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III 2 Principe d’entropie et solutions apportées

Origine et formulation du principe d’entropie

VII. III 2 Principe d’entropie et solutions apportées

Après avoir identifié les causes de l’incertitude, on va maintenant énoncer le principe d’entropie. Celui- ci est à la base de la réflexion proposée dans la dernière partie.

Enoncé

Tout déséquilibre dans système dynamique, entendu au sens de (H4), ne peut pas régresser avec le temps. Par conséquent, il ne peut que ce stabiliser ou s’amplifier.

Bien qu’il ne soit jamais ouvertement formulé, l’idée d’un principe d’entropie semble être implicitement présente dans l’esprit des économistes. Cela se perçoit lorsqu’ils reconnaissent l’incapacité à modéliser dans un contexte d’incertitude. Ainsi, selon Kennet Arrow (1951) :

« Frequency theorists are therefore compelled to accept the view that probability statements cannot describe all kinds of ignorance (see Keynes [1, pp. 95-99]). This is indeed the viewpoint that has predominated among statisticians […] » (p. 410).

Plus récemment, North (2005) souligne également que la mathématisation de l’économie s’accompagne d’une absence de prise en compte de l’incertitude :

« Les économistes eux-mêmes se montrent assez ambigus sur le sujet : ils raisonnent largement comme si l’incertitude était une condition exceptionnelle, alors que la condition usuelle, la certitude, permet établir les élégants modèles mathématiques de l’économie formelle. » (p. 32)

Ce principe d’entropie se fonde sur une distinction intermédiaire : celle d’une conception du temps prenant place dans le corps des réels.

La flèche du temps

Le temps est perçu comme suivant une trajectoire linéaire allant du passé vers le futur. Sur le plan économique cela prend la forme d’une irréversibilité du processus de production :

« Le processus de production ne peut pas être inversé puisque, en particulier, la production prend du temps et les marchandises sont datées. » (Debreu (1959), p. 43).

Il est vrai que des démonstrations lèvent cette hypothèse (confère chapitre II). Néanmoins, cela n’est qu’une astuce servant à contourner les problèmes des seuils de rentabilités lorsque les rendements d’échelle sont décroissants. En aucun cas, on envisage dans la littérature économique une inversion du temps ou l’insertion de celui- ci dans le corps des complexes.

Système dynamique et incertitude

Cette précision étant faite, on va prouver que toute approche dynamique est incompatible avec l’existence d’un équilibre. Ceci étant à la fois le fruit de notre perception du temps et des effets de l’incertitude. Remarquons d’ailleurs que le principe d’entropie demeure vrai même si l’on se réfère, comme c’est le cas, à un cadre théorique particulièrement simple.

La solution par des hypothèses sur les croyances

Afin de garder une conception du temps, sans pour autant faire face à une incertitude, est apparue l’idée d’attribuer aux croyances des agents des caractéristiques particulières. Ce procédé repose sur trois phases :

1) La première consiste à admettre l’existence d’une croyance particulière selon laquelle la situation présente est l’indicateur le plus approprié pour connaître les perspectives futures.

2) Il découle du premier point que les individus (rationnels) vont chercher à extrapoler sur la base de leurs connaissances et opinions présentes.

3) Pour s’assurer du caractère acceptable de leurs anticipations, les agents vont les ajuster de manière à ce qu’elles soient partagées par un groupe. En d’autres termes, les individus se règlent sur des prévisions moyennes.

Naturellement, si chaque agent détermine ses anticipations sur la base de celles des autres, on aboutit à un jeu de miroir caractéristique des situations stratégiquement interdépendantes. Aucune anticipation ne peut se former. Cette théorie repose donc sur des bases particulièrement friables comme le suggérait Keynes (1937) :

« Or, une théorie pratique de l’avenir fondée sur ces trois principes présente certaines caractéristiques bien marquées. En particulier puisqu’elle repose sur des fondements si peu solides, elle est sujette à des changements soudains et violents. La pratique établie, faite de tranquillité et d’immobilité, de certitude et de sécurité peu s’effondrer tout à coup. Des craintes et des espoirs nouveaux se mettent alors à guider la conduite des hommes. » (p. 145).

Le rôle des institutions

Une autre façon de réduire l’incertitude est de créer des institutions comme l’explique North (2005) :

« Les croyances et les institutions imaginées par les humains ne sont compréhensibles que comme une réponse permanente aux divers niveaux d’incertitude auxquels ils ont été et restent confrontés au cours de l’évolution du paysage physique et humain. L’effort accompli par les humains pour structurer l’environnement afin de le rendre plus prévisible a été et demeure la source profonde des institutions […] » (p. 33).

Les exemples les plus adéquats d’institutions instaurées pour diminuer l’incertitude sont celles du modèle d’équilibre général. En particulier le commissaire priseur, ou ce qui est équivalent, le bureau central de la planification en délivrant les prix présents et futurs (hypothèse du système complet de marchés) évince l’incertitude du modèle. Ceci est essentiel pour prouver l’existence d’un équilibre général, car en l’absence d’un système complet de marchés une telle preuve est loin d’aller de soi. On se propose de le voir1.

1

Les économistes néo- classiques, qui considèrent la présentation de Debreu comme la formulation la plus aboutie de la théorie de l’équilibre général, préfèrent remettre en cause l’hypothèse du système complet de marchés en évoquant une question de réalisme. Grandmont (1977), dans l’introduction, justifie par ces quelques mots l’étude des équilibres temporaires : « In the real world, there is no such thing as a complete set of futures markets, nor are there enough institutions enabling the agents to transfer wealth freely over time and across states of nature. » (p. 4). Curieusement, la question de l’entropie est éludée.

SECTION IV

Entropie et existence de l’équilibre. L’exemple des « équilibres