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Identité libanaise : appartenance confessionnelle et partage culturel

E- Les obstacles du partage de l’information et de la communication

Il existe sept cents institutions culturelles au Liban, selon le site Web de l’agenda culturel libanais. 97

Lancé en 1994, ce dernier est considéré comme la seule publication spécialisée dans la promotion des activités culturelles au Liban. L’actualisation et la mise en ligne du répertoire ont été rendues possibles grâce au soutien de l’Institut français du Liban. Ce répertoire des organismes définit le paysage culturel dans son intégralité: musées publics, musées privés, mécénats, associations culturelles qui soutiennent le patrimoine, espaces d’art contemporain, arts visuels, écoles de musique, théâtre et danse, ciné-clubs, festivals cinématographiques, festivals nationaux et internationaux, salons du livre, éditeurs, bibliothèques, espaces de spectacle, espaces universitaires, enseignement universitaire, centres culturels, propriété intellectuelle, secteur public (Ministère de la

réseaux et mondialisation, 1999. Rennes. Apogée

http://www.commposite.org/index.php/revue/article/view/42/41

McCHESNEY Robert. Les Géants des médias, une menace pour la démocratie. in CHOMSKY Noam. et McCHESNEY Robert (eds.) Propagande, Médias et Démocratie, Montréal, Écosociété. 2000

MUSSO Pierre. Pour une critique du "capitalisme informationnel" Nouvelles FondationS. 2007. n°6 https://www.cairn.info/revue-nouvelles-fondations-2007-2-page-110.htm

97 Le site de l’Agenda culturel. Répertoire des organismes culturels http://www.agendaculturel.com/fr-repertoire-organismes-culturels

69 Culture, Ministère de l’Information, Ministère de l’éducation et de l’enseignement supérieur, centre des archives nationales, Conseil national de la recherche scientifique). Dans le cas des musées au Liban par exemple, on remarque des problèmes liés aux ressources humaines, un manque de personnel bien visible, un manque de technique de communication, voire de responsables qualifiés pour la collecte et le traitement de l’information. Un autre problème majeur est le manque de fonds pour traiter, imprimer, diffuser l’information. On peut ajouter aussi des problèmes techniques et une absence de systèmes modernes d’information, sans oublier le traumatisme dû à des problèmes psychologiques comme le manque de confiance mutuelle entre administrateurs et professionnels, la censure.

A l’ère du numérique, il faudrait donc des améliorations opérationnelles qui consistent à utiliser les médias en développant un système efficace de traitement et de diffusion de l’information et à encourager sa libre circulation.

Nous nous interrogeons sur les rapports complexes qui existent entre culture et numérique. L’impact de la dématérialisation comme sujet et objet, favorisant l’échange improbable, mais aussi dialectique, entre numérisation de la culture et culture numérique, entre politique dématérialisée et dématérialisation de la politique culturelle.98

Au sens littéral du terme, « dématérialisation » signifie priver une chose de ses attributs physiques. D’un point de vue technologique, cela revient à faire fi des différents supports physiques inhérents à la mise à disposition des contenus en vue de les numériser. De cette manière, un simple périphérique de stockage suffit pour recueillir toutes sortes d’œuvres culturelles et les conserver. Ainsi, sur un même disque dur, on peut retrouver de la musique, des films, des jeux et même des livres numériques pour peu que l’espace de stockage soit suffisant. Alors qu’il faudrait un entrepôt pour stocker des milliers de disques, des centaines de DVD et toute une bibliothèque, la

98

DE BERNARD François. La dématérialisation des politiques culturelles: Problématique et paradoxes. Musée d’Auxerre. 5ème colloque interdisciplinaire. Culture et Numérique: nouveau champ des pouvoirs. 4-5/07/2008. Icones-images: musée de sens.

70 dématérialisation permet de conserver tout cela dans un boîtier. En numérisant la culture et sauvegardant le patrimoine, un paradoxe de la sauvegarde nait. Numériser permet de sauvegarder, de partager et de diffuser également les savoirs, les expressions et le contenu avec accessibilité et efficacité. En effet, la numérisation massive des contenus culturels n’a pas pour objectif de concurrencer les contenus culturels traditionnels mais d’en faciliter l’accès et la préservation. Par ailleurs, partout où elle a lieu, la numérisation bénéficie également à d’autres secteurs d’activité en particulier à l’éducation, à la science, à la recherche, au tourisme, aux médias. Par le biais du numérique, il est possible de préserver le patrimoine culturel de l’humanité mais surtout de permettre à tout un chacun d’y accéder simplement. C’est en numérisant que nous promouvons la diversité culturelle et la rendons plus accessible. Cette idée par exemple, se trouve formalisée dans la charte de l’UNESCO sur la conversation du patrimoine numérique.99

« Le patrimoine numérique n’a par essence, aucune limite temporelle, géographique, culturelle ou formelle. Il est propre à une culture, mais virtuellement accessible à tout un chacun dans le monde. Les minorités peuvent s’adresser aux majorités, les particuliers à un auditoire mondial. Le patrimoine numérique de tous les pays, régions et communautés doit être conservé et rendu accessible pour donner au fil du temps une image équilibrée et équitable de tous les peuples, nations, cultures et langues ».

Cette possibilité de duplication infinie du contenu dématérialisé est une façon de protéger les œuvres contre les effets du temps. Techniquement, une donnée informatique amovible, stockée et existante comme trace sur un serveur ou un disque dur, ne peut pas s’altérer, alors que les supports physiques sont soumis aux lois du temps, au vieillissement et finissent par être inutilisables, comme les disquettes ou floppy remplacées par les clés USB au début des années 2000, à cause de leur fragilité et de leur capacité limitée à 1,41 M, alors que les fichiers manipulés commençaient à dépasser largement cette taille.

71 Néanmoins, des applications pratiques sont bien nombreuses pour une telle idée, qui soulève une problématique en elle-même: comme l’accessibilité, l’authenticité, la réalité de la diversité, ainsi que la durabilité de la sauvegarde. En effet, l’oeuvre numérisée reste une copie de l’authentique et ne la remplace pas. Ce qui fait la différence entre la consultation d’une notice en ligne et une visite au musée. Ajoutons aussi la langue dominante qui reste l’anglais en parlant de la réalité de la diversité; avec des différences de ressources financières qui favorisent les pays les plus développés.

L’autre désavantage de la dématérialisation tient au fait qu’énormément de plates-formes de téléchargement en ligne utilisent un système de compte. Celui-ci permet à l’utilisateur de se connecter depuis n’importe où au service et de retélécharger à volonté les produits qu’il a achetés. Cette façon de procéder est très pratique pour le client mais aussi dangereuse. Si la sécurité du compte est compromise et qu’un pirate s’empare du compte, il devient compliqué pour l’utilisateur de le récupérer. Celui-ci doit se lancer dans toute une série de procédures afin de démontrer que le compte est bien sa propriété et qu’il en a été dépossédé de façon frauduleuse. Cela peut avoir de fâcheuses conséquences puisque les diverses plates-formes proposent souvent d’enregistrer les coordonnées bancaires de la personne afin de faciliter les achats ultérieurs. Ces données sont cryptées de sorte qu’elles ne puissent pas être réutilisées pour d’autres sites, cependant, il reste toujours possible au hacker d’acheter sur la plate-forme en question. Face aux incertitudes actuelles sur la continuité des supports numériques et à un nombre croissant de documents numériques à gérer, nous nous arrêtons sur l’article 3 de la charte de l’UNESCO sur la conservation du patrimoine numérique:

« l’évolution des attitudes n’a pas suivi celle des technologies. L’évolution numérique a été trop rapide et trop coûteuse pour que les pouvoirs publics et les institutions élaborent en temps voulu et en connaissance de cause des stratégies de

72 conservation. La menace qui plane sur le potentiel économique, social, intellectuel et culturel n’a pas été pleinement saisie. »100

La culture telle qu’elle est réglementée n’est pas accessible à chacun, du moins immédiatement. La rendre accessible réclame par conséquent l’intercession de

médiateurs (informateurs, accompagnateurs, pédagogues) et, simultanément,

l’élaboration de procédures de médiation (depuis les textes explicatifs jusqu’aux signalétiques de parcours). Les médiateurs travaillant dans des contextes variés (rural, urbain, institutions, associations...) s’attachent à favoriser l’émergence de confrontations et de rencontres efficaces sur le plan artistique et culturel.

[...] Le problème central n’est plus seulement de sensibiliser des populations à la culture mais de soutenir les mutations du champ culturel: crise des valeurs, conflits de références, coexistence culturelle difficile [deviennent] autant de motifs de diversifier les interventions, de prendre des partis différents face à la composition des publics culturels ou aux options de la démocratisation et de la démocratie culturelles [...] La fonction des médiateurs revient à relier, favoriser des passages ou faciliter des liaisons, surtout lorsque des heurts culturels sont prévisibles (et qu’il faut) renforcer la cohésion du groupe et lui forger une identité. 101

Le malaise social libanais n'a-t-il une existence visible que lorsque les médias en parlent, c'est-à-dire lorsqu'il est reconnu comme tel par les journalistes. Or, il ne se réduit pas au seul malaise médiatiquement constitué, ni surtout à l'image qu'en donnent les médias lorsqu'ils le relèvent. Il reste que les médias font désormais partie intégrante de la réalité ou, si l'on préfère, produisent des effets de réalité en créant une vision médiatique de la réalité qui contribue à créer la réalité qu'elle prétend décrire. Notamment, les malheurs et les revendications doivent désormais s'exprimer médiatiquement pour espérer avoir une existence publiquement reconnue et être, d'une manière ou d'une autre "pris en compte" par le pouvoir politique. Pour conclure ce chapitre, et en exposant l’identité libanaise

100 Op. cit., cf. note nO52 ci-dessus

101 RUBY Christian dans De WARESQUIEL Emmanuel. Dictionnaire des politiques culturelles. Larousse CNRS, 2001. P 400-401

73 dans cette partie panoramique, depuis le mandat Français, en passant par l’indépendance et le confessionnalisme comme une culture dominante dans le pays des cèdres, nous avons traité le sécularisme comme une forme de culture transcendante dans les pratiques culturelles, naissant dans une minorité de la société, blessée par le traumatisme de la guerre civile et les problèmes de corruption que le pays connaît, la circulation de l’information, ainsi que les obstacles que la culture rencontre .

C’est à travers les TIC et les réseaux socionumériques que les artistes « engagés » utilisent le discours du sécularisme dans leurs pratiques artistiques pour partager leur art. Nous détaillerons ce point dans le chapitre qui suit.

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CHAPITRE II

Engagement et responsabilité des artistes contemporains libanais :