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Le monadisme et son moment maupertuisien

Le modèle monadologique chez Maupertuis

III. Le monadisme et son moment maupertuisien

Nous avons jusqu'à présent mentionné un « modèle monadologique » e t des « éléments de leibnizianisme » présents chez Maupertuis, et nous avons tenté d'en repérer les traits principaux. Cependant, sont en même temps apparus les changements de sens des concepts leibniziens mobilisés. Face à de tels glissements, deux types de considérations sont possibles. On peut, premièrement, les envisager comme les marques d'un éloignement avec la pensée de Leibniz et tenter d'évaluer la distance qui sépare le modèle original de l'usage qu'en fait Maupertuis. Ou l'on peut, deuxièmement, considérer ces changements de sens comme des changements de direction internes au leibnizianisme. Dans cette seconde option, le modèle développé par Maupertuis est à comprendre comme l'actualisation de l'une des versions du monadisme rendues possibles par la philosophie leibnizienne. Les changements de sens de certains concepts ne sont dès lors plus envisagés comme des éloignements par rapport à la

doctrine supposée originale, mais plutôt comme diverses manières d'en interpréter et d'en user.

Nous avons par exemple mis en évidence, dans notre premier chapitre, comment le texte wolffien permettait de distinguer entre deux manières de donner sens au monadisme, selon qu'on insiste sur la simplicité des substances ou sur leur capacité représentative. Maupertuis propose lui-même une configuration nouvelle, où la monade est amalgamée à un élément matériel, doué de désir, d'aversion et de mémoire. Or, nous tenons que cette configuration livre une interprétation possible du monadisme leibnizien, et qu'on peut encore tenter d'élucider le sens historique de cette interprétation. Par sens historique, on entend la manière dont la doctrine du Système de la nature s'inscrit dans une histoire des réceptions du monadisme, et la manière dont cette inscription permet d'identifier une logique propre à cette histoire. En effet, Maupertuis se positionne à la fois par rapport à Leibniz, à Wolff et aux wolffiens, ainsi qu'à Du Châtelet. Autrement dit, le modèle qu'il propose s'inscrit dans une histoire du monadisme dont on peut tenter de reconstruire le sens et les principales étapes.

Un tel projet paraît d'autant plus important que le texte du Système de la nature suscite les objections célèbres de Diderot, auxquelles Maupertuis répond dans l'édition des Œuvres de 1756. Or, ces objections portent sur l'attribution de la capacité perceptive aux éléments de la matière, et sur les conséquences de la tentative de penser l'âme comme résultat d'une sommation de perceptions élémentaires, c'est-à-dire précisément sur les éléments qui permettent d'identifier la solution maupertuisienne comme un modèle monadologique. La théorie de la génération de Maupertuis fonctionne dès lors comme une médiation : d'une part, elle définit une interprétation possible du leibnizianisme sur la question des monades, différente des interprétations leibniziennes, wolffiennes ou châteletienne. D'autre part, elle fournit aux auteurs matérialistes, Diderot en particulier, l'occasion d'assimiler et de discuter une monadologie alternative. Quel est le sens du moment maupertuisien dans l'histoire du monadisme au 18e siècle et particulièrement dans l'histoire de la reprise de la philosophie leibnizienne dans le corpus matérialiste ? Nous nous proposons de répondre en montrant que, si la conjecture maupertuisienne peut bien être considérée comme une monadologie alternative, notamment en ce qu'elle matérialise la monade, on ne peut pourtant la considérer comme une interprétation matérialiste de la philosophie de Leibniz. Au contraire, il apparaîtra que l'adjonction de la perception aux éléments de la matière est tenu par Maupertuis pour un puissant outil anti-matérialiste. Il s'agira alors de prendre au sérieux les objections de Diderot à l'encontre du Système de la nature.

Une monadologie alternative

L'élément maupertuisien n'est pas un élément wolffien, puisqu'il est doué de la capacité perceptive. Il n'est pas non plus strictement une monade leibnizienne, puisqu'il est amalgamé à une partie primitive corporelle. Maupertuis se distingue à la fois de Leibniz et de Wolff en ce qu'il considère le rapport de composition entre monades et corps organique comme un rapport de composition méréologique. Il s'éloigne en outre de Du Châtelet en ce qu'il n'articule pas monadisme et atomisme, mais supprime simplement le niveau des substances simples. Or, ces divergences sont à comprendre, non comme des manières de refuser la philosophie leibnizienne de la substance, mais d'en fournir une interprétation alternative. Maupertuis construit ainsi une véritable histoire du monadisme afin de mettre en évidence la place qu'y occupe son propre modèle. Dans la Lettre VII, intitulé « Sur les Systèmes », il s'attarde sur le rapport entre Leibniz et « ses disciples ».102 Ce faisant, il livre des considérations sur le devenir historique de la pensée leibnizienne. Pour le scientifique malouin, il existe entre Leibniz et les wolffiens un rapport d'idolâtrie traduit, sur le plan théorique, par un durcissement dogmatique des hypothèses leibniziennes les plus confuses.

Parmi celles-ci, la lettre cite le principe de raison suffisante, l'harmonie préétablie, et enfin, le système des monades :

« Il échappa à notre Philosophe de dire, dans quelque accès de métaphysique, que toute la Nature était remplie d'entéléchies, d'êtres simples, dont chacun doué d'une force active se représentait lui-même, et représentait tout l'Univers. Ceci fit encore plus de fortune. Le système des monades est aujourd'hui regardé dans toutes les Universités d'Allemagne comme la plus heureuse production de l'esprit humain. »103

Il n'est pas anodin que Maupertuis insiste ici sur la double caractérisation de la monade comme être simple et comme point de vue représentatif de tout l'univers. Car il s'agit précisément des deux points à propos desquels il se fait le plus critique. Maupertuis ne conçoit en effet pas qu'on puisse recourir à « des êtres invisibles, qui ne se manifestent ni ne sont démentis par aucuns phénomènes. »104 L'« accès de métaphysique » dont il est question réfère donc à la convocation de principes abstraits, dont l'expérience ne peut fournir aucun corrélat, fonctionnant pourtant comme le fondement d'une explication des phénomènes. C'est pourquoi

102 O, II, « Lettre VII. Sur les Systèmes », p.258. Notons qu’entre la Dissertatio (1751) et les Lettres (1752) se déroule la controverse avec König, chronologie qui peut expliquer la manière dont Maupertuis durcit le ton à l’égard des leibniziens dans les Lettres.

103Ibid., p.259.

104Ibid., p.260.

Maupertuis considère la monadologie leibnizienne comme un véritable « système ». Il n'est pas anodin, à cet égard, que la Lettre VII cite l'exposition de la philosophie leibnizienne par Condillac, dans le Traité des systèmes, dont elle semble partager les principales critiques.105 Or, la détermination de la monadologie comme système produit une conséquence paradoxale : l'acceptation dogmatique des principes de Leibniz par ses disciples ne permet en effet pas de présager de la clarté desdits principes. Autrement dit, la systématicité n'est pas gage de l'intelligibilité des énoncés mis en système. Tout au contraire, considérer la monade comme un principe au fondement de la réalité, c'est ouvrir à toutes sortes de confusions. C'est pourquoi Maupertuis remarque que les wolffiens « ne s'accordent point entr'eux sur plusieurs points principaux ».106 Ici, le constat historiographique d'une imprécision quant au sens du système renvoie à la critique épistémologique des types de principes en jeu : une nouvelle fois à la suite de Condillac, Maupertuis considère que l'hypothèse monadologique, lorsqu'elle réfère à des êtres immatériels, implique non seulement l'impossibilité d'une confirmation empirique, mais produit, en outre, une difficulté d'interprétation.107 La monade est problématique tout autant du point de vue de son existence que du point de vue de son sens.

Si la Lettre VII en reste à l'énoncé de cette indétermination du système des monades, la Lettre VIII, intitulée « Sur les monades », précise en quoi consiste la confusion. On retrouve les deux points sur lesquels Maupertuis fait porter la critique, à savoir la question de l a composition des corps par des êtres simples, et celle de la représentation universelle contenue dans toute monade :

« On a embarrassé les partisans du système des monades en leur demandant combien il fallait de monades pour faire un corps. Ils ne savaient pas, ou ne se souvenaient plus que les corps ne sont point composés de monades : que le sentiment que nous avons de leur présence n'est que la perception d'une monade, qui a la force de se les représenter. »108

La tension est construite ici entre, d'une part, l'affirmation d'un rapport d'engendrement des composés à partir des simples et, d’autre part, celle d'une perception des êtres composés dans les êtres simples. D'un côté, la monade est un élément qui, par combinaison avec d'autres monades, implique la constitution des corps. De l'autre, le corps est un simple phénomène 105Idem. Sur ce point, voir C. Leduc, « Maupertuis et le système leibnizien des Essais de théodicée », 300 Jahre

Essais de Théodicée. Rezeption und Transformation, hrsg. von W. Li und W. Schmidt-Biggemann, Studia Leibnitiana, Sonderheft, 2013, 285-298.

106 O, II, « Lettre VII. Sur les Systèmes. » p.260.

107 Chez Condillac : « Ainsi, le premier abus des systèmes, celui qui est la source de beaucoup d’autres, c’est que nous croyons acquérir de véritables connaissances, lorsque nos pensées ne roulent que sur des mots qui n’ont point de sens déterminé. », Œuvres philosophiques de Condillac, vol.1, p.127.

108 O, II, « Lettre VIII. Sur les monades », p.262.

dont la réalité procède de sa perception par une monade. Si, dans la première option, la multiplicité des monades précède l'unité du corps qu'elle participe à composer, dans la deuxième option, au contraire, l'unité monadique subsume sous une perception unique la multiplicité des phénomènes. On comprend que, présentée ainsi, l'hypothèse monadologique paraisse contradictoire : c'est que Maupertuis n'entrevoit pas la composition des corps par les êtres simples autrement que comme un rapport de constitution de parties à tout, c'est-à-dire selon ce que nous avons nommé une logique méréologique impliquant de traiter les monades comme des parties corporelles. On se fourvoierait pourtant en attribuant la reconstruction maupertuisienne à une erreur d'interprétation des rapports entre monades et corps composés.

Car, pour Maupertuis, c'est Leibniz lui-même qui inaugure la confusion :

« Peut-être l'Auteur de ce système a-t-il lui-même contribué à jeter dans cet embarras ses disciples : qui sait même si Leibnitz avait déjà de ses monades l'idée qui pouvait les mettre à l'abri de ces difficultés ? Du moins en plusieurs occasions il s'est expliqué de manière à en pouvoir faire douter. Quand il disait, par exemple, que dans sa tasse de café il y avait peut-être une foule de monades qui seraient un jour des âmes humaines, ne semblait-il pas les regarder comme des êtres nageant dans son café, ou comme le sucre lorsqu'il y est dissous ? S'il avait dit : mon café n'est qu'un phénomène dont la perception est excitée par quelque être qui n'est point du café ; ses disciples n'auraient pas été en peine pour répondre à la question, combien faut-il de monades pour faire un corps ? »109

Une note nous informe que, comme Condillac lorsqu'il rapporte la même anecdote, cette référence trouve son origine chez M. G. Hansch, qui avait publié en 1728 une synthèse de la philosophie de Leibniz, exposée sous forme démonstrative.110 Maupertuis en use de manière à montrer que, si l'on considère qu'une goutte de café contient des monades, c'est que celles-ci doivent être comprises comme des parties matérielles du café lui-même. Des monades sont dans le café au sens où des animaux spermatiques, par exemple, se trouvent dans la semence, ou au sens où des grains de sucre se mêlent aux gouttes de café. On jetterait une lumière nouvelle sur la tension identifiée par Maupertuis en remarquant que, dans un cas, l'hypothèse monadologique se prononce sur la composition des corps par les corps, tandis que, dans le second, elle prétend traiter la corporéité comme un phénomène issu de la représentation des monades. C'est dire que Maupertuis oppose une interprétation matérialisante de la monade,

109 O, II, « Lettre VIII. Sur les monades. » p.262-263.

110 M. G. Hansch, Godefridi Guilielmi Leibnitii Principia philosophiae, more geometrico demonstrata..., Francfort et Leipzig, 1728. L'opuscule contient en outre la traduction latine de la Monadologie parue dans le supplément des Acta eruditorum en 1721, ce qui est une des raisons pour lesquelles les commentateurs hésitent à attribuer le texte à Wolff ou Hansch. Notons encore que, si Maupertuis réfère à la même anecdote que Condillac, il semble ne pas s'être contenté de copier la référence, mais a, selon toute vraisemblance, consulté par lui-même le texte de Hansch, qu'il cite beaucoup plus précisément que Condillac dans le Traité des systèmes.

qui considère les éléments comme des parties moindres des corps composés, et une interprétation spiritualisante, qui fait des monades les principes d'une phénoménalisation des corps. Car, dans le second cas, le « café n'est qu'un phénomène ». Tout se passe donc comme si, en citant indirectement Leibniz, via Hansch, Maupertuis identifiait deux tendances de la doctrine originelle leibnizienne, dont l'une permet de lire l'hypothèse monadologique comme une doctrine franchement idéaliste, prononçant la pure phénoménalité des corps, et dont l'autre, au contraire serait beaucoup plus réaliste, puisqu'elle fait de la monade le principe de constitution matérielle du réel.

Or, Maupertuis entend tirer au clair le sens véritable du monadisme, c'est-à-dire qu'il entend se prononcer là où Leibniz demeure équivoque selon les différents exposés. Car « il y a apparence que quand Leibniz forma et proposa ses premières idées sur les monades, il n'avait pas prévu jusqu'où elles devaient le conduire : et je crois qu'il n'y a guère de système métaphysique dont l'Auteur n'ait été dans le même cas. »111La vérité du monadisme se trouverait ainsi, paradoxalement, non dans l'énoncé original de l'hypothèse chez Leibniz, mais dans son devenir chez d'autres auteurs. Autrement dit, il s'agit de retrouver, par-delà les divergences d'interprétation dues à l'indétermination de la philosophie leibnizienne, l'unique sens possible assignable au concept de monade :

« Il en est ainsi surtout du système des monades : elles pouvaient n'être dans leur principe que les premiers éléments de la matière, doués de perception et de force. »112

Capital, cet extrait l'est d'un double point de vue. Tout d’abord, il nous informe clairement de ce que Maupertuis ne prétend pas s'affranchir du monadisme, mais bien plutôt en déterminer le sens véritable. Il fait ainsi de son interprétation le moyen de clarifier l'hypothèse originelle.

L'histoire des réceptions du monadisme est ainsi moins l'histoire de ses dévoiements que celle de son dévoilement : Maupertuis considère que son Système de la nature précise et éclaircit le concept de monade. Il s'agit, certes, d'un usage nouveau des thèses leibniziennes, mais d'un usage fondé sur une lecture de la philosophie leibnizienne qui prétend en manifester la signification profonde, cachée pour Leibniz lui-même. Or, cette signification ne semble pouvoir être atteinte qu'à la condition de ne pas s'inscrire dans un rapport dogmatique par rapport à la figure tutélaire de Leibniz. Car, la tradition wolffienne, victime de son idolâtrie envers le maître, ne peut que reconduire les apories et les confusions inhérentes aux thèses

111 O, II, « Lettre VIII. Sur les monades », p.263.

112Ibid., p.264.

originelles. Ici se situe le positionnement paradoxal de Maupertuis par rapport à l'hypothèse monadologique : c'est pour n'être pas leibnizien, ou wolffien, qu'il peut saisir le fond de la philosophie de Leibniz, et s'inscrire dans l'histoire interprétative du leibnizianisme.

Deuxièmement, l'extrait nous livre clairement l'interprétation en question. On l'aura compris, le terme d'« éléments » ne désigne pas ici la même chose que la substance simple chez Wolff.

L'élément de la matière est, au sens strict, un élément matériel qui constitue les corps composés en se combinant. Autrement dit, Maupertuis prend clairement position, dans l'alternative issue de la confusion originelle de la doctrine leibnizienne, pour la version matérialisante de la monade. Il le fait mêmeen prétendant donner le sens authentique du monadisme.

Le modèle monadologique proposé par Maupertuis manifeste dès lors sa grande originalité. On ne pourrait en effet le rattacher à aucune interprétation déjà formulée. En affirmant que la monade est un « élément de la matière »—où il faut entendre : un élément matériel de la matière—il s'affranchit aussi bien de Leibniz, de Wolff et de Du Châtelet. En affirmant que la monade est douée de perception, il se positionne clairement contre l'école wolffienne. L'erreur serait dès lors de prendre l'attribution de la perception à tout élément pour l'expression d'un retour à la doctrine leibnizienne. Car, comme nous l'avons montré, la perception au sens maupertuisien ne consiste pas, comme chez Leibniz, en une représentation plus ou moins distincte de l'univers. Elle est au contraire une perception élémentaire qui pose la question de la sommation des différentes perceptions et de leur intégration dans une perception unique. L'élément est dès lors, certes, perceptif, mais il n'est plus un point de vue sur l'entièreté de l'univers. Force est dès lors d'affirmer que Maupertuis propose une monadologie alternative : car, ni leibnizienne, ni wolffienne, la conjecture du Système de la nature prétend pourtant fournir la seule interprétation légitime possible du leibnizianisme sur la question des monades.

Une monadologie matérialiste ?

On pourrait, sur la base des remarques précédentes, affirmer qu'on trouve chez Maupertuis le principe d'une « matérialisation de la monade », comme l'a par exemple proposé C. T Wolfe. Pour Wolfe, la « molécule » maupertuisienne doit en outre être inscrite

dans un contexte plus large d'interprétations matérialistes de la monade leibnizienne.113 L'attribution des propriétés perceptives à la matière devrait dès lors être comprise comme l'expression d'une réduction de tous les phénomènes (y compris psychiques) au seul niveau matériel. Cependant, cette double affirmation nous semble brouiller la compréhension du projet maupertuisien, et en biffer les nuances. Car, matérialiser la monade n'est pas pour autant proposer une interprétation matérialiste de la monadologie. La distinction provient de ce que le geste d'attribution de propriétés psychiques aux éléments de la matière ne s'accompagne pas de la possibilité de générer ces propriétés depuis la matière et ces mouvements. Certes, l’élément maupertuisien est un support matériel, mais il est doté d'attributs immatériels. En d'autres termes, si l'on peut bien parler de matérialisation de la monade chez Maupertuis, on renoncera pourtant à évoquer une quelconque monadologie matérialiste.

Maupertuis est d'ailleurs clair sur ce point : il se défend à de nombreuses reprises de formuler une théorie matérialiste. On trouve, dans le Système de la nature, deux lignes de défense. La première consiste à discuter des conséquences de l'attribution de l'intelligence aux parties de la matière. Maupertuis dialogue alors avec les théologiens—les « Docteurs de notre religion »—et rappelle les controverses suscitées par l'hypothèse cartésienne des animaux-machines.114 L'argument est dès lors tout trouvé : il s'agit de traiter l'intelligence des éléments de la même manière qu'on traite l'intelligence des corps organisés animaux :

« Or si, dans de gros amas de matière, tels que les corps des animaux, l'on admet sans péril quelque principe d'intelligence, quel péril plus grand trouvera-t-on à l'attribuer aux plus petites parties de la matière ? Si l'on dit que l'organisation fait la différence, conçoit-on que l'organisaticonçoit-on, qui n'est qu'un arrangement de parties, puisse jamais faire naître une pensée ? »115

113 C. T. Wolfe, « Endowed Molecule and emergent organization : The Maupertuis-Diderot Debate. », in

113 C. T. Wolfe, « Endowed Molecule and emergent organization : The Maupertuis-Diderot Debate. », in