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Les Institutions de physique : une articulation du monadisme et de l'atomismemonadisme et de l'atomisme

Du Châtelet : une articulation du monadisme et de l'atomisme

II. Les Institutions de physique : une articulation du monadisme et de l'atomismemonadisme et de l'atomisme

La première partie des Institutions de physique présente une subtil mélange des métaphysiques leibnizienne et wolffienne sur lesquelles Du Châtelet entend fonder la physique. Il nous incombera de déterminer ce qui ressortit du texte wolffien et ce qui, au contraire, provient d'une lecture directe de Leibniz. Dans tous les cas, le texte des Institutions fait rupture par rapport à la correspondance de 1738. En effet, Du Châtelet adopte le monadisme—sous la forme wolffienne d’une métaphysique des êtres simples—et semble du même coup accepter la conception de la matière que, jusqu'ici, elle refusait d'adopter. À première vue, Du Châtelet se convertirait à la métaphysique de Wolff sans hésitation, ce qui

42 27 février 1739, p.500.

signifierait en même temps l'abandon des thèses atomistes pourtant défendues avec vigueur auparavant. Ce schéma simple d'une conversion n'est pourtant pas cohérent avec le maintien assumé et explicite, au chapitre IX (« De la divisibilité et subtilité de la matière ») de la notion d'atome, chapitre qui attire rarement l'attention de la littérature secondaire.43 Force est de constater, à la lecture de ce chapitre IX, que l'acceptation du monadisme de la simplicité ne mène paradoxalement pas à l'abandon de la thèse atomiste, mais qu'au contraire les deux positions sont articulées par Du Châtelet grâce au principe de raison suffisante. Dès lors, ceci signifie que le type de leibnizianisme construit dans la première partie des Institutions de physique ne résulte pas d'une simple reprise des textes wolffien et leibnizien, mais qu'il se caractérise par cette originalité théorique selon laquelle l'existence d'êtres simples inétendus cohabite avec celle de « particules solides »44 de matière. Ainsi, le problème de la conception de la matière, identifié plus haut, n'est pas résolu par l'abandon de l'atomisme qu'on opposait jusqu'ici au principe de conservation de la force, mais par la transformation de celui-ci, qui le rend articulable avec la thèse monadique. Cette articulation inattendue constitue selon nous l'apport capital de Du Châtelet à l'histoire de la reprise de la philosophie de Leibniz dans le discours matérialiste du fait que, tout en maintenant la fondation du matériel sur les êtres simples immatériels, elle permet tout de même de poser des corps primitifs dans la nature, à partir desquels peut se faire l'explication des phénomènes naturels. Nous nous attacherons dès lors dans les pages qui suivent à déterminer la conception de la matière présentée dans les premiers chapitres des Institutions de physique.

Le principe de raison suffisante comme boussole

L'« Avant-Propos » des Institutions de physique nous renseigne sur l'élément principal que prélève Du Châtelet dans la métaphysique leibnizienne :

« Les idées de M. de Leibniz sur la Métaphysique, sont encore peu connues en France, mais elles méritent assurément de l'être : malgré les découvertes de ce grand homme, il y a sans doute encore bien des choses obscures dans la Métaphysique ; mais il me semble qu'il nous a fourni dans le principe de la raison suffisante, une boussole capable de nous conduire dans les sables mouvants de cette science. »45

43 On consultera exemplairement A. Gireau-Geneaux, « Mme Du Châtelet entre Leibniz et Newton : matière, force et substance » , SVEC 2001:1, qui propose une lecture suivie des chapitres 7 et 8 des Institutions de physique, sans s'intéresser au décisif chapitre 9, qui s'inscrit pourtant dans la claire continuité des deux précédents.

44 IP., p.186.

45 Ibid., p.13.

On peut, à partir de cette affirmation, s'interroger sur les textes depuis lesquels est prélevé le principe de raison. Comme nous l'avons vu, Du Châtelet assume, quelques lignes auparavant, de puiser « les principales opinions Monsieur de Leibniz sur la Métaphysique (…) dans les ouvrages du célèbre Wolff. »46 La note attenante cite explicitement l'Ontologia, et donne pour référence « les chapitres suivants : De principio contradictionis, des principio rationis sufficientis, de possibili, et impossibili, de necessario et contingente, de extensione, continuitate, spatio, tempore, etc. » Le premier chapitre des Institutions, consacré aux

« principes de nos connaissances », confirme que la source d'information de Du Châtelet, pour ce qui relève du principe de raison suffisante, se trouve être le texte wolffien. Car, elle affirme que « nous sentons dans tous les cas que nous ne pouvons point forcer notre esprit à admettre quelque chose, sans une raison suffisante, c'est-à-dire, sans une raison qui nous fasse comprendre pourquoi cette chose est ainsi plutôt que tout autrement. »47 Comme l'a noté A-L Rey,48 cette présentation constitue une reprise des premières propositions du chapitre de l'Ontologia consacré au principe : la raison suffisante y est avant tout interprétée comme un principe de compréhension de l'actualité des choses du monde. Cependant, si la définition est wolffienne, l'argumentation puise largement dans le texte leibnizien, et notamment dans la correspondance avec Clarke. C'est le cas de l'exemple utilisé pour asseoir le principe : lorsqu'on place deux boules d'un poids égal aux deux extrémités d'une balance, on peut affirmer que leur poids est identique dans la mesure précise où il n'y a pas de raison suffisante pour que les bras de l'instrument penchent d'un côté plutôt que de l'autre.49 Du Châtelet emprunte l'illustration à la troisième lettre de Leibniz, envoyée à Clarke à la fin novembre 1715.50 Comme lui, elle cite un peu plus loin les expériences d'Archimède pour montrer que, si le principe de raison suffisante n'a été développé, énoncé distinctement et introduit dans les sciences que par Leibniz, il y a en réalité toujours fonctionné de manière implicite.51 Ainsi, Du Châtelet mêle ici la source leibnizienne et la source wolffienne de manière à construire le principe de raison suffisante. Ce qui n’est pas toujours le cas. On notera par exemple que la

46 Ibid., p.12-13.

47 Ibid., p22. On retrouve une autre formulation quelques pages plus loin : « (…) il faut qu'il y ait dans tout ce qui existe quelque chose par où l'on puisse comprendre pourquoi ce qui est a pu exister, et c'est ce qu'on appelle raison suffisante ». p.27.

48 A-L Rey, « Le leibnizo-newtonianisme : la construction d'une philosophie naturelle complexe dans la première moitié du 18e siècle. La méthode d'Émilie du Châtelet entre hypothèses et expériences », Dix-huitième siècle, n° 45, 2013/1, p.126.

49 IP, p23.

50 GP, VII, 356.

51 IP, p.25.

correspondance Leibniz-Clarke fonctionne parfois dans les Institutions de physique comme la seule source d'information de la philosophie leibnizienne citée par Du Châtelet. C'est le cas dans les chapitres qui analysent les notions d'espace (V, §74) et de temps (VI, §96), qui peuvent être considérés comme des reconstructions du débat entre Leibniz et Clarke. Sur cette base, U. Winter présente une typologie des chapitres des Institutions de physique, distinguant entre ceux qui procéderaient d'une lecture directe de Leibniz, et ceux dont le leibnizianisme serait médiatisé par le texte wolffien. Ainsi, les trois premiers chapitres (« Des principes de nos connaissances », « De l'existence de Dieu », « De l'essence, des attributs et des modes ») appartiendraient à la seconde catégorie, tandis que les trois suivants (« De l'espace », « Du temps », « Des éléments de la matière ») seraient le résultat de la lecture de la correspondance avec Clarke.52 Selon nous, il paraît évident que Du Châtelet connaît la métaphysique leibnizienne, via la correspondance, de manière indépendante à sa restitution dans la métaphysique de Wolff. En conséquence, les chapitres sur l'espace et le temps peuvent être considérés comme non-médiatisés par le texte wolffien. Cependant, nous verrons que le cas du chapitre VI, sur « les éléments de la matière » n'est pas aussi clair, et qu'au contraire, il est impossible de saisir le sens de ce chapitre sans comprendre que Du Châtelet y reprend une métaphysique des êtres simples wolffienne (que nous avons nommé « monadisme de la simplicité dans le premier chapitre ») plutôt qu’un monadisme leibnizien. On peut, pour lors, se contenter d'affirmer que le chapitre VI n'aurait pas pu être écrit par Du Châtelet sans la lecture de Wolff.

Avant de se pencher sur la conception de la matière déployée par Du Châtelet, il faut s'interroger sur la signification de l'adoption du principe de raison suffisante, et sur son usage comme d'une boussole dans le champ métaphysique.53 Pourquoi le principe de raison est-il retenu par Du Châtelet ? Souvenons-nous que, dès la correspondance, la métaphysique en son sens large, qu'il s'agisse d'une interrogation sur le concept de matière, ou d'une théologie volontariste, intervenait dans l'optique d'une fondation de la science physique. Si donc le principe de raison suffisante est retenu, on peut raisonnablement penser que Du Châtelet

52 « From translation to philosophical discourse - Émilie Du Châtelet's Commentaries on Newton and Leibniz » Émilie Du Châtelet between Leibniz and Newton., ouvr. cit., p.190-191.

53 P. V. Moriarty a signé l'article de référence sur le fonctionnement du principe de raison suffisante dans les Institutions de physique. Cf « The principle of sufficient reason in Du Châtelet's Institutions » Emilie Du Châtelet: rewriting Enlightenment philosophy and science [SVEC 2006: 01].203-225. Cependant, Moriarty, s'il reconstitue les différents sens du principe de raison, ne s'interroge pas sur le problème précis auquel est censé répondre le principe, et manque donc de le mettre en rapport avec une interrogation sur le concept de matière.

reconnaît en lui, lors de la rédaction des Institutions, un outil adéquat pour opérer cette fondation. Il n'est dès lors pas anodin de noter que le premier chapitre présente le recours aux principes leibniziens (principe de raison suffisante donc, mais aussi principe de non-contradiction) comme des outils méthodologiques alternatifs. La méthode cartésienne de l'idée claire et distincte semble en effet, à première vue, un bon candidat pour opérer la fondation de la physique sur des principes métaphysiques assurés. Cependant, Du Châtelet interprète la méthode cartésienne de manière à révéler son incapacité à rendre compte de la vérité des propositions fondamentales :

« On a beaucoup abusé du mot de Principe, les scolastiques qui ne démontraient rien donnaient pour principes des mots inintelligibles. Descartes qui sentit combien cette manière de raisonner éloignait les hommes du vrai, commença par établir qu'on ne doit raisonner que sur des idées claires ; mais il poussa trop loin ce principe : car il admit que l'on pouvait s'en rapporter à un certain sentiment vif et interne de clarté et d'évidence pour fonder nos raisonnements. »54

En faisant du sentiment vif le critère de la clarté selon Descartes, Du Châtelet rend la méthode de recherche cartésienne incapable de se prononcer sur la vérité de deux propositions contradictoires qui recevraient chacune l'assentiment d'un individu différent. On comprend qu'à cette forme d'intuitionnisme, Du Châtelet oppose le principe de non-contradiction, qui affirme précisément l'impossibilité pour deux propositions contradictoires d'être vraies dans le même temps. Il s'agit ainsi de « substituer des démonstrations aux illusions de notre imagination ; et ne rien admettre comme vrai, que ce qui découle, d'une manière incontestable, des premiers principes que personne ne peut révoquer en doute, et rejeter comme faux tout ce qui est contraire à ces principes, ou aux vérités que l'on a établies par leur moyen, quoi qu'en puisse dire l'imagination. »55 Cependant, si la critique s'abat sur la méthode cartésienne, c'est moins en vertu de la conséquence générale de la coexistence possible des contradictoires que du fait de la conséquence particulière de celle-ci sur le concept de matière.

Ainsi Du Châtelet note-elle immédiatement après avoir caractérisé la méthode cartésienne comme recours méthodologique au sentiment vif, que

« Ce fut en suivant ce principe que ce Philosophe se trompa sur l'essence du corps qu'il faisait consister dans l'étendue seulement, parce qu'il croyait avoir dans l'étendue, une idée claire et distincte du Corps, sans se mettre en peine de prouver la possibilité de cette idée, que nous verrons bientôt très incomplète, puisqu'il y faut ajouter la force d'inertie, et la force active. »56

54 IP, p.16.

55 Ibid., p.17.

56 Ibid., p.16-17.

Si la méthodologie cartésienne est disqualifiée, c'est parce que le recours au sentiment vif ne permet pas de se doter d'un concept de matière capable de rendre complètement compte des phénomènes corporels. Cette remarque nous permet d'envisager, par retour, la pertinence du principe de raison suffisante aux yeux de Du Châtelet. C'est qu'il permet, en opérant l'articulation entre le niveau corporel et le niveau métaphysique, de régler le problème qui émerge lors de la correspondance avec Maupertuis. En suivant l'exigence de raison suffisante, Du Châtelet s'assure de proposer un concept de matière cohérent et en continuité avec sa physique. Autrement dit, parce que l'ambition des Institutions de physique réside dans la fondation de la science physique, c'est du point de vue de la constitution d'une nature cohérente, et particulièrement du point de vue de la construction d'un concept de matière acceptable, que sont évaluées les méthodologies leibnizienne et cartésienne. Le principe leibnizien, ainsi que sa formulation wolffienne, sont retenus parce qu'ils permettent de régler les tensions théoriques soulevées durant l'année 1738. Enfin, puisque le principe de non-contradiction est avant tout un principe formel uniquement capable de se prononcer sur la nécessité des propositions, il appartient au domaine de la géométrie.57 Il revient donc au principe de raison suffisante d'assurer la compréhension de leur actualité, c'est-à-dire qu'il constitue le principe régulateur de la recherche en philosophie naturelle.

Il n'y a qu'à la condition d'identifier le problème auquel répond l'introduction du principe de raison suffisante que les diverses conséquences déployées dans le premier chapitre des Institutions de physique prennent sens. On remarque en effet que toutes les implications du principe de raison relevées par Du Châtelet concernent prioritairement le concept de matière.58 Ainsi, les deux principes présentés par Du Châtelet dans la suite, lesquels découlent de celui de la raison suffisante, respectivement le principe d'indiscernabilité et celui de continuité, reçoivent une interprétation matérielle. Prenons d'abord le cas de l'indiscernabilité :

« De ce grand axiome d'une raison suffisante, il en naît un autre que Monsieur de Leibniz appelle le principe des indiscernables : ce principe bannit de l'univers toute matière similaire, car s'il y avait deux parties de matière absolument similaires et semblables, en sorte qu'on pût mettre l'une à la place de l'autre sans qu'il arrivât le moindre changement (car c'est ce qu'on entend par entièrement semblable) il n'y aurait point de raison suffisante pourquoi l'une de ces particules serait placée dans la lune, par exemple, et l'autre sur Terre, puisqu'en les changeant et mettant celle qui est dans la Lune sur la Terre, et celle qui est sur la Terre dans la Lune, toutes choses demeureraient les mêmes. »59 57 Ibid., p.24-25.

58 Du Châtelet y relève aussi des implications théologiques (p.23-24) mais celles-ci ne nous semblent pas concerner le propos principal des Institutions.

59 Ibid., p.28-29.

Deux remarques s'imposent. Tout d'abord, le principes des indiscernables est bien déduit depuis le principe de raison suffisante : rien n'expliquerait les situations spatiales particulières de deux êtres indiscernables dont les places pourraient indifféremment être inter-changées. Il existe donc une raison qui rend compte de la place respective de tous les êtres, et cette raison réside dans leur discernabilité. Le principe de raison impose donc la distinction interne des choses en vertu même de leur situation intra-mondaine et de leurs rapports externes. Ensuite, Du Châtelet envisage moins la discernabilité comme une distinction des êtres que comme une diversité des matières constituant l'univers :

« Ainsi, chaque particule de matière est destinée à faire l'effet qu'elle produit, et c'est de là que naît la diversité, qui se trouve entre deux grains de sable comme entre notre globe et celui de Saturne, laquelle nous fait voir que la sagesse du Créateur n'est pas moins admirable dans le plus petit être, que dans le plus grand. »60

On reconnaîtra aisément, dans la manière d'interpréter la discernabilité comme une dissimilitude matérielle, le geste wolffien opéré dans la Cosmologie. Ceci dit, chez Du Châtelet, cette déviation du niveau auquel opère la discernabilité provient moins d'une théorie de la substance que d'une interrogation fondamentale sur le sens du concept de matière, laquelle interrogation dirige l'usage du principe de raison suffisante. Il n'est pas tout à fait clair cependant, si ces passages proviennent de la lecture de la cosmologie wolffienne, ou de la lecture directe de la correspondance entre Leibniz et Clarke. On peut néanmoins raisonnablement penser que Du Châtelet ne s'est pas seulement renseignée sur l'Ontologia de Wolff, mais qu'elle a en outre consulté sa cosmologie. Le passage qui suit immédiatement cite en tout cas, comme chez Wolff, comme dans la correspondance Leibniz-Clarke, la fameuse anecdote du philosophe dans le jardin :

« Cette infinie diversité qui règne dans la nature, se fait sentir à nous aussi loin que la portée de nos organes peut s'étendre. Monsieur de Leibniz qui avança le premier cette vérité, eut le plaisir de la voir confirmer par les yeux même de ceux qui la niaient, dans une promenade avec Madame l'Électrice d'Hanovre, dans le jardin d'Herrenhausen : car ce philosophe ayant assuré qu'on ne trouverait jamais deux feuilles entièrement semblable dans la quantité presqu'innombrable de celles qui les entouraient, plusieurs courtisans qui étaient présents passèrent inutilement une partie de la journée dans cette recherche, et ils ne purent jamais trouver deux feuilles qui n'eussent des différences sensibles, même à l'œil. »61

On le voit, cette anecdote est un topos de la réception de Leibniz au 18e siècle. Elle est liée par Du Châtelet à l'idée que, par le biais du principe de raison suffisante, il est possible de

60 Ibid., p.29.

61 Ibid., p.30.

prouver que chaque particule matérielle du monde est dissemblable par rapport à toute autre, et que cette distinction est comparable à celle de deux grains de sable ou de deux feuilles d'arbre. En l'espace d'une page, Du Châtelet condense une anecdote, des arguments, des concepts et des exemples qu'on verra fonctionner chez les matérialistes français lors des trois décennies suivantes, et le fait au nom même du principe leibnizien de raison suffisante. Parce que la perspective adoptée par les Institutions de physique implique en effet d'user du principe de raison pour construire un concept cohérent de matière, elle mène à une interprétation matérielle du principe des indiscernables, permet ainsi de penser une matière universellement différenciée et fait de ces quelques paragraphes des passages capitaux de la reprise de la philosophie de Leibniz dans le corpus matérialiste.

Cependant, telle quelle, l'introduction du principe de raison suffisante n'a pas encore permis de régler la question des corps durs. Sur ce point, le premier chapitre des Institutions de physique semble présenter un changement radical de position de la part de Du Châtelet. Il s’agit de la seconde conséquence du principe de raison quant à la construction d'une philosophie naturelle cohérente, et qui concerne cette fois la continuité de la nature :

« De l'Axiome d'une raison suffisante découle encore un autre principe qu'on appelle la Loi de continuité, c'est encore à Monsieur de Leibniz que nous sommes redevables de ce principe qui est d'une grande fécondité dans la Physique ; c'est lui qui nous enseigne que rien ne se fait par saut dans la nature, et qu'un être ne passe point d'un état à un autre, sans passer par tous les différents états qu'on peut concevoir entre eux. »62

« De l'Axiome d'une raison suffisante découle encore un autre principe qu'on appelle la Loi de continuité, c'est encore à Monsieur de Leibniz que nous sommes redevables de ce principe qui est d'une grande fécondité dans la Physique ; c'est lui qui nous enseigne que rien ne se fait par saut dans la nature, et qu'un être ne passe point d'un état à un autre, sans passer par tous les différents états qu'on peut concevoir entre eux. »62