• Aucun résultat trouvé

Nature et régime de l’autorisation

L’insécurité juridique, une réalité

SECTION 1 : Une autorisation administrative fragile

B. Nature et régime de l’autorisation

Autorisation préalable de nature individuelle, le permis de construire, et plus largement l’autorisation d’urbanisme, a pour but de vérifier que le projet de construction envisagé respecte les règles d’urbanisme et de construction en vigueur. Il convient de présenter la nature de cette autorisation (1.) et son régime (2.).

1)

Nature de l’autorisation

Le permis de construire, comme le permis d’aménager, est une autorisation administrative de construire. Cette décision administrative prend la forme d’un arrêté

22

L’emprise au sol est la projection verticale du volume de la construction, tous débords et surplombs inclus (Code de l’urbanisme, art. R.*420-1, créé par décret no 2011-2054, 29 déc. 2011, art. 2). 23 Code de l’urbanisme, art. R.* 421-14.

municipal quand il est délivré par le maire ou d’un arrêté préfectoral quand il est délivré par le préfet. L’arrêté vaut pour l’opération visée par la demande de permis. Le permis de construire n’est définitif qu’en l’absence de recours dans le délai de deux mois à compter de son affichage sur le terrain ou de retrait dans le délai de trois mois après la date du permis, en effet, l’autorité compétente peut le retirer, si elle l’estime illégal. Introduire un recours contre un permis de construire ou attaquer un permis de construire signifie en réalité que l’arrêté municipal ou préfectoral est mis en cause par un tiers. Ce dernier a l’obligation parallèlement à l’introduction de son recours en justice d’informer dans les quinze jours le bénéficiaire.

Ainsi, le permis de construire est une autorisation administrative d’urbanisme qui émane soit du maire soit du préfet. Plus précisément, si la commune est dotée d’un plan local d’urbanisme (PLU) ou d’un document d’urbanisme équivalent, le maire est compétent pour délivrer le permis de construire au nom de la commune. À défaut de tels documents, la compétence revient aux autorités de l’État, le permis de construire est alors délivré par le préfet ou le maire au nom de l’État. En effet, aux termes du Code de l’urbanisme, l’autorité compétente pour délivrer le permis de construire est :

a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d’un plan local d’urbanisme ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu, ainsi que, lorsque le conseil municipal l’a décidé, dans les communes qui se sont dotées d’une carte communale ; lorsque le transfert de compétence à la commune est intervenu, ce transfert est définitif ;

b) Le préfet ou le maire au nom de l’État dans les autres communes. Lorsque la décision est prise par le préfet, celui-ci recueille l’avis du maire ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent25.

Et par exception, l’autorité administrative de l’État est également compétente pour se prononcer sur un projet portant sur :

a) Les travaux et constructions réalisés pour le compte d’États étrangers ou d’organisations internationales, de l’État, de ses établissements publics et concessionnaires ;

b) Les travaux et constructions de stockage d’énergie ;

c) Les travaux et constructions réalisés à l’intérieur des périmètres des opérations d’intérêt national mentionné à l’article L. 121-226 ;

d) Les opérations de logement situées dans les secteurs arrêtés par le préfet en application du deuxième alinéa de l’article L. 302-9-127 du Code de la construction et de l’habitation ;

e) Les logements construits par des sociétés de construction dans lesquelles l’État détient la majorité du capital ;

f) Les ouvrages, constructions ou installations mentionnés à l’article L. 2124- 18 du Code général de la propriété des personnes publiques28.

Nous insistons sur cette notion de compétence car elle est toujours critiquée par les tiers dans leur requête en annulation.

Que ce soit le maire ou le préfet, l’autorité compétente n’a pas un pouvoir discrétionnaire. En effet, elle doit, aux termes de l’article L. 422-4 alinéa 1er du Code de l’urbanisme, recueillir l’accord ou l’avis des autorités ou commissions compétentes pour statuer sur la demande de permis.

Dans le même sens, l’article L. 422-5 du Code de l’urbanisme prévoit qu’en l’absence de plan local d’urbanisme ou de documents d’urbanisme, le maire ou le président de l’établissement public de coopération intercommunale (EPCI) recueille l’avis conforme du préfet. Pour mémoire, les EPCI sont des regroupements de communes. Ils ont pour objet d’élaborer des projets communs de développement au sein d’un périmètre dit de solidarité. Les communautés urbaines, ou encore les communautés d’agglomération ou de communes sont des EPCI tout comme les syndicats de communes ou d’agglomération nouvelle (Sénart). Dans ce cadre, une commune peut déléguer à un EPCI, dont elle est membre, la compétence pour délivrer les permis de construire. En conséquence de quoi, les EPCI sont subordonnés à des règles homogènes.

26 C’est-à-dire touchant au renouvellement urbain, à la mixité sociale, à un urbanisme vert

responsable.

27 C’est-à-dire, en partie, l’obligation de mettre en chantier, pour chaque période triennale, au moins

30 % de logements locatifs sociaux rapportés au nombre total de logements commencés.

Le permis de construire est donc délivré par une autorité administrative qui a, au préalable, vérifié la conformité du projet aux règles d’urbanisme. Le permis délivré est donc, par principe, légal.

2)

Régime juridique

Par essence, le permis de construire est légal. En effet, aux termes de l’article L. 421- 6 alinéa 1er du Code de l’urbanisme, le permis de construire ne peut être accordé que si, d’une part, le projet projeté est conforme aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l’utilisation des sols, à l’implantation, à la destination, à la nature, à l’architecture, aux dimensions, à l’assainissement des constructions et à l’aménagement de leurs abords et si, d’autre part, ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d’utilité publique. La légalité s’apprécie également au regard des dispositions de la loi du 9 janvier 1985 sur la montagne et de la loi du 3 janvier 1986 sur le littoral ainsi qu’au regard des dispositions du règlement sanitaire départemental29. En d’autres termes, un permis de construire assure que le projet est conforme aux règles d’urbanisme. En revanche, il n’a pas vocation à assurer une quelconque conformité aux règles du droit civil ou du droit de la construction. Sa délivrance est, en outre, subordonnée au respect de l’application de la règle la plus sévère, ce qui doit, en principe, s’entendre comme un gage de sécurité juridique de l’autorisation ainsi délivrée.

Plus précisément, le permis de construire est accordé à l’issue d’un examen de sa régularité. Cet examen consiste pour l’autorité compétente à examiner la régularité de la construction projetée au regard des exigences légales et réglementaires en vigueur à la date de la délivrance du permis de construire, et non au jour de la demande de permis par le pétitionnaire. En outre, ce contrôle de légalité est appliqué strictement par l’autorité administrative. En effet, cette dernière fait application de la règle la plus sévère. En d’autres termes, en présence de deux règles et d’une discordance entre elles, c’est la règle la plus sévère que l’administration choisit d’appliquer.

Aussi lorsqu’un permis de construire est attaqué ce n’est bien souvent pas son illégalité au regard de la réglementation urbaine qui est en cause mais les troubles

29 POUJADE (B.) et BONICHOT (J.-C.), op. cit. Droit de l’urbanisme, Focus droit, Montchrestien,

anormaux du voisinage que sont la perte d’ensoleillement, la privation de vue ou encore la dépréciation du bien du fait de l’opération autorisée et qui relève, bien entendu, de la compétence du juge judiciaire.

Pourtant pour attaquer un permis de construire devant le juge administratif, le requérant doit critiquer un point d’illégalité au regard de la réglementation urbaine pour que son recours en excès de pouvoir soit recevable et pour que l’autorisation administrative délivrée ait une « chance » d’être annulée. Et ce, alors même que le vrai motif consisterait en une perte d’ensoleillement ou un autre trouble relevant de la théorie du trouble anormal du voisinage relevant évidemment de la compétence du juge judiciaire.

Nonobstant le fait que la légalité du permis de construire délivré s’apprécie à l’égard de nombreuses règles d’utilisation du sol, des critiques tenant à la légalité du permis délivré peuvent survenir. Ces critiques viseront tantôt une interprétation divergente d’une règle d’utilisation du sol, tantôt la légitimité de l’autorité administrative qui a délivré le permis. Par exemple, dans leurs requêtes, les tiers visent souvent le non- respect d’une disposition du PLU, quand ils n’attaquent pas aussi également le PLU en parallèle. Les tiers critiquent également souvent la compétence du signataire de l’arrêté qui a délivré le permis de construire. Ils arguent ainsi souvent que l’adjoint au maire n’était pas dûment habilité.

La conclusion de ces observations est que le permis de construire est une autorisation réglementaire légale mais somme toute fragile.

II.

Une autorisation fragile

Le permis de construire est un procédé de police administrative. En d’autres termes, il est une simple autorisation de faire. Il ne constitue donc pas un titre de propriété. Par voie de conséquence, il ne doit porter atteinte en aucune manière aux droits des tiers (A.). Dès lors qu’il cause un préjudice à un tiers celui-ci est en droit de demander l’annulation du permis dès lors qu’il y a intérêt (B.). Le tiers a alors plusieurs voies d’action pour demander l’annulation de la mesure administrative illégale (C.).