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Niveau de diplôme de la mère

Conciliation entre vie familiale et vie professionnelle : l’effet du congé parental

6.4 L’impact de la fécondité sur l’activité des mères

6.4.5 Niveau de diplôme de la mère

Une autre façon de vérifier que l’effet négatif du troisième enfant sur l’activité des mères provient effectivement des incitations induites par l’Allocation parentale d’éducation, est d’étudier l’évolution de cet effet suivant que le deuxième enfant est né avant ou après juillet 1994 sur des sous-populations. L’Allocation parentale d’éducation est particulièrement incitative pour certaines catégories de femmes. Par exemple, Afsa (1998) met en évidence le fait que les bénéficiaires de l’Allocation parentale d’éducation sont principalement des femmes faiblement diplômées. Par conséquent, on devrait trouver que si l’Allocation parentale d’éducation est à l’origine de l’effet négatif du troisième enfant sur l’activité des mères, sur cette sous-population, cet effet est significativement négatif pour les mères ayant eu leur deuxième enfant avant 1994, alors qu’il est non significatif pour les mères ayant eu leur deuxième enfant après 1994. Pour les femmes plus diplômées, qui bénéficient moins de l’Allocation parentale d’éducation, l’effet d’avoir plus de deux enfants sur leur activité devrait être plus faible quelle que soit la date de naissance de leur deuxième enfant.

Les résultats selon le niveau de diplôme des mères sont présentés dans le tableau 6.7. Pour les deux sous-échantillons, les estimations de l’effet de la fécondité sur l’offre de travail des mères par les moindres carrés ordinaires décroissent lorsque les mères ont leur second enfant après la réforme. Pour les mères moins diplômées, avoir un troisième enfant réduit la probabilité de participation au marché du travail de 35 points si le second enfant est né avant la réforme, et de 21 points seulement si le second enfant est né après. Ces effets sont significatifs au seuil de 1%. Pour les mères plus diplômées, l’effet d’une troisième naissance est significatif au seuil de 1% si le second enfant est né avant la réforme, et non significatif s’il est né après. Ces résultats suggèrent une fois encore que lorsque l’élasticité entre l’activité des mères et le nombre d’enfants est expurgé de l’effet de l’Allocation parentale d’éducation, elle est plus faible, voire non significative.

Les estimations par variable instrumentale donnent des estimations non biaisées de l’effet causal de la fécondité sur l’offre de travail des mères. Avoir des aînés de même sexe accroît seulement la probabilité d’avoir un troisième enfant des mères moins diplômées (tableau 6.4). Dans ce contexte, nous examinons si les estimations par variable instrumentale de l’effet d’avoir plus de deux enfants sur la participation des mères au marché du travail dépendent de leur niveau de diplôme. Les résultats du tableau 6.7 indiquent que c’est le cas. Sur le sous-

échantillon des mères plus diplômées, l’effet de la fécondité sur l’offre de travail des mères est non significatif quelles que soient la date de naissance du second enfant. En revanche, sur le sous-échantillon des mères moins diplômées, certains coefficients sont négatifs et significatifs. Au total l’effet de la fécondité sur l’offre de travail des mères estimé en utilisant ‘même sexe’ comme instrument est significatif seulement dans les cas où le sexe des aînés affecte la probabilité d’avoir un troisième enfant, c'est-à-dire dans le cas des mères moins diplômées78. Ces résultats sont cohérents avec l’hypothèse selon laquelle le sexe des deux aînés affecte l’offre de travail des mères seulement parce qu’il affecte leur fécondité.

Tableau 6.7 - Effet d’avoir plus de deux enfants sur la participation des mères au marché du travail en fonction de leur diplôme

MCO DMC

Même sexe MCO

DMC Même sexe -0,210*** (0,030) -0,722 (0,671) -0,061 (0,059) 1,527 (2,025) -0,350*** (0,010) -0,788*** (0,278) -0,286*** (0,021) 1,078 (1,001) 18744 18744 4663 4663 N Technique d'estimation: 2ème enfant né >= 1994 2ème enfant né < 1994

Sous échantillon: Mères moins diplômées Mère plus diplômées Variable dépendante: Participation au marché du travail

Degré de significativité : * : 10% ** : 5% *** : 1%

CHAMP :femmes en couple âgées de 21 à 35 ans ayant au moins deux enfants et dont au moins un des trois premiers enfants a moins de trois ans.

NOTE : les écarts-types sont indiqués entre parenthèses et corrigés des corrélations spatiales et sérielles potentielles. Les autres explicatives sont les indicateurs d'âge, d'âge à la 1ère naissance, la différence d’âge entre les deux aînés, le sexe du premier et du deuxième enfant, le statut d’immigration, le diplôme et des effets fixes annuels. L'effet principal de l'Allocation parentale d’éducation de rang deux est aussi inclus dans l'équation. Les mères moins diplômées sont les mères ayant au maximum le baccalauréat, et les mères plus diplômées ont un diplôme supérieur au baccalauréat.

SOURCE :enquêtes Emploi 1990-1998, Insee.

Les résultats indiquent que parmi les mères ayant au maximum le baccalauréat, avoir plus de deux enfants réduit significativement la participation au marché du travail pour celles qui n’ont pas pu bénéficier de l’Allocation parentale d’éducation pour leur deuxième enfant alors que l’effet est non significatif pour celles qui ont pu en bénéficier. Lorsque le deuxième enfant est né avant juillet 1994, l’effet sur les mères faiblement diplômées est non significativement plus fort que sur l’échantillon complet (-0,788 contre -0,518, alors que les écarts-types sont proches). Conformément à l’intuition, l’effet d’avoir plus de deux enfants sur l’offre de travail

78 Dans la mesure où le sexe des aînés n’affecte pas la probabilité d’avoir un troisième enfant des mères plus

diplômées, les résultats reportés au tableau 6.8 ne peuvent s’interpréter comme indiquant qu’avoir plus de deux enfants n’affecte pas l’offre de travail des mères plus diplômées.

des mères est significativement négatif précisément quand seules les mères de plus de deux enfants ont des incitations spécifiques à quitter le marché du travail.

6.4.6 Variantes

Nous vérifions la cohérence de nos résultats avec un test de falsification sur les pères. Dans la mesure où le poids de la conciliation repose principalement sur les femmes, avoir plus de deux enfants ne devrait pas réduire l’offre de travail des pères, et ce quelle que soit la date de naissance de leur deuxième enfant. Ceci est confirmé par le tableau 6.8 : que leur second enfant soit né avant ou après juillet 1994, les estimations par variable instrumentale montrent que l’effet d’avoir plus de deux enfants sur l’offre de travail des pères n’est jamais significativement négatif.

Tableau 6.8 – Effet d’avoir plus de deux enfants sur l'offre de travail des pères

MCO DMC

Même sexe MCO

DMC Même sexe -0,023* (0,013) 0,168 (0,182) 0,76 (0,64) 3,86 (12,09) -0,002 (0,02) 0,131* (0,071) -0,42** (0,19) -0,82 (4,50) 18522 18522 14480 14480

Variable dépendante: Participation au marché

du travail Heures / semaine

Technique d'estimation: 2ème enfant né >= 1994

2ème enfant né < 1994 N

Degré de significativité : * : 10% ** : 5% *** : 1%

CHAMP :hommes en couple âgées de 21 à 35 ans ayant au moins deux enfants et dont au moins un des trois premiers enfants a moins de trois ans.

NOTE : les écarts-types sont indiqués entre parenthèses et corrigés des corrélations spatiales et sérielles potentielles. Les autres explicatives sont les indicateurs d'âge, d'âge à la 1ère naissance, la différence d’âge entre les deux aînés, le sexe du premier et du deuxième enfant, le statut d’immigration, le diplôme et des effets fixes annuels. L'effet principal de l'Allocation parentale d’éducation de rang deux est aussi inclus dans l'équation. SOURCE :enquêtes Emploi 1990-1998, Insee.

Les résultats sont complémentaires de ceux obtenus pour les mères : lorsque le second enfant est né avant la réforme et qu’avoir plus de deux enfants a un impact négatif sur la participation des mères au marché du travail, l’effet sur la participation des pères au marché du travail est significativement positif. Une explication pourrait être qu’avant la réforme, avoir plus de deux enfants incite les mères à se retirer du marché du travail, et pour compenser la perte de revenu, les pères accroissent leur participation au marché du travail. Cette hypothèse est cohérente avec les résultats d’après réforme : lorsque avoir plus de deux enfants n’a plus d’effet sur la participation au marché du travail des mères, l’effet sur celle des

pères est également non significative. Alors que l’effet cumulé du nombre d’enfants et de l’Allocation parentale d’éducation a un effet positif sur l’activité des pères (avant la réforme), l’impact net de la fécondité est non significatif (après la réforme).

Les estimations par les moindres carrés ordinaires donnent aussi des résultats intéressants. Lorsque le deuxième enfant est né avant la réforme, les pères de plus de deux enfants ne se retirent pas du marché du travail, mais certains réduisent le nombre d’heures travaillées par semaine. Lorsque le deuxième enfant est né après la réforme, certains pères de plus de deux enfants se retirent du marché du travail. Il est possible que l’image du rôle de père se modifie, et qu’alors qu’il n’était pas envisageable pour les pères de suspendre leur activité professionnelle pour s’occuper de leurs enfants, c’est maintenant une possibilité pour certains des pères d’au moins trois enfants.

Lorsque nous considérons l’échantillon étendu des mères âgées de 21 à 40 ans, les effets de première étape, les résultats des estimations par les moindres carrés ordinaires, et les doubles moindres carrés sont confirmés et les degrés de significativité sont identiques. Par exemple, on trouve qu’avoir plus de deux enfants réduit significativement la participation des mères au marché du travail de (-0,515) points lorsque le deuxième enfant est né avant la réforme (-0,518 sur les 21-35), et que cet effet est non significatif s’il est né après (comme sur les 21-35).

Lorsqu’on étudie la probabilité d’emploi plutôt que la probabilité d’activité, les résultats diffèrent. Dans ce cas, on étudie le statut d’emploi des mères (en emploi d’un côté, au chômage ou inactive de l’autre) plutôt que leur choix d’activité. On trouve qu’avoir plus de deux enfants n’a pas d’effet significatif sur la probabilité d’emploi des mères, quelle que soit la date de naissance du second enfant79. L’éligibilité à l’Allocation parentale d’éducation n’altère pas l’effet causal de la fécondité sur l’emploi des mères. Le statut d’emploi relève non seulement du choix des mères de travailler, mais également de la décision des employeurs de les embaucher. C’est cela qui distingue le statut d’emploi du statut d’activité étudié précédemment. Les employeurs n’ont aucune raison de modifier leur comportement d’emploi après la réforme. Il est donc cohérent de trouver que l’effet de la fécondité sur l’emploi des mères ne varie pas après la réforme.

79 Dans le chapitre 4, le nombre d’enfants a un effet significativement négatif sur l’emploi des mères, mais plus

faible que l’effet sur le taux d’activité (tableau 4.7). La non significativité est sans doute due ici à la réduction de l’échantillon. Quoi qu’il en soit, ce qui est intéressant ici est que le degré de significativité est identique avant et après la réforme.

6.4.7 L’effet de la fécondité sur l’offre de travail des mères lorsque les