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Les notions de statique et dynamique dans les écrits des économistes

Le recensement effectué par Malchup (1971) des termes « statique » et « dynamique » chez trente neufs auteurs montre le caractère hétéroclite des définitions.

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Les positions triviales

esquivent selon nous les véritables enjeux et entretiennent une confusion. Toutes ont pour point commun de lier les concepts de statique et de dynamique avec une approche en terme d’équilibre.

Equilibre et convergence

La première de ces positions triviales, sans doute la plus répandue, consiste à décrire la statique comme l’étude de l’équilibre alors que l’analyse dynamique correspond à l’étude de la convergence vers celui-ci. Outre le lien établi sans démonstration entre statique et équilibre, ce genre d’approche présuppose la convergence des trajectoires. C’est là une position triviale dans le sens où elle pose comme hypothèse le résultat escompté. On trouve ce type de position chez Patinkin (1956) pour qui la statique est l’ « Analyse de […] la nature de l’équilibre » tandis que la dynamique est l’« Analyse portant […] sur la nature des forces du marché, par lesquelles l’économie passe d’une position initiale de déséquilibre à la position d’équilibre. » (p. 32).

Système non perturbé et système perturbé

Une seconde vision triviale, présentée notamment par Moore (1929), consiste à définir la statique comme l’étude de l’équilibre au sein d’un système non perturbé. Dans cette optique, la statique examine les équilibres stables. Inversement, la dynamique a pour objet la compréhension de l’équilibre au sein d’un système perturbé. C’est l’étude des équilibres mouvants.

Le mérite de cette présentation, par rapport à celle précédente, est d’envisager des situations plus « incertaines » où l’équilibre peut-être perturbé. Toutefois afin de maintenir le lien entre dynamique et équilibre, les partisans de cette définition sont conduits implicitement à formuler une hypothèse « d’équilibre permanent ». Ainsi même si le système est perturbé, la dynamique demeure l’analyse des équilibres (mouvants). Il n’est plus question de trajectoire, de processus et de convergence.

La variable temps

Enfin, une dernière distinction s’effectue par rapport au temps. Pour Hayek (1941), par exemple, la statique correspond à une « Théorie de l’équilibre sans considération de temps. » (p. 17-18). Alors que la dynamique s’appréhende comme une « Théorie de l’équilibre intertemporel » (p. 22-23).

Bien que cette vision a l’avantage d’inclure une dimension temporelle, elle ne prend pas en compte l’incertitude, ni même le risque. C’est pourquoi, elle ne nous semble pas plus valable que les deux précédentes.

Observations

On l’a souligné, le dénominateur commun de ces trois définitions est de présupposer que la statique et/ou la dynamique analyse des situations d’équilibre. Cette tendance à se concentrer sur des états d’équilibres s’explique par la difficulté qu’il y a à analyser et comparer les situations de déséquilibres. Pourtant si l’on veut être rigoureux on ne peut pas se contenter d’évacuer par hypothèse ce qui devrait être l’objet même de l’analyse. Autrement dit, la capacité de la statique et de la dynamique à intégrer la notion d’équilibre doit être l’objet d’une démonstration et non d’un postulat.

A ces présentations triviales, s’opposent d’autres définitions plus subtiles que l’on trouve généralement chez des économistes qui ont bénéficié d’une formation mathématique plus avancée.

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Les positions avancées

L’idée de distinguer la statique de la dynamique en incluant une dimension temporelle n’est pas récente car on la retrouve notamment chez Hicks (1939) :

« J’appelle Statique Economique, les parties de la théorie économique où nous ne nous préoccupons pas de la date ; j’appelle Dynamique Economique les parties où chaque quantité doit être datée » (p. 115).

Commentaire

La définition de Hicks échappe à la trivialité puisqu’elle ne fait pas intervenir la notion d’équilibre. Néanmoins, elle peut difficilement être retenue en l’état dans la mesure où elle propose d’exclure toute préoccupation temporelle d’une analyse statique. Le traitement du temps étant un élément essentiel de l’analyse économique, ce genre de position supprime quasiment tout intérêt à la démarche statique. C’est pourquoi, on mobilise plutôt la vision de

Kondratieff (1925) qui désigne sous le nom de statique une « Conception selon laquelle les phénomènes économiques sont considérés, essentiellement et par principe, en dehors de toute variation possible dans le temps […] » (p. 567).

Dans l’esprit de Kondratieff, l’analyse statique correspond donc à l’étude en « coupe instantanée » d’une trajectoire1. En ce sens, la statique peut se voir comme un cas particulier de l’analyse dynamique. C’est d’ailleurs l’idée que soutient Oppenheimer en avançant toutefois des arguments de natures légèrement différentes.

La statique comme cas particulier de la dynamique

En effet, si on se réfère à Oppenheimer (1924), la dynamique est constituée de la « statique » et de la « cinétique ». Cette dernière « comprend toutes les études des modifications en grandeur ou en direction ou les deux à la fois, en raison de changement dans les données. ». Pour sa part, la statique est une « partie de la dynamique » examinant « non pas un état en repos mais un état en mouvement […] qui n’est pas exposé à des perturbations venant de changements dans les données pendant la période d’observation ».

L’analyse de Samuelson présente de grandes similarités :

« Stationnaire est un terme descriptif caractérisant le comportement d’une variable économique dans le temps ; il implique d’habitude la constance, mais il est quelquefois généralisé pour indiquer un comportement qui se répète périodiquement. Utilisé dans ce sens, le mouvement d’un système dynamique peut être stationnaire : par exemple, le comportement d’un pendule vérifiant les lois de Newton, mais qui ne serait soumis à aucune perturbation et resterait donc au repos […] » (p. 395).

L’élément qui vient différencier la statique de la dynamique est la possibilité de prendre en compte des perturbations. On voit aussi clairement que l’analyse statique est l’examen de la trajectoire à un instant donné. C’est la raison pour laquelle on propose de retenir, par hypothèse, la définition suivante du terme « statique » :

1 Si la « coupe instantanée » étudiée est le point d’aboutissement de la trajectoire, alors dans ce cas l’analyse statique peut se confondre avec l’analyse d’une situation d’équilibre.

HYPOTHESE (H2)

On qualifie d’analyse statique l’ensemble des phénomènes économiques dont l’étude s’effectue en immobilisant le temps c’est-à-dire en « coupe instantanée ».

Avant de retenir à son tour une définition de la notion de dynamique, il faut que nous la distinguions de celle d’un processus.

SECTION II