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PARTIE 1 : CADRE THEORIQUE

2. LE POSITIONNEMENT DANS LA LITTERATURE CONCERNANT LE

2.1. Une analyse basée sur trois niveaux hiérarchisés de gestion

2.1.1. Le niveau stratégique

Les études classées dans le niveau stratégique focalisent leur attention sur les raisons pour lesquelles l’approche Supply Chain Management s’est développée ou doit être adoptée, selon les deux perspectives, analytique dans le premier cas, normative dans le deuxième. En particulier, ces études expriment un consensus en ce qui concerne l'importance de l'intégration de fournisseurs, industriels et clients afin d’atteindre un avantage concurrentiel plus élevé, à la fois de chaque opérateur et de la SC entière25.

Suivant Porter (1985, op. cit.) l’avantage concurrentiel, dérivant essentiellement de la valeur créée par une firme, vise à établir une position profitable et durable contre les forces concurrentielles qui influencent la compétition industrielle. Ainsi, il est proposé que l’implémentation d’une gestion intégrée de la chaîne entière rende la création de la valeur et de la satisfaction du consommateur plus simple. Cette création de valeur amène à un avantage compétitif plus élevé et stable (ainsi que une profitabilité majeure) aussi bien pour chaque acteur que pour toute la chaîne (LaLonde, 1997).

Certains auteurs (Clark, 1991; Ellram, 1991) ont donné un sens différent à la notion de gestion intégrée de la chaîne ; cette dernière est associée à l’intégration verticale de la firme, qui décide de garder la gestion de toutes ses fonctions à l’intérieur. Ainsi Ellram dit que l’intégration verticale (gestion interne) peut être considérée comme une alternative au Supply Chain Management (gestion externalisée), dans la mesure où elle permet à la firme de gérer et de contrôler l’efficacité de la chaîne.

Cependant, on pourrait argumenter que l'approche Supply Chain Management a les mêmes possibilités d’application dans de grandes firmes à sites multiples et dans de petites organisations à site unique.

25 De nombreuses contributions portent sur l’analyse des avantages dérivant de l’adoption du Supply Chain

Management. Parmi les autres, on évoque les suivantes, qui insistent sur les effets d’une gestion intégrée et synchronisée des flux physiques et informationnels internes à la firme et entre les firmes : Reck & Long, 1988 ; Leender & Blenkhorn, 1988 ; Bowersox et alii, 1989 ; Burt & Doyle, 1992 ; Clinton & Closs, 1997.

Une deuxième remarque est qu'il n'y a aucun rapport nécessaire entre propriété et contrôle (Hoakansson & Snehota, 1995). En effet le niveau d'intégration entre entreprises indépendantes peut être plus élevé que dans un rapport formel de propriété et, inversement, les contrats entre entreprises autonomes peuvent contenir des éléments très semblables à des mécanismes internes hiérarchiques de contrôle. Ce sont précisément le contrôle et la maîtrise de la chaîne qui comptent pour l’atteinte d’un modèle de gestion intégrée et non pas la structure juridique des relations.

Ainsi, nous considérons que l’application du Supply Chain Management est adaptée aussi bien aux chaînes multi acteur qu’aux chaînes verticalement intégrées, les deux chaînes nécessitant d’être gérées.

Malgré cela, l’extension d’un comportement d’intégration de l’intérieur vers l’extérieur de la firme a été définie par Bowersox et Closs (1996) comme « Supply Chain Management ». Ceci implique que la coordination dans la supply chain s’améliore si toutes les étapes de la chaîne conçoivent des actions en commun ou si elles considèrent les effets d’une action individuelle sur l’ensemble de la chaîne26. Par contre, un manque de coordination se manifeste lorsqu’une étape (surtout si de propriété différente des autres), qui peut avoir des objectifs divergents par rapport aux autres, vise a maximiser son propre profit, même si les actions poursuivies déterminent une baisse des profits globaux de la chaîne.

Pour illustrer ce problème des objectifs contradictoires existant entre différents maillons de la chaîne de l’offre, prenons le cas d’un transporteur et d’un producteur. Le transporteur se soucie avant tout du taux de remplissage de ses camions. Plus les quantités transportées sont importantes, plus le coût de transport unitaire sera réduit et plus le prix payé par le producteur sera faible. S’il veut payer moins cher le transport, le producteur va produire et stocker des quantités importantes avant de les expédier. Mais ses coûts de stockage (coûts du capital immobilisé et coûts de gestion des stocks) vont alors augmenter. De même, le service client du producteur pourrait s’avérer moins bon :

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Si le SCM est conçu d’une façon unique, intégrée, en visualisant une série d’opérations liées en séquence, quelques unes gérées par la firme industrielle et d’autres par des partenaires externes, il est nécessaire de souligner que la séquence même des opérations est changeant. Ceci est d’autant plus vrai lorsque les acteurs de la supply chain sont des entités autonomes, avec leur propre environnement technologique, compétitif, cultural, etc. Ainsi, l’appartenance à la même chaîne, qui est en compétition avec d’autres chaînes, n’empêche pas que des relations conflictuelles puissent exister parmi les acteurs de la même supply chain. Les opérations sont interdépendantes mais aussi vulnérables aux actions et aux

le transport à intervalles de temps éloignés de quantités importantes entraîne une réactivité plus faible à l’évolution de la demande. Si producteur et transporteur arrivent à se coordonner et à partager de façon continue l’information concernant leurs contraintes respectives, ils peuvent s’organiser pour atteindre un objectif global, par exemple de minimisation de leurs coûts globaux (transport, production et stockage, mauvaise image en termes de service au client).

Un élément qui complexifie la fixation d’objectifs communs pour une chaîne donnée est dû au fait qu’aujourd’hui les supply chain comprennent des centaines d’acteurs différents. Par exemple, Ford Motor Company a des milliers de fournisseurs, tels que Goodyear et Motorola qui, à leur tour, ont un nombre très élevé de fournisseurs. La circulation de l’information devient de ce fait très difficile. La distorsion de l’information est amplifiée aussi par la variété croissante des produits (références, modèles, options, etc.). C’est notamment en ce domaine que l’on repère un des défis les plus cruciaux du Supply Chain Management, c’est à dire la poursuite de la coordination malgré le nombre élevé d’acteurs et de produits.

Le fait que le manque de coordination se lie à une circulation imparfaite de l’information trouve confirmation dans des analyses empiriques effectuées par les grandes entreprises telles que Procter & Gamble, Hewlett Packard et Barilla (Dornier & Fender, 2001). Ces producteurs ont expérimenté le « bullwhip » ou « Forrester » effect (Forrester, 1961), c’est-à-dire la fluctuation croissante des ordres à partir des ventes (de l’aval de la chaîne), en remontant chez les distributeurs, jusqu’aux producteurs et leurs fournisseurs (vers l’amont de la chaîne).

Le bullwhip effect distord les informations concernant la demande à l’intérieur d’une chaîne avec le résultat que les acteurs de cette même chaîne ont des estimations différentes de la demande. Ce fait entraîne deux conséquences possibles: soit une augmentation des stocks de sécurité soit une rupture de stock. Ainsi, la rentabilité d’une chaîne est réduite car l’assurance d’un certain niveau de disponibilité du produit (niveau de réactivité de la chaîne) devient plus chère. L’approche Supply Chain Management vise en premier lieu à la réduction de ce gaspillage tout en essayant d’assurer au client le niveau de service souhaité.

comportements des membres de la chaîne, dans la poursuite de l’optimisation de leur activité.

Les contributions appartenant au niveau d’analyse stratégique adoptent souvent le mot « philosophie ». Ainsi le Supply Chain Management27 a été défini comme une philosophie d’intégration pour gérer les flux totaux d’un canal de distribution à partir du fournisseur jusqu’au consommateur final (Cooper, 1997).

Quelques auteurs (Mentzer et alii, 2001) parlent plutôt d'Orientation SC28. Suivant une perspective de système global, le SCM peut être mis en application avec succès quand au moins trois membres d'une supply chain partagent l’ainsi dite Orientation SC, qui existe quand les firmes partagent une vue commune sur les facteurs augmentant ou empêchant une approche Supply Chain Management.

Suivant la littérature, le Supply Chain Management en tant que philosophie et/ou orientation de gestion aurait les caractéristiques suivantes :

• une approche systémique des supply chain pour la gestion des flux totaux de marchandises du fournisseur de matières premières jusqu’au consommateur final et pour la gestion des flux d’information remontant la chaîne de l’aval vers l’amont;

• une orientation stratégique vers la coopération parmi les acteurs afin de synchroniser et faire converger les capacités et les compétences internes à chaque firme et transversales aux firmes vers un ensemble unique ;

• une focalisation sur le consommateur, pour la création de sources uniques et identifiées de valeur, entraînant une satisfaction du consommateur plus élevée.

En résumé, on retiendra que les traits marquants du Supply Chain Management, en tant que philosophie, approche ou orientation de gestion sont à repérer dans la vision systémique de la chaîne à partir de l’aval vers l’amont où la coordination parmi les acteurs garantit l’atteinte des résultats de baisse des coûts et d’augmentation du niveau de service au consommateur/client final.

27 “SCM is an integrative philosophy to manage the total flow of a distribution channel from supplier to the ultimate consumer”.

28 L’orientation supply chain a été définie comme la reconnaissance par une entreprise des implications systémiques et stratégiques des activités impliquées dans la gestion intégrée des différents flux dans la supply chain.