons de politique économique justifient en effet, qu’afin de préserver le bon fonctionnement des marchés financiers, en assurant notamment la transparence du marché ainsi que la sécurité des épargnants, le législateur encadre par un certain nombre de règles spécifiques et contraignantes, de publicité en particulier, les pactes auxquels ont très fréquemment recours les actionnaires de sociétés dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé » : C. LEROY, Le pacte d’actionnaires dans l’environnement sociétaire, Thèse de doctorat,

Université Paris-Val de Marne, 2010, p. 16, n° 15. Voir aussi J.-M. MOULIN, « L'incidence du droit boursier sur les pactes d'actionnaires » in J. RAYNARD (dir.), Pacte d’associé ou clause statutaire : quel choix pour l’entreprise sociétaire ? Actes du colloque national DJCE, 8 et 9 février 2013 à la faculté de Droit de Bordeaux,

LexisNexis, 2013, p. 95. Adde D. OHL et F. MARTIN LAPRADE, « Pactes et sociétés cotées : étude de certains

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32. Qu’il s’agisse de la société anonyme ou de l’ensemble des formes sociales, d’aucuns pourraient, dans le but de justifier du manque d’intérêt qu’il y aurait à s’interroger sur le phénomène137, soutenir que la cause de la contractualisation du droit des sociétés paraît déjà entendue. En effet, depuis quelques décennies, le constat d’une recrudescence du phénomène contractuel en droit des sociétés est posé en doctrine où on a soutenu que cette matière, traditionnellement marquée par le caractère d’ordre public de ses dispositions, se trouve désormais de plus en plus soumise à deux tendances contradictoires138. Depuis lors, la doctrine française de même que celle relevant d’autres droits nationaux ont consacré bien des études à la question de la contractualisation du droit des sociétés139. En ce qui concerne le droit Ohada, seuls quelques travaux de recherche ont, à notre connaissance, été consacrés à la question de la liberté contractuelle depuis l’adoption du l’AUSC de 1997 à ce jour. On peut notamment citer la thèse d’Olivia BOTOE-BI-EVIE140, celle de Wendkouni Judicaël DJIGUEMDE141 ou encore celle d’Isabelle DEKADJEVI142. Dans un tel contexte et quand on considère la doctrine dans son ensemble143, l’importance aussi bien quantitative que qualitative des travaux scientifiques qui ont successivement été consacrés à la question pourrait inciter à s’interroger sur ce qu’il reste à dire, que l’on n’ait déjà bien souvent écrit sur la thématique.

137 « Pourquoi vouloir encore parler de contractualisation des sociétés commerciales fut-il en droit OHADA…? » :

A. D. EYANGO DJOMBI, « La contractualisation du droit des sociétés commerciales de l’Ohada » : Penant 2015, n° 893, p. 434.

138 Voir notamment Y. GUYON, Traité des contrats. Les sociétés, aménagements statutaires et conventions entre associés, LGDJ, 4ème éd, 1999, p 7 : Constatant que « Le droit des sociétés est plus que jamais soumis à deux tendances contradictoires : d’un côté la prolifération d’une réglementation de plus en plus tatillonne, de l’autre l’aspiration à davantage de souplesse et de liberté dans l’organisation et le fonctionnement de ces personnes morales », l’auteur affirmait déjà dès la première édition de son œuvre en 1993, que cette tendance contradictoire

traduisait « la marche vers un renouveau contractuel en droit des sociétés ».

139 Voir par exemple B. SAINTOURENS, « La flexibilité du droit des sociétés », RTD com. 1987, p. 457 ; J.

PAILLUSSEAU, « La Contractualisation de la société anonyme fermée » : Gaz. Pal. 1998, 2, doctr. p. 1257 ; R. LIBCHABER, « La société, contrat spécial », in Prospectives du droit économique - Dialogues avec Michel

JEANTIN, Dalloz, 1999, p. 281 ; P. BISSARA, « De la société contractante à la contractualisation de la société », in Approche renouvelée de la contractualisation, sous la dir. de S. CHASSAGNARD-PINET et D. HIEZ, PUAM, 2007 ; M. COIPEL, « La contractualisation des causes de dissolution des sociétés », in Mélanges offerts à Roland

DE VALKENNER à l’ occasion du 125e anniversaire de la revue du notariat Belge, Brylant, 2000, p. 147.

140 O. BOTOE-BI-EVIE, Pour une promotion de la liberté contractuelle en droit OHADA des sociétés, thèse de

doctorat, Université d’Aix-Marseille, 2014. Ainsi que l’indique le titre de la thèse, l’auteur a particulièrement montré l’intérêt que présente la contractualisation et appelé le législateur OHADA à réformer son droit des sociétés en y accordant plus de place à la liberté contractuelle des associés.

141 W. J. DJIGUEMDE, L’aménagement conventionnel de la société commerciale en droit français et en droit OHADA, thèse de doctorat, Université de Bordeaux, 2015. La réflexion de Monsieur DJIGUEMDE est résolument inscrite dans une démarche de comparaison des droits Ohada et français. A l’opposé, la présente étude exclusivement consacrée au droit Ohada se fonde principalement sur une analyse substantielle et systémique du droit Ohada et entend proposer une réflexion sur la place, le sens et le rôle de l’ordre public et de la liberté contractuelle dans cet espace de référence.

142 I. DEKADJEVI, La volonté individuelle dans les sociétés commerciales de droit OHADA, Thèse de doctorat,

Université d’Abomey-Calavi (Bénin), 2018.

143 Nous pensons à la doctrine relative au droit Ohada, celle relevant du droit français et plus généralement à celle

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33. Pour autant, la réflexion sur la contractualisation du droit des sociétés commerciales

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