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Mécanisme de variation des quantités Les équilibres à prix fixes Etant donné l’instabilité de la méthode la plus « populaire » de variation des prix, une

voie alternative qui semble naturelle est de stipuler que les ajustements sont du ressort des quantités :

« Intuitivement on peut considérer un K- équilibre à prix fixes comme le point fixe d’un tâtonnement en quantités […] » (Benassy (1984), p. 36).

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Présentation

En premier lieu, mentionnons que ces approches mettent l’accent sur les équilibres non walrasiens :

« Nous avons vu dans le chapitre précédent les concepts de bases d’une théorie microéconomique valable dans le cas où l’offre et la demande ne sont pas égales sur tous les marchés. Nous allons maintenant rassembler ces éléments et construire un certain nombre de concepts d’équilibres non walrasiens que nous désignerons sous le nom générique de K- équilibres. [ …]. Ces concepts seront cependant non walrasiens dans la mesure où les signaux en quantités joueront dans les processus d’ajustement un rôle aussi important que les signaux

prix. Quant aux prix, même s’ils sont flexibles, ils ne s’ajusteront pas nécessairement de façon à équilibrer l’offre et la demande sur tous les marchés. » (Benassy (1984), p. 26).

Etant donné le rôle primordial qu’ont joué les modèles à prix fixes dans l’étude des équilibres non walrasiens, on va examiner attentivement la formalisation de Benassy. Celui ci se place d’emblée dans une économie d’échange comportant m agents munis d’une fonction objective d’utilité.

Structure du modèle et formation des prix

Le choix du vecteur prix fixé une fois pour toute est de la responsabilité d’un agent i : « Nous supposerons donc dans ce qui suit que les biens sont différenciés non seulement par leurs caractéristiques physiques, mais éventuellement aussi par l’agent qui en fixe les prix, de sorte que les prix d’un bien sera fixé par un seul agent. » (p. 21).

Les autres individus ont un comportement price taker :

« C’est au niveau de la formation des contraintes anticipées que l’agent i diffère des autres agents qui ne contrôlent pas les prix. En effet les autres agents prennent les prix et les contraintes anticipées comme des données paramétriques qu’ils ne peuvent influencer. » (p. 21).

Notons qu’à la différence du commissaire priseur walrasien l’agent i est muni d’une fonction d’utilité semblable à celle des autres agents, qu’il cherche à maximiser.

Le prix annoncé n’égalise généralement pas l’offre et la demande. Par conséquent, certains agents ne pourront acquérir ou vendre la quantité voulue. Ils seront alors rationnés.

Schémas de rationnement et règle du coté court

Dans ce contexte, l’équilibre engendré dépend étroitement de la règle de partage des rations instaurées par le modélisateur. En réalité, il existe au moins autant d’équilibres possibles que de schémas de rationnement.

Pour sa part Benassy instaure la règle du « coté court » qu’il décrit en ces termes :

« Le coté « court » d’un marché est celui ou le volume global des transactions désirées est le plus faible. C’est donc le coté de la demande s’il y a excès d’offre, le coté de l’offre s’il y a excès de demande. L’autre coté est appelé le coté « long » » (p. 5).

En d’autres termes, seuls les agents du coté court réalisent leurs offres ou demandes.

Sur le plan mathématique, le schéma de rationnement que subit un agent i sur un marché h est matérialisé par une fonction Fih

( )

⋅ qui possède pour argument les demandes nettes effectives des m individus.

En ce qui nous concerne, il est important de remarquer que cette fonction ne décrit en aucun cas un processus mais traduit simplement « l’organisation des marchés ». Il n’y a pas d’idée d’ajustement sous-jacente.

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La nature du processus

La notion de demande effective

Une conséquence directe des rationnements est l’existence d’effets de report. Ces derniers expriment le fait qu’un agent contraint sur un marché modifie ses offres ou demandes sur d’autres marchés. Les agents qui ont conscience que les prix annoncés ne sont pas d’équilibre tentent d’anticiper les contraintes qu’ils subiront. Par ce biais, ils déterminent leurs demandes effectives qui résultent de « la maximisation de la fonction d’utilité sous la contrainte de budget et en tenant compte des contraintes perçues sur les autres marchés. » (p. 14).

La perception des contraintes à l’origine du processus

Dans la version proposée par Benassy, les contraintes perçues par un individu sur les offres ou demandes sont représentées par une fonction G (⋅), qui se déduit de F (⋅), et qui dépend des demandes nettes effectives des autres agents. Evidemment se pose le problème de la capacité de ce dernier à les connaître. En fait, il doit les anticiper. Là manière dont se font les anticipations n’est pas précisée dans le modèle. Cela dépend des croyances de chacun : élément particulièrement délicat à formaliser.

Enfin, notons l’importance de la fonction F (⋅), c’est à dire la règle de partage des rations dans la manière dont les individus vont considérer les contraintes.

La teneur du processus

Au départ, chaque agent doit donc déterminer sa demande nette effective en tenant compte des contraintes qu’il pense subir, lesquelles dérivent de l’idée qu’il se fait des demandes nettes effectives des autres agents.

L’étape suivante consiste à l’annoncer au centralisateur. Celui- ci, après les avoir regroupé, renvoie aux agents la valeur des demandes nettes effectives désormais observées. S’en suivra une nouvelle évaluation des contraintes et par conséquent une nouvelle demande nette effective. La démarche est ainsi décrite par Benassy :

« Intuitivement on peut considérer un K- équilibre à prix fixe comme le point fixe d’un tâtonnement en quantité où les agents annonceraient des demandes effectives sur la base de contraintes perçues. A partir de ces demandes effectives le « marché » renverrait aux agents de nouvelles contraintes perçues sur la base desquelles ils annonceraient de nouvelles demandes effectives, et ainsi de suite…L’équilibre à prix fixe serait atteint pour des demandes effectives et contraintes perçues se reproduisant à l’identique. Les transactions pourraient alors avoir lieu. » (p. 36).

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Equilibre et convergence

L’équilibre

De ce point de vue, l’équilibre s’appréhende intuitivement comme une situation ou « rien ne bouge ». En effet, lorsque les nouvelles demandes nettes effectives qu’adresse le centralisateur aux agents ne modifie pas leurs perceptions des contraintes et donc leurs demandes nettes effectives : le circuit se reproduit bien à l’identique. On retrouve l’idée de point fixe sur laquelle va s’appuyer la démonstration d’existence.

Plus formellement un K- équilibre à prix fixes, associé à un système de prix P et à un schéma

de rationnement F, est un ensemble de vecteurs e , e , d , sɶii i i tels que : a) eɶi = ξɶi(P, d , s )i i

b) e∗i =F(e , E )ɶi ɶi

c) di =G (E )di ɶi et si =G (E )si ɶi

e~ireprésente la demande nette effective tandis que les fonctions G et di G se déduisent de si F par l’intermédiaire de la définition suivante :

{

}

d ih ih ih ih ih ih ih G (E )ɶ =max eɶ F (e , E )ɶ ɶ =eɶ

{

}

s ih ih ih ih ih ih ih G (E )ɶ = −min eɶ F (e , E )ɶ ɶ =eɶ

THEOREME D’EXISTENCE D’UN K- EQUILIBRE

Si les hypothèses du théorème du point fixe de Brouwer sont vérifiées et si, de surcroît, les schémas de rationnements demeurent continus, alors il existe au moins un K- équilibre.

Réflexion sur la nature de l’ajustement

On affirme souvent, en s’appuyant sur ce modèle, qu’il suffit d’instaurer une parfaite flexibilité des prix pour éviter l’apparition de situations de K- équilibre. C’est d’ailleurs l’opinion de Benassy (1984) :

« Même si l’égalité offre-demande n’est pas assurée institutionnellement, on pourrait accepter l’hypothèse d’équilibre comme une bonne approximation du fonctionnement de certains marchés. Tel est le cas des marchés “ très compétitifs ”, comme les marchés de certaines denrées agricoles ou matières premières, où les prix sont très flexibles et répondent rapidement à des modifications de l’offre où de la demande. » (p. 3).

On va à présent montrer qu’il n’en n’est rien pour peu qu’on modifie légèrement les conjectures de certains agents. Pour cela, on va reprendre la démarche de Hahn (1980) que l’on va toutefois adapter à notre propos.

Définition

Un K- équilibre à prix flexibles associé à un système de prix P et à un schéma de rationnement F , ii =1,..., m, est un ensemble de vecteurs e , e , d , sɶi i i i tel que :

(i)

{

e , e , d , s / ii ii i =1,..., m

}

forment un K- équilibre pour le vecteur prix P* (ii) 0≤P∗ ≤ ∞

Hypothèse sur les conjectures

Jusqu’à maintenant on a supposé que tous les agents se complaisaient dans une attitude de preneur de prix. Or, une telle hypothèse paraît difficilement justifiable en ce qui

concerne les agents rationnés. Désormais ces derniers vont tenter d’influencer l’évolution des prix par une manipulation du schéma de rationnement. Celle- ci s’effectuant selon les modalités suivantes :

- Si l’agent i est un demandeur contraint, il annoncera au centralisateur une demande

supérieure à celle résultant de son programme de maximisation, c'est-à-dire :dai >di, afin de favoriser une hausse des prix et une augmentation de l’offre globale.

- Si l’agent i est un offreur contraint, il annoncera au centralisateur une offre supérieure à

celle résultante de son programme de maximisation, c’est à dire :Sai >Si, dans le but d’obtenir une baisse des prix et par conséquent une augmentation de la demande.

Pourtant si l’agent i est capable d’anticiper les contraintes en quantités qu’il subira lorsque les prix affichés ne sont pas d’équilibre, on se demande pourquoi il s’entête à crier un vecteur prix qui n’égalise pas l’offre et la demande. Il n’y a ici aucun motif pour que l’ensemble des demandes nettes effectives soit nul.

Conclusion

Comme on l’a observé, les modèles d’équilibres à prix fixes, dans la mesure où ils s’inscrivent dans la perspective du modèle d’équilibre général, n’échappent pas à la nécessité d’une centralisation importante. A cela s’ajoute le fait que leur complexité les rend délicats à manipuler. C’est la raison pour laquelle une part importante des économistes ont privilégié une autre démarche.

SECTION III