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0.4 Travaux de thèse

0.4.1 Motivations et contributions

Lors de cette thèse, on a développé l’ensemble des outils nécessaires à la si-mulation numérique du système des équations de Navier-Stokes pour des solutions régulières. Il s’agit de la génération de maillages, du code de calcul dédié pour le schéma discret en espace et en temps et de l’analyse des résultats. On résume ici l’essentiel des contributions sans respecter leur ordre d’apparition dans le mémoire, en insistant sur les principales difficultés et en soulignant les résultats majeurs. 0.4.1.1 Approximation d’ordre élevé

Validation des ordres de convergence. La discrétisation spatiale GD proposée est d’ordre élevé. En particulier, on utilise une représentation polynomiale de la solution jusqu’à l’ordre sept. De plus, les calculs numériques sont effectués au moyen d’un code informatique dédié, lequel est issu d’un code interne Onera qui a été généralisé et complété pour les besoins de ce travail. Les résultats obtenus sont validés sur cinq cas tests d’écoulements réguliers internes ou externes de fluides parfaits ou visqueux, bien référencés dans la littérature :

1. l’écoulement interne, stationnaire et subsonique de fluide parfait dans un canal de type convergent-divergent [176, 83] (cas test 1) ;

2. l’écoulement interne, instationnaire et subsonique d’une paire de tourbillons vis-queux et contra-rotatifs se dirigeant perpendiculairement à une paroi plane [87] (cas test 2) ;

3. l’écoulement externe, instationnaire et subsonique d’un fluide visqueux autour du profil d’aile « NACA0012 »12 [96, 40] (cas test 3) ;

4. l’écoulement externe, instationnaire et subsonique d’un fluide visqueux autour du profil d’aile de Selig et Donovan (ou SD) SD7003 [166, 113] (cas test 4) ; 5. l’écoulement externe, instationnaire et subsonique d’un fluide visqueux autour

et en aval d’un cylindre [79] (cas test 5).

La convergence en maillage en loi de puissance p+1 pour le degré p d’un polynôme donné [142] et celle en ordre en loi exponentielle p pour un maillage donné [68] sont vérifiées en détail sur les cas tests 1 et 2. La bonne valeur des ordres obtenus valide, non seulement la métrique du schéma numérique, mais également le choix des flux numériques.

Utilisation de flux numériques à stencil compact. Pour la méthode GD, le choix de flux numériques à stencil compact est une clé incontournable à une parallélisation efficace de la méthode. Comme on l’a déjà mentionné, ce choix est particulièrement délicat pour les termes de diffusion [28, 183]. En effet, sur l’exemple de l’équation de la chaleur monodimensionnelle scalaire, on démontre qu’un choix de flux similaire à celui des termes de convection conduit à un schéma numérique inconsistant.

Ici, pour les termes de convection, on utilise le flux LLF [156] dans une version modifiée [33] permettant de stabiliser le schéma par l’ajout de dissipation numérique.

Introduction générale

Ce flux a été retenu pour sa simplicité de mise en œuvre sur un système d’équations non linéaires multi-dimensionnelles, pour son faible coût en nombre d’opérations à virgules flottantes par seconde et enfin pour ses performances d’approximation [28, 131, 96, 33].

Pour les termes de diffusion, on utilise la technique de formulation mixte appli-quant le flux (ou schéma) BR2 [13, 7], lequel introduit des opérateurs de relèvement pour approcher le saut du gradient de la solution numérique aux interfaces. En particulier, ce choix fait suite à plusieurs études préliminaires sur des équations d’advection-diffusion scalaires linéaires et non linéaires en deux dimensions d’espace incluant les deux autres flux BR1 [9] et LDG [27]. Ces études ne sont pas présen-tées dans ce mémoire. Toutefois, on indique que le flux BR2 est celui qui montre les meilleures propriétés de compacité, de stabilité et de convergence réunies, lors d’une discrétisation explicite en temps. En outre, il garantit un ordre de convergence optimal de la norme L2 en loi de puissance.

0.4.1.2 Représentation des frontières matérielles courbes

Représentation polynomiale des géométries courbes. En GD, il est néces-saire de prendre en compte les frontières matérielles courbes. Par exemple en 1997, Bassi et Rebay [10] ont simulé un écoulement bidimensionnel isentropique autour d’un cercle, approché par un polygone. Ils ont alors montré qu’une création impor-tante d’entropie avait lieu à chaque sommet du polygone, donnant naissance à des oscillations non-physiques dans le sillage, et ce même avec un maillage raffiné.

Dans ce travail, pour les cas tests présentant des parois matérielles courbes, on utilise une représentation polynomiale de degré deux ou quatre, passant par trois ou cinq points pour décrire une frontière dans un élément physique du maillage [151].

Construction d’une base orthogonale de polynômes. La prise en compte des géométries courbes rend difficile le choix de la base orthonormale et hiérarchique dans laquelle on cherche la solution numérique. En effet, dans la pratique les polynômes qui engendrent la base sont évalués en des points de quadrature, eux-mêmes conte-nus dans un élément de référence. Il faut alors introduire une transformation de cet élément vers chaque élément physique courbe. Le calcul du Jacobien de cette trans-formation rend trop complexe la construction d’une base orthogonale dans l’élément de référence comme par exemple, celle de Dubiner [42] qui utilise le produit tensoriel de familles de polynômes définis sur un intervalle de l’axe des réels.

Pour pallier ce problème, on définit une base numérique directement dans l’élé-ment physique à partir d’une base de monômes définis en coordonnées barycentriques (pour un meilleur conditionnement) et orthonormalisés par une procédure de Gram-Schmidt modifiée [134].

Avec le cas test 1, on teste l’efficacité de la représentation retenue pour les géo-métries courbes. En particulier, on montre que les convergences en maillage et en ordre sont garanties lors de l’utilisation d’une représentation iso-paramétrique des frontières.

0.4. Travaux de thèse

0.4.1.3 Discrétisation temporelle adaptée aux écoulements étudiés

Implicitation des termes de flux visqueux. L’association d’une méthode GD à un schéma explicite en temps impose de grandes restrictions sur le pas de temps en raison des conditions de stabilité. En effet, des expériences numériques préliminaires sur l’équation linéaire d’advection pure en une dimension d’espace montrent que pour une discrétisation GD de degré p, la restriction est de type Courant-Friedrichs-Lewy (ou CFL) et décroît linéairement en p [28], tandis que pour l’équation linéaire de diffusion pure la restriction est de type Von Neumann et décroît quadratiquement en

p [108, 51]. En général, lors de la simulation des écoulements à convection dominante,

la capture correcte des phénomènes dans la couche limite en zone de proche paroi impose de raffiner le maillage à cet endroit et conduit localement à Reh  1. La valeur du pas de temps est alors fixée par celle du pas de temps visqueux et devient très petite, voire rédhibitoire pour des applications réelles.

Dans ce travail, on choisit alors de discrétiser implicitement les termes de diffu-sion afin de s’affranchir de la condition de stabilité très contraignante de type Von Neumann, tout en gardant une discrétisation explicite pour les termes de convection afin de restituer correctement les mécanismes de transport.

Résolution séparée des termes de convection et de diffusion. Dans [139], on s’est intéressé à la résolution de l’équation d’advection-diffusion linéaire scalaire avec une discrétisation spatiale GD et une discrétisation temporelle explicite-implicite (comme expliqué ci-dessus) utilisant un schéma d’Euler sur les termes de convection et d’Euler rétrograde sur les termes de diffusion. Par une analyse de Von Neumann, on montre que les conditions de stabilité du schéma numérique sont :

∆t ≤

c2, Reh ≤ 6, (1)

avec c la vitesse de convection. La première condition correspond à une limitation du pas de temps et la seconde correspond à une restriction de la méthode aux écoulements à diffusion dominante. En particulier, cette dernière est inappropriée pour les écoulements à convection dominante de ce travail.

C’est pourquoi, on remédie à cette limitation en utilisant une décomposition d’opérateurs de type Strang [160]. Cette décomposition permet de résoudre séparé-ment les intégrations des termes de convection et de diffusion, et de proposer ainsi une méthode numérique dédiée pour chacun des opérateurs associés aux différents termes. En particulier, le schéma explicite retenu est celui de Heun [63, 52], et celui implicite est celui de Crank-Nicolson [34, 36]. Dans ce dernier cas, pour inverser le système linéaire, on a recours à une méthode itérative GMRes13 à redémarrages et préconditionnée avec l’algorithme de Jacobi par blocs.

Avec l’ensemble des cas tests 2 à 5, on montre à la fois que la stratégie temporelle explicite-implicite retenue lève la restriction de type Von Neumann par rapport à une stratégie explicite, et qu’elle est très bien adaptée aux écoulements instationnaires à convection dominante. En particulier les cas tests 4 et 5 sont de très bons exemples d’applications de ces écoulements, en raison de leur couche limite fortement décollée.

Introduction générale

0.4.1.4 Simplifications des discrétisations temporelles

Les schémas implicites en temps conduisent à l’inversion de systèmes linéaires d’autant plus grands que le maillage est raffiné ou que la solution recherchée est précise, et donc à des temps de calcul rédhibitoires. Par exemple, lors de la résolution du système des équations RANS avec une méthode GD utilisant le flux BR2 pour les termes de diffusion, Crivellini et Bassi [35] montrent que le temps de construction de la matrice implicite est croissant avec le degré p du polynôme et atteint 80% du temps total de résolution pour p = 6.

Dans ce travail, on met en place deux stratégies de simplification du schéma numérique implicite, que l’on combine ensuite.

- La première simplification est celle sans jacobienne car elle approche le pro-duit de la matrice jacobienne de dérivation du résidu discret par un vecteur au moyen d’une différence finie d’ordre un. Elle permet une réduction des coûts (encombrement mémoire et temps CPU) lors de la construction de la ma-trice implicite et du produit de cette mama-trice avec un vecteur dans l’inversion GMRes. On précise que cette simplification a été développée très récemment (2008) pour les écoulements de fluides visqueux laminaires [123, 121, 91, 15] et turbulents [35] dans le cadre de la méthode GD.

- La seconde simplification exploite le caractère modale et celui hiérarchique de la base de polynômes. Elle repose sur un découplage des degrés de liberté de la solution numérique à l’intérieur d’un élément du maillage avec ceux des élé-ments voisins. Elle permet une réduction des coûts lors des constructions de la matrice implicite et de la matrice de préconditionnement, et lors du pro-duit de ces deux matrices avec un vecteur dans l’inversion GMRes. On précise que cette simplification a été initiée en 2010 sur l’équation de la chaleur sca-laire en une dimension d’espace [37] , puis a été mise en œuvre avec succès sur des équations d’advection-diffusion scalaires, linéaires et non linéaires, en deux dimensions d’espace pour les écoulements à diffusion [139] ou convection do-minante [53, 138]. Très récemment (2013), le découplage des degrés de liberté, tel qu’il est appliqué pour cette simplification, a été réutilisé dans [15] mais uniquement sur la matrice de préconditionnement, alors qu’ici il s’applique aux deux matrices implicite et de préconditionnement.

Avec l’ensemble des cas tests 2 à 5, on montre, non seulement que les trois stra-tégies temporelles simplifiées capturent les phénomènes physiques à l’identique de la méthode non simplifiée, mais également qu’elles préservent les propriétés de stabi-lité de cette dernière. Par ailleurs, les gains théoriques et obtenus avec les méthodes simplifiées, en comparaison avec la méthode sans simplification, sont en bon accord. Notamment, la méthode combinant les deux simplifications est jusqu’à 3, 25 fois plus rapide sur la résolution totale que la méthode sans simplification.

0.4.1.5 Génération de maillages d’ordre élevé

D’un côté, un maillage adéquat pour simuler des écoulements instationnaires à convection dominante est un maillage où la taille caractéristique des éléments est adaptée aux échelles locales des phénomènes à capturer. D’un autre côté, un 18

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maillage judicieux en GD est aussi un maillage grossier pour exploiter le potentiel de résolution en h/p de la méthode, et tenant compte des géométries courbes pour garantir un ordre élevé.

Dans ce travail, on a construit l’ensemble des maillages des cas tests 2 à 5 simu-lant des écoulements de fluides visqueux à l’aide du logiciel libre Gmsh permettant de générer des maillages curvilignes [54, 55]. Ces maillages sont à la fois non structu-rés triangulaires pour s’adapter aux géométries complexes, et fortement anisotropes pour capturer les différents phénomènes physiques. Ils présentent, dans les zones de proche paroi, des éléments étirés dans la direction du gradient de vitesse décrois-sant, et dans les zones de sillage, des éléments asymétriques resserrés sur la ligne de fuite. A ce titre, le rapport d’aspect global des maillages, rapport du plus grand diamètre inscrit d’un élément sur le plus petit, se situe entre 1 (maillage isotrope) et 2 125 (maillage anisotrope), et le rapport d’aspect global des éléments, rapport du plus grand côté d’un élément sur le plus petit, se situe entre 1 (élément isotrope) et 640 (élément anisotrope). Ainsi, pour l’ensemble des applications numériques, on observe toujours la très bonne capture des phénomènes physiques en comparaison aux références de la littérature.

Toutefois, on soulève ici une difficulté non négligeable pour la construction de maillages à géométries courbes. Il n’existe pas à ce jour, comme le rappelait encore le compte-rendu du premier atelier sur les méthodes d’ordre élevé [176], de générateurs de maillages curvilignes efficaces capables de générer des maillages d’ordre élevé adaptés aux zones de couche limite. Le principal problème est dû au chevauchement (ou croisement) possible des éléments proches des géométries courbes, conduisant à des valeurs négatives pour le Jacobien de la transformation des éléments courbes vers l’élément de référence. Ce souci s’est répercuté dans ce travail, par des maillages contenant, non seulement des éléments avec des rapports d’aspect moins grands que souhaités, mais également avec un nombre relativement important d’éléments.