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Occurrence des interactions dislocation-boucle

Chapitre III. Mécanismes de la déformation plastique après irradiation

IV. Occurrence des interactions dislocation-boucle

IV. Occurrence des interactions dislocation-boucle

Le Tableau III-2 résume la totalité des interactions observées lors des essais de traction in-situ. Les cas d’ancrages des dislocations sont divisés en deux catégories : les « ancrages faibles » correspondant en particulier aux ancrages ponctuels des dislocations sur les boucles, pour lesquels la force d’ancrage est faible, qui semblent être de type R1 ou des interactions élastiques à distance. Les « ancrages forts » catégorisent les cas où le désancrage de la dislocation est lent, et où le mécanisme d’ancrage est de type R1 ou R4 avec la formation d’un tour d’hélice.

Tableau III-2. Résumé des interactions dislocation-boucles observées lors des essais de traction in-situ.

Prismatique <a> Pyramidal <a> Basal <a>

T ambiante Ancrages forts : 2 Absorption (R3) : 7 Tour d’hélice (R4) : 1 - - 350°C 400°C Ancrages faibles: nombreux (>10) Ancrages faibles: nombreux (>10) Ancrages faibles: nombreux (>>10) Ancrage fort : 3 Ancrage fort : 3 Ancrage fort : Nombreux (>10) Absorption (R3) : 5 Absorption (R3) : 2 Tour d’hélice (R4) : 3 Tour d’hélice (R4) : 1

Bien que certains cas d’interactions dislocation-boucle aient été observés lors de ces essais, ces derniers restent rares en comparaison à la densité important de boucles et de dislocations dont le glissement est activé. Lors des expériences de traction in-situ réalisées par Drouet [5] sur des éprouvettes de Zy-4 pré-irradiées aux ions, peu de cas d’interactions ont également été observé. Drouet [5] réalise une étude statistique de l’occurrence des interactions qui démontre que le pourcentage de non-interaction entre une dislocation et les boucles est faible, ce qui est donc en désaccord avec les observations expérimentales.

La Figure III-30 illustre la faible probabilité des interactions dislocation-boucle dans le cas de dislocations glissant dans le plan prismatique. Les soustractions d’images permettent notamment de suivre deux d’entre elles, d1 et d2, et montrent que seuls quelques cas d’ancrages surviennent

(soustraction a)-b) pour la dislocation d1 par exemple). En effet, sur cette séquence, les dislocations

passent au voisinage d’une cinquantaine de boucles et moins de 5 ancrages sont observés pour chacune des dislocations. Ces estimations sont cohérentes avec l’étude statistique de Drouet [5], qui démontre pour une dislocation glissant dans un plan prismatique à température ambiante, que le nombre moyen d’interactions attendu est d’environ 10%.

Figure III-30. Faible occurrence d'interaction lors du glissement de dislocations dans un plan prismatique à 350°C.

Les cas de non-interaction peuvent tout d’abord être dus à des raisons géométriques (position de la boucle par rapport au plan de glissement, vecteur de Burgers). La Figure III-31 illustre un possible cas de non interaction dû à des raisons géométriques pour une dislocation glissant dans un plan pyramidal à 400°C. L’image a) montre deux boucles distinctes pouvant potentiellement interagir avec la dislocation. Cependant, comme observé sur les soustractions d’images, aucune interaction, ni mouvement des boucles lors du passage de la dislocation n’est observé.

Figure III-31. Non interaction entre une dislocation glissant dans un plan pyramidal et deux boucles à 400°C.

a) t = 0 s b) t = 3,76 s c) t = 7,6 s d) t = 23,96 s 100 nm 100 nm 100 nm 100 nm 100 nm 100 nm 100 nm a)-b) b)-c) c)-d) d1 d1 d1 d1 d1 d1 d1 d2 d2 d2 d2 d2 d2 d2 100 nm boucle 1 100 nm 100 nm 100 nm boucle 2 boucle 1 boucle 2 100 nm 100 nm 100 nm a) t = 0 s b) t = 3,48 s c) t = 7,88 s d) t = 11,36 s a)-b) b)-c) c)-d)

IV. Occurrence des interactions dislocation-boucle

Des mécanismes d’évitement des boucles par les dislocations ont de plus été suggérés afin d’expliquer le peu d’interactions observées [5]. Ce mécanisme d’évitement peut tout d’abord se produire par un double glissement dévié de la dislocation ce qui réduit les chances d’interactions avec les boucles dans le plan de glissement. De plus, un mouvement des boucles le long de leur cylindre est possible et peut se produire à courte distance. Comme expliqué précédemment, le ralentissement du glissement des dislocations peut être dû à des ancrages par interaction directe avec les boucles. Cependant, dans certains cas, le glissement des dislocations peut être ralenti par des interactions élastiques répulsives à distance entre les dislocations et les boucles. Ces interactions élastiques entraînent un ralentissement du glissement des dislocations au voisinage des boucles, et un glissement des boucles sur leur cylindre, sur une très faible distance. L’éloignement des boucles du plan de glissement des dislocations permet alors de nouveau le glissement de ces dernières.

Synthèse du chapitre

A l’échelle macroscopique, l’irradiation aux neutrons rapides entraîne le durcissement des alliages de zirconium ainsi qu’une diminution de leur ductilité. Les principaux modèles pouvant expliquer ces évolutions de propriétés mécaniques sont basés sur l’interaction des dislocations, dont le glissement est activé lors de la déformation plastique, avec les défauts induits par l’irradiation, et notamment les boucles de dislocation. Il est généralement admis que les boucles agissent comme obstacles au glissement des dislocations, et sont donc à l’origine du durcissement d’irradiation. Onimus [1] a montré expérimentalement, la présence d’un mécanisme de canalisation du glissement après irradiation aux neutrons d’échantillons de Zy-4, conduisant à la formation de bandes claires, dénuées de défauts, dans les plans basaux, prismatiques et pyramidaux. Ce mécanisme traduit la possibilité que les boucles peuvent également être entraînées ou annihilées par les dislocations. Dans une optique de meilleure compréhension des interactions dislocation-boucle, des essais de traction in-situ au MET ont été menés dans le cadre de ce travail de thèse à température ambiante et à plus haute température (350- 500°C).

L’activation de différents systèmes de glissement a été observée lors de ces essais. Le système de glissement prismatique est le système favorablement activé, en particulier à température ambiante. Il se caractérise par des vitesses de glissement des dislocations de plusieurs centaines de nm.s-1. A haute

température, le système de glissement pyramidal est thermiquement activé. Le glissement y est plus visqueux, et se caractérise par de nombreux doubles glissements déviés des dislocations à caractère vis. Le système de glissement dans le plan de base n’est activé que dans des cas spécifiques où son facteur de Schmid est important. Le glissement des dislocations est similaire à ce qui est observé pour le glissement pyramidal, avec de longues dislocations vis fortement soumises au double glissement dévié.

Deux types d’interactions ont été observés lors de ces essais : l’ancrage des dislocations sur les boucles et l’absorption des boucles par les dislocations. Ces interactions entraînent dans la majorité des cas un ralentissement du glissement des dislocations, notamment à haute température, et participent au durcissement d’irradiation.

Les dislocations glissant dans les plans prismatiques et dans le plan basal à haute température (350- 400°C) sont soumises à des ancrages très nombreux, de type R1. Des cas d’ancrage très forts ont également été observés pour les systèmes prismatiques et pyramidaux.

L’absorption des boucles de dislocation a été observée lors du glissement dans les plans prismatiques et pyramidaux à température ambiante et haute température. Ces absorptions peuvent se faire par incorporation des boucles sous la forme de crans (réaction R3) ou sous la forme de tours d’hélice (réaction R4). Dans les deux cas, des jonctions sessiles temporairement ancrantes sont créées entraînant le ralentissement du glissement des dislocations. Ces interactions sont donc d’une part la preuve qu’il existe bien un mécanisme d’annihilation des boucles, et d’autre part qu’elles sont également directement impliquées dans le durcissement d’irradiation observée macroscopiquement.

Références bibliographiques

Références bibliographiques

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Chapitre IV. Etude des interactions dislocation-boucle