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Comparaison entre les réseaux sociaux traditionnels aux réseaux socionumériques

F- L’effervescence numérique a t-elle un sens politique ?

Comme les artistes engagés à travers le chant tels Yasmine Hamdan, Wael Koudeih et Tania Saleh, le peuple aussi a pu créer la révolution dans le monde arabe contre la dictature et le malaise qui y règnent depuis des années. Nombreuses sont les scènes témoignant du changement dans le monde arabe comme l’Egypte et la Tunisie.

« Une révolution sans organisation et sans leaders, comme en Tunisie, voilà ce que pourrait être la révolution à l’ère numérique. Avec la diffusion horizontale massive d’informations, le peuple peut envisager de se passer d’une organisation formelle », 160 selon l’expression du responsable marketing de Facebook au Moyen-Orient Wael Ghonim, figure emblématique des rassemblements sur la place Tahrir, arrêté et détenu par la police égyptienne.

II ne faut pas tomber dans ce que certains comme Mathew Ingram, appellent une cyber utopie « It’s not Twitter or Facebook, it’s the power of the network ». 161

Ce n’est pas internet ou les réseaux sociaux qui font la révolution : les manifestations interdites, les

160 Article publié en ligne sur le site de GouvActuAdmiNet par LEGALE Eric. Egypte: Révolution 2.0.

Acte II. Consulté le14 /02/2011 http//gouvactu.adminet.fr/forum-mondial-de-l-39-e-da-c-mocratie_site00292.html Consulté le 14/06/2011

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Article publié en ligne sur le site de Gigaom parINGRAM Mathew. It’s not Twitter or Facebook, it’s the power of the network https://gigaom.com/2011/01/29/twitter-facebook-egypt-tunisia/ Consulté le 30/04/2011

137 immolations publiques ou l’occupation de la place Tahrir sont avant tout des expressions physiques d’une contestation et d’un désarroi populaires.

Internet et les nouvelles technologies sont des instruments pour la diffusion de l’information certes. Et selon les médias principaux, elles sont considérées comme révolutionaires, mais ce sont surtout les populations qui sont descendues dans la rue pour affronter la police et même quand le gouvernement a arrêté Internet et les réseaux de communication numériques pendant quatre jours, la mobilisation a continué. « S’il est certain que les nouvelles technologies ont été importantes pour la diffusion de l’information sur les manifestants et pour les encourager, ça n’a pas été le seul facteur de leur mobilisation. Si les militants d’Internet postent une information ou un message pour être lus par des milliers de personnes, il est plus ou moins garanti que les médias traditionnels comme CNN, El Jazeera ou la BBC reprennent l’info et feront qu’elle sera lue par des millions. Elle va ainsi se répandre ».162

Peut-on parler d’une révolution numérique ? Oui et non. Oui, en ce sens que dans ces pays où l’information est sévérement contrôlée, les réseaux sociaux numériques jouent un rôle essentiel en permettant le ralliement des forces vives de changements sociopolitiques ; non si on croit que Twitter et Facebook ont créé de toutes pièces les conditions du réveil des populations arabes royales ou militaires. Le terrain était prêt pour une révolution populaire ; les cris de ralliement lancés au travers de ces réseaux sociaux et repris par les médias traditionnels ont été la source phare qui a fait éclater ces rassemblements monstres en Tunisie, puis en Egypte, au Bahrein, au Yémen et puis dans tout le Maghreb.

Tous ces réseaux socionumériques du Web, des téléphones et des jeux vidéos en ligne sont davantage liés à la découverte d’une nouvelle sociabilité mondialisée sans

162 EL HAMALAWY Hossam est membre de l’organisation Socialiste révolutionnaire ainsi que du centre d’études socialistes au Caire. Journaliste, blogueur, il est l’un de ces jeunes « cyberguerilleros » au Coeur des révolutions en cours dans le monde arabe.

Article posté en ligne par Hossam EL HAMALAWY. no89, 10/02/2011. P 2. Révolution 2.0, un blogueur révolutionnaire sur la place Tahrir, tout est à nous! http://www.npa2009.org/content/révolution-20-un-blogueur-révolutionnaire-sur-la-place-tarir

138 engagement réel. La technologie multiplie les outils de contact, iphone, ipad, itouch, GPS, mais elle n’arrivera pas à combler, l’angoisse existentielle, la solitude de l’être profond et vulnérable. Le fait d’être toujours branché remplit-il le vide de nos existences anonymes? Comment réconcilier la réalité technique et économique de la communication avec sa dimension sociale, culturelle et politique ? En d’autres termes, c’est de chercher à comprendre à quelles conditions les valeurs démocratiques de relation et d’ouverture au cœur des mots d’information et de communication, peuvent, ou non, s’imposer face à des techniques omniprésentes. Comme le dit Dominique Wolton dans Penser la communication (1997) une rupture considérable dans l’histoire de l’humanité avec l’avènement des nouvelles technologies? L’approche technique et économique a dominé, il est indispensable de revaloriser son approche humaniste et politique, donc démocratique. « La communication, symbole de liberté, de démocratie et de modernité, s’est banalisée. L’avenir de la communication n’est pas dans le triomphe des nouvelles technologies mais dans le risque de la rencontre et l’incompréhension. Communiquer, c’est accepter la cohabitation avec l’autre, le pari de l’échange. La mondialisation ne pourra éviter sa propre caricature que si elle reste fidèle à certaines valeurs dont celle de la communication ». 163

Par conséquent, en faisant cette étude, on atteste une domination d’une culture confessionnelle dans la société libanaise. Nous avons démontré la légitimité de l’existence d’une contre-culture s’opposant à la culture dominante, visant à communiquer et à diffuser un système de valeurs alternatives, celle du sécularisme ou de la laïcité. Parmi les multiples manifestations culturelles de ce contre-courant, nous nous sommes particulièrement intéressés aux manifestations musicales. À travers nos deux artistes Tania Saleh et Wael Koudeih nous avons relevé les marques et les expressions de l’existence de cette culture à l’ère du numérique ainsi que les éléments particuliers de l’engagement de ces deux chanteurs. Cette existence s’est ancrée socialement et « virtuellement » sur le web à travers les liens forts et les liens faibles renvoyant depuis les sites officiels analysés. La liste des chanteurs ne s’arrête pas

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139 uniquement sur ces deux chanteurs engagés : on peut citer Yasmine Hamdan, Mashrou' Leila et beaucoup d’autres dans la scène culturelle contemporaine… Face à cette instrumentalisation d’internet et des nouvelles technologies, l’effervescence numérique ou le cyberactivisme, a certes un sens politique. La question des mouvements sociaux en ligne demeure « hybride » dans la mesure où elle renvoie à un engagement social qui passe par le virtuel pour agir sur le réel. En d’autres termes, l’intérêt de cet engagement virtuel à distance réside dans le fait qu’il est enraciné dans la réalité sociale d’un part, et dans la possibilité de mobiliser des groupes de pressions transnationaux et décentralisés d’autre part.

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CHAPITRE III

Les formes culturelles au Liban : le discours des performances