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10 La méthode du fil chaud par surface

10.1 Modification du système

10.1.1 Evolution théorique

La méthode du fil chaud consiste, rappelons-le, à placer un fil électrique à l'intérieur de l'échantillon testé. Lors de l'injection d'un courant électrique dans le fil, celui-ci émet de la chaleur par effet Joule. Le transfert thermique au sein du matériau testé, est dépendant de sa conductivité thermique. L'idée de la méthode de contact est de remplacer une partie du matériau de test (en pratique, la moitié) par un matériau aux propriétés thermiques connues (Figure 146). La réponse obtenue sera due en partie par le transfert dans le matériau connu, et en autre partie dans le matériau à tester. Afin de favoriser le transfert dans le matériau testé, il est préférable de choisir comme matériau connu un bon isolant, ce qui permettra également d'en limiter l'épaisseur. Enfin, si les propriétés de l'isolant sont suffisamment connues, alors la seule inconnue après la mesure sera la conductivité thermique du matériau à étudier.

Figure 146 : Evolution du schéma de principe de la méthode du fil chaud a- fil inséré à b-fil de surface

Le développement a donc consisté à créer un couple isolant-fil chaud applicable aux maçonneries. Les dimensions ont donc été revues afin d'être plus facilement applicables à des mesures de surfaces (pierres, moellons,…): la longueur du fil n'excède pas 5 centimètres. Pour conserver un fort ratio longueur/diamètre, le fil utilisé, toujours en Nickel, est plus fin, d’un diamètre de 0,025 mm. Afin d'éviter les effets de bords, les soudures doivent être les plus fines possibles. Elles ont été effectuées sous loupe binoculaire tandis que le fila été maintenu le plus tendu possible.

10.1.2 Mise au point du protocole expérimentale : force d'appui

Un capteur posé à la surface d'un matériau peut engendrer des erreurs ou artéfacts de mesures dues à une « résistance de contact », c'est à dire le contact imparfait entre le capteur (fil chaud) et le matériau plus ou moins rugueux peut localement piéger des fluides (air, eau). Une mousse isolante, déformable, peut atténuer cette « résistance de contact » à condition d'y appliquer une force d'appui suffisante. Les essais ultérieurs ont donc consisté à déterminer l'influence d'une force de contact sur la mesure, par augmentation de pression (adjonction de masse).

10.1.2.1 Essais sur l'isolant

La mousse, déformable, est le principal matériau susceptible de modifier la résistance de contact lors d'une variation de force d'appui. Les premiers essais ont donc été réalisés sur le matériau isolant choisi (élastomère de type éthylène-propylène-diène monomère expansé), de part et d'autre du fil. Sur la partie supérieure, des masses successives ont été rajoutées, de façon à faire varier le poids des matériaux au dessus du fil, et donc la force d'appui (figure 147).

figure 147 : Evolution du profil d'élévation de la température ΔT=f(ln(t)) en fonction de la masse appliquée. Cas de l'élastomère expansé (EPDM)

On démontre qu'une masse de 150g, correspondant à une pression de 600 Pa dans le dispositif, suffit à réduire une partie significative de la résistance de contact. Un second palier est observé entre 500 et 600g. Cette différence est due à la mise en place de la masse 12h avant la mesure. Ce laps de temps semble avoir permis à l'isolant de mieux se plaquer sur le fil et diminuer encore davantage la résistance de contact. Pour tous les essais, la valeur de conductivité thermique évolue avec la pression pour se « stabiliser » autour de 0.045 W.m-1.K-1 (figure 148).

figure 148: Evolution de la valeur de la conductivité thermique mesurée sur la mousse EPDM en fonction de la charge appliquée.

En conséquence, nous avons retenu que l'appareillage de laboratoire destiné aux mesures de la conductivité thermique sur surface est équipé d’une masse accolée de 700 g appliquée juste derrière l'isolant. Les câbles reliés au générateur et au voltmètre traversent l'isolant et sont soudés au fil tendu sur l'élastomère (Figure 149).

Figure 149 : Capteur expérimental

10.1.2.2 Essais sur plexiglas

Dans le cas précédent, nous pouvons suspecter que les deux épaisseurs d'isolants ont réagi à l'ajout de masse. Des essais sur un autre matériau non déformable (à cette échelle) ont été nécessaires pour évaluer le comportement de la résistance de contact avec une seule couche d'isolant.

Bien que le plexiglas ne rentre pas dans le cadre de l’étude des matériaux de construction, nous avons mesuré sa conductivité thermique en imposant une contrainte sur l’échantillon avec différentes charges. Le plexiglas représente un « milieu idéal », s'opposant à la mousse EPDM car il ne présente aucun relief ni aucune déformation. Des essais ont été effectués pour six charges successives (Figure 150).

(a)

(b)

prismatic sample polymer foam 25 µm Ø Ni wire

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Figure 150 : Evolution du profil d'élévation de la température ΔT=f(ln(t)) en fonction de la charge appliquée. Cas du plexiglas

Le Tableau 22 résume les différentes valeurs de pente finale et de conductivité thermique déterminées pour chaque essai en fonction de différentes contraintes appliquées sur l’échantillon.

Charge (g) Pente λ (W.m-1.K-1) 0 0,077 0,157 145,26 0,077 0,158 296,44 0,077 0,158 472,71 0,077 0,156 670,26 0,079 0,152 870,36 0,079 0,153

Tableau 22 : Evolution de la conductivité thermique du plexiglas pour divers chargements.

Par rapport au test sur la mousse d'élastomère, les valeurs de conductivité thermique apparente ne diminuent que très légèrement avec la charge pour se stabiliser autour d'une valeur limite de 0.153 W.m-1.K-1. On observe donc toujours des valeurs plus élevées pour les faibles charges, mais il faut cette fois attendre un chargement supérieur à 600 g (2 400 Pa) pour atteindre ce palier. Par la suite, les essais seront effectués avec un chargement d'environ 700g (2 800 Pa), afin de s'affranchir d'éventuelles erreurs.

10.1.3 Validation sur matériaux connus

Par modélisation, nous avons pu définir que la conductivité thermique effective mesurée dans ces conditions correspondait à la moyenne des conductivités effectives de l'isolant et du matériau testé (voir partie 10.2.2.5, page 124). Cela nous permet de comparer les valeurs obtenues par cette méthode avec les valeurs obtenues avec le fil noyé, sur la brique de terre crue et la brique de chaux pure.

Les mesures de conductivité thermique sur des matériaux hétérogènes par la méthode de surface donnent des courbes ∆T=f(ln(t)) caractérisées par deux pentes qui entraînent le calcul de deux conductivités distinctes, λ1etλ2 (Figure 151).

Calculée sur deux échantillons de brique de terre crue, la conductivité thermique effective moyenne λ2 est égale à 0.495 W.m-1.K-1, avec un écart-type de 6.10-2 W.m-1.K-1 (4 mesures

successives par échantillon). La conductivité thermique effective du matériau terre crue, calculée à partir de l'équation (65) est égale à 0.95 W.m-1.K-1, ce qui est en accord avec la mesure par la

méthode noyé (0.97 W.m-1.K-1).

Figure 151 : Courbes ΔT=f(ln(t)) obtenues sur deux échantillons (1 en bleu, 2 en rouge) de brique de terre crue par la méthode de surface

Les mesures sur la brique de chaux par la méthode de surface donne une moyenne apparente de 0.200 W.m-1.K-1avec un écart-type de 2.10-3 W.m-1.K-1pour huitmesures successives. La conductivité

effective déduite λ2 du matériau est ainsi de 0.36 W.m-1.K-1, proche de la valeur obtenue par la

méthode noyée (0.387 W.m-1.K-1). Pour les billes de verre, à diamètre de bille équivalent, nous obtenons 0.27 W.m-1.K-1 contre 0.30 W.m-1.K-1mesuré par la méthode noyée.

Les conductivités thermiques (λ2) obtenues sur des surfaces polies d'agate, de quartz et de calcite

sont respectivement égales à 6.8, 8.8, 3.5 W.m-1.K-1. Ces valeurs sont en accord avec les données bibliographiques [entre 6 et 14 W.m-1.K-1 pour le quartz et environ 3,5 W.m-1.K-1 pour la calcite; (Robertson, 1988), (Midttomme, et al., 1998)].

Pour s’assurer de la validation expérimentale de notre protocole, nous avons cherché à confronter nos résultats de mesures avec ceux menés et reconnus par d’autres auteurs. Enfin, Bourret de l'université de Limoges a recoupé différentes méthodes de mesures sur des matériaux isolants à base de kaolin fritté à 1100°C (Bourret, 2012). Les essais que nous avons menés par la méthode du fil chaud de surface sont concordants avec les données obtenues par fluxmètre (0,054 W.m-1.K-1) et par hot disk (0,051 W.m-1.K-1). Nos valeurs, comprises entre 0,045 W.m-1.K-1 et 0,051

W.m-1.K-1, sont légèrement inférieures ce que Bourret peut expliquer par des différences de porosité

entre échantillons. Il est également possible que la faible charge appliquée sur ces matériaux (400g), du fait de leur fragilité, ait entraîné une légère sous-estimation de la valeur de conductivité.

Ln(t) ∆ T (° C ) 1 2

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