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PARTIE 1 : CADRE THEORIQUE

2. LE POSITIONNEMENT DANS LA LITTERATURE CONCERNANT LE

3.3. Le marketing relationnel

Le Marketing relationnel est un processus continu d’engagement dans des activités et des programmes de coopération et de collaboration45 avec les clients (directs et finaux) pour la création de la valeur économique (mutuelle) à des coûts réduits (Sheth, Parvatiyar, 2000). Cette définition se réfère en général à la firme focale d’une chaîne, un industriel ou un distributeur. Ainsi, nous pourrons pencher pour la non applicabilité de la démarche à l’étude d’une relation suivant une perspective PSL.

Cependant, Morgan & Hunt (1994) donnent une définition plus large du Marketing relationnel: « Le Marketing relationnel se réfère à toutes les activités du marketing orientées vers la mise en place, le développement et le maintien d’échanges relationnels de succès ». Cette définition, malgré son ampleur, ne mentionne pas le client et insiste sur l’importance du succès des échanges relationnels avec les parties prenantes (stakeholders) en général, et notamment avec les fournisseurs d’une firme.

L’interprétation du Marketing relationnel dans ce sens plus large identifie un éventail de relations plus ample que l’interface avec le client ; l’échange relationnel de succès peut ainsi être appréhendé en tant qu’activité créatrice de valeur. La compréhension de la perception des dynamiques relationnelles de la part du prestataire pourrait aider ce dernier à bien entretenir ses relations avec les clients clés et le client à pouvoir agir sur ses relations en amont afin d’améliorer la satisfaction des clients finaux.

En réponse aux critiques portant sur le caractère vague de cette définition du Marketing relationnel, on pourrait argumenter, avec Payne (2000), que le Marketing en tant que concept et activité ne s’applique plus seulement au département Marketing, mais s’articule en une démarche transversale aux différentes fonctions internes et aux processus intra-firmes, en ayant le client final comme centre d’intérêt principal. Les attentes du client sont aussi au cœur du SCM (Lambert, 2001). On pourrait affirmer que le marketing relationnel et le SCM sont deux concepts très proches, appliqués souvent à des contextes différents. Mattsson (1997) soutient implicitement la définition large du MR, en interprétant la version limitée comme une variante du marketing mix.

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Par rapport à la coopération, la collaboration identifie une ampleur de la relation plus élevée entre deux firmes (Golicic, Foggin & Mentzer, 2003)

Mudambi & McDowell Mudambi (1995) ont déjà mobilisé le Marketing relationnel dans le cadre d’une recherche sur les relations clients fournisseurs. Grönroos (2000) a utilisé le terme d’« achat relationnel » (relationship buying) s’intéressant à une démarche relationnelle dans les approvisionnements. Le Marketing relationnel et les achats relationnels peuvent être appréhendés comme deux faces de la même démarche, dans le sens où un fournisseur (nous sommes dans une perspective fournisseur de service) ne peut pas s’engager avec succès dans une relation avec un client particulier sans que ce dernier ait préalablement investi dans la même démarche. Ainsi, pour pouvoir analyser les dynamiques relationnelles, suivant n’importe quelle perspective - « client » ou « fournisseur »- le Marketing relationnel est utile car il met l’accent sur la relation et non pas sur la transaction. En conséquence, ce n’est pas difficile d’être d’accord avec Håkansson (1982) lorsqu’il conteste la séparation du marketing industriel et des approvisionnements.

Le Marketing relationnel trouve ses racines dans le changement du cœur de l’analyse de la compétition et du conflit vers la coopération mutuelle. C’est à partir des années 1980 que les experts de Marketing ont commencé à considérer la satisfaction du client au-delà des aspects transactionnels du Marketing, et à élargir les domaines couverts jusqu’aux aspects relationnels (Sheth, Parvatiyar, 2000).

Sheth, Parvatiyar (2000) argumentent que le thème central de toutes les perspectives et les définitions liées au Marketing relationnel est la relation coopérative et de collaboration (plutôt que les relations standards de marché) entre une firme et ses clients et/ou les autres acteurs du marché. En d’autres termes, ces relations sont fondées sur la coopération et l’avantage mutuel. Nous retrouvons une convergence autour du concept du Supply Chain Management (Relationship management, suivant Christopher et Ryals, 1999). Jusqu’à aujourd’hui ce concept a été mobilisé dans la perspective des clients (acheteurs) ; cependant puisque le Supply Chain Management concerne l’intégration entre les différentes interfaces de la chaîne qui se perçoivent comme clients fournisseurs d’un ensemble unique, elle est également utile pour l’analyse des relations suivant une perspective fournisseur (PSL).

Le Marketing relationnel joue un rôle important dans la phase de mise en place de la relation (sélection des partenaires). L’attention porte sur l’échange relationnel et non pas sur la transaction. Dans un échange qui implique une relation avec une certaine durée, le choix des partenaires est crucial pour le partage des activités. Les facteurs clés pour le

choix des partenaires ont été identifiés : le risque (lié à l’incertitude) et la valeur ajoutée offerte par le fournisseur au produit/service crée par le client. Wilson (1995) avance que la confiance envers le fournisseur et donc sa fiabilité font partie des critères du choix dans la mesure où le fournisseur potentiel n’a jamais été testé. En revanche, la recherche de Doney & Cannon (1997) indique que la confiance ne joue pas le rôle principal dans la sélection des fournisseurs. Ils reconnaissent l’importance de l’évaluation de la confiance et des autres facteurs intangibles ; cependant, le choix s’appuierait sur des facteurs « hard », tels que les caractéristiques du produit/service offert en termes de prix, garantie de livraison, de respect des délais, etc.

Les facteurs du choix des fournisseurs renvoient au thème de la segmentation de ces derniers. Anderson & Narus (1991) suggèrent que les produits et les services de base devraient être échangés suivant le modèle transactionnel, contrairement aux produits/services plus sophistiqués, où un échange relationnel serait souhaitable.

Dyer et alii (1998) suggèrent que les fournisseurs devraient être segmentés en fournisseurs d’inputs stratégiques (liés aux compétences distinctives de la firme) et fournisseurs d’inputs non stratégiques. Cet aspect a été depuis longtemps reconnu dans la littérature du Marketing en ce qui concerne la segmentation des clients et l’adoption des stratégies de marketing les plus appropriées. Cette double approche de gestion transactionnelle ou relationnelle entre partenaires met en évidence les risques liés à la nature changeante des positions des acteurs tout au long de la chaîne et les enjeux liés à la gestion de la base des fournisseurs. Eviter un mélange des deux modèles ou leur utilisation inappropriée demeure une question ouverte. Au-delà des difficultés de la mise en œuvre de cette segmentation, il y a accord sur l’utilité de cette double approche de gestion des relations (Mitchell, Singh, 1996). Ce critère est valable aussi pour les firmes de prestation de services : une segmentation des clients est perçue de plus en plus comme une opération nécessaire pour une gestion différenciée des relations.

En conclusion, dans la littérature (Barnes, 2001, Hunt & Morgan, 1994, Wilson, 1995), parmi les éléments fondateurs d’une relation clients fournisseur inspirée des principes du MR, on retrouve la coopération, la confiance, l’engagement, la communication et le partage des gains et des risques.

Dans le tableau ci-dessous nous répertorions certaines des définitions et des contributions liées à ces éléments.

Tableau 3: Le Marketing relationnel et les éléments fondateurs d’une relation client- fournisseur

Elément Contributions, définitions inspirées du Marketing relationnel

Confiance Wilson suggère que la confiance est un élément fondamental pour la création d’une relation. « Trust is reliance on and confidence in one’s partner » (Mayer, Davis & Schoorman 1995 ; Shaw 1997). Dans la littérature portant sur les relations qui impliquent un prestataire logistique et un client, ce concept de confiance a été également mobilisé (Morgan & Hunt 1994 ; Wilson 1995 ; Minihan 1996).

Engagement Wilson considère l’engagement comme la variable dépendante la plus utilisée dans les études concernant les relations client- fournisseur.

Dwyer, Schurr & Oh (1987) définissent l’engagement « implicit or explicit pledge of relational continuity between exchange partners ». L’un des facteurs clés de succès d’une alliance logistique est ainsi l’engagement de chacun des partenaires.

Morgan & Hunt observent que la confiance et l’engagement sont importants parce qu’ils encouragent les entreprises à :

1) agir pour préserver l’investissement relationnel en coopérant avec les acteurs impliqués dans la relation ;

2) résister aux alternatives occasionnelles séduisantes en faveur des gains attendus à long terme du fait d’une relation de longue durée ;

3) interpréter des actions risquées comme prudentes du fait de la conviction que les partenaires n’agiront pas de façon opportuniste.

Concernant l’externalisation de la logistique, l’engagement dans la relation a été aussi établi comme un facteur clef pour la construction d’une alliance logistique solide (Rutner & Gibson, 1998).

Investissements Les actifs spécifiques, en empruntant la définition de Williamson, ont été reconnus comme des facteurs qui entraînent une certaine hésitation à désinvestir. Ceci est valable aussi dans une alliance client-prestataire logistique. A titre d’exemple : la formation du personnel du prestataire pour la gestion d’entrepôt, la création d’un site de distribution dédié, la mise en route d’une connexion informatique des systèmes pour le contrôle des stocks, etc. Goolsby (2001) présente le cas de Géotronics et UPS Logistics Group.

Communication et échange

d’information

La communication peut être définie comme le partage formel aussi bien qu'informel d'information significative et utile entre entreprises. (Anderson et Narus, 1991).

La communication favorise la confiance en aidant à la résolution des discussions et à l'alignement des perceptions et des attentes (Moorman, Deshpande et Zaltman, 1993).

Plus les modes de communication sont profonds et larges plus le « partenariat » est fort (Lambert, Emmelhainz et Gardner , 1996). Coopération Clients et fournisseurs dans une alliance stratégique mettent en

place des efforts communs pour résoudre les problèmes rencontrés pour le développement de réponses mutuelles aux changements du marché (Razzaque et Sheng, 1998).

Partage des gains et

des risques La focalisation croissante sur la réciprocité des relations clients fournisseurs entraîne l’utilisation du partage des coûts [et des risques] comme une des approches les plus répandues pour la gestion des relations inter organisationnelles (Langley, Allen et Tyndall, 2001).

Malgré ses nombreuses contributions, le Marketing relationnel n’est pas perçu comme une théorie déjà développée (Mattsson, 1997) ; il est encore difficile d’unifier ces différentes approches en une théorie générale. Reid & Plank (2000) avancent : « en général, ce que nous voulons exprimer par le terme Marketing relationnel est quelque chose de mixte ». Cette affirmation est un indice du stade initial de développement de la discipline.

Dans sa définition la plus ample, le Marketing relationnel peut être appliqué aux relations impliquant une gouvernance bilatérale. L’attention portée sur la relation bilatérale (dyadique) se révèle une unité d’analyse importante pour le niveau tactique de gestion de la relation, qui entre en jeu une fois que la relation a été déjà mise en place au niveau stratégique. Cependant, l’absence des influences des relations externes nous permet d’affirmer que la perspective tactique est seulement partiellement bien illustrée par cette approche.

Malgré le fait que l’attention du Marketing relationnel porte sur la relation client- fournisseur, cette approche n’oublie pas les transactions individuelles, qui forment le cœur de toute relation acheteur vendeur. En fait, le sujet principal du marketing industriel est l’analyse de la transaction dans le contexte de la relation. En conséquence, « même si certains auteurs de la TCT et du MR ne partagent pas cet avis, les deux écoles de pensée ne sont pas en opposition l’une par rapport à l’autre.

Une synthèse de nombreux aspects des deux approches supporte le développement de relations étroites fournisseur client en tant que stratégie rationnelle ». (Mudambi & McDowell Mudambi 1995).

Enfin, l’approche du Marketing relationnel, avec sa forme bilatérale, présente la même limite que la TCT : l’absence de considération de la « nature encastrée » des relations individuelles (Mattsson, 1997). Ces dernières ne peuvent s’expliquer qu’en tenant compte de l’ensemble des relations auquel elles appartiennent.